Aux termes de l’article 2 du code de procédure pénale, l’action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction.
L’article 3 ajoute que l’action civile peut être exercée en même temps que l’action publique et devant la même juridiction. Elle sera recevable pour tous chefs de dommages, aussi bien matériels que corporels ou moraux, qui découleront des faits objets de la poursuite. L’auteur du dommage est tenu à la réparation intégrale du préjudice de telle sorte qu’il ne puisse y avoir pour la victime ni perte ni profit. Toutefois, il appartient à la partie civile de démontrer les préjudices subis et le lien d’imputabilité entre ces derniers et l’infraction dont l’auteur a été reconnu coupable. La charge de la preuve de ces éléments lui incombe. En outre, il est statué conformément à l’article 4 du code de procédure civile selon lequel l’objet du litige est déterminé par les prétentions des parties, c’est-à-dire dans les limites fixées par les demandes et la proposition du responsable. Les articles L.376-1 et L.454-1 du code de la santé publique octroient aux caisses de sécurité sociale un recours subrogatoire contre le tiers responsable d’un dommage corporel en vue d’obtenir le remboursement des prestations versées à l’assuré social. Ce recours peut être exercé devant les juridictions civiles ou pénales et s’exerce poste par poste sur les seules indemnités prises en charge par ces organismes, à l’exclusion des postes de préjudice à caractère personnel. En l’espèce, l’auteur des SMS a été condamné par ordonnance d’homologation prononcée par le président du Tribunal correctionnel de Valenciennes pour avoir, entre le 1er septembre 2023 et le 22 février 2024, menacé de mort un tiers de manière réitéré en lui disant à plusieurs reprises « je vais te crever, je vais te buter, tu vas finir au trou » et en envoyant de nombreux SMS contenant le même type de menaces. |
Résumé de l’affaire :
Condamnation de [S] [T][S] [T] a été condamné par le Tribunal correctionnel de Valenciennes le 29 février 2024 pour avoir menacé de mort [B] [K] à plusieurs reprises entre le 1er septembre 2023 et le 22 février 2024. Les menaces incluaient des déclarations explicites telles que « je vais te crever » et « tu vas finir au trou », accompagnées de nombreux SMS contenant des menaces similaires. Constitution de partie civileLe tribunal a déclaré recevable la constitution de partie civile de [B] [K], reconnaissant [S] [T] responsable des préjudices subis. L’affaire a été renvoyée à l’audience du 12 septembre 2024 pour statuer sur l’action civile. Demandes de réparation de [B] [K][B] [K], représenté par son avocat, a demandé au tribunal de condamner [S] [T] à réparer l’intégralité de son préjudice, incluant 1 094,53 € pour préjudice économique et 3 000 € pour préjudice moral. Il a également demandé 2 000 € en vertu de l’article 475-1 du code de procédure pénale, ainsi que le remboursement des dépens. Absence de [S] [T] à l’audience[S] [T] n’a pas comparu à l’audience, ni personne pour le représenter. L’affaire a été mise en délibéré pour le 14 novembre 2024. Principes juridiques sur l’action civileSelon le code de procédure pénale, l’action civile en réparation du dommage causé par une infraction appartient à ceux qui ont personnellement souffert du dommage. L’action peut être exercée en même temps que l’action publique, et la partie civile doit prouver les préjudices subis et leur lien avec l’infraction. Préjudices patrimoniauxConcernant les préjudices patrimoniaux, [B] [K] a demandé une indemnisation pour perte de gains professionnels due à un arrêt maladie qu’il attribue aux menaces subies. Cependant, le tribunal a constaté que le lien de causalité entre l’arrêt de travail et les menaces n’était pas suffisamment démontré, entraînant le déboutement de sa demande. Préjudices extra-patrimoniauxPour les préjudices extra-patrimoniaux, le tribunal a reconnu que les menaces avaient causé des souffrances physiques et psychiques à [B] [K], entraînant des troubles anxieux. En conséquence, une indemnité de 2 500 € a été allouée pour ces souffrances. Frais de justiceLe tribunal a également statué sur les demandes accessoires, précisant que les frais de justice sont à la charge de l’État. [S] [T] a été condamné à payer 1 000 € à [B] [K] pour les frais non couverts par l’État, conformément à l’article 475-1 du code de procédure pénale. Décision finale du tribunalLe tribunal a condamné [S] [T] à verser 2 500 € à [B] [K] pour son préjudice, tout en déboutant [B] [K] de sa demande de perte de gains professionnels. Le jugement a été déclaré commun à la CPAM du Hainaut, et les parties ont été informées des recours possibles pour le recouvrement des indemnités. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de recevabilité de l’action civile en réparation du dommage ?L’article 2 du Code de procédure pénale stipule que l’action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction. Cette disposition implique que la victime doit prouver qu’elle a subi un préjudice en lien direct avec l’infraction. L’article 3 précise que l’action civile peut être exercée simultanément avec l’action publique et devant la même juridiction. Elle est recevable pour tous chefs de dommages, qu’ils soient matériels, corporels ou moraux, découlant des faits poursuivis. Il est donc essentiel que la partie civile démontre les préjudices subis et le lien d’imputabilité entre ces préjudices et l’infraction. Comment se calcule la réparation des préjudices patrimoniaux ?La réparation des préjudices patrimoniaux, notamment la perte de gains professionnels, se base sur le principe de la réparation intégrale du préjudice, comme le stipule l’article 2 du Code de procédure pénale. Ce préjudice indemnise la perte de salaires subie par la victime, de la date du dommage jusqu’à la date de consolidation. La perte de revenus se calcule en net, hors incidence fiscale, et s’évalue à partir des revenus déclarés à l’administration fiscale ou d’autres documents pertinents. Dans le cas présent, [B] [K] a demandé 1 094,53 € pour une perte de salaire liée à un arrêt maladie. Cependant, il doit prouver le lien de causalité entre son arrêt de travail et les menaces subies, ce qui n’a pas été démontré de manière satisfaisante. Quels sont les critères d’évaluation des préjudices extra-patrimoniaux ?Les préjudices extra-patrimoniaux, tels que les souffrances endurées, sont évalués en tenant compte des souffrances physiques et psychiques subies par la victime. L’article 4 du Code de procédure civile précise que l’objet du litige est déterminé par les prétentions des parties, ce qui inclut les demandes de réparation pour les préjudices extra-patrimoniaux. Dans cette affaire, les faits de menaces ont causé des troubles anxieux chez [B] [K], justifiant une indemnisation pour souffrances endurées. Le tribunal a décidé d’allouer une somme de 2 500 € pour ces souffrances, en tenant compte de la durée des faits et des traitements médicaux prescrits. Quelles sont les conséquences de la non-comparution de [S] [T] lors de l’audience ?La non-comparution de [S] [T] lors de l’audience n’empêche pas le tribunal de statuer sur l’affaire, comme le prévoit l’article 476 du Code de procédure pénale. Cet article stipule que le tribunal peut juger en l’absence de la personne poursuivie, à condition que celle-ci ait été régulièrement convoquée. Dans ce cas, le tribunal a pu examiner les demandes de [B] [K] et rendre une décision sur les préjudices subis, même sans la présence de [S] [T]. Cela souligne l’importance pour les parties de se présenter aux audiences, car leur absence peut entraîner des décisions défavorables. Quelles sont les implications de l’article 475-1 du Code de procédure pénale dans cette affaire ?L’article 475-1 du Code de procédure pénale prévoit que la victime peut demander le remboursement des frais non couverts par l’État, exposés en raison de la procédure pénale. Dans cette affaire, [B] [K] a demandé une indemnité de 2 000 € sur le fondement de cet article. Le tribunal a reconnu la recevabilité de cette demande et a condamné [S] [T] à payer 1 000 € à [B] [K] pour les frais non pris en charge par l’État. Cela montre que les victimes d’infractions pénales peuvent obtenir réparation pour les frais engagés dans le cadre de la procédure judiciaire. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Tribunal judiciaire de Valenciennes
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INTÉRÊTS CIVILS
RG 24/00042 – Portalis DBZT-W-B7I-GICI – parquet 24060000035 – minute 155/2024
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ORDONNANCE du QUATORZE NOVEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE
À l’audience publique du 12 septembre 2024 tenue en matière correctionnelle par Madame Agnès DEIANA, Juge, statuant en juge unique en vertu des dispositions de l’ordonnance du président du Tribunal judiciaire de Valenciennes, prise en application des articles 464 al. 4 et 495-6 du code de procédure pénale, assistée de Monsieur Samuel VILAIN, Greffier.
