Contexte de l’affaireLa société [4], anciennement connue sous le nom de [5], a fait appel d’un jugement rendu le 7 janvier 2020 par le tribunal judiciaire de Rouen. Ce jugement avait fixé à 10 % le taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de M. [P] [I], un salarié atteint d’une maladie professionnelle, spécifiquement une tendinopathie de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche, reconnue le 11 juin 2016. Décisions antérieuresLe 14 juin 2022, la cour a ordonné la communication d’un rapport d’évaluation de l’IPP de M. [I] au docteur [C] et a radié l’affaire de son rôle, avec possibilité de réinscription une fois que l’affaire serait prête à être jugée. Réinscription de l’affaireLe 6 juin 2024, l’affaire a été réenrôlée à la demande de la société, qui a présenté des conclusions le 10 juin. La société a demandé à la cour d’infirmer le jugement précédent, arguant que l’ensemble des mouvements de l’épaule n’avait pas été correctement évalué et que le taux d’IPP devrait être réduit à 6 %. En alternative, elle a demandé une expertise médicale judiciaire. Position de la caisse d’assurance maladiePar des conclusions du 30 mars 2022, la caisse a demandé à la cour de débouter la société de ses demandes, tant sur l’injonction de communication du rapport médical que sur l’inopposabilité du taux d’IPP. Elle a également demandé la confirmation du jugement initial et a sollicité une décision sur les dépens. Éléments d’évaluation de l’IPPLa cour a rappelé que le taux d’incapacité permanente est déterminé selon divers critères, y compris la nature de l’infirmité et l’état général de la victime. Les mesures des mouvements de l’épaule ont été examinées, et le médecin-conseil de la caisse a évalué un taux d’IPP de 12 %, tandis que le médecin désigné par les premiers juges a conclu à un taux de 10 %. Conclusion de la courLa cour a confirmé le taux d’IPP de 10 % retenu par les premiers juges, considérant que la limitation des mouvements était légère. Elle a également rejeté la demande d’expertise médicale de la société, soulignant qu’il n’y avait pas d’éléments pertinents pour soutenir ses prétentions. La société a été condamnée aux dépens d’appel. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 15 NOVEMBRE 2024
DÉCISION DÉFÉRÉE :
19/74
Jugement du POLE SOCIAL DU TJ DE ROUEN du 07 Janvier 2020
APPELANTE :
SAS [4]
[Adresse 6]
[Localité 3]
représentée par Me Frédérique BELLET, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Cruse MASSOSSO BENGA, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE :
CPAM DE L’EURE
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me François LEGENDRE, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de Procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 26 Septembre 2024 sans opposition des parties devant Madame POUGET, Conseillère, magistrat chargé d’instruire l’affaire.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame BIDEAULT, Présidente
Madame ROGER-MINNE, Conseillère
Madame POUGET, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme WERNER, Greffière
DEBATS :
A l’audience publique du 26 septembre 2024, où l’affaire a été mise en délibéré au 15 novembre 2024
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 15 Novembre 2024, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure civile,
signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.
EXPOSÉ DU LITIGE :
La société [4] (la société), précédemment dénommée [5], a interjeté appel d’un jugement du 7 janvier 2020 par lequel le tribunal judiciaire de Rouen a fixé à 10 % le taux d’incapacité permanente partielle de M. [P] [I], son salarié, résultant d’une maladie professionnelle dont celui-ci a été reconnu atteint le 11 juin 2016, à savoir une tendinopathie de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche.
Par arrêt du 14 juin 2022, cette cour a :
ordonné la communication par le greffe au docteur [C] du rapport d’évaluation de l’IPP de M. [I], établi par le médecin conseil de la caisse primaire d’assurance maladie de l’Eure,
ordonné la radiation de l’affaire du rôle de la cour auquel elle pourra être réinscrite une fois celle-ci en état d’être jugée.
Le 6 juin 2024, l’affaire a été réenrôlée à la demande de la société qui par conclusions du 10 juin suivant, soutenues oralement à l’audience, demande à la cour de :
infirmer le jugement,
à titre principal,
juger que l’ensemble des mouvements de l’épaule n’a pas été étudié et que ceux-ci ne sont pas atteints, que son médecin conseil a estimé qu’un taux de 6% pourrait être fixé compte tenu des éléments du dossier médical et des données de l’examen clinique,
ramener à 6 % le taux d’IPP attribué à M. [I] dans les rapports caisse/employeur,
à titre subsidiaire, ordonner une expertise médicale judiciaire confiée à tel expert avec la mission définie dans ses écritures, ou une consultation sur pièces.
renvoyer l’affaire à une audience ultérieure afin qu’il soit débattu du taux d’IPP après dépôt du rapport d’expertise.
Par conclusions du 30 mars 2022, soutenues oralement à l’audience, la caisse demande à la cour de :
à titre principal,
débouter la société de sa demande d’injonction de communiquer le rapport médical d’évaluation,
à titre subsidiaire,
débouter la société de sa demande d’inopposabilité du taux d’IPP,
à titre infiniment subsidiaire,
débouter la société de sa demande d’expertise judiciaire ou d’une consultation médicale sur pièces,
en tout état de cause,
confirmer le jugement,
juger ce que de droit sur les dépens.
A titre liminaire, la cour rappelle qu’il a été précédemment statué sur la demande d’injonction de communiquer le rapport médical d’évaluation du taux d’IPP et constate que la société ne soutient plus l’inopposabilité de la décision fixant ledit taux.
En application de l’article L. 434-2 du code de la sécurité sociale le taux de l’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité.
L’incapacité permanente est appréciée à la date de consolidation de l’état de la victime.
Saisie de la contestation du taux d’incapacité permanente partielle retenu après consolidation, il appartient à la juridiction de se prononcer sur l’ensemble des éléments concourant à la fixation de celui-ci.
Selon le guide barème d’indemnisation des accidents du travail (point 1.1.2), la limitation légère de tous les mouvements du membre non dominant est évaluée entre 8 et 10 %.
Les mesures normales des mouvements sont les suivantes :
– élévation latérale : 170°
– adduction : 20°
– antépulsion : 180°
– rétropulsion : 40°
– rotation interne : 80°
– rotation externe : 60°.
Le médecin-conseil de la caisse qui a retenu un taux d’IPP de 12 %, a indiqué que persistait une raideur douloureuse modérée de l’épaule gauche comme séquelle d’une tendinopathie rompue de la coiffe des rotateurs de l’épaule non dominante. Il a mesuré les amplitudes suivantes :
antépulsion : D 140° ; G 140 °,
abduction : D 140 ° ; G 150 °,
mouvements complexes réalisés difficilement des deux côtés,
pouce sur rachis : D et G niveau sacrum,
force de serrage au dynamo : D 90 ; G 40.
Le docteur [M], désigné par les premiers juges, a considéré que les mouvements étaient possibles de façon identique des deux côtés et faiblement limités et que ceux complexes étaient difficiles des deux côtés. Il a conclu à un taux de 10 % pour une raideur faible de l’épaule gauche.
Le médecin conseil de la société, le docteur [C], rappelle que le barème d’invalidité propose un taux de 8 à 10 % en cas de limitation légère de tous les mouvements de l’épaule non dominante et considère que tous les mouvements n’ont pas été étudiés et que l’on est dans le cadre d’une limitation très légère de certains mouvements.
Toutefois, il résulte des mesures de l’examen ci-dessus rappelés que l’élévation latérale (ou abduction) et l’antépulsion (bras levé vers l’avant du corps) qui sont les principaux mouvements, sont supérieures à 90°, ce qui permet de considérer que la limitation des mouvements est légère et, partant, de confirmer le taux d’IPP de 10 % retenu par les premiers juges.
En l’absence de tout élément pertinent de nature à étayer les prétentions de la société, il n’y a pas lieu d’ordonner une expertise médicale, laquelle ne peut avoir pour objet de suppléer la carence des parties dans l’administration de la preuve.
La société qui succombe est condamnée aux dépens d’appel.
La cour,
Statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Rouen du 7 janvier 2020,
Y ajoutant,
Rejette la demande d’expertise médicale formée par la société [4],
La condamne aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE