Sommaire Contexte de l’affaireM [N] [C] est un salarié de la société [5]. Le 1er avril 2021, il a été victime d’un accident sur le trajet entre son domicile et son lieu de travail. Cet accident a été déclaré par son employeur à la caisse primaire d’assurance-maladie de Savoie, qui a reconnu l’accident comme étant un accident du travail le 20 avril 2021. Contestation de la prise en chargeLe 16 juin 2021, la société [5] a contesté la décision de prise en charge de l’accident par la caisse primaire d’assurance-maladie devant la commission de recours amiable. Cette commission a rejeté le recours, et la décision a été notifiée le 2 septembre 2021. Par la suite, la société a saisi le tribunal le 2 novembre 2021 pour obtenir une déclaration d’inopposabilité de la décision de reconnaissance de l’accident du travail. Arguments de la sociétéLa société [5] soutient que la décision de la caisse a été prise à l’issue d’une procédure irrégulière, arguant que les investigations n’ont pas respecté le contradictoire et les délais prévus par le code de la sécurité sociale. En alternative, elle demande que l’accident soit requalifié en accident de trajet, affirmant que l’accident s’est produit entre le domicile du salarié et son lieu de travail. Position de la caisse primaire d’assurance-maladieLa caisse primaire d’assurance-maladie de Savoie a conclu au rejet des demandes de la société, affirmant que l’accident s’est produit dans le périmètre de l’entreprise, ce qui justifie sa qualification d’accident du travail. Analyse juridiqueSelon l’article R. 441-7 du code de la sécurité sociale, la caisse doit engager des investigations uniquement si elle reçoit des réserves motivées de l’employeur. Dans ce cas, la déclaration d’accident n’étant pas accompagnée de réserves, la caisse n’était pas tenue de mener des investigations. De plus, l’article L. 411-1 définit un accident du travail comme un accident survenant à l’occasion du travail, tandis que l’article L. 411-2 précise les conditions pour qu’un accident survenu en trajet soit qualifié comme tel. Décision du tribunalLe tribunal a requalifié l’accident subi par M [N] [C] en accident de trajet, constatant que l’accident s’est produit alors que le salarié traversait une voie ferrée en dehors du périmètre de l’entreprise. La société [5] a été déboutée de ses autres demandes, et les dépens de l’instance ont été mis à la charge de la caisse primaire d’assurance-maladie de Savoie. |
Questions / Réponses juridiques :
Quelles sont les conditions de reconnaissance d’un accident du travail selon le Code de la sécurité sociale ?La reconnaissance d’un accident du travail est régie par plusieurs articles du Code de la sécurité sociale. L’article L. 411-1 stipule qu’est considéré comme accident du travail « tout accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ». Cela signifie que l’accident doit être lié à l’activité professionnelle du salarié, peu importe le lieu où il se produit. De plus, l’article L. 411-2 précise que pour qu’un accident survenu pendant le trajet entre le domicile et le lieu de travail soit reconnu comme accident du travail, il faut que certaines conditions soient remplies. Ces conditions incluent la preuve que l’accident s’est produit pendant le trajet d’aller et de retour entre la résidence principale et le lieu de travail. Il est donc essentiel de démontrer le lien entre l’accident et l’activité professionnelle pour bénéficier de la reconnaissance d’accident du travail. Quels sont les droits de l’employeur en cas de contestation de la prise en charge d’un accident du travail ?L’employeur a le droit de contester la prise en charge d’un accident du travail en émettant des réserves motivées. Selon l’article R. 441-7 du Code de la sécurité sociale, « la caisse dispose d’un délai de trente jours francs à compter de la date à laquelle elle dispose de la déclaration d’accident ». Si l’employeur émet des réserves, la caisse doit alors procéder à des investigations avant de reconnaître le caractère professionnel de l’accident. Cependant, dans le cas présent, il a été établi que la déclaration d’accident n’était pas assortie de réserves, ce qui signifie que la caisse n’était pas tenue de mener des investigations. Ainsi, l’employeur doit être vigilant lors de la déclaration d’un accident et s’assurer d’émettre des réserves si nécessaire pour préserver ses droits. Comment se déroule la procédure de contestation d’une décision de prise en charge d’un accident du travail ?La procédure de contestation d’une décision de prise en charge d’un accident du travail commence par le dépôt d’un recours devant la commission de recours amiable. L’article L. 142-1 du Code de la sécurité sociale prévoit que l’employeur peut contester la décision de la caisse primaire d’assurance-maladie. Si la commission de recours amiable rejette le recours, l’employeur peut saisir le tribunal compétent. Dans le cas présent, la société [5] a saisi le tribunal après le rejet de son recours par la commission de recours amiable. Il est important de respecter les délais de recours, qui sont généralement de deux mois à compter de la notification de la décision contestée. Le tribunal examinera alors les éléments de preuve et rendra une décision qui pourra confirmer ou infirmer la prise en charge de l’accident. Quelles sont les conséquences d’une requalification d’un accident du travail en accident de trajet ?La requalification d’un accident du travail en accident de trajet a des conséquences importantes sur les droits du salarié et de l’employeur. Un accident de trajet est défini par l’article L. 411-2 du Code de la sécurité sociale, qui précise que l’accident doit survenir pendant le trajet entre le domicile et le lieu de travail. Cette requalification peut affecter les indemnités versées au salarié, car les modalités de prise en charge peuvent différer entre un accident du travail et un accident de trajet. En général, les accidents de trajet peuvent donner lieu à des prestations similaires, mais les conditions d’indemnisation peuvent varier. Dans le cas présent, le tribunal a requalifié l’accident de M [C] en accident de trajet, ce qui a conduit à une modification des droits de la société [5] et de la caisse primaire d’assurance-maladie. Il est donc crucial pour les parties de bien comprendre les implications juridiques de cette requalification. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
DE NANTERRE
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PÔLE SOCIAL
Affaires de sécurité sociale et aide sociale
JUGEMENT RENDU LE
13 Décembre 2024
N° RG 21/01788 – N° Portalis DB3R-W-B7F-XBMY
N° Minute : 24/01959
AFFAIRE
S.A.S. [5]
C/
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA SAVOIE
Copies délivrées le :
DEMANDERESSE
S.A.S. [5]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Morgane COURTOIS D’ARCOLLIERES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0503
substitué à l’audience par Me Noellie ROY, avocate au barreau de PARIS
DEFENDERESSE
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA SAVOIE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Mme [W] [J], munie d’un pouvoir régulier
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L’affaire a été débattue le 04 Novembre 2024 en audience publique devant le tribunal composé de :
Vincent SIZAIRE, Vice-président
Gérard BEHAR, Assesseur, représentant les travailleurs salariés
Yoann VOULHOUX, Assesseur, représentant les travailleurs non-salariés
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats et du prononcé : Stéphane DEMARI, Greffier.
JUGEMENT
Prononcé en premier ressort, par décision contradictoire et mise à disposition au greffe du tribunal conformément à l’avis donné à l’issue des débats.
M [N] [C] est salarié de la société [5].
Le 1er avril 2021, son employeur a déclaré auprès de la caisse primaire d’assurance-maladie de Savoie un accident du trajet survenu le même jour. Le 20 avril 2021, la caisse primaire d’assurance-maladie a pris en charge le sinistre comme accident du travail.
Le 16 juin 2021, la société a contesté cette prise en charge devant la commission de recours amiable, laquelle a rejeté son recours par un décision notifiée le 2 septembre 2021.
Par requête enregistrée le 2 novembre 2021, la société [5] a saisi la présente juridiction.
Dans le dernier état de ses écritures et de ses observations, elle demande au tribunal :
– de lui déclarer inopposable la décision de reconnaissance de l’accident du travail de [C];
– A titre subsidiaire, de requalifier l’accident en accident de trajet.
