Sommaire Contexte de la demandePar un courrier recommandé daté du 24 octobre 2019, [I] [T] a saisi le tribunal judiciaire de Marseille pour contester une mise en demeure émise par l’URSSAF le 28 mai 2019. Cette mise en demeure, d’un montant de 13 354 €, concernait des cotisations et majorations dues pour les 1er et 2ème trimestres de 2019. Déroulement de l’audienceL’affaire a été examinée lors d’une audience le 08 octobre 2024. [I] [T] ne s’est pas présenté, ni n’a été représenté, et n’a pas demandé de dispense de comparution. L’URSSAF a alors demandé au tribunal de statuer sur le fond, confirmant l’affiliation de [I] [T] au régime de sécurité sociale des travailleurs indépendants et validant la mise en demeure. Affiliation au régime de sécurité socialeLe tribunal a rappelé que la Caisse nationale du régime social des indépendants, régie par le Code de la sécurité sociale, est un organisme de droit privé auquel les travailleurs indépendants doivent être affiliés. Depuis le 1er janvier 2018, l’URSSAF a pris en charge les missions de recouvrement des cotisations sociales des travailleurs indépendants. Validité de la mise en demeureConcernant la mise en demeure du 28 mai 2019, le tribunal a constaté qu’elle respectait les exigences légales, précisant la nature des cotisations réclamées et le montant dû. Il a donc confirmé la validité de cette mise en demeure pour un montant actualisé de 5 420 €, incluant des majorations de retard. Décision du tribunalLe tribunal a déclaré mal fondé le recours de [I] [T], confirmant son affiliation obligatoire au régime de la sécurité sociale des indépendants. Il a validé la mise en demeure et condamné [I] [T] à payer la somme due à l’URSSAF, ainsi qu’à verser des dépens et une somme de 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. L’appel de cette décision doit être formé dans un délai d’un mois suivant sa notification. |
Questions / Réponses juridiques :
Quelle est la procédure à suivre en cas de non-comparution du demandeur ?En vertu de l’article 468 alinéa 1 du Code de procédure civile, si le demandeur ne comparaît pas sans motif légitime, le défendeur peut demander un jugement sur le fond. Ce jugement sera contradictoire, sauf si le juge décide de renvoyer l’affaire à une audience ultérieure. Dans le cas présent, l’URSSAF Ile de France, en tant que défenderesse, a demandé le prononcé d’un jugement sur le fond, ce qui a été accordé par le tribunal. Ainsi, la non-comparution de [I] [T] a permis à l’URSSAF de solliciter un jugement contradictoire, conformément aux dispositions légales. Quelles sont les obligations d’affiliation au régime de sécurité sociale des indépendants ?Les obligations d’affiliation au régime de sécurité sociale des indépendants sont régies par les articles L.611-1 et suivants du Code de la sécurité sociale. Ces articles stipulent que les travailleurs indépendants, tels que [I] [T], doivent être obligatoirement affiliés à ce régime. La Caisse nationale du régime social des indépendants, bien qu’elle ait été dissoute au 1er janvier 2018, était régie par des dispositions législatives qui imposaient cette affiliation. L’URSSAF a depuis pris en charge le recouvrement des cotisations dues par les travailleurs indépendants, conformément à l’article L.213-1 du même code. Ainsi, [I] [T], en tant qu’entrepreneur individuel, est soumis à cette obligation d’affiliation. La mise en demeure émise par l’URSSAF est-elle valide ?La validité de la mise en demeure délivrée par l’URSSAF est encadrée par l’article L.244-2 du Code de la sécurité sociale. Cet article stipule qu’une action ou poursuite doit être précédée d’un avertissement par lettre recommandée, invitant le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans un délai d’un mois. L’article R.244-1 précise que la mise en demeure doit indiquer la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, ainsi que les majorations et pénalités applicables. Dans le cas présent, la mise en demeure du 28 mai 2019 mentionne clairement la nature des cotisations réclamées, la cause de l’obligation, et le montant dû. Par conséquent, la mise en demeure est considérée comme valide, et le recours de [I] [T] a été déclaré mal fondé. Quelles sont les conséquences financières pour [I] [T] suite à la décision du tribunal ?Suite à la décision du tribunal, [I] [T] est condamné à payer plusieurs sommes. Il doit verser à l’URSSAF Ile de France un montant total de 5 420 €, incluant 266 € de majorations de retard pour les cotisations des 1er et 2ème trimestres 2019. De plus, en application de l’article 700 du Code de procédure civile, [I] [T] est également condamné à verser 500 € à l’URSSAF pour couvrir les frais de justice. Enfin, les dépens de l’instance seront laissés à sa charge, ce qui signifie qu’il devra également assumer les frais liés à la procédure judiciaire. Ces conséquences financières résultent directement de la confirmation de son affiliation obligatoire au régime de sécurité sociale des indépendants et de la validité de la mise en demeure. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE
POLE SOCIAL
[Adresse 4]
[Adresse 5]
[Localité 2]
JUGEMENT N° 24/5018 du 12 Décembre 2024
Numéro de recours: N° RG 19/06193 – N° Portalis DBW3-W-B7D-W4QJ
AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [I] [Y] [T]
né le 19 Novembre 1976 à ETATS UNIS (LOIRE ATLANTIQUE)
[Adresse 1]
[Localité 2]
non comparant, ni représenté
c/ DEFENDERESSE
Organisme URSSAF-DRRTI ILE DE FRANCE
[Adresse 6]
[Localité 3]
représentée par Maître Clémence AUBRUN de la SELARL BREU-AUBRUN- GOMBERT ET ASSOCIES, avocats au barreau D’AIX-EN-PROVENCE
DÉBATS : À l’audience publique du 08 Octobre 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :
Président : PAWLOWSKI Anne-Sophie, Vice-Présidente
Assesseurs : PAULHIAC Olivier
DURAND Patrick
Lors des débats : ELGUER Christine, Greffier
À l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 12 Décembre 2024
NATURE DU JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort
Par courrier recommandé avec accusé de réception expédié le 24 octobre 2019, [I] [T] a, par l’intermédiaire de son avocat, saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Marseille devenu tribunal judiciaire d’une demande tendant à l’annulation de la mise en demeure émise le 28 mai 2019 à son encontre par l’URSSAF d’un montant de 13 354 € au titre des cotisations et majorations dues pour les 1er et 2ème trimestres 2019.
Après une phase de mise en état, l’affaire a été appelée à l’audience du 08 octobre 2024.
[I] [T] régulièrement convoqué par voie de citation n’est ni présent, ni représenté et n’a sollicité aucune dispense de comparution.
Par voie de conclusions déposées par son avocate, l’URSSAF Ile de France demande au tribunal de rendre un jugement sur le fond et de :
– Confirmer l’affiliation obligatoire de [I] [T] au régime de sécurité sociale des travailleurs indépendants ;
– Confirmer la mise en demeure du 28 mai 2019 pour un montant de 5 420 € dont 266 € de majorations de retard ;
– Débouter [I] [T] de ses prétentions, fins et conclusions ;
– Le condamner, à titre reconventionnel, au paiement de la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
La présente affaire a été mise en délibéré au 12 décembre 2024.
Sur la qualification du jugement
Aux termes des dispositions de l’article 468 alinéa 1 du Code de procédure civile, si, sans motif légitime, le demandeur ne comparaît pas, le défendeur peut requérir un jugement sur le fond qui sera contradictoire, sauf la faculté du juge de renvoyer l’affaire à une audience ultérieure.
En l’espèce, l’URSSAF Ile de France défenderesse a sollicité le prononcé d’un jugement sur le fond.
Celui-ci sera par conséquent contradictoire.
Sur l’affiliation obligatoire au régime de sécurité sociale des indépendants
La Caisse nationale du régime social des indépendants était régie par les dispositions des articles L.111-1, R.111-1, L.621-1 à L.621-3 du Code de la sécurité sociale et tirait par conséquent son existence juridique de dispositions législatives, stipulant qu’elle est un organisme de droit privé de sécurité sociale, auxquels sont obligatoirement affiliés les travailleurs indépendants et disposant que le régime social des indépendants comprend une caisse nationale et des caisses de base, dotées de la personnalité morale et de l’autonomie financière.
Ces caisses tenaient donc de ces dispositions légales leur capacité juridique et leur qualité à agir dans l’exécution des missions qui leur étaient confiées par les articles L.611-4 et L.611-8 et suivants du Code de la sécurité sociale, parmi lesquelles le recouvrement des cotisations et contributions sociales ainsi que le contrôle et le contentieux du recouvrement des travailleurs indépendants en relevant.
Par suite de l’entrée en vigueur au 1er janvier 2018 des dispositions de la loi n°2017-1836 du 30 décembre 2017 et du décret n°2018-174 du 9 mars 2018, les missions antérieurement dévolues aux caisses du régime social des indépendants ont été transférées à l’URSSAF, laquelle tire de l’article L.213-1 dans sa rédaction issue de la loi précitée n°2017-1836 du 30 décembre 2017, une mission générale pour le recouvrement des cotisations sociales et d’allocations familiales et notamment des travailleurs indépendants.
L’URSSAF n’est pas une mutuelle (dont le rôle défini par l’article L.111-1 du Code de la mutualité est complémentaire du régime légal d’assurance maladie et maternité auquel les mutuelles peuvent participer).
Aucune disposition du Traité de Rome ou des Traités modificatifs ne prévoit le transfert de compétence en matière de protection sociale des Etats au profit des institutions européennes et il est de jurisprudence communautaire constante que le droit communautaire ne porte pas atteinte à la compétence des Etats membres pour aménager leur système de sécurité sociale.
Au contraire, l’article 153.4 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne mentionne expressément que les dispositions pouvant être prises par le Parlement européen et le Conseil pour favoriser l’harmonisation des systèmes sociaux ‘ne portent pas atteinte à la faculté reconnue aux Etats membres de définir les principes fondamentaux de leur système de sécurité sociale et ne doivent pas en affecter sensiblement l’équilibre financier’ et ‘ne peuvent empêcher un Etat membre de maintenir ou d’établir des mesures de protection plus strictes compatibles avec les traités’.
La caisse du régime social des indépendants, comme l’URSSAF ne sont pas des mutuelles.
Elles ne sont, ni l’une, ni l’autre, une entreprise au sens du droit de l’Union.
Il s’ensuit que les règles régissant les marchés publics ne lui sont pas applicables.
De même, les règles de concurrence figurant dans le corps du traité et les dispositions des directives relatives aux assurances de personnes (directives n°92-49 CEE du 18 juin 1992, n°92/96 CEE du 10 novembre 1992) sont inapplicables aux organismes de sécurité sociale qui n’exercent pas une activité économique et ne constituent pas une entreprise, l’appelant procédant par confusion en assimilant les organismes de sécurité sociale avec des entreprises d’assurances ou des mutuelles.
La distinction opérée par la jurisprudence communautaire entre le régime professionnel et le régime légal est basée sur la prépondérance dans le premier cas des considérations liées au travailleur et aux circonstances propres à son emploi sur des considérations liées à la politique sociale menée par l’Etat.
La circonstance que le droit français de la sécurité sociale comporte une distinction entre le régime général et des régimes spécifiques à certains secteurs d’activités, ou reconnaissent à certaines caisses une compétence spécifique, en ne leur confiant qu’une partie de la gestion des risques sociaux de sécurité sociale, ne peut être analysée comme instaurant des régimes professionnels de sécurité sociale au sens du droit communautaire, dès lors que le principe est celui de l’affiliation obligatoire dans tous ces régimes pour un même socle de risques.
Ainsi, le fait que la caisse du régime social des indépendants (qui n’existe plus en tant que telle depuis le 1er janvier 2018) ne compte parmi ses adhérents que des travailleurs non salariés exerçant leur activité à titre indépendant, n’implique pas pour autant que le régime de sécurité sociale des professions libérales soit un régime professionnel au sens du droit communautaire.
Il résulte de l’article L.213-1 du Code de la sécurité sociale que les unions de recouvrement assurent le recouvrement des cotisations et des contributions de sécurité sociale dues par les travailleurs indépendants au même titre que celles dues, notamment, par les salariés ou assimilés relevant du régime général et par leurs employeurs, ainsi que par les salariés ou assimilés volontaires des professions libérales.
L’article L.311-2 du même code dispose que sont affiliés obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d’une pension toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l’un ou l’autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat.
Le socle de garanties, commun à tous les régimes de sécurité sociale français, repose sur le principe de solidarité nationale posé par l’article L.111-1 du Code de la sécurité sociale qui dispose que la sécurité sociale assure pour toute personne travaillant ou résidant en France de façon stable et régulière, la couverture des charges de maladie, de maternité et de paternité ainsi que les charges de famille et garantit les travailleurs contre les risques de toute nature susceptible de réduire ou de supprimer leurs revenus par l’affiliation des intéressés à un ou plusieurs régimes obligatoires.
Il s’ensuit que la Caisse nationale du régime social des indépendants, comme ses caisses de base, et comme les unions de recouvrement, ne sont pas des entreprises, et que les règles régissant les marchés publics ne leur sont pas davantage applicables.
[I] [T] qui exerce depuis le 27 octobre 2015 une activité d’entrepreneur individuel est effectivement obligatoirement affilié au régime social des indépendants en application des articles L.611-1 et suivants du Code de la sécurité sociale et l’URSSAF est désormais en charge du recouvrement des cotisations dues à ce titre.
Sur la validité de la mise en demeure délivrée le 28 mai 2019 par l’URSSAF
L’article L 244-2 du Code de la sécurité sociale dispose que : « Toute action ou poursuite effectuée en application de l’article précédent ou des articles L. 244-6 et L. 244-8-1 est obligatoirement précédée, si elle a lieu à la requête du ministère public, d’un avertissement par lettre recommandée de l’autorité compétente de l’Etat invitant l’employeur ou le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans le mois ».
L’article R 244-1 du même code précise en son alinéa 1er que « L’avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s’y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent ».
En l’espèce, il est manifeste à l’examen de la mise en demeure délivrée le 28 mai 2019 que celle-ci indique la nature des cotisations réclamées (maladie, IJ, vieillesse, CSG-CRDS-formation professionnelle), la cause de l’obligation (cotisations et contributions obligatoires et l’étendue de l’obligation de l’assuré, à savoir le paiement des cotisations et contributions obligatoires dont il est personnellement redevable envers la sécurité sociale des indépendants au titre des cotisations des 1er et 2ème trimestres 2019.
Il y a donc lieu de confirmer la validité de la mise en demeure délivrée le 28 mai 2019 pour un montant actualisé de 5 420 € dont 266 € de majorations de retard et de déclarer mal-fondé le recours introduit par [I] [T].
Sur les demandes accessoires
En application des dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile, les dépens seront laissés à la charge de [I] [T].
L’issue du litige justifie de condamner [I] [T] au paiement d’une somme de 500 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort,
DÉCLARE mal fondé le recours introduit par [I] [T] ;
CONFIRME l’affiliation obligatoire de [I] [T] au régime de la sécurité sociale des indépendants ;
VALIDE la mise en demeure délivrée le 28 mai 2019 à l’encontre de [I] [T] à hauteur de 5 420 € dont 266 € de majorations de retard au titre des cotisations des 1er et 2ème trimestres 2019 ;
CONDAMNE [I] [T] à payer à l’URSSAF Ile de France la somme de de 5 420 € en ce compris 266 € de majorations de retard au titre des cotisations des 1er et 2ème trimestres 2019 ;
CONDAMNE [I] [T] aux dépens de l’instance ;
CONDAMNE [I] [T] à verser à l’URSSAF Ile de France une somme de 500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
DIT que tout appel de la présente décision doit être formé, sous peine de forclusion, dans le délai d’un mois à compter de la réception de sa notification, conformément aux dispositions de l’article 538 du Code de procédure civile.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2024.
Notifié le :
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE