Responsabilité financière et vigilance des donneurs d’ordre dans le cadre de la sous-traitance : enjeux et conséquences.

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Responsabilité financière et vigilance des donneurs d’ordre dans le cadre de la sous-traitance : enjeux et conséquences.

Contexte de l’affaire

La société [3] a effectué des travaux de sous-traitance pour la société [4]. Suite à des infractions de travail dissimulé constatées, l’URSSAF Provence-Alpes-Côte d’Azur a notifié à la société [4] une mise en œuvre de sa solidarité financière en raison de son manquement à l’obligation de vigilance envers son co-contractant.

Notifications et mises en demeure

Le 22 février 2017, l’URSSAF a adressé une lettre à la société [4] concernant un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale d’un montant total de 61 951 euros pour l’année 2015. Après des échanges, une mise en demeure a été émise le 23 juin 2017, portant le montant total à 69 261 euros. Une situation similaire s’est produite pour un autre établissement de la société [4], avec un montant total de 200 117 euros notifié le 27 juin 2017.

Recours et décisions judiciaires

La société [4] a contesté ces mises en demeure, mais son recours a été rejeté par la commission de recours amiable le 6 décembre 2017. Elle a alors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale le 15 janvier 2018. Le tribunal de grande instance de Marseille a rendu un jugement le 27 novembre 2019, annulant la procédure de mise en œuvre de la solidarité financière.

Appel et révisions judiciaires

L’URSSAF a fait appel de cette décision, et le 26 mars 2021, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a réformé le jugement initial, validant la mise en œuvre de la solidarité financière et condamnant la société [4] à payer les montants dus. Cependant, la Cour de cassation a cassé cet arrêt le 6 avril 2023, renvoyant l’affaire devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

État actuel de l’affaire

Le 12 mai 2023, l’URSSAF a saisi la cour d’appel en tant que cour de renvoi. Cependant, la société [4] a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 30 juin 2024, et sa liquidation judiciaire a été clôturée pour insuffisance d’actif. L’absence de mandataire ad hoc a conduit à la décision de radiation de l’affaire, qui ne pourra être rétablie que sur demande de l’appelante avec justification de la désignation d’un mandataire.

Questions / Réponses juridiques :

 

Quelles sont les obligations de vigilance du donneur d’ordre en matière de sous-traitance ?

La responsabilité du donneur d’ordre en matière de sous-traitance est encadrée par l’article L. 8222-1 du Code du travail, qui impose une obligation de vigilance. Cet article stipule que le donneur d’ordre doit s’assurer que son cocontractant respecte ses obligations en matière de déclarations sociales et de paiement des cotisations.

En effet, le donneur d’ordre est tenu de vérifier la régularité de la situation de son sous-traitant, notamment en ce qui concerne le paiement des cotisations sociales. En cas de manquement à cette obligation, il peut être tenu solidairement responsable des dettes de son sous-traitant envers l’URSSAF, comme le précise l’article L. 8222-2 du même code.

Ainsi, la société [4] a été mise en demeure par l’URSSAF pour ne pas avoir rempli cette obligation de vigilance, ce qui a conduit à la mise en œuvre de la solidarité financière.

Quels sont les recours possibles en cas de mise en demeure par l’URSSAF ?

Lorsqu’une société reçoit une mise en demeure de l’URSSAF, elle peut exercer plusieurs recours. Selon l’article L. 244-2 du Code de la sécurité sociale, la société peut d’abord contester la mise en demeure devant la commission de recours amiable.

Si ce recours est rejeté, comme cela a été le cas pour la société [4], elle peut saisir le tribunal des affaires de sécurité sociale, conformément à l’article R. 142-1 du Code de la sécurité sociale. Ce dernier article précise que le recours doit être formé dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision contestée.

Dans le cas présent, la société [4] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale après le rejet de son recours par la commission de recours amiable, ce qui est conforme aux dispositions légales.

Quelles sont les conséquences d’une annulation de la procédure de mise en œuvre de la solidarité financière ?

L’annulation de la procédure de mise en œuvre de la solidarité financière a des conséquences significatives pour le donneur d’ordre. Selon l’article L. 133-4-5 du Code de la sécurité sociale, si la mise en œuvre de la solidarité est annulée, cela entraîne également l’annulation des exonérations de cotisations sociales qui avaient été accordées.

Dans le jugement du 27 novembre 2019, le tribunal a annulé la procédure de mise en œuvre de la solidarité financière de la société [4], ce qui a eu pour effet d’annuler également les exonérations de cotisations sociales. Cela signifie que la société [4] n’était plus responsable des dettes de son sous-traitant, et les cotisations et majorations de retard qui en découlaient ne pouvaient plus être réclamées.

Cependant, cette annulation a été réformée par la cour d’appel, qui a validé la procédure de mise en œuvre de la solidarité financière, rétablissant ainsi les obligations de la société [4].

Quel est le rôle de la Cour de cassation dans ce litige ?

La Cour de cassation joue un rôle crucial en tant que juridiction suprême en matière de droit. Dans l’affaire en question, par arrêt en date du 6 avril 2023, la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt rendu par la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

Cette décision a pour effet de remettre les parties dans l’état où elles se trouvaient avant l’arrêt contesté, ce qui signifie que la cour d’appel devra réexaminer l’affaire. La Cour de cassation ne juge pas le fond de l’affaire, mais vérifie si les règles de droit ont été correctement appliquées.

En l’espèce, la Cour de cassation a estimé que l’arrêt de la cour d’appel comportait des erreurs de droit, ce qui a conduit à la nécessité d’un nouvel examen de l’affaire par une autre formation de la cour d’appel.

Quelles sont les implications de la radiation de l’affaire par la cour d’appel ?

La radiation de l’affaire par la cour d’appel, comme ordonné dans les motifs, a des implications importantes pour le déroulement du litige. Selon l’article 381 du Code de procédure civile, la radiation d’une affaire signifie qu’elle est retirée du rôle des affaires en cours.

Cela implique que l’affaire ne sera pas jugée tant que l’appelante n’aura pas déposé ses conclusions et justifié la désignation d’un mandataire ad hoc. Cette procédure vise à garantir que toutes les parties sont correctement représentées et que les droits de la défense sont respectés.

La radiation peut également retarder la résolution du litige, car l’affaire ne pourra être rétablie sur le rôle qu’après le dépôt des conclusions et la désignation d’un mandataire ad hoc, ce qui peut prendre du temps.

 

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

13 décembre 2024
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n° 23/06593
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8b

ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT DE RADIATION

DU 13 DECEMBRE 2024

N°2024/ .

Rôle N° RG 23/06593 – N° Portalis DBVB-V-B7H-BLJA5

[8]

C/

S.A.S. [4]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

– [8]

– S.A.S. [4]

N° RG 23/06593 – N° Portalis DBVB-V-B7H-BLJA5

Arrêt prononcé sur saisine de la Cour suite à l’arrêt rendu par la Cour de Cassation le 06 Avril 2023.

DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

[8], demeurant [Adresse 2]

représenté par Mme [L] [E] en vertu d’un pouvoir spécial

DEFENDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

S.A.S. [4], demeurant [Adresse 1]

non comparante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 Novembre 2024, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre, chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre,

Madame Sylvie CACHET, Présidente de chambre

Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Isabelle LAURAIN.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Décembre 2024.

ARRÊT

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Décembre 2024

Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

La société [3] a réalisé des travaux de sous-traitance pour le compte de la société [4].

Par lettre d’observations en date du 22 février 2017, faisant référence à un procès-verbal de relevant des infractions de travail dissimulé daté du 19 octobre 2016, adressé au procureur de la République, l’URSSAF Provence-Alpes-Côte d’Azur, a notifié, à la société [4], pour son établissement sis à [Adresse 6], la mise en oeuvre de sa solidarité financière de donneur d’ordre, avec un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale d’un montant total de 61 951 euros au titre de l’année 2015, en retenant que la société [4] ne s’est pas assurée de la régularité de la situation et n’a pas rempli son obligation de vigilance envers son co-contractant.

Après échange d’observations, l’URSSAF a ensuite notifié à la société [4] une mise en demeure datée du 23 juin 2017, portant sur un montant total de 69 261 euros (dont 61 951 euros en cotisations et 7 310 euros en majorations de retard).

Après rejet le 6 décembre 2017 par la commission de recours amiable de son recours, la société [4] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale le 15 janvier 2018.

Par lettre d’observations en date du 22 février 2017, l'[Adresse 10], a notifié, à la société [4], pour son établissement sis à [Adresse 5], la mise en oeuvre de sa solidarité financière de donneur d’ordre avec un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale d’un montant total de 179 081 euros au titre de l’année 2015, en retenant que la société [4] ne s’est pas assurée de la régularité de la situation et n’a pas rempli son obligation de vigilance envers son co-contractant.

Après échange d’observations, l’URSSAF a ensuite notifié à la société [4] une mise en demeure datée du 27 juin 2017, portant sur un montant total de 200 117 euros (dont 179 081 euros en cotisations et 21 036 euros en majorations de retard).

Après rejet le 6 décembre 2017 par la commission de recours amiable de son recours, la société [4] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale le 15 janvier 2018.

Par lettre d’observations en date du 22 février 2017, faisant référence à un procès-verbal de relevant des infractions de travail dissimulé daté du 19 octobre 2016, adressé au procureur de la République, l’URSSAF Provence-Alpes-Côte d’Azur, a notifié, à la société [4], pour son sis à [Adresse 6], l’annulation des exonérations du donneur d’ordre non vigilant suite au constat de travail dissimulé du sous traitant d’un montant total de 61 951 euros au titre de l’année 2015.

Après échange d’observations, l’URSSAF a ensuite notifié à la société [4] une mise en demeure datée du 23 juin 2017, portant sur un montant total de 69 261 euros (dont 61 951 euros en cotisations et 7 310 euros en majorations de retard).

Après rejet le 6 décembre 2017 par la commission de recours amiable de son recours, la société [4] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale le 15 janvier 2018.

Par jugement du 27 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Marseille, pôle social, après avoir joint les recours, a:

* ‘accueilli favorablement’ l’exception de procédure présentée par la SAS [4] envers les deux lettres d’observations du 22 février 2017, avec effet sur les deux mises en demeure adressées les 23 et 27 juin 2017 par l’URSSAF, pour défaut de précision d’une part quant aux outils de mesure des infractions au travail dissimulé reprochées à SASU [3], d’autre part à la teneur des sommes réclamées par voie de mise en oeuvre de la solidarité financière, soit autant de manquements aux exigences des droits de la défense,

* annulé la procédure de mise en oeuvre de la solidarité financière de la SAS [4], moyennant annulation subséquente de l’exonération de cotisations sociales dites Fillon, initiées par les deux lettres d’observations adressées le 27 juin 2017 par l’URSSAF, et la procédure de recouvrement subséquente,

*débouté les parties de l’ensemble de leurs prétentions plus amples ou contraires,

* réservé le sort des dépens,

* dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

L’URSSAF a relevé régulièrement appel dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées.

Par arrêt en date du 26 mars 2021, la cour d’appel d’Aix-en-Provence, après avoir réformé ce jugement dans toutes ses dispositions, statuant à nouveau, a:

* validé la procédure de mise en oeuvre de la solidarité financière de la société [4],

* condamné la société [4] à payer à l'[Adresse 10] la somme de 200 117 euros (dont 179 081euros de cotisations et 21 036 euros de majorations de retard),

* renvoyé l'[9] à recalculer le montant de l’annulation des exonérations prévues par l’article L.133-4-5 du code de la sécurité sociale, en cotisations et majorations de retard, sur la seule période du 01.01.2015 au 30.09.2015,

*rejeté toute autre demande,

* condamné la SAS [4] aux entiers dépens de l’instance.

Le tribunal de commerce de Marseille a prononcé, par jugement en date du 9 décembre 2021, la liquidation judiciaire de la SC [4], puis par jugement en date du 27 juin 2024, la clôture de cette procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif.

La société [7] a été radiée d’office du registre du commerce et des sociétés de Marseille le 30 juin 2024.

Par arrêt en date du 6 avril 2023 (2e Civ., 6 avril 2023, pourvoi n°21-17.173), la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 26 mars 2021, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence, et après avoir remis l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt, les a renvoyées devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée.

Par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le 12 mai 2023, l'[Adresse 10] a saisi la présente cour d’appel, prise en sa qualité de cour de renvoi.

Par conclusions réceptionnées par le greffe le 18 septembre 2024, l'[9] sollicite l’infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et demande à la cour de:

* ‘confirmer’ la solidarité financière de la société [4] à l’égard de la société [3],

* inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la société [4] la somme de 200 117 euros (dont 179 081euros de cotisations et 21 036 euros de majorations de retard),

* inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la société [4] la somme de 69 261 euros (dont 61 951 euros en cotisations et 7 310 euros en majorations de retard) (annulation des exonérations).

MOTIFS

Alors que la cour est saisie depuis le 12 mai 2023, en sa qualité de cour de renvoi par l’URSSAF et que la société intimée est radiée depuis le 30 juin 2024, après que par jugement en date du 27 juin 2024 le tribunal de commerce de Marseille ait prononcé la clôture de sa procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif, aucun mandataire ad hoc ne lui a été désigné et par suite régulièrement assigné en intervention forcée par l’URSSAF.

L’affaire n’est donc pas en état d’être jugée.

Il y a lieu d’en ordonner la radiation, son rétablissement au rôle ne pouvant intervenir que sur demande de l’appelante, avec dépôt de ses conclusions et justification de la désignation d’un mandataire ad hoc, qu’il lui incombera ensuite de faire assigner, et de lui notifier ses pièces et conclusions, pour la date d’audience à laquelle l’affaire sera fixée.

PAR CES MOTIFS,

Vu l’article 381 du code de procédure civile,

– Ordonne la radiation de l’affaire et son retrait du rang des affaires en cours,

– Dit qu’elle sera rétablie sur le dépôt de ses conclusions de l’appelante et justification de la désignation d’un mandataire ad hoc, avant l’expiration du délai de péremption de l’instance,

-Dit que l'[Adresse 10] devra pour la date d’audience à laquelle l’affaire aura

été fixée, faire assigner, le mandataire ad hoc désigné, et lui notifier ses pièces et conclusions.

Le Greffier Le Président

N° RG 23/06593 – N° Portalis DBVB-V-B7H-BLJA5


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