A l’appui de ses prétentions, elle soutient que la décision litigieuse a été adoptée au terme d’une procédure irrégulière en ce que la caisse a mené ses investigations sans respecter le contradictoire et sans respecter les délais fixés par le code de la sécurité sociale. A titre subsidiaire, elle soutient que l’accident est survenu entre le lieu du travail et le domicile du salarié.
Dans le dernier état de ses écritures et de ses observations, la caisse primaire d’assurance-maladie de Savoie conclut au rejet des demandes.
Elle soutient que l’accident s’est produit dans le périmètre de l’entreprise de sorte qu’il doit être regardé comme un accident du travail.
Sur la demande d’inopposabilité
En vertu de l’article R. 441-7 du code de la sécurité sociale, » la caisse dispose d’un délai de trente jours francs à compter de la date à laquelle elle dispose de la déclaration d’accident et du certificat médical initial prévu à l’article L. 441-6 pour soit statuer sur le caractère professionnel de l’accident, soit engager des investigations lorsqu’elle l’estime nécessaire ou lorsqu’elle a reçu des réserves motivées émises par l’employeur « . Il résulte de ces dispositions que, lorsqu’elle a été destinataire de réserves motivées de l’employeur, la caisse ne peut reconnaître le caractère professionnel de l’accident sans procéder préalablement à des investigations.
En l’espèce, il est constant que la déclaration de l’accident en cause n’est assortie d’aucune réserve, de sorte que la caisse primaire d’assurance-maladie n’avait nullement l’obligation de procéder à des investigations. Le seul courriel adressé à l’employeur pour connaître le lieu exact de localisation de l’accident n’implique nullement que la caisse a, de sa propre initiative, diligenté une telle enquête préalablement à sa décision.
Il s’ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des règles de notification et d’information applicables en pareille hypothèse ne peut qu’être écarté.
Sur la qualification de l’accident
Dans sa rédaction applicable au litige, l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale dispose qu’est » considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise « . L’article L411-2 du même code dispose qu’est » également considéré comme accident du travail, lorsque la victime ou ses ayants droit apportent la preuve que l’ensemble des conditions ci-après sont remplies ou lorsque l’enquête permet à la caisse de disposer sur ce point de présomptions suffisantes, l’accident survenu à un travailleur mentionné par le présent livre, pendant le trajet d’aller et de retour, entre : 1°) la résidence principale, une résidence secondaire présentant un caractère de stabilité ou tout autre lieu où le travailleur se rend de façon habituelle pour des motifs d’ordre familial et le lieu du travail « .
En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats et notamment des indications portées sur la déclaration d’accident reçue par la caisse ainsi que de la photographie du lieu du sinistre que, nonobstant la qualification d’accident du travail mentionnée sur la déclaration, il a eu lieu alors que le salarié traversait à motocyclette la voie ferrée située en dehors du périmètre de l’entreprise. Il est ainsi survenu entre le lieu du travail et le domicile de M [C] et doit dès lors être qualifié d’accident de trajet.
Sur les dépens et les frais de l’instance
Il convient, en application de l’article 696 du code de procédure civile, de mettre à la charge de la caisse primaire d’assurance-maladie les dépens de l’instance.
Le tribunal, statuant par jugement contradictoire, en premier ressort et par mise à disposition au greffe,
REQUALIFIE en accident de trajet l’accident subi par M [N] [C] le 1er avril 2021 et pris en charge le 20 avril 2021 par la caisse primaire d’assurance-maladie de Savoie comme accident du travail.
DÉBOUTE la société [5] du surplus de ses demandes.
MET à la charge de la caisse primaire d’assurance-maladie de Savoie les entiers dépens de l’instance.
Et le présent jugement est signé par Vincent SIZAIRE, Vice-président et par Stéphane DEMARI, Greffier, présents lors du prononcé.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,