Les parties ayant été avisées que l’ordonnance serait rendue le 14 novembre 2024 par Madame Agnès DEIANA, Juge, assistée de Monsieur Samuel VILAIN, Greffier.
DEMANDEUR
Monsieur [B] [K], né le [Date naissance 4] 1972 à [Localité 7] (NORD),
demeurant [Adresse 5]
représenté par Maître Mélanie O’BRIEN, avocat au barreau de VALENCIENNES
D’une part,
DÉFENDEUR
Monsieur [S] [T], né le [Date naissance 2] 1969 à [Localité 6] (NORD),
demeurant [Adresse 3]
non comparant
D’autre part,
[S] [T] a été condamné par ordonnance d’homologation prononcée le 29 février 2024 par le président du Tribunal correctionnel de Valenciennes pour avoir, entre le 1er septembre 2023 et le 22 février 2024, menacé de mort [B] [K] de manière réitéré en lui disant à plusieurs reprises « je vais te crever, je vais te buter, tu vas finir au trou » et en envoyant de nombreux SMS contenant le même type de menaces.
Par ordonnance du même jour, la constitution de partie civile de [B] [K] a été déclarée recevable, [S] [T] déclaré responsable des préjudice subis par [B] [K] et l’affaire renvoyée en l’audience du 12/09/2024 pour statuer sur l’action civile.
Par conclusions déposées et visées à l’audience, [B] [K], représenté par son conseil, demande au tribunal de :
condamner [S] [T] à réparer l’entier préjudice subi et en conséquence le condamner à lui payer 1 094,53 € en réparation du préjudice économique ; 3 000 € en réparation du préjudice moral ;
condamner [S] [T] à payer à [B] [K] la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 475-1 du code de procédure pénale, outre aux entiers dépens ;
dire le présent jugement commun à la CPAM.
[S] [T] n’a pas comparu ni personne pour lui.
L’affaire a été mise en délibéré au 14 novembre 2024.
Aux termes de l’article 2 du code de procédure pénale, l’action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction.
L’article 3 ajoute que l’action civile peut être exercée en même temps que l’action publique et devant la même juridiction. Elle sera recevable pour tous chefs de dommages, aussi bien matériels que corporels ou moraux, qui découleront des faits objets de la poursuite.
L’auteur du dommage est tenu à la réparation intégrale du préjudice de telle sorte qu’il ne puisse y avoir pour la victime ni perte ni profit. Toutefois, il appartient à la partie civile de démontrer les préjudices subis et le lien d’imputabilité entre ces derniers et l’infraction dont l’auteur a été reconnu coupable. La charge de la preuve de ces éléments lui incombe.
Le dommage doit prendre sa source dans le délit poursuivi et avoir été directement causé par l’infraction.
En outre, il est statué conformément à l’article 4 du code de procédure civile selon lequel l’objet du litige est déterminé par les prétentions des parties, c’est-à-dire dans les limites fixées par les demandes et la proposition du responsable.
Les articles L.376-1 et L.454-1 du code de la santé publique octroient aux caisses de sécurité sociale un recours subrogatoire contre le tiers responsable d’un dommage corporel en vue d’obtenir le remboursement des prestations versées à l’assuré social. Ce recours peut être exercé devant les juridictions civiles ou pénales et s’exerce poste par poste sur les seules indemnités prises en charge par ces organismes, à l’exclusion des postes de préjudice à caractère personnel.
En l’espèce, la CPAM du Hainaut, régulièrement mise en cause, a fait savoir qu’elle n’entendait pas intervenir faute de créance à faire valoir.
[S] [T] a été pénalement condamné pour avoir menacé de mort [B] [K] à plusieurs reprises.
1. Sur les préjudices patrimoniaux
Sur les préjudices patrimoniaux temporaires
Perte de gains professionnels actuels
Ce poste de préjudice indemnise la perte de salaires subie par la victime, de la date du dommage jusqu’à la date de consolidation.
La perte de revenus se calcule en net (et non en brut) et hors incidence fiscale. L’évaluation de ce préjudice se réalise à partir des revenus déclarés à l’administration fiscale pour le calcul de l’impôt sur le revenu, ou tout ensemble de documents permettant, par leur cohérence et leur regroupement d’apprécier les revenus nets professionnels perçus par la partie civile au moment de la réalisation du dommage et la perte subi pendant la période d’ incapacité temporaire et totale de travail imputable aux faits.
En l’espèce, [B] [K] sollicite la somme de 1 094,53 € en raison d’un arrêt maladie qu’il estime résulter du harcèlement et des menaces subies du 1er février 2024 au 2 mars 2024.
Il produit trois arrêts maladie : un du 1er au 7 février 2024 puis un du 21 au 28 février 2024 et du 28 février 2024 au 2 mars 2024 dont le motif n’est pas indiqué. Le premier arrêt maladie du 1er au 7 février 2024 étant prescrit pour une bronchite aiguë, il ne présente aucun lien de causalité avec les faits dont [S] [T] doit répondre. Au titre des sept plaintes déposées par [B] [K] auprès des services de police pour dénoncer les faits dont il était victime, il y a lieu de relever que les deux dernières sont datées des 19 et 22 février 2024 et qu’il s’est vu prescrire un médicament contre l’anxiété le 21 février 2024. Compte tenu de la proximité temporelle entre les dépôts de plainte et les faits dénoncés, et du traitement prescrit, le lien de causalité entre l’arrêt de travail du 21 février 2024 au 2 mars 2024 et les menaces de mort est établi de sorte que [S] [T] doit réparation de la perte de gains professionnels subies sur la période.
[B] [K] verse aux débats les bulletins de paie des mois de février et mars 2024 desquelles il résulte qu’il a perçu 90 % de son salaire durant l’arrêt maladie, outre les indemnités journalières de la sécurité sociale qu’il ne justifie pas. Il ne produit pas les documents utiles permettant de retenir un revenu net mensuel et de calculer la perte alléguée. Il ne fait aucune exploitation utile des pièces versées. Il n’explique pas ni ne justifie du montant de sa demande à hauteur de 1 094,53 € de sorte que le montant du préjudice dont il demande réparation n’est pas démontré.
En conséquence, [B] [K] sera débouté de sa demande.
2. Sur les préjudices extra-patrimoniaux
Les préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)
Les souffrances endurées
Il s’agit de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime.
En l’espèce, il y a lieu de relever que les faits ont duré plusieurs mois du 1er septembre 2023 et le 22 février 2024 et ont causé des troubles anxieux chez [B] [K], soignés par traitement médicamenteux.
Dès lors, il convient d’allouer la somme de 2 500 €.
Sur les demandes accessoires
L’article 800-1 du code de procédure pénale énonce que « nonobstant toutes dispositions contraires, les frais de justice criminelle, correctionnelle et de police sont à la charge de l’État et sans recours envers les condamnés. »
Le tribunal statuant selon les règles de la procédure pénale, il n’y a pas lieu à statuer sur les dépens.
[S] [T] sera condamné à payer à [B] [K] une somme de 1 000 € au titre des frais non payés par l’État et exposés par lui en application de l’article 475-1 code de procédure pénale.
Le Tribunal correctionnel, statuant sur intérêts civils, publiquement,
Par ordonnance contradictoire à l’égard de [S] [T] et contradictoire à signifier à l’égard de [B] [K] ;
CONDAMNONS [S] [T] à payer à [B] [K] une indemnité de deux mille cinq cents euros (2 500 €) au titre de la liquidation de son préjudice, assortie des intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;
DÉBOUTONS [B] [K] de sa demande au titre de la perte de gains professionnelle ;
CONDAMNONS [S] [T] à payer à [B] [K] mille euros (1 000 €) en vertu de l’article 475-1 du code de procédure pénale ;
DÉCLARONS le présent jugement commun à la CPAM du Hainaut ;
Les parties civiles sont informées de la possibilité de saisir le Service d’Aide au Recouvrement pour les Victimes d’Infractions pénales (SARVI) ou la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions pénales (CIVI), à charge pour elles d’entrer en contact avec le bureau d’aide aux victimes (BAV – tél. : [XXXXXXXX01]), dont la permanence se tient au Tribunal judiciaire de Valenciennes du lundi au vendredi de 8h30 à 12h00 et de 13h30 à 16h30.
Le condamné est informé de la possibilité pour la partie civile non éligible à la CIVI de saisir le SARVI s’il ne procède pas au paiement des dommages et intérêts auxquels il a été condamné dans le délai de deux mois courant à compter du jour où la condamnation est devenue définitive.
En foi de quoi la présente décision a été signée par le président et le greffier.
Le greffier, Le président,