Vices du Consentement et Responsabilité dans une Transaction Immobilière : Un Cas de Nullité Rétroactive

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Vices du Consentement et Responsabilité dans une Transaction Immobilière : Un Cas de Nullité Rétroactive
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Contexte de la vente

L’association Assemblée Evangélique le Rocher a décidé de vendre un immeuble à usage d’entrepôt situé à [Adresse 1] [Localité 5]. Pour ce faire, elle a mandaté l’agence Square Habitat. Un compromis de vente a été signé le 4 novembre 2021, stipulant la vente de l’immeuble à M. [B] [O] pour un montant de 125.000 euros, avec une réitération par acte authentique prévue au plus tard le 3 février 2022.

Conditions suspensives et reports

La vente était soumise à une condition suspensive d’obtention par l’acquéreur d’un prêt d’au moins 105.000 euros. Un avenant du 24 décembre 2021 a reporté la date de signature de l’acte authentique au 22 mars 2022. Cependant, M. [B] [O] ne s’est pas présenté à la signature prévue le 21 mars 2022, puis a informé l’association qu’il ne signerait pas en raison du refus de la mairie concernant son projet de transformation de l’entrepôt en habitation.

Résolution du compromis et actions judiciaires

L’association a alors sommé M. [B] [O] de se présenter pour signer l’acte authentique, mais il ne s’est pas présenté. Par courrier recommandé du 15 juin 2022, l’association a notifié la résolution du compromis à ses torts exclusifs et a demandé le paiement d’une clause pénale ainsi que des loyers non perçus. En octobre 2022, l’association a assigné M. [B] [O] devant le tribunal judiciaire de Lille pour obtenir ces paiements.

Contre-assignation de M. [B] [O]

En mai 2023, M. [B] [O] a assigné l’agence Square Habitat en intervention forcée, cherchant à engager sa responsabilité délictuelle et à obtenir une indemnisation. Les deux affaires ont été jointes par ordonnance en juillet 2023, et les parties ont déposé leurs dernières écritures en mars et novembre 2023, avec la clôture des débats fixée au 29 mars 2024.

Demandes des parties

L’association Assemblée Evangélique le Rocher a demandé la constatation de la résiliation du compromis, le paiement de la clause pénale de 12.500 euros, des loyers non perçus, ainsi que des frais de justice. De son côté, M. [B] [O] a demandé la nullité du compromis pour vice du consentement, le déboutement de toutes les demandes de l’association, et des dommages-intérêts à l’encontre de l’agence immobilière.

Nullité du compromis de vente

Le tribunal a examiné la demande de nullité du compromis de vente, concluant que le consentement de M. [B] [O] avait été vicié par une erreur sur les qualités essentielles du bien, rendant le compromis nul. Cette nullité a été jugée suffisante pour débouter l’association de ses demandes indemnitaires.

Responsabilité de l’agence immobilière

Concernant la responsabilité de l’agence Square Habitat, le tribunal a reconnu une faute dans la rédaction du compromis, en omettant d’inclure une condition suspensive relative aux autorisations administratives nécessaires. Cependant, M. [B] [O] n’a pas prouvé avoir subi un préjudice en raison de cette faute, entraînant le rejet de ses demandes contre l’agence.

Décision finale du tribunal

Le tribunal a déclaré le compromis de vente nul, débouté l’association de toutes ses demandes, et l’a condamnée aux dépens. M. [B] [O] a été condamné à payer 3.000 euros à l’association au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Les demandes de M. [B] [O] contre l’agence ont également été rejetées, chaque partie conservant la charge de ses dépens.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

4 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Lille
RG n°
22/06425
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 04
N° RG 22/06425 – N° Portalis DBZS-W-B7G-WQNG

JUGEMENT DU 04 NOVEMBRE 2024

DEMANDEUR :

L’association ASSEMBLEE EVANGELIQUE LE ROCHER, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Géraldine SORATO, avocat au barreau de LILLE

DEFENDEURS :

M. [B] [O]
[Adresse 8]
[Localité 4]
représenté par Me Michaël MOKROWIECKI, avocat au barreau de LILLE

La société SQUARE HABITAT NORD DE FRANCE, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 3]
[Localité 7]
représentée par Me Karl VANDAMME, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Ghislaine CAVAILLES, Vice-Présidente
Assesseur : Leslie JODEAU, Vice-présidente
Assesseur : Laurence RUYSSEN, Vice présidente

GREFFIER : Yacine BAHEDDI, Greffier

DEBATS :

Vu l’ordonnance de clôture différée en date du 29 Mars 2024.

A l’audience publique du 02 Septembre 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré,les avocats ont été avisés que le jugement serait rendu le 04 Novembre 2024.

Leslie JODEAU, Juge rapporteur qui a entendu la plaidoirie en a rendu compte au tribunal dans son délibéré

JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 04 Novembre 2024 par Ghislaine CAVAILLES, Président, assistée de Yacine BAHEDDI, greffier.

EXPOSE DU LITIGE

L’association Assemblée Evangélique le Rocher est propriétaire d’un immeuble à usage d’entrepôt situé au [