La diffusion de l’œuvre musicale sous forme numérique ne satisfait pas à elle seule à l’obligation d’exploitation commerciale de l’œuvre au sens de l’article L. 132-12 du code de propriété intellectuelle qui dispose que « l’éditeur est tenu d’assurer à l’œuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession ». .
En l’occurrence, l’éditeur n’a pas satisfait à l’obligation de diffusion commerciale et a commis une faute contractuelle à ce titre. Il revient légalement à l’éditeur d’assurer la diffusion commerciale de l’œuvre ; la teneur de cette obligation varie selon la nature de l’œuvre. A ce titre, selon le code des usages et bonnes pratiques de l’édition des œuvres musicales du 4 octobre 2017 « l’exploitation permanente et suivie et la diffusion commerciale ne sont pas considérées comme assurées si la seule exploitation réalisée est celle de la diffusion de l’œuvre audiovisuelle pour laquelle l’œuvre musicale a été spécialement créée ». (Article 3.4 « l’exploitation permanente et suivie et la diffusion commerciale de l’œuvre »). Il a été considéré que l’absence d’exploitation permanente et suivie et la diffusion commerciale était suffisamment grave pour justifier à elle seule la résolution du contrat d’édition Pour rappel, aux termes de l’article L. 132-1 du code de la propriété intellectuelle « le contrat d’édition est le contrat par lequel l’auteur d’une œuvre de l’esprit ou ses ayants droit cèdent à des conditions déterminées à une personne appelée éditeur le droit de fabriquer ou de faire fabriquer en nombre des exemplaires de l’œuvre ou de la réaliser ou faire réaliser sous une forme numérique, à charge pour elle d’en assurer la publication et la diffusion. » |
Résumé de l’affaire :
Contexte de l’affaireM. [K] [W] a cédé ses droits d’édition de ses œuvres musicales à la société Regain D’avance Edition par un contrat daté du 14 février 2020. Cette cession a été contestée par M. [K] [W] en raison de la mauvaise exécution du contrat et d’actes de contrefaçon. Assignation en justiceLe 9 août 2022, M. [K] [W] a assigné la société Regain D’avance Edition en résolution du contrat d’édition et en paiement de dommages-intérêts. La société W.T.P.L. a ensuite intervenu dans l’instance le 20 octobre 2022. Demandes de M. [K] [W]Dans ses conclusions du 2 mai 2023, M. [K] [W] a demandé la résolution judiciaire du contrat d’édition, l’arrêt de la reproduction de son œuvre par W.T.P.L., ainsi que des dommages-intérêts pour perte de chance, préjudice de contrefaçon et préjudice moral. Réponse de W.T.P.L.W.T.P.L. a demandé le déboutement de M. [K] [W] de ses demandes et a sollicité une indemnité pour ses frais de justice. Elle a également affirmé avoir respecté ses obligations contractuelles. Arguments de M. [K] [W]M. [K] [W] a soutenu que le contrat ne précisait pas le nombre minimum d’exemplaires pour le premier tirage et que l’éditeur avait manqué à ses obligations de publication et de promotion de l’œuvre. Il a également contesté l’adaptation de son œuvre sans son consentement. Arguments de W.T.P.L.W.T.P.L. a affirmé avoir respecté les délais de publication et a soutenu qu’elle n’avait pas d’obligation de commercialisation des œuvres. Elle a également contesté les allégations de M. [K] [W] concernant l’adaptation de son œuvre. Décision du tribunalLe tribunal a constaté que W.T.P.L. n’avait pas satisfait à son obligation de diffusion commerciale, justifiant ainsi la résolution du contrat d’édition. En revanche, le contrat d’adaptation audiovisuelle n’a pas été résilié. Dommages-intérêtsM. [K] [W] a été débouté de sa demande de dommages-intérêts pour contrefaçon, mais a obtenu une réparation de 2.000 euros pour préjudice moral. ConclusionLe tribunal a prononcé la résolution du contrat d’édition, ordonné à W.T.P.L. de cesser toute reproduction de l’œuvre et de restituer les exemplaires à M. [K] [W]. W.T.P.L. a été condamnée aux dépens. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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Chambre 01
N° RG 22/05137 – N° Portalis DBZS-W-B7G-WIWW
JUGEMENT DU 31 OCTOBRE 2024
DEMANDEUR:
M. [K] [W]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représenté par Me Raphaël EKWALLA-MATHIEU, avocat au barreau de LILLE
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/16263 du 13/01/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de LILLE)
DÉFENDERESSE:
S.A.R.L. W.T.P.L, venant aux droits de la S.A.R.L. REGAIN D’AVANCE ÉDITION,
immatriculée au RCS de LILLE METROPOLE sous le n° 383 851 243 00048,
prise en la personne de son gérant, M. [M] [H]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Vincent PLATEL, avocat au barreau de LILLE
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Président : Marie TERRIER,
Assesseur : Juliette BEUSCHAERT,
Assesseur : Nicolas VERMEULEN,
Greffier : Benjamin LAPLUME,
DÉBATS
Vu l’ordonnance de clôture en date du 08 Novembre 2023.
A l’audience publique du 03 Septembre 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré, les parties ont été avisées que le jugement serait rendu le 31 Octobre 2024.
Vu l’article 804 du Code de procédure civile, Nicolas VERMEULEN, juge préalablement désigné par le Président, entendu en son rapport oral, et qui, ayant entendu la plaidoirie, en a rendu compte au Tribunal.
JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 31 Octobre 2024 par Nicolas VERMEULEN, Juge, pour la présidente empêchée Marie TERRIER, Présidente, assistée de Benjamin LAPLUME, Greffier.
Suivants conventions en date du 14 février 2020 M. [K] [W] a cédé ses droits et a confié l’édition de ses œuvres musicales à la société Regain D’avance Edition, aux droits de laquelle vient W.T.P.L.
Se plaignant de la mauvaise exécution du contrat de cession et d’édition ainsi que d’actes de contrefaçon, par acte de commissaire de justice en date du 09 août 2022, M. [K] [W] a fait assigner la société Regain D’avance Edition en résolution du contrat d’édition et en paiement de dommages-intérêts.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 20 octobre 2022, la société W.T.P.L. est intervenue volontairement à l’instance.
La clôture est intervenue le 08 novembre 2023, suivant ordonnance du même jour, et l’affaire a été fixée à l’audience de plaidoiries du 03 septembre 2024.
Au terme de ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 02 mai 2023, M. [K] [W] demande de :
Prononcer la résolution judiciaire du contrat de cession et d’édition ainsi que du contrat d’adaptation audiovisuelle, le premier étant le support nécessaire, condamner la société W.T.P.L. à cesser toute reproduction ou représentation de l’œuvre et de ses adaptations, et à restituer à M. [W] tous les exemplaires de l’œuvre dont elle dispose ;
Condamner la société W.T.P.L. à verser à M. [W] la somme de 10.000 euros au titre d’une perte de chance d’aboutir au projet qu’il avait préparé en faveur de l’AKF et par la nécessité de reconversion professionnelle ;
La condamner à lui verser la somme de 5.000 euros en réparation du préjudice pour contrefaçon de l’œuvre « […] » intitulée « […] » et « […] » ;
La condamner à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de son préjudice moral ;
Dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire ;
La condamner au paiement d’une somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
La condamner aux dépens.
Au terme de ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 02 mars 2023, la société W.T.P.L. demande de :
Débouter M. [K] [W] de ses demandes ;
Le condamner à lui payer une indemnité de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Le condamner aux dépens ;
Ordonner l’exécution provisoire.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties.
L’affaire a été mise en délibéré au 31 octobre 2024.
Sur les demandes au titre de la résolution des contrats d’édition et de cession du droit d’adaptation
1. Sur le fondement des articles L. 132-10 et L. 132-11 du code de la propriété intellectuelle, M. [K] [W] estime qu’aucune clause de contrat litigieux ne comprend la mention du nombre minimum d’exemplaires constituant le premier tirage de l’œuvre alors qu’un minimum de droits d’auteur n’est pas garanti par l’éditeur.
Il soutient que l’éditeur a publié l’œuvre musicale après un an contrairement aux usages de la profession ; qu’il s’était par ailleurs engagé à réaliser l’illustration de l’œuvre musicale. Il énonce que le délai de quatre mois de publication en ligne des œuvres musicales doit être regardé comme tardif.
Il expose que la clause selon laquelle l’éditeur n’est pas contraint de fabriquer des partitions est en contradiction avec l’esprit et l’ampleur du projet initial de M. [K] [W].
Il prétend que l’éditeur avait l’obligation de procéder à la promotion auprès du public de l’œuvre et verse aux débats le code des usages et bonnes pratiques de l’édition des œuvres musicales.
M. [K] [W] reproche également, à la société W.T.P.L., l’adaptation de son œuvre sans son consentement.
Le demandeur en conclut que les faits sont suffisamment graves pour justifier la résolution judiciaire du contrat.
*
2. En réponse, la société W.T.P.L. énonce qu’elle a régularisé avec M. [K] [W] le 14 février 2020 :
Un contrat de cession et d’édition d’œuvres musicales ;Un contrat de cession du droit d’adaptation audiovisuelle ;
Il précise que l’œuvre musicale a été commercialisée le 26 juin 2020, soit quatre mois plus tard, ce qui est conforme aux usages de la profession, d’autant plus pendant l’état d’urgence sanitaire.
S’agissant de l’œuvre « […] », adaptation française de « […] », un contrat de cession et d’édition a été signé par l’ensemble des parties, et notamment M. [K] [W], le 10 mars 2020. Il soutient que les documents versés aux débats par le requérant sont incomplets et verse aux débats les documents originaux.
La société W.T.P.L. expose qu’elle a pour mission principale la gestion des droits d’auteur et qu’elle n’a pas la charge de la commercialisation des œuvres de M. [K] [W]. Elle estime qu’elle n’avait aucune obligation contractuelle en termes d’enregistrement des œuvres, de leur promotion ou du marketing.
La société W.T.P.L. rappelle que M. [K] [W] a consenti à l’adaptation en français de son œuvre et qu’aucun vice de consentement n’entache la convention litigieuse.
Elle estime que l’absence de mention, dans les contrats litigieux, relative au nombre minimum d’exemplaires constituant le premier tirage de l’œuvre est insuffisante pour justifier la résolution des conventions.
SUR CE
3. Aux termes de l’article L. 132-1 du code de la propriété intellectuelle « le contrat d’édition est le contrat par lequel l’auteur d’une œuvre de l’esprit ou ses ayants droit cèdent à des conditions déterminées à une personne appelée éditeur le droit de fabriquer ou de faire fabriquer en nombre des exemplaires de l’œuvre ou de la réaliser ou faire réaliser sous une forme numérique, à charge pour elle d’en assurer la publication et la diffusion. »
4. En l’espèce, suivant contrat de cession et d’édition d’œuvres musicales en date du 13 janvier 2020, M. [K] [W] à cédé son droit de propriété incorporelle, exclusif et opposable à tous, sur l’œuvre intitulée « […] ([…]) » ou « […] ».
Le contrat litigieux stipule expressément que « le support principal de l’exploitation éditoriale est constitué par le disque produit par l’éditeur et/ou par la mise en ligne des œuvres sur un ou plusieurs services accessibles par réseau numérique de transmission de données avec faculté de téléchargement, notamment Internet. L’édition graphique est donc facultative : elle ne sera assurée que si la demande du public le justifie ou si une demande, assortie de réels débouchés commerciaux, lui est faite en ce sens. » (Article X. 2°)
Ainsi, le contrat d’édition litigieux prévoit que l’œuvre sera réalisée sous forme numérique comme le permet l’article L. 132-1 du code de la propriété intellectuelle dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2014-1348 du 12 novembre 2014.
5. Les parties s’accordent pour fixer la date à laquelle l’œuvre a été diffusée sous format numérique au 26 juin 2020 ; le requérant estime en revanche que ce délai est tardif en ce qu’il contrevient à l’alinéa 4 de l’article L. 132-11 du code de la propriété intellectuelle aux termes duquel « à défaut de convention spéciale, l’éditeur doit réaliser l’édition dans un délai fixé par les usages de la profession ».
Afin d’établir les usages de la profession, les parties font références, sans le verser aux débats, au code des usages et bonnes pratiques de l’édition des œuvres musicales du 4 octobre 2017 aux termes duquel (article 3.3 « la publication de l’œuvre ») « le contrat d’édition fixe le délai convenu pour la publication de l’œuvre, qui ne peut être supérieur à un an après la remise par l’auteur du matériel approprié ».
Or, il est constant que le contrat litigieux ne fixe pas le délai convenu pour la publication de l’œuvre et que les parties ne discutent pas dans le cas présent la date à laquelle M. [K] [W] a remis à son éditeur le matériel approprié.
Le tribunal constate néanmoins que l’œuvre a été publiée le 26 juin 2020, soit quatre mois après la signature du contrat d’édition, alors que l’état d’urgence sanitaire avait été déclarée le 16 mars 2020, de sorte que l’œuvre a été publiée sous format numérique dans un délai conforme aux usages de la profession.
M. [K] [W] n’est ainsi pas fondé à reprocher une publication tardive de son œuvre sous forme numérique.
6. Il est également reproché, par le requérant, à la société W.T.P.L., un manquement à son obligation de diffusion commerciale de l’œuvre telle que définit à l’article L. 132-12 du code de propriété intellectuelle qui dispose que « l’éditeur est tenu d’assurer à l’œuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession ».
Bien que les parties en débattent abondamment, il revient légalement à l’éditeur d’assurer la diffusion commerciale de l’œuvre ; la teneur de cette obligation varie selon la nature de l’œuvre.
Le tribunal se réfère au code des usages et bonnes pratiques de l’édition des œuvres musicales du 4 octobre 2017 qui rappelle que « l’exploitation permanente et suivie et la diffusion commerciale ne sont pas considérées comme assurées si la seule exploitation réalisée est celle de la diffusion de l’œuvre audiovisuelle pour laquelle l’œuvre musicale a été spécialement créée ». (Article 3.4 « l’exploitation permanente et suivie et la diffusion commerciale de l’œuvre »).
Dès lors, l’éditeur a une obligation de diffusion commerciale de l’œuvre. Or, la société W.T.P.L. se borne à prétendre, à tort, qu’elle n’avait aucune obligation quant à la commercialisation de l’œuvre autre que celle de sa diffusion et que la commercialisation de l’œuvre relève du contrat d’artiste ou de l’attaché de presse ou du directeur artistique.
Le tribunal déduit de cette allégation que la seule exploitation réalisée par la société W.T.P.L. est celle de la diffusion de l’œuvre sous forme numérique. Ainsi, la société W.T.P.L reconnaît ne pas avoir procédé à la diffusion commerciale de l’œuvre litigieuse.
Ainsi, l’éditeur n’a pas satisfait à l’obligation de diffusion commerciale et a commis une faute contractuelle à ce titre.
7. Par ailleurs, M. [K] [W] estime à juste titre que l’article L. 132-10 du code de la propriété intellectuelle dispose que le « contrat d’édition doit indiquer le nombre minimum d’exemplaires constituant le premier tirage. Toutefois, cette obligation ne s’applique pas aux contrats prévoyant un minimum de droits d’auteur garantis par l’éditeur. »
Il n’est pas contesté par la société W.T.P.L. que le contrat d’édition litigieux ne comprend pas de stipulation ayant pour objet de fixer un nombre minimum d’exemplaires ou de garantir un montant minimum de droits d’auteur. Ainsi, le contrat ne répond pas aux formalismes prévus par le code de la propriété intellectuelle.
Toutefois, le manquement à ce formalisme est sanctionné de la nullité de la convention ; en revanche, il ne constitue pas une faute contractuelle.
Dès lors, M. [K] [W], qui ne soutient pas de demande en nullité, n’est pas fondé à reprocher une faute contractuelle sur ce fondement.
8. Enfin, le grief de M. [K] [W] tiré de la modification de l’œuvre par sa traduction en français qui résulte de son interprétation par M. [P] [E] et Mme [Z] [T] se heurte à la signature d’un contrat de cession du droit d’adaptation audiovisuelle du 13 janvier 2020 aux termes duquel le requérant, en qualité de compositeur, a cédé ses droits sur l’œuvre « […] », adaptation française de « […] ».
Il est observé en effet que M. [K] [W] allègue à tort ne pas avoir expressément consenti à l’adaptation française de son œuvre en versant aux débats une copie tronquée de la convention litigieuse dès lors que l’original est versé aux débats par la société W.T.P.L. sur lequel son paraphe est apposé sur chaque page et sa signature est apposée sur la dernière page.
Le grief sera donc rejeté.
9. Il résulte de l’ensemble de ces éléments que M. [K] [W] n’est fondé à opposer à la société W.T.P.L. qu’un seul des quatre griefs qu’il allègue.
Toutefois, l’absence d’exploitation permanente et suivie et la diffusion commerciale est suffisamment grave pour justifier à elle seule la résolution du contrat d’édition du 12 janvier 2020 portant sur l’œuvre intitulée « […] ([…]) » ou « […] ».
Il y a lieu d’ordonner en conséquence à la société défenderesse de cesser toute reproduction de l’œuvre et à restituer au requérant tous les exemplaires de l’œuvre dont elle dispose.
En revanche, le contrat d’adaptation audiovisuelle du 12 janvier 2020 portant sur l’œuvre « […] », adaptation française de « […] » n’est pas interdépendant du contrat d’édition litigieux. Il n’y a donc pas lieu de prononcer la résolution de ce contrat.
Sur la demande de dommages-intérêts.
10. M. [K] [W] estime avoir subi un préjudice du fait notamment de sa collaboration avec l’association AKF qui souhaitait que l’œuvre musicale puisse devenir son hymne. Il prétend également que l’adaptation sans son consentement est constitutive d’un acte de contrefaçon sur le fondement de l’article L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle. Il sollicite à ce titre des dommages-intérêts forfaitaire (sur le fondement de l’article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle) et pour préjudice moral.
11. S’agissant du préjudice, la société W.T.P.L. estime qu’aucune preuve de notoriété de M. [K] [W] n’est versée aux débats. Elle soutient également qu’il n’y a pas de lien causal entre sa reconversion professionnelle et le contrat d’édition litigieux.
SUR CE,
12. M. [K] [W] fonde ses demandes en responsabilité sur deux fondements juridiques distinct, le premier étant le droit commun afin de réparer les dommages causés par l’inexécution contractuelle du contrat d’édition du 12 janvier 2020, le second étant l’article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle permettant à la partie lésée de solliciter une réparation forfaitaire des dommages consécutifs à une contrefaçon.
13. Il a été observé ci-avant que M. [K] [W] n’est pas fondé à faire grief à la défenderesse d’actes de contrefaçon. (point 8).
Dès lors, sa demande en paiement d’une somme de 5.000 euros en réparation du préjudice résultant des actes de contrefaçon sera rejetée.
14. S’agissant de dommages subis consécutivement aux inexécutions contractuelles du contrat d’édition litigieux, il est rappelé que l’article 1231-1 du code civil dispose « le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure. »
De plus, l’article 1231-2 du code civil dispose que « les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé ».
15. En l’espèce, il a été jugé ci-avant que la société W.T.P.L. n’a pas satisfait à l’obligation de diffusion commerciale et a commis une faute contractuelle à ce titre (point 6.)
M. [K] [W] allègue que les manquements de la société W.T.P.L. lui ont fait perdre toute crédibilité auprès de l’association l’Australian Koala Foundation alors qu’il espérait que son œuvre devienne l’hymne de cette organisation.
Pour corroborer ses allégations, le requérant verse aux débats une copie du courriel adressé à l’Australian Koala Foundation ainsi que leur réponse en langue anglaise en date du 25 juillet 2020.
Le tribunal comprend du courriel envoyé par M. [K] [W] que celui-ci leur propose une collaboration suite à la publication de son œuvre « […] ». En réponse, l’association précise que « you have been very generous with your offer and my team ans I will do everything we can to ensure we uphold our end of the bargain » que le tribunal comprend comme « vous avez été généreux avec votre offre et nous ferons tout ce que nous pourrons pour que notre arrangement aboutisse ».
Le requérant ne verse aucune autre correspondance avec l’Australian Koala Foundation, de sorte que le tribunal n’est pas en mesure de connaître les raisons pour lesquelles la collaboration avec M. [K] [W] a cessé.
M. [K] [W] est donc défaillant à rapporter la preuve d’un lien causal entre la faute de la société W.T.P.L. et l’échec de sa collaboration avec l’Australian Koala Foundation.
16. En revanche, l’absence de diffusion commerciale de l’éditeur a causé un préjudice moral à M. [K] [W], alors même que le contrat d’édition ne prévoyait ni droits d’auteur minimum, ni le nombre d’exemplaire minimum lors du premier tirage.
Le préjudice moral sera justement réparé par l’allocation d’une somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts.
Sur les autres demandes
La société W.T.P.L., partie perdante, sera condamnée aux dépens.
Il est rappelé que M. [K] [W] bénéficie de l’aide juridictionnelle suivant décision du 13 janvier 2022 (n°2021/16263)
Ainsi, la demande en paiement d’une somme correspondant aux frais non compris dans les dépens, fondée au titre de l’article 700 du code de procédure civile, sera rejetée.
Le tribunal, statuant publiquement, en premier ressort, par jugement contradictoire, et par mise à disposition au greffe
PRONONCE la résolution du contrat d’édition du 12 janvier 2020 portant sur l’œuvre intitulée « […] ([…]) » ou « […] » ;
ORDONNE à la société W.T.P.L. de cesser toute reproduction de l’œuvre et à restituer au requérant tous les exemplaires de l’œuvre dont elle dispose ;
DEBOUTE M. [K] [W] de sa demande de résolution du contrat d’adaptation audiovisuelle en date du 12 janvier 2020 portant sur l’œuvre « […] », adaptation française de « […] »
CONDAMNE la société W.T.P.L. à payer à M. [K] [W] la somme de 2.000 euros au titre de son préjudice moral ;
DEBOUTE M. [K] [W] de ses demandes indemnitaires plus amples ou contraires ;
DEBOUTE M. [K] [W] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société W.T.P.L. aux dépens.
LE GREFFIER POUR LA PRESIDENTE EMPECHEE
Benjamin LAPLUME Nicolas VERMEULEN