Locations Airbnb illicites : le propriétaire a le droit aux frais perçus par Airbnb ?

·

·

Locations Airbnb illicites : le propriétaire a le droit aux frais perçus par Airbnb ?

Non, en cas de Locations Airbnb illicites, les frais Airbnb ne sont pas assimilés à des fruits civils, ils restent donc acquis à Airbnb.

Aux termes de l’article 548 du code civil : ‘les fruits produits par la chose n’appartiennent au propriétaire qu’à la charge de rembourser les frais des labours, travaux et semences faits par des tiers et dont la valeur est estimée à la date du remboursement.’

Aux termes de l’article 546 du même code : ‘Les fruits produits par la chose n’appartiennent au propriétaire qu’à la charge de rembourser les frais des labours, travaux et semences faits par des tiers et dont la valeur est estimée à la date du remboursement.’

Les commissions perçues par la société Airbnb, appelées ‘frais de service’, n’étaient pas produits par le bien immobilier appartenant à l’EPIC [Localité 9] habitat OPH au sens de l’article 546 du code civil, mais étaient la contrepartie du droit pour les voyageurs d’utiliser son site Internet regroupant des annonces de locations saisonnières.

Le fait que ces frais représentaient un pourcentage des sous-loyers payés ne constituait qu’une modalité de calcul desdites commissions, et ne signifie pas qu’ils provenaient de la mise en location du bien.

Enfin, ces commissions s’analysent en des impenses utiles à la perception des sous-loyers et ne doivent donc pas être attribués au propriétaire du bien, conformément aux dispositions de l’article 548 du code civil.

Résumé de l’affaire :

Contexte du litige

Par contrat de bail signé le 18 septembre 2013, l’EPIC [Localité 9] habitat OPH a loué un bien à Mme [C] [F] situé à [Adresse 5] à [Localité 3].

Découverte de la sous-location

Le 28 décembre 2021, l’EPIC [Localité 9] habitat OPH a été informé que Mme [C] [F] sous-louait une partie de son logement via Airbnb. Un constat d’huissier a révélé que cette sous-location avait débuté en 2019, générant des revenus significatifs.

Actions de l’EPIC [Localité 9] habitat OPH

Le 4 février 2022, l’EPIC a sommé Mme [C] [F] de cesser la sous-location et de fournir ses relevés Airbnb. Suite à cela, un jugement a été rendu le 25 novembre 2022, déboutant l’EPIC de sa demande de résiliation de bail et d’autres demandes connexes.

Appel de l’EPIC [Localité 9] habitat OPH

L’EPIC a interjeté appel le 13 janvier 2023, demandant l’infirmation du jugement et la résiliation du bail pour sous-location illicite, ainsi que l’expulsion de Mme [C] [F].

Demandes de Mme [C] [F]

Dans ses conclusions du 25 juin 2023, Mme [C] [F] a demandé la confirmation du jugement de première instance et, à titre subsidiaire, un délai de deux ans pour quitter les lieux.

Position de la société Airbnb Ireland unlimited

La société Airbnb a également déposé des conclusions le 23 juillet 2024, demandant la confirmation du jugement sur certains points et l’infirmation sur d’autres, notamment concernant les frais de service.

Motifs de la décision

Le tribunal a constaté que Mme [C] [F] avait sous-loué son logement en violation des termes du bail et des lois en vigueur. La gravité de ces manquements a justifié la résiliation du bail et l’expulsion de la locataire.

Délai accordé à Mme [C] [F]

Un délai de trois ans a été accordé à Mme [C] [F] pour quitter les lieux, tenant compte de sa situation personnelle et de sa bonne volonté à respecter ses obligations.

Indemnité d’occupation et frais

Mme [C] [F] a été condamnée à payer une indemnité d’occupation équivalente au loyer dû jusqu’à la libération des lieux. Les frais de service d’Airbnb n’ont pas été considérés comme des fruits civils devant être versés à l’EPIC.

Conclusion de la cour

La cour a infirmé le jugement de première instance sur certains points, prononçant la résiliation du bail et ordonnant l’expulsion de Mme [C] [F], tout en confirmant d’autres aspects du jugement initial.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la légalité de la sous-location dans le cadre d’un bail conventionné ?

La légalité de la sous-location dans le cadre d’un bail conventionné est strictement encadrée par la loi et les termes du contrat de location. Selon l’article 8 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, il est clairement stipulé que « le locataire ne peut ni céder le contrat de location, ni sous-louer le logement ».

De plus, le contrat de bail signé entre l’EPIC [Localité 9] habitat OPH et Mme [C] [F] contient une clause interdisant explicitement la sous-location, stipulant que « ce contrat de location est consenti au Preneur à l’exclusion de toutes autres personnes ».

Cette interdiction est renforcée par l’article L.442-3-5 du code de la construction et de l’habitation, qui précise que dans les logements conventionnés, le locataire doit occuper les locaux loués au moins huit mois par an et qu’il est interdit de sous-louer, sauf exceptions prévues par la loi.

Ainsi, la sous-location effectuée par Mme [C] [F] via la plateforme Airbnb constitue une violation tant des dispositions légales que des termes du contrat de bail, justifiant la demande de résiliation du bail par l’EPIC [Localité 9] habitat OPH.

Quelles sont les conséquences juridiques de la résiliation du bail pour sous-location illicite ?

La résiliation du bail pour sous-location illicite entraîne plusieurs conséquences juridiques. En vertu de l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits, ce qui signifie que les parties doivent respecter les termes du contrat.

Dans le cas présent, la résiliation du bail signifie que Mme [C] [F] perd son droit d’occupation des lieux loués. L’article L.412-3 du code des procédures civiles d’exécution permet au juge d’ordonner l’expulsion de la locataire, et ce, même sans son consentement, si elle ne quitte pas les lieux volontairement.

De plus, l’article L.442-3-5 du code de la construction et de l’habitation stipule que le bailleur peut saisir le juge pour obtenir la résiliation du bail en cas de non-respect des obligations de sous-location.

En conséquence, l’EPIC [Localité 9] habitat OPH peut demander l’expulsion de Mme [C] [F] et la récupération des lieux, ainsi que le paiement d’une indemnité d’occupation équivalente au montant du loyer jusqu’à la libération effective des lieux.

Quels sont les droits et obligations des parties en matière d’indemnité d’occupation ?

Les droits et obligations des parties en matière d’indemnité d’occupation sont régis par les articles 546 et 548 du code civil. L’article 546 stipule que « les fruits produits par la chose n’appartiennent au propriétaire qu’à la charge de rembourser les frais des labours, travaux et semences faits par des tiers ».

En cas de résiliation du bail, le locataire, ici Mme [C] [F], est tenu de payer une indemnité d’occupation au bailleur, qui correspond au montant du loyer qui aurait été dû si le contrat de bail s’était poursuivi. Cette indemnité est destinée à compenser le bailleur pour la perte de loyer pendant la période où le locataire reste dans les lieux après la résiliation du bail.

L’indemnité d’occupation est donc calculée sur la base du loyer contractuel, majoré des charges et taxes, et ce jusqu’à la libération complète des lieux. En vertu de l’article L.412-4 du code des procédures civiles d’exécution, le juge peut également accorder des délais pour quitter les lieux, tenant compte de la situation personnelle du locataire.

Comment se déroule la procédure d’expulsion en cas de non-respect des obligations locatives ?

La procédure d’expulsion en cas de non-respect des obligations locatives est encadrée par le code des procédures civiles d’exécution. Lorsqu’un bail est résilié, le bailleur peut saisir le juge pour obtenir une ordonnance d’expulsion.

L’article L.412-3 précise que le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants, mais cela dépend de la bonne volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations.

En cas d’expulsion, l’article L.412-4 stipule que la durée des délais ne peut être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans, en tenant compte de divers facteurs tels que l’âge, l’état de santé et la situation familiale de l’occupant.

Si le locataire ne quitte pas les lieux volontairement, l’expulsion peut être effectuée avec l’assistance d’un serrurier et des forces de l’ordre, conformément à l’article L.412-3.

Il est important de noter que l’expulsion doit se faire dans le respect des droits de l’occupant, et le juge doit s’assurer que les conditions de relogement sont prises en compte.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

12 novembre 2024
Cour d’appel de Paris
RG
23/01704
RÉPUBLIQUE FRAN’AISE

AU NOM DU PEUPLE FRAN’AIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 4

ARRÊT DU 12 NOVEMBRE 2024

(n° , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/01704 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CG724

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Novembre 2022-Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de PARIS- RG n° 22/04415

APPELANT

E.P.I.C. [Localité 9] HABITAT-OPH

Immatriculé au RCS de PARIS sous le numéro B 344 810 825

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Catherine HENNEQUIN de la SELAS LHUMEAU GIORGETTI HENNEQUIN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0483, substituée à l’audience par Me Emmanuel LEPARMENTIER, avocat du SELAS LGH & Associés, toque : P483

INTIMÉES

Madame [C] [F]

née le 19 juillet 1987 à [Localité 6] (Maroc)

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Catherine JEARALLY, avocat au barreau de PARIS, toque : D1059

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/016128 du 16/06/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PARIS)

Société AIRBNB IRELAND UC société de droit irlandais

Siège social [Adresse 2]

[Localité 8]

[Localité 7]

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant, Me Yves ARDAILLOU, avocat au barreau de PARIS, toque : R138

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 1er octobre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Agnès BODARD-HERMANT, présidente à la chambre et Monsieur Jean-Yves PINOY, conseiller.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Nicolette GUILLAUME, présidente de chambre

Madame Agnès BODARD-HERMANT, présidente à la chambre

Monsieur Jean-Yves PINOY, conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Dorothée RABITA

ARRET :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

– signé par Madame Nicolette GUILLAUME, Présidente de chambre et par Madame Aurély ARNELL, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

EXPOSÉ DU LITIGE

Par contrat de bail signé le 18 septembre 2013, l’EPIC [Localité 9] habitat OPH a donné en location à Mme [C] [F] un bien situé [Adresse 5] à [Localité 3] (escalier 4, étage 1, porte 43).

L’EPIC [Localité 9] habitat OPH a été informé le 28 décembre 2021 que Mme [C] [F] sous-louait une partie de son logement à des tiers via la plate-forme de location Airbnb. Un constat d’huissier dressé le 29 décembre 2021 à l’initiative de l’EPIC [Localité 9] habitat OPH indique que Mme [C] [F] a sous-loué une chambre via la plate-forme Airbnb depuis 2019 moyennant un prix de 39 euros la nuitée outre 6,50 de frais de service, l’annonce comptant 106 commentaires.

L’EPIC [Localité 9] habitat OPH lui a fait délivrer le 4 février 2022 une sommation de cesser de tout acte de sous-location et de communiquer ses relevés Airbnb.

Saisi par l’EPIC Paris habitat OPH par acte d’huissier de justice délivré le 15 février 2022, par jugement contradictoire rendu le 25 novembre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a :

– débouté l’EPIC [Localité 9] habitat OPH de sa demande de résiliation du bail ;

– constaté que la demande en paiement des fruits civils au titre des sous-locations formée à l’encontre de Mme [C] [F] et de la société Airbnb Ireland unlimited compagny est sans objet du fait du paiement extinctif effectué par Mme [C] [F] ;

– débouté l’EPIC [Localité 9] habitat OPH de sa demande en paiement des fruits civils au titre des frais de service formée à l’encontre de la société Airbnb Ireland unlimited compagny ;

– condamné Mme [C] [F] aux dépens de l’instance ;

– débouté l’EPIC [Localité 9] habitat OPH et la société Airbnb Ireland unlimited compagny de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– rappelé que l’exécution provisoire est de droit.

Par déclaration reçue au greffe le 13 janvier 2023, l’EPIC [Localité 9] habitat OPH a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions déposées le 5 juillet 2024 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, l’EPIC [Localité 9] habitat OPH demande à la cour de :

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il :

– le déboute de sa demande de résiliation de bail ;

– le déboute de sa demande en paiement des fruits civils au titre des frais de service formée à l’encontre de la société Airbnb Ireland unlimited ;

– condamne Mme [C] [F] aux dépens de l’instance ;

– le déboute de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

statuant à nouveau,

– débouter Mme [C] [F] et la société Airbnb Ireland unlimited de leurs demandes, fins et conclusions ;

– prononcer la résiliation du contrat de location le liant à Mme [C] [F] pour sous-location illicite ;

– ordonner l’expulsion de Mme [C] [F], ainsi que celle de tous occupants de son chef des lieux loués [Adresse 5], [Localité 3], avec l’assistance d’un serrurier et d’un représentant des forces de l’ordre si besoin est, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ;

– ordonner la suppression du délai de deux mois suivant la délivrance du commandement de quitter les lieux ;

– ordonner la séquestration des objets mobiliers pouvant se trouver dans les lieux dans tel garde meuble du choix du requérant et ce, en garantie des loyers et charges et indemnité d’occupation dus, aux frais, risques et périls des défendeurs ;

– condamner Mme [C] [F] à lui payer une indemnité d’occupation au moins égale au montant du loyer qui aurait été dû si le bail s’était poursuivi, majoré des charges et taxes à compter de la résiliation du bail et ce jusqu’à la libération complète et effective des lieux litigieux, en ce compris la remise des clefs ;

– condamner la société Airbnb Ireland unlimited à lui payer la somme de 1 956,70 euros ;

– condamner in solidum Mme [C] [F] et la société Airbnb Ireland unlimited à lui verser la somme de 1 200 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance ;

– condamner in solidum Mme [C] [F] et la société Airbnb Ireland unlimited aux entiers dépens de première instance, dont distraction au profit de la Selas LGH & associés, en la personne de Maître Catherine Hennequin, en applications des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

– condamner in solidum Mme [C] [F] et la société airbnb Ireland unlimited à lui verser la somme de 1 800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel ;

– condamner in solidum Mme [C] [F] et la société Airbnb Ireland unlimited aux entiers dépens de l’instance d’appel, dont distraction au profit de la Selas LGH & associés, en la personne de Maître Catherine Hennequin, en applications des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées le 25 juin 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, Mme [C] [F] demande à la cour de :

à titre principal,

– confirmer dans toutes ses dispositions le jugement du 25 novembre 2022 ;

à titre subsidiaire,

– lui accorder un délai de deux ans pour quitter les lieux ;

– débouter l’EPIC [Localité 9] habitat OPH de sa demande présentée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– débouter l’EPIC [Localité 9] habitat OPH de sa demande présentée au titre des dépens.

Dans ses dernières conclusions déposées le 23 juillet 2024 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, la société Airbnb Ireland unlimited demande à la cour de :

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il :

– déboute l’EPIC [Localité 9] habitat OPH de sa demande en paiement des fruits civils au titre des frais de service formée à son encontre ;

– déboute l’EPIC [Localité 9] habitat OPH de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il :

– la déboute de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

statuant à nouveau,

– condamner l’EPIC [Localité 9] habitat OPH à lui verser la somme de 1 200 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance ;

en tout état de cause :

– débouter toutes demandes contraires au présent dispositif ;

– condamner l’EPIC [Localité 9] habitat OPH à lui verser la somme de 1 800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d’appel ;

– condamner l’EPIC [Localité 9] habitat OPH aux entiers dépens de l’instance d’appel, dont distraction au profit de la Selarl Lexavoue Paris Versailles, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1 – Sur la résiliation et la gravité du manquement imputé à la locataire

Il est établi que Mme [C] [F] a loué 279 nuits pour un revenu de 9 613,57 euros par l’intermédiaire de la société Airbnb une chambre dans son appartement situé [Adresse 5] à[Localité 3]e [Adresse 5] à [Localité 3] (pièce 7 du bailleur) entre le 9 janvier 2019 et le 2 mai 2022 (réservation du 2 avril 2022) et qu’une sommation de cesser tout acte de sous-location lui avait été délivrée le 4 février 2022.

Selon l’article 1103 du code civil : ‘les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits’.

Il est constant que le bail signé entre l’EPIC [Localité 9] habitat OPH et Mme [C] [F] porte sur un logement conventionné par l’Etat. Le paragraphe 3 du premier article des conditions générales du contrat de location intitulé ‘objet et conditions de la location’ interdit la sous-location dans les termes qui suivent : ‘ ce contrat de location est consenti au Preneur à l’exclusion de toutes autres personnes. Il en résulte qu’il ne pourra, sous peine de résiliation du contrat, sous-louer, céder, échanger ou transférer son droit au présent contrat.’

Par ailleurs, l’article 8 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à l’amélioration des rapports locatifs précise : « Le locataire ne peut ni céder le contrat de location, ni sous-louer le logement. »

La demande de résiliation du bail d’un logement conventionné impose l’examen de la faute de la locataire consistant dans le fait de sous-louer régulièrement l’une de ses chambres, au regard des circonstances résultant du régime applicable aux logements conventionnés, de l’interdiction légale de sous-location et d’un changement de destination des locaux susceptible d’être caractérisé par l’utilisation répétée et lucrative d’une partie du logement.

Cette exigence particulière résulte des dispositions des articles L.411-1 et suivants, R.441-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution qui déterminent les modalités de gestion et les conditions d’octroi de logements moyennant des loyers inférieurs aux prix du marché privé. Ces logements sont destinés aux personnes et aux familles de ressources modestes (L.411-1 du code de la construction et de l’habitation).

De fait, l’article L.442-3-5 du code de la construction et de l’habitation dispose : « Dans les logements mentionnés au premier alinéa de l’article L. 441-1, le locataire doit occuper les locaux loués au moins huit mois par an, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. Il est interdit au locataire de sous-louer son logement, meublé ou non, en dehors des cas mentionnés à l’article L. 442-8-1 du présent code, de céder son bail et de procéder contractuellement avec un tiers à un échange de son logement sauf dans le cas prévu à l’article 9 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée. En cas de non-respect des deux premiers alinéas du présent article, le bailleur peut saisir le juge aux fins de résiliation du bail »,

et l’article L.442-8 du même code dispose : « Dans tous les immeubles destinés à la location et financés au moyen de crédits prévus par le livre III, il est interdit de louer en meublé ou de sous-louer un logement, meublé ou non, sous quelque forme que ce soit, sous peine d’une amende de 9 000 €. Le premier alinéa n’est pas applicable aux logements-foyers mentionnés à l’article L. 633-1. » (souligné par la cour)

Dans le cas d’espèce, la violation répétée à la fois du contrat et des dispositions légales est d’autant plus grave et caractérisée que Mme [C] [F] a persisté à sous-louer une chambre de son appartement pendant plusieurs semaines au-delà de la sommation qui lui avait intimé de ne pas le faire.

Ces manquements de Mme [C] [F] justifient de prononcer la résiliation du bail, bien qu’elle ait remboursé les loyers perçus, par infirmation du jugement querellé.

A défaut de départ volontaire de la locataire, l’expulsion sera ordonnée, sans astreinte.

Il est en l’espèce conforme à la nature indemnitaire et compensatoire de l’indemnité d’occupation de condamner solidairement la locataire au paiement d’une somme d’un montant égal au loyer contractuel qui aurait été dû si le contrat de bail s’était poursuivi, outre les provisions pour charges, et ce jusqu’à libération effective et complète des lieux.

Il sera également fait droit à la demande du bailleur quant aux meubles.

En vertu de l’article L. 412-3 du code des procédures civiles d’exécution, « le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales, sans que ces occupants aient à justifier d’un titre à l’origine de l’occupation.

Le juge qui ordonne l’expulsion peut accorder les mêmes délais, dans les mêmes conditions ».

Selon l’article L. 412-4 du même code : « la durée des délais prévus à l’article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l’occupant, notamment en ce qui concerne l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d’eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l’occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l’habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés ».

Dans le cas présent, il est constant que Mme [C] [F] paye son loyer régulièrement et a remboursé à son bailleur les fruits perçus de la sous-location illégale. Il sera donc retenu une bonne volonté dans l’exécution de ses obligations. Par ailleurs, il est constant que mère célibataire avec un salaire modeste (cf. sa pièce 10), son relogement sera particulièrement difficile dans le secteur privé, de sorte qu’un délai de trois ans lui est accordé pour quitter les lieux.

Sur les frais d’Airbnb

Aux termes de l’article 548 du code civil : ‘les fruits produits par la chose n’appartiennent au propriétaire qu’à la charge de rembourser les frais des labours, travaux et semences faits par des tiers et dont la valeur est estimée à la date du remboursement.’

Aux termes de l’article 546 du même code : ‘Les fruits produits par la chose n’appartiennent au propriétaire qu’à la charge de rembourser les frais des labours, travaux et semences faits par des tiers et dont la valeur est estimée à la date du remboursement.’

Les commissions perçues par la société Airbnb, appelées ‘frais de service’, n’étaient pas produits par le bien immobilier appartenant à l’EPIC [Localité 9] habitat OPH au sens de l’article 546 du code civil, mais étaient la contrepartie du droit pour les voyageurs d’utiliser son site Internet regroupant des annonces de locations saisonnières.

Le fait que ces frais représentaient un pourcentage des sous-loyers payés ne constituait qu’une modalité de calcul desdites commissions, et ne signifie pas qu’ils provenaient de la mise en location du bien.

Enfin, ces commissions s’analysent en des impenses utiles à la perception des sous-loyers et ne doivent donc pas être attribués au propriétaire du bien, conformément aux dispositions de l’article 548 du code civil.

Ces frais ne pouvant être assimilés à des fruits civils, le premier juge doit donc être confirmé sur ce point.

Partie principalement perdante, Mme [C] [F] sera condamnée aux dépens de première instance, par infirmation, et d’appel.

L’équité ne justifie aucune condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 25 novembre 2022 en ce qu’il a débouté l’EPIC [Localité 9] habitat OPH de ses demandes de résiliation du bail et d’expulsion et en ce qu’il a jugé sur les dépens, et le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Prononce la résiliation du contrat de location liant l’EPIC [Localité 9] habitat OPH à Mme [C] [F] portant sur le bien situé [Adresse 5] à [Localité 3] (escalier 4, étage 1, porte 43),

Ordonne, à défaut de départ volontaire, l’expulsion de Mme [C] [F], ainsi que celle de tous occupants de son chef des lieux loués [Adresse 5], [Localité 3], avec l’assistance d’un serrurier et d’un représentant des forces de l’ordre si besoin est,

Accorde à Mme [C] [F] un délai de trois ans pour quitter les lieux,

Ordonne la séquestration des objets mobiliers pouvant se trouver dans les lieux dans tel garde meuble du choix du requérant et ce, en garantie des loyers et charges et indemnité d’occupation dus, aux frais, risques et périls des défendeurs,

Condamne Mme [C] [F] à payer à l’EPIC [Localité 9] habitat OPH une indemnité d’occupation égale au montant du loyer qui aurait été dû,

Y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

Rejette toute autre demande,

Dit que Mme [C] [F] supportera la charge des dépens de première instance et d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile par les avocats qui en ont fait la demande.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x