Contexte de l’affaireLa SAS [5] a saisi le tribunal judiciaire de Nanterre par courrier recommandé le 28 mars 2023 pour former opposition à une contrainte établie par l’URSSAF d’Île-de-France, datée du 13 mars 2023, pour un montant de 97.557 € concernant des cotisations et majorations de retard sur la période d’octobre 2019 à décembre 2021. Un second recours a été introduit le 4 avril 2023, portant également sur la même contrainte. Déroulement des audiencesLors de l’audience du 2 avril 2024, le tribunal a décidé de joindre les deux procédures et a renvoyé l’affaire à l’audience du 23 septembre 2024. À cette audience, le conseil de la SAS [5] a demandé un renvoi, arguant qu’il venait de se constituer et n’avait pas reçu les pièces de l’URSSAF. Il a également sollicité des délais de paiement et le rejet des demandes de l’URSSAF. Position de l’URSSAFL’URSSAF d’Île-de-France s’est opposée à la demande de renvoi, déclarant que le recours était irrecevable en raison de son absence de motivation. Elle a également soutenu que la créance était fondée et que le tribunal n’avait pas compétence pour accorder un nouvel échéancier. L’URSSAF a demandé que la SAS [5] soit condamnée à payer les frais de signification de la contrainte. Décision du tribunalLe tribunal a rejeté la demande de renvoi, considérant qu’aucun motif valable ne justifiait ce renvoi et que la SAS [5] avait la possibilité de faire valoir ses moyens de défense. Concernant la recevabilité de l’opposition, le tribunal a constaté que la SAS [5] n’avait pas motivé son recours, ce qui le rendait irrecevable. Par conséquent, la contrainte de l’URSSAF a été déclarée définitive. Conséquences financièresLes frais de signification de la contrainte, d’un montant de 72,84 €, ont été mis à la charge de la SAS [5], étant donné que l’opposition a été jugée irrecevable. De plus, la SAS [5] a été condamnée à supporter les dépens, et sa demande de remboursement des frais irrépétibles a été rejetée. Conclusion de la décisionLe tribunal a ainsi confirmé la contrainte établie par l’URSSAF, la déclarant exécutoire de droit à titre provisoire, et a ordonné le paiement des frais et dépens par la SAS [5]. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
DE NANTERRE
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PÔLE SOCIAL
Affaires de sécurité sociale et aide sociale
JUGEMENT RENDU LE
31 Octobre 2024
N° RG 23/00669 – N° Portalis DB3R-W-B7H-YLJU
N° Minute : 24/01487
AFFAIRE
URSSAF
C/
S.A.S. [5]
Copies délivrées le :
DEMANDERESSE
URSSAF
Sise [Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Mme [C] [L], munie d’un pouvoir régulier
DEFENDERESSE
S.A.S. [5]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Jonathan NEY, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 598
***
L’affaire a été débattue le 23 Septembre 2024 en audience publique devant le tribunal composé de :
Matthieu DANGLA, Vice-Président
Jérôme DILLAT, Assesseur, représentant les travailleurs salariés
Karine RENAT, Assesseur, représentant les travailleurs non-salariés
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats et du prononcé : Stéphane DEMARI, Greffier.
JUGEMENT
Prononcé en premier ressort, par décision contradictoire et mise à disposition au greffe du tribunal conformément à l’avis donné à l’issue des débats.
Par courrier recommandé du 28 mars 2023, la SAS [5] a saisi le tribunal judiciaire de Nanterre, spécialement désigné en application de l’article L211-16 du code de l’organisation judiciaire, aux fins de former opposition à la contrainte établie le 13 mars 2023 par le directeur de l’Union de Recouvrement de Cotisations de Sécurité Sociale et Allocations Familiales d’Île-de-France (URSSAF) d’Île-de-France, et signifiée le 17 mars 2023, pour un montant de 97.557 € au titre de cotisations et majorations de retard sur la période des mois d’octobre 2019 à décembre 2021 (enregistré sous le numéro RG 23/00669).
Un second recours portant sur une opposition à la même contrainte a été introduit par la SAS [5] par courrier du 4 avril 2023 (procédure enregistrée sous le numéro RG 23/00753).
Lors de l’audience du 2 avril 2024, le tribunal a décidé la jonction de ces deux procédures et a renvoyé l’affaire à l’audience du 23 septembre 2024.
L’affaire a été évoquée au fond à l’audience du 23 septembre 2024.
Le conseil de la SAS [5] demande le renvoi de l’affaire, exposant s’être récemment constitué au bénéfice de son client et ne pas avoir reçu les conclusions et pièces de l’URSSAF. Il sollicite par ailleurs l’octroi de délais de paiement sur le fondement de l’article 1343-5 du Code civil, le rejet des demandes de l’URSSAF et la condamnation de cette dernière au paiement de la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’URSSAF d’Île-de-France s’oppose à la demande de renvoi formée par le conseil de la SAS [5] et conclut à l’irrecevabilité du recours, celui-ci n’étant pas motivé, sur le fondement de l’article R133-3 du code de la sécurité sociale. Elle fait valoir à titre subsidiaire, à l’appui de sa demande de validation de la contrainte, que sa créance est fondée et qu’il n’entre pas dans la compétence du tribunal d’accorder un nouvel échéancier. Elle demande également la condamnation de la SAS [5] à supporter les frais de signification de al contrainte, pour un montant de 72,84 €.
A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré au 21 octobre 2024 par mise à disposition au greffe.
Sur la demande de renvoi
Aucun motif ne justifie de renvoyer l’affaire, celle-ci ayant déjà fait l’objet d’un renvoi contradictoire à l’audience du 2 avril 2024 et les difficultés de communication de pièces ne résultant que du choix de la SAS [5] de changer récemment d’avocat.
En outre, il apparaît que l’URSSAF a soulevé oralement une fin de non recevoir reposant sur l’absence de motivation de l’opposition à contrainte formée par la société, de sorte que celle-ci était parfaitement en mesure de faire valoir ses moyens de défense sur cette question.
La demande de renvoi sera donc rejetée.
Sur la recevabilité de l’opposition à contrainte
Aux termes de l’article R133-3 du code de la sécurité sociale, » si la mise en demeure ou l’avertissement reste sans effet au terme du délai d’un mois à compter de sa notification, les directeurs des organismes créanciers peuvent décerner, dans les domaines mentionnés aux articles L133-8-7, L161-1-5 ou L244-9, une contrainte comportant les effets mentionnés à ces articles. La contrainte est notifiée au débiteur par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception ou lui est signifiée par acte d’huissier de justice. La contrainte est signifiée au débiteur par acte d’huissier de justice ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. A peine de nullité, l’acte d’huissier ou la notification mentionne la référence de la contrainte et son montant, le délai dans lequel l’opposition doit être formée, l’adresse du tribunal compétent et les formes requises pour sa saisine.
L’huissier de justice avise dans les huit jours l’organisme créancier de la date de signification.
Le débiteur peut former opposition par inscription au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort duquel il est domicilié ou pour les débiteurs domiciliés à l’étranger, au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort de l’organisme créancier par lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressée au secrétariat dudit tribunal dans les quinze jours à compter de la notification ou de la signification. L’opposition doit être motivée ; une copie de la contrainte contestée doit lui être jointe. Le secrétariat du tribunal informe l’organisme créancier dans les huit jours de la réception de l’opposition.
La décision du tribunal, statuant sur opposition, est exécutoire de droit à titre provisoire « .
En l’espèce, la SAS [5] n’invoque aucune raison de droit ou de fait dans le cadre de ses deux oppositions successives reçues les 28 mars 2023 et 2 avril 2023, puisqu’elle se contente d’indiquer qu’elle entend contester la contrainte.
Force est de constater que le recours est donc formé par un courrier non motivé, alors que l’article R133-3 du code de la sécurité sociale sus-visé fait obligation au débiteur de faire connaître les motifs de son opposition dans l’acte saisissant la juridiction.
Il convient de souligner que l’acte de signification de la contrainte précisait expressément que l’opposition devait être motivée, de sorte que la SAS [5] ne pouvait ignorer cette exigence.
En conséquence, celle-ci sera déclarée irrecevable en son opposition.
La contrainte établie par l’URSSAF d’Île-de-France le 13 mars 2023 reprendra donc tous ses effets conformément aux dispositions de l’article L244-9 du code de la sécurité sociale.
Sur les frais d’exécution
Aux termes de l’article R133-6 du code de la sécurité sociale, les frais de signification de la contrainte faite dans les conditions de l’article R133-3, ainsi que de tous actes de procédure nécessaires à son exécution, sont à la charge du débiteur, sauf lorsque l’opposition a été jugée fondée.
L’opposition étant irrecevable et ne pouvant dès lors être jugée fondée, les frais de signification de la contrainte du 13 mars 2023, d’un montant de 72,84 € seront donc mis à la charge de la SAS [5], ces frais étant nécessaires à l’exécution de la contrainte.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Les dépens seront supportés par la SAS [5], sur le fondement des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile applicable en vertu du paragraphe II de l’article R142-1-A du code de la sécurité sociale.
Le sens de la décision conduira également à rejeter la demande formée par la SAS [5] au titre des frais irrépétibles.
Le tribunal judiciaire de Nanterre, statuant par décision contradictoire, rendue en premier ressort et par mise à disposition au greffe,
REJETTE la demande de renvoi formé par la SAS [5] ;
DÉCLARE irrecevable le recours formé par la SAS [5] ;
CONSTATE en conséquence que la contrainte établie le 13 mars 2023 par l’URSSAF d’Île-de-France à l’encontre de la SAS [5] au titre de cotisations et majorations de retard pour la période des mois d’octobre 2019 à décembre 2021, pour un montant de 97.557 €, est devenue définitive et comporte les effets d’un jugement en application de l’article L244-9 du code de la sécurité sociale ;
CONDAMNE la SAS [5] au paiement des frais de signification de la contrainte du 13 mars 2023, d’un montant de 72,84 € ;
DÉBOUTE la SAS [5] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire ;
CONDAMNE la SAS [5] au paiement des entiers dépens ;
Et le présent jugement est signé par Matthieu DANGLA, Vice-Président et par Stéphane DEMARI, Greffier, présents lors du prononcé.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,