Clarification des obligations de cotisation en matière d’indemnités transactionnelles liées à la rupture de contrat de travail

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Clarification des obligations de cotisation en matière d’indemnités transactionnelles liées à la rupture de contrat de travail

Contrôle de l’URSSAF PACA

L’ASSOCIATION [6] a été soumise à un contrôle de l’URSSAF PACA concernant l’application de la législation de sécurité sociale pour la période du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019. À l’issue de ce contrôle, une lettre d’observations a été envoyée le 12 avril 2021, détaillant plusieurs chefs de redressement.

Chefs de redressement

Les chefs de redressement incluent des montants contestés et non contestés, tels que le forfait social, la CSG/CRDS sur les indemnités de rupture conventionnelle, et des cotisations sur des indemnités de licenciement. Au total, l’URSSAF a mis en demeure l’ASSOCIATION pour un montant de 115 041 euros, comprenant des cotisations dues, des majorations de redressement et des majorations de retard.

Contestations de l’ASSOCIATION

Le 28 mars 2022, l’ASSOCIATION a contesté plusieurs chefs de redressement auprès de la commission de recours amiable, notamment ceux relatifs aux indemnités de licenciement et aux transactions suite à des ruptures conventionnelles. La commission a rejeté cette contestation par décision du 27 juillet 2022.

Procédure judiciaire

L’ASSOCIATION a ensuite saisi le tribunal judiciaire de Marseille le 4 octobre 2022 pour contester la décision de la commission. L’affaire a été mise en délibéré après une audience prévue pour le 26 juin 2024.

Demandes de l’ASSOCIATION et de l’URSSAF

L’ASSOCIATION demande l’annulation de la mise en demeure et une indemnisation de 3 000 euros, tandis que l’URSSAF demande le rejet des demandes de l’ASSOCIATION et la confirmation des chefs de redressement contestés.

Examen des chefs de redressement

Le tribunal a examiné les chefs de redressement n° 5, 10 et 11, se concentrant sur la nature des indemnités versées et leur assujettissement aux cotisations sociales. L’ASSOCIATION n’a pas réussi à prouver que les indemnités étaient exclusivement indemnitaires.

Décision du tribunal

Le tribunal a déclaré le recours de l’ASSOCIATION recevable mais mal fondé, confirmant les chefs de redressement et condamnant l’ASSOCIATION à payer 10 244 euros de majorations de retard. De plus, l’ASSOCIATION a été condamnée à verser 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l’instance.

Quelles sont les conséquences juridiques du contrôle de l’URSSAF PACA sur l’ASSOCIATION [6] ?

Le contrôle de l’URSSAF PACA a conduit à un redressement de l’ASSOCIATION [6] pour un montant total de 115 041 euros, comprenant des cotisations dues, des majorations de redressement et des majorations de retard.

Selon l’article L242-1 du Code de la sécurité sociale, toute somme versée ou tout avantage accordé aux travailleurs en contrepartie ou à l’occasion du travail doit être soumis à cotisations.

Les chefs de redressement identifiés, tels que les cotisations sur les indemnités de rupture conventionnelle et les avantages en nature, soulèvent des questions sur la nature des sommes versées et leur assujettissement aux cotisations sociales.

L’ASSOCIATION a contesté certains chefs de redressement, mais la commission de recours amiable a rejeté sa contestation, confirmant ainsi le bien-fondé des redressements.

Le Tribunal a ensuite été saisi pour examiner la légalité de cette décision, ce qui a conduit à une analyse approfondie des éléments de preuve fournis par l’ASSOCIATION.

Quels sont les critères d’assujettissement des indemnités transactionnelles aux cotisations sociales ?

L’assujettissement des indemnités transactionnelles aux cotisations sociales est régi par l’article L242-1 du Code de la sécurité sociale, qui stipule que toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie de leur travail sont soumises à cotisations.

La jurisprudence, notamment les arrêts de la Cour de cassation, a précisé que les indemnités transactionnelles sont soumises aux cotisations sociales, sauf si l’employeur prouve qu’elles visent à indemniser un préjudice.

Il incombe à l’employeur de justifier la nature des sommes versées, en produisant des documents probants.

Dans le cas de l’ASSOCIATION [6], le Tribunal a constaté qu’aucun protocole d’accord transactionnel n’avait été produit, ce qui a empêché d’établir la nature indemnitaire des sommes versées.

Ainsi, les indemnités ont été confirmées comme assujetties aux cotisations sociales.

Comment le Tribunal a-t-il évalué la validité des transactions conclues par l’ASSOCIATION [6] ?

Le Tribunal a évalué la validité des transactions en se basant sur les articles L.242-1 et L.136-1 du Code de la sécurité sociale, qui stipulent que les indemnités versées lors de la rupture du contrat de travail sont soumises à cotisations, sauf preuve du caractère indemnitaire.

Il a également rappelé que les transactions doivent être conclues après l’homologation de la rupture conventionnelle par l’autorité administrative et doivent régler un différend relatif à l’exécution du contrat de travail.

L’ASSOCIATION [6] n’a pas produit les protocoles transactionnels ni justifié de la date d’homologation des ruptures conventionnelles, ce qui a conduit le Tribunal à conclure que les transactions n’étaient pas valables.

En conséquence, les indemnités versées ont été considérées comme des rémunérations soumises à cotisations.

Quelles sont les implications des décisions du Tribunal pour l’ASSOCIATION [6] ?

Les décisions du Tribunal ont des implications significatives pour l’ASSOCIATION [6], notamment la confirmation des chefs de redressement n° 5, 10 et 11, et l’obligation de payer 10 244 euros au titre des majorations de retard.

L’ASSOCIATION a également été condamnée à verser 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, ce qui représente une charge financière supplémentaire.

Le Tribunal a souligné que l’ASSOCIATION avait échoué à prouver le caractère indemnitaire des sommes versées, ce qui a conduit à la confirmation des redressements par l’URSSAF PACA.

Enfin, le jugement rappelle que tout appel doit être formé dans un délai d’un mois, ce qui impose une contrainte temporelle pour l’ASSOCIATION si elle souhaite contester la décision.


 

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

14 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Marseille
RG
22/02624
REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 2]

JUGEMENT N°24/04460 du 14 Novembre 2024

Numéro de recours: N° RG 22/02624 – N° Portalis DBW3-W-B7G-2RNV

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
Association [6]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me GUILLAUME BREDON, avocat au barreau de PARIS

c/ DEFENDERESSE
Organisme URSSAF PACA
[Adresse 7]
[Localité 3]
représentée par madame [C] [F], Inspecteur de l’organisme, munie d’un pouvoir régulier,

DÉBATS : À l’audience publique du 26 Juin 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : DEPARIS Eric, Vice-Président

Assesseurs : PFISTER Laurent
MARTOS Francis

L’agent du greffe lors des débats : DESCOMBAS Pierre,

L’agent du greffe lors du délibéré : COULOMB Maryse,

À l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 14 Novembre 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

EXPOSE DES FAITS

L’ASSOCIATION [6] a fait l’objet d’un contrôle de l’Union de Recouvrement des cotisations de Sécurité Sociale et d’Allocations Familiales de Provence-Alpes-Côte d’Azur (ci-après URSSAF PACA) relatif à l’application de la législation de sécurité sociale sur la période du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019.
Suite à ce contrôle, une lettre d’observations datée du 12 avril 2021 a été adressée à l’ASSOCIATION [6], faisant état des chefs de redressement suivant :

Chef de redressement n° 1 : forfait social-assiette-ruptures conventionnelles : 1 888 euros contesté, ramené à 1 058 euros ;Chef de redressement n° 2 : CSG /CRDS indemnités liées à la rupture conventionnelle: dépassement indemnité de licenciement : 1 384 euros, contesté ramené à 103 euros ;Chef de redressement n° 3 : rappel de salaire suite à décision de justice assiette plafonnée YAHIA : 3 130 euros non contesté ;Chef de redressement n° 4 : CSG/ CRDS : rupture du contrat de travail-limites d’exonération : indemnités pour licenciement irrégulier : 1 783 euros et majoration de redressement pour 178 euros non contesté ;Chef de redressement n° 5 : cotisations-rupture non forcée du contrat de travail : assujettissement indemnité transactionnelle suite démission : 434 euros contesté, maintenu ;Chef de redressement n° 6 : indemnités de rupture forcée intégralement soumises à cotisations (préavis, congés payés, non concurrence, congé reclassement…) : 2 283 euros contesté et annulé ; Chef de redressement n° 7 : indemnités de rupture forcée intégralement soumises à cotisations (préavis non payé suite licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle) : 4 474 euros non contesté ;Chef de redressement n° 8 : CSG/CRDS : indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail : crédit : – 91 euros non contesté ;Chef de redressement n° 9 : cotisations-rupture conventionnelle du contrat de travail-condition relative à l’âge du salarié : crédit : – 1 999 euros non contesté ;Chef de redressement n° 10 : forfait social-assiette-transactions suite rupture conventionnelles : 2200 euros contesté, maintenu ;Chef de redressement n° 11 : CSG/CRDS indemnités liées à la rupture conventionnelle : transactions suite ruptures conventionnelles : 1 067 euros contesté maintenu ;Chef de redressement n° 12 : gratifications versées à des stagiaires : stagiaires de la formation professionnelle continue : 2 001 euros non contesté ;Chef de redressement n° 13 : prise en charge par l’employeur de contraventions : 6 216 euros non contesté ;Chef de redressement n° 14 : avantage en nature véhicule : principe et évaluation-hors cas des constructeurs et concessionnaires : 29 846 euros, majoration de redressement : 2 985 euros non contesté ;Chef de redressement n° 15 : avantage en nature logement : évaluation cas général : 9 891euros majoration de redressement : 989 euros contesté, ramené en cotisations à 8 716 euros et en majoration de redressement à 871 euros ;Chef de redressement n° 16 : avantage en espèces : prêts accordés aux salariés selon des taux préférentiels (hors établissements de crédit) : 829 euros contesté maintenu ;Chef de redressement n° 17 : réduction générale des cotisations-règles générales : 39 428 euros : non contesté ;Chef de redressement n°18 : avantage en nature : cadeaux en nature offerts par l’employeur : 460 euros non contesté.
A l’issue de la période contradictoire, l’URSSAF PACA a délivré une mise en demeure en date du 31 janvier 2022 à l’encontre de l’ASSOCIATION [6] pour un montant total de 115 041 euros dont 99 656 euros de cotisations dues, 4035 euros de majorations de redressement et 11 350 euros de majorations de retard.

Par courrier en date du 28 mars 2022, l’ASSOCIATION [6] a saisi la commission de recours amiable d’une contestation à l’encontre :

du chef de redressement n° 2 CSG /CRDS indemnités liées à la rupture conventionnelle dépassement indemnité de licenciement : 1 384 euros, contesté ramené à 103 euros, du chef de redressement n° 5 : cotisations-rupture non forcée du contrat de travail : assujettissement indemnité transactionnelle suite démission : 434 euros contesté, maintenu, du Chef de redressement n° 10 : forfait social-assiette-transactions suite rupture conventionnelles : 2 200 euros contesté, maintenu, et du Chef de redressement n° 11 : CSG/CRDS indemnités liées à la rupture conventionnelle : transactions suite ruptures conventionnelles : 1 067 euros contesté maintenu.
Par décision du 27 juillet 2022, la commission de recours amiable a rejeté la contestation de l’ASSOCIATION [6].

Par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 04 octobre 2022, l’ASSOCIATION [6] a saisi le pole social du tribunal judiciaire de Marseille d’une requête en contestation à l’encontre de la décision de rejet de la commission de recours amiable.

Après une phase de mise en état, l’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 26 juin 2024.

L’ASSOCIATION [6], représentée par son conseil reprenant oralement ses écritures, demande au Tribunal de :

Annuler la mise en demeure délivrée à son encontre par l’URSSAF PACA ;Condamner l’URSSAF PACA à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
L’URSSAF PACA, représentée par un inspecteur juridique, demande au tribunal de :

Débouter l’ASSOCIATION [6] de l’ensemble de ses demandes ;Constater que l’ASSOCIATION [6] ne conteste que le chef de redressement n°5, 10 et 11 de la lettre d’observations ;Confirmer le bien-fondé de la décision rendue par la commission de recours amiable le 27 juillet 2022 en ce qu’elle a rejeté les demandes de la société et confirmé le bien fondé des chefs de redressement contestés ;Constater que l’ASSOCIATION [6] a procédé au paiement du principal (115 041 euros de cotisations) ; Condamner l’ASSOCIATION [6] à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

L’affaire a été mise en délibéré au 14 novembre 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’étendue du litige,

Le Tribunal relève que l’ASSOCIATION [6] conteste aux termes de sa requête introductive d’instance exclusivement les chefs de redressement
n° 5 : cotisations-rupture non forcée du contrat de travail : assujettissement indemnité transactionnelle suite démission, n° 10 : forfait social-assiette-transactions suite rupture conventionnelles et n° 11 : CSG/CRDS indemnités liées à la rupture conventionnelle : transactions suite ruptures conventionnelles.

Le Tribunal prend également acte que l’ASSOCIATION [6] s’est acquittée du règlement du principal, soit la somme de 115 041 euros en cotisations et que sa contestation porte seulement sur le paiement des majorations de retard afférentes à ces chefs de redressement, soit la somme de 10 244 euros.

Il ne sera donc statué que sur les demandes de la cotisante afférente à ces 3 chefs de redressement.

Sur le chef de redressement n° 5 : cotisations-rupture non forcée du contrat de travail : assujettissement indemnité transactionnelle suite démission,

Aux termes de l’article L242-1 alinéa 1 du Code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable en l’espèce, toute somme versée ou tout avantage accordé aux travailleurs en contrepartie ou à l’occasion du travail doit être soumis à cotisations notamment les salaires, les indemnités, les primes, gratifications ou tous autres avantages en argent ou en nature.

Aux termes de l’article L242-1 7° du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable à la présente espèce, et des articles 80 ter et 80 duodecies et du Code général des impôts, les indemnités liées à la rupture du contrat de travail sont exonérées de cotisations sociales jusqu’à deux fois le montant du plafond annuel de sécurité sociale.

Toutefois, par plusieurs arrêts rendus en 2018 (15 mars 2018 n°17-10.325 ; Cass. soc., 21 juin 2018 n°17-19.432 et 12 juillet 2018 n°17-23.345) la chambre sociale de la Cour de cassation a précisé que les indemnités transactionnelles versées lors de la rupture du contrat de travail sont soumises aux cotisations de sécurité sociale, à moins que l’employeur ne rapporte la preuve qu’elles concourent, pour tout ou partie de leur montant, à l’indemnisation d’un préjudice. Cette jurisprudence a depuis été confirmée.

Cependant, dès lors que l’indemnité transactionnelle comprend, pour partie, des sommes destinées à mettre fin à une revendication salariale, la totalité de l’indemnité présente un caractère salarial et doit être soumise à cotisations.

En outre, l’indemnité destinée à compenser la perte de rémunération éventuellement subie par un salarié présente un caractère salarial et doit être soumise à cotisations.
Il incombe à l’employeur de rapporter la preuve des conditions exonératoires.Ce dernier doit ainsi être en mesure de justifier par des documents incontestables la nature des sommes litigieuses au regard de la règle d’assiette.

Le juge du fond doit quant à lui apprécier la valeur des éléments de preuve produits par l’employeur, sans être tenu par la qualification donnée par les parties à l’indemnité en cause.

En l’espèce, l’ASSOCIATION [6] expose avoir conclu avec l’une de ses salariées, madame [Z] [S], ayant démissionné, un protocole d’accord transactionnel afin de mettre un terme à un litige prud’hommal et s’être accordée avec cette dernière sur l’octroi d’une somme de 800 euros en réparation d’un préjudice moral.

La cotisante indique que sa salariée l’a, pendant une année, interpellée pour avoir des explications concernant son solde de tout compte et qu’en l’absence de réponse de sa part, elle aurait saisi le juge prud’hommal pour obtenir réparation du préjudice moral causé par son silence gardé.

La cotisante soutient que ladite indemnité, octroyée en réparation d’un préjudice moral et ne s’analysant pas comme un salaire, doit être exonérée de cotisations sociales en application de la jurisprudence précitée.

S’il relève de l’office du juge d’apprécier en application de l’article 12 du code de procédure civile la véritable nature juridique d’une indemnité transactionnelle sans être tenu par les termes des parties pour se prononcer sur son éventuelle soumission aux cotisations sociales, il appartient cependant à l’employeur de rapporter la preuve du caractère exclusivement indemnitaire de la somme versée en exécution d’une transaction en versant aux débats toutes pièces utiles.

Or, l’ASSOCIATION [6] ne produit pas le protocole d’accord transactionnel qu’elle indique avoir conclu avec sa salariée, madame [Z] [S] de telle sorte que le Tribunal n’est pas en mesure de se prononcer sur la nature de l’indemnité versée en exécution de la transaction. L’employeur ne verse pas non plus aux débats la requête introductive d’instance de sa salariée devant le conseil de prud’hommes, empêchant ainsi le tribunal de prendre connaissance des demandes de madame [S] et donc de savoir si celle-ci entendait obtenir réparation d’un préjudice moral ou si ses réclamations étaient de nature salariale. L’employeur ne justifie pas non plus des réclamations adressées à son encontre par madame [S] alors qu’il prétend pourtant avoir été relancé par cette dernière pendant une année au sujet de son solde de tout compte.

Le Tribunal relève par ailleurs que selon les constatations de l’inspecteur du recouvrement, faisant foi jusqu’à preuve contraire, la salariée a saisi le juge prud’homal en raison d’une contestation de son solde de tout compte, soit pour un différend de nature salariale, et non, comme l’affirme la cotisante, pour obtenir réparation d’un préjudice moral.

Compte tenu de l’ensemble des éléments précédemment exposés, ce chef de redressement sera logiquement confirmé.

Sur le chef de redressement n° 10 : forfait social-assiette-transactions suite rupture conventionnelles,

En application de l’article L.242-1 du code de la sécurité sociale, toutes sommes versées et tous avantages en argent ou en nature alloués aux travailleurs salariés en contrepartie ou à l’occasion du travail sont considérés comme rémunérations et entrent dans l’assiette des cotisations.

Il est de jurisprudence constante que seules peuvent être exclues de l’assiette sociale, les indemnités présentant le caractère de dommages et intérêts.

Les articles L.137-15 et L. 137-16 du code de la sécurité sociale, dans leurs différentes versions applicables au litige, disposent que les rémunérations ou gains assujettis à la CSG et exclus de l’assiette des cotisations de sécurité sociale en application de l’article L.242-1 du code de la sécurité sociales sont soumises au paiement d’un forfait social fixé à 20 %.
Il appartient au juge, saisi d’un différend relatif à l’assujettissement de tout ou partie des sommes versées à titre d’indemnité transactionnelle forfaitaire, de rechercher si cette indemnité comprend des éléments de rémunérations soumis à cotisations dans les conditions prévues par l’article L.242-1 du code de la sécurité sociale, le juge n’étant pas lié par la qualification donnée à cette indemnité par les parties.

Enfin, il y a lieu de rappeler que la Cour de cassation a précisé que les parties ne peuvent conclure une transaction après s’être accordée sur une rupture conventionnelle que si, d’une part, celle-ci intervient postérieurement à l’homologation de la rupture conventionnelle par l’autorité administrative et que si, d’autre part, elle a pour objet de régler un différend relatif non pas à la rupture du contrat de travail mais à son exécution sur des éléments non compris dans la convention de rupture. ( Cass. soc., 26 mars 2014, n° 12-21.136 – Cass. soc., 25 mars 2015, n° 13-23.368 ).

En l’espèce, l’ASSOCIATION [6] expose avoir conclu avec mesdames [I] et [X], à la suite des rupture conventionnelles convenues avec celles-ci, deux transactions ayant eu pour objet de réparer des préjudices moraux subis par ces salariées pendant l’exécution de leur contrat de travail respectif. mesdames [I] et [X] ont ainsi respectivement perçu à titre transactionnel les sommes de 6 000 euros et 5 000 euros.

L’ASSOCIATION [6] rapporte que madame [I] s’est plainte d’avoir été déstabilisée psychologiquement et d’avoir éprouvé une importante fatigue physique et morale ayant justifié des arrêts de travail. Madame [X] aurait fait part quant à elle dans des termes comparables d’un épuisement professionnel également à l’origine d’arrêts de travail.

L’ASSOCIATION [6] fait valoir que les indemnités transactionnelles perçues par mesdames [I] et [X] indemnisant un préjudice moral distinct de la rupture du contrat de travail et se rapportant aux conditions d’exécution du contrat de travail n’ont pas à être assujetties au forfait social.

En défense, l’URSSAF PACA soutient que les indemnités transactionnelles perçues par mesdames [I] et [X] à la suite de la rupture conventionnelle de leur contrat de travail constituent un complément d’indemnité, de nature salariale et non indemnitaire et à ce titre doivent être assujetties au forfait social.

Le Tribunal rappelle qu’il incombe aux parties en application de l’article 9 du code de procédure civile de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de leurs prétentions.

En l’espèce, l’ASSOCIATION [6] n’a pas cru bon de produire les protocoles transactionnels litigieux ni même de verser aux débats le moindre élément attestant d’une contestation des salariées concernées relativement à leur condition de travail et ayant motivé la conclusion des transactions litigieuses.

Mais encore, la cotisante ne justifie même pas que les transactions ont été valablement conclues, c’est-à-dire postérieurement à l’homologation par l’administration des deux ruptures conventionnelles. Aucune pièce ou même information n’est en effet fournie par la cotisante quant à la date de signature des transactions et de l’homologation des ruptures conventionnelles par l’administration.

Concernant le contenu des transactions litigieuses, le Tribunal ne peut en définitive se fonder que sur les seuls éléments d’information rapportées par l’URSSAF PACA dans ses écritures et par la commission de recours amiable dans sa décision de rejet du 27 juillet 2022.

L’URSSAF PACA et sa commission de recours amiable exposent, sans être contredites par la cotisante, que les transactions présentent l’indemnité transactionnelle comme une somme « globale forfaitaire et définitive » « qui couvre l’ensemble des préjudices soulevés » par les salariées au titre de leurs « conditions de travail et de l’exécution du contrat de travail et plus généralement de l’ensemble des préjudices susceptibles d’être invoqués ». Il va sans dire que de tels termes, aussi généraux, sont dépourvus de tout contenu précis et ne valent assurément pas preuve ni de la nature exclusivement indemnitaire des sommes convenue entre la cotisante et ses deux salariées ni même que les sommes litigieuses visent à réparer un préjudice distinct de la rupture du contrat de travail.

Ce chef de redressement sera donc confirmé.

Sur le chef de redressement n°11 : CSG/CRDS indemnités liées à la rupture conventionnelle : transaction suite rupture conventionnelles,

En application des articles L 136-1 du code de la sécurité sociale et L136-1-1 III 5° du code de la sécurité sociale, l’indemnité de rupture conventionnelle est assujettie à la Contribution Sociale Généralisée (ci-après CSG) et à la contribution au remboursement de la dette sociale (ci-après CRDS) pour la fraction qui excède le plus faible des deux seuils suivants, à savoir :

Le montant spécifique d’indemnité prévu pour ce motif de rupture ou, en l’absence d’un tel montant, le montant de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ;Le montant non soumis aux cotisations sociales.
S’agissant de l’indemnité transactionnelle, il résulte des dispositions de l’article L.242-1 du code de la sécurité sociale que les sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail sont comprises dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales, à moins que l’employeur ne rapporte la preuve qu’elles concourent à l’indemnisation d’un préjudice.

Le juge est tenu de rechercher si la somme versée dans le cadre d’une transaction et qualifiée par les parties d’indemnité transactionnelle et définitive n’englobe pas, nonobstant la qualification retenue par les parties, des éléments de rémunération légaux ou conventionnels demeurant soumis à cotisations.

Par ailleurs, il y a lieu de rappeler qu’un employeur et un salarié qui ont conclu une convention de rupture ne peuvent valablement conclure une transaction, d’une part, que si celle-ci intervient postérieurement à l’homologation de la rupture conventionnelle par l’autorité administrative, d’autre part, que si elle a pour objet de régler un différend relatif non pas à la rupture du contrat de travail mais à son exécution sur des éléments non compris dans la convention de rupture.

En l’espèce, l’URSSAF PACA a estimé qu’il convenait de soumettre à la CSG et à la CRDS l’indemnité transactionnelle perçue par mesdames [I] et [X] en exécution de la transaction conclue postérieurement la rupture conventionnelle de leur contrat de travail.

Comme indiqué précédemment, le Tribunal n’est pas en mesure d’apprécier ni la validité des transactions ni la nature des indemnités transactionnelles octroyées aux salariées concernées, faute pour l’employeur de produire lesdites transactions et de justifier de la date d’homologation des ruptures conventionnelles intervenues entre la cotisante et mesdames [I] et [X]. En tout état de cause, il s’évince des indications fournies par l’URSSAF PACA et sa commission de recours amiable, non contestées par la cotisante que l’indemnité transactionnelle consentie aux intéressées est définie aux termes des transactions litigieuses de manière fort imprécise puisqu’elle aurait vocation à réparer « l’ensemble des préjudices susceptibles d’être invoqués ».

Au regard des éléments précités, force est de constater que l’ASSOCIATION [6] échoue à rapporter la preuve, qui lui incombe, du caractère purement indemnitaire des indemnités transactionnelles consenties à mesdames [I] et [X] et que celles-ci réparent un préjudice distinct de la rupture du contrat de travail de ces deux salariés.

C’est donc à bon droit que l’URSSAF PACA a assujetti à la CSG et à la CRDS les indemnités transactionnelles consenties à mesdames [I] et [X] en exécution des transactions postérieures à la rupture conventionnelle de leur contrat de travail.

En conséquence, ce chef de redressement sera confirmé.

Sur les demandes accessoires,

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, l’ASSOCIATION [6], qui succombe à l’instance, sera condamnée à en supporter les dépens.

Il n’apparaît pas inéquitable de condamner l’ASSOCIATION [6] au paiement d’une somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille, statuant par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe,

DECLARE recevable en la forme mais mal fondé le recours de l’ASSOCIATION [6] ;

DEBOUTE l’ASSOCIATION [6] de l’ensemble de ses demandes ;

VALIDE les chefs de redressements n° 5, 10 et 11 visés dans la lettre d’observation en date du 12 avril 2021 ;

CONDAMNE l’ASSOCIATION [6] à payer à l’Union de Recouvrement des cotisations de Sécurité Sociale et d’Allocations Familiales de Provence-Alpes-Côte d’Azur la somme de 10 244 euros au titre des majorations de retard afférentes aux chefs de redressement n° 5, 10 et 11 ;

RAPPELLE que le présent jugement se substitue aux décisions prises par l’organisme et la commission de recours amiable ;

CONDAMNE l’ASSOCIATION [6] au paiement à l’Union de Recouvrement des cotisations de Sécurité Sociale et d’Allocations Familiales de Provence-Alpes-Côte d’Azur d’une somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE l’ASSOCIATION [6] aux dépens de l’instance ;

DIT que tout appel de la présente décision doit, à peine de forclusion, être formé dans le délai d’un mois à compter de la réception de sa notification conformément aux dispositions de l’article 538 du Code de procédure civile ;

L’AGENT DE GREFFE LE PRESIDENT


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