Rétablissement personnel et contestation de dettes : enjeux de la fraude et de la temporalité dans le traitement des situations financières.

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Rétablissement personnel et contestation de dettes : enjeux de la fraude et de la temporalité dans le traitement des situations financières.

Déclaration de recevabilité

Le 11 juillet 2018, une commission de surendettement des particuliers a déclaré M. [F] recevable dans sa demande de traitement de sa situation financière, l’orientant vers un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.

Contestation par la CARSAT

La caisse d’assurance retraite et de la santé au travail Sud-Est (CARSAT) a contesté cette décision en raison du caractère frauduleux de l’indu d’allocation de solidarité aux personnes âgées. Un juge des contentieux de la protection a, par jugement du 16 octobre 2020, prononcé une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, incluant cette dette.

Appel de la CARSAT

Le 5 novembre 2020, la CARSAT a interjeté appel du jugement et a formé opposition à l’arrêt rendu par défaut le 26 octobre 2021.

Grief de la CARSAT

La CARSAT a fait grief à l’arrêt de confirmer le jugement du 16 octobre 2020, en particulier concernant l’effacement de sa dette d’indu de 16 822,36 euros, arguant que l’origine frauduleuse de la créance devait être établie par une sanction prononcée par un organisme de sécurité sociale.

Interprétation de la Cour

La Cour a rappelé que, selon l’article L. 711-4 du code de la consommation, le caractère frauduleux d’une créance doit être apprécié au moment où le juge statue, sur la base d’une décision de justice ou d’une sanction notifiée et non contestée.

Confirmation du jugement

Pour confirmer le jugement, la cour d’appel a retenu que la décision de sanction du 28 novembre 2018 était postérieure à la décision de la commission de surendettement du 5 septembre 2018, imposant l’effacement de la créance principale envers M. [F].

Violation du texte

En statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article L. 711-4 du code de la consommation, qui stipule que les dettes d’origine frauduleuse ne peuvent être remises ou effacées sans accord du créancier.

Questions / Réponses juridiques :

 

Quelles sont les conditions d’exclusion des dettes d’origine frauduleuse selon le code de la consommation ?

Selon l’article L. 711-4, 3°, du code de la consommation, les dettes ayant pour origine des manœuvres frauduleuses commises au préjudice des organismes de protection sociale sont exclues de toute remise, rééchelonnement ou effacement, sauf accord du créancier.

Cette exclusion s’applique lorsque l’origine frauduleuse de la créance est établie soit par une décision de justice, soit par une sanction prononcée par un organisme de sécurité sociale, conformément aux articles L. 114-17, L. 114-17-1 et L. 114-17-2 du code de la sécurité sociale.

Il est important de noter que le caractère frauduleux s’apprécie au jour où le juge statue, sur la base d’une décision de justice ou d’une sanction notifiée et non contestée.

Comment le caractère frauduleux d’une créance est-il apprécié par le juge ?

Le caractère frauduleux d’une créance est apprécié par le juge au moment où il statue, en se basant sur les éléments qui lui sont fournis.

Cela signifie que le juge doit examiner les preuves et les décisions qui lui sont présentées, sans se limiter à la chronologie des événements.

Ainsi, même si une sanction a été notifiée après la décision de la commission de surendettement, cela ne doit pas empêcher le juge de considérer cette sanction comme un élément pertinent pour établir le caractère frauduleux de la créance.

Quelles sont les conséquences d’une décision de la commission de surendettement sur les dettes d’indu ?

La décision de la commission de surendettement peut avoir des conséquences significatives sur les dettes d’indu, notamment en ce qui concerne l’effacement de certaines créances.

Cependant, comme le stipule l’article L. 711-4 du code de la consommation, si une créance est établie comme étant d’origine frauduleuse, elle peut être exclue de cette mesure d’effacement.

Dans le cas présent, la cour d’appel a confirmé que la décision de sanction notifiée le 28 novembre 2018, bien qu’intervenue après la décision de la commission, devait être prise en compte pour apprécier la nature de la dette d’indu.

Quels articles du code de la sécurité sociale sont pertinents pour établir l’origine frauduleuse d’une créance ?

Les articles pertinents du code de la sécurité sociale pour établir l’origine frauduleuse d’une créance sont les articles L. 114-17, L. 114-17-1 et L. 114-17-2.

Ces articles précisent les conditions dans lesquelles une sanction peut être prononcée par un organisme de sécurité sociale, et comment cette sanction peut établir le caractère frauduleux d’une créance.

En particulier, l’article L. 114-17 stipule que les sanctions doivent être notifiées et non contestées pour être prises en compte dans l’appréciation du caractère frauduleux.

Quelles erreurs la cour d’appel a-t-elle commises dans son jugement ?

La cour d’appel a commis une erreur en ne tenant pas compte de la sanction notifiée le 28 novembre 2018, en se basant uniquement sur la chronologie des événements.

En effet, selon l’article L. 711-4 du code de la consommation, le caractère frauduleux d’une créance doit être apprécié au moment où le juge statue, indépendamment de la date à laquelle la décision de la commission de surendettement a été rendue.

Cette approche a conduit à une violation des textes applicables, car la cour n’a pas pris en considération les éléments qui établissaient le caractère frauduleux de la créance d’indu envers la CARSAT.

 

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

12 décembre 2024
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-20.051
CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 décembre 2024

Cassation partielle

Mme MARTINEL, président

Arrêt n° 1193 F-B

Pourvoi n° Z 22-20.051

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 DÉCEMBRE 2024

La caisse d’assurance retraite et de la santé au travail Sud-Est, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Z 22-20.051 contre l’arrêt rendu le 14 juin 2022 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (chambre 1-9), dans le litige l’opposant :

1°/ à M. [T] [F], domicilié [Adresse 1],

2°/ à la société [9], société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], ayant un établissement [Adresse 13],

3°/ à la caisse d’allocations familiales du Var, dont le siège est [Adresse 4],

4°/ à la société [12], société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 6],

5°/ à la société [7], société anonyme, dont le siège est chez [8], [Adresse 10],

6°/ à la société [14], dont le siège est c/o société [11], [Adresse 5],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Latreille, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse d’assurance retraite et de la santé au travail Sud-Est, et l’avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l’audience publique du 6 novembre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Latreille, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 juin 2022), le 11 juillet 2018, une commission de surendettement des particuliers a déclaré M. [F] recevable en sa demande de traitement de sa situation financière et l’a orienté vers un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.

2. Saisi par la caisse d’assurance retraite et de la santé au travail Sud-Est (CARSAT) d’une contestation de cette décision en raison du caractère frauduleux de l’indu d’allocation de solidarité aux personnes âgées, un juge des contentieux de la protection a, par jugement du 16 octobre 2020, prononcé une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire incluant cette dette.

3. Le 5 novembre 2020, la CARSAT a interjeté appel de ce jugement, puis formé opposition à l’encontre de l’arrêt rendu par défaut le 26 octobre 2021.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

4. La CARSAT fait grief à l’arrêt de confirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Toulon le 16 octobre 2020 et, en particulier, en ce que la mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire prononcée au bénéfice de M. [F] comprenait l’effacement de sa dette d’indu de 16 822,36 euros, alors « qu’aux termes de l’article L. 711-4 du code de la consommation, l’origine frauduleuse de la créance est établie par une sanction prononcée par un organisme de sécurité sociale ; que ce caractère frauduleux s’apprécie au jour où le juge statue, sur la base des éléments lui sont fournis, quelle que soit la date à laquelle ils sont intervenus ; qu’en refusant de tenir compte de la pénalité notifiée le 28 novembre 2018 au prétexte qu’elle se situait chronologiquement à une date postérieure à celle à laquelle la CARSAT avait été destinataire de la décision de la commission de surendettement, la cour d’appel a violé les articles L. 711-4 du code de la consommation et L. 114-17 du code la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Vu l’article L. 711-4, 3°, du code de la consommation :

5. Selon ce texte, sauf accord du créancier, sont exclues de toute remise, de tout rééchelonnement ou effacement les dettes ayant pour origine des manoeuvres frauduleuses commises au préjudice des organismes de protection sociale, dont l’origine frauduleuse est établie soit par une décision de justice, soit par une sanction prononcée par un organisme de sécurité sociale dans les conditions prévues aux articles L. 114-17, L. 114-17-1 et L. 114-17-2 du code de la sécurité sociale.

6. Il résulte de ce texte que ce caractère frauduleux s’apprécie au jour où le juge statue et sur le fondement d’une décision de justice ou d’une sanction, notifiée et non contestée, prononcée par un organisme de sécurité sociale.

7. Pour confirmer le jugement, en particulier en ce que la mesure comprenait l’effacement de sa dette d’indu de 16 822,36 euros envers la CARSAT, l’arrêt retient que la décision de sanction du 28 novembre 2018 se situe chronologiquement à une date postérieure à celle à laquelle la CARSAT a été destinataire de la décision de la commission de surendettement du 5 septembre 2018 lui imposant l’effacement de sa créance principale envers M. [F].

8. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé.


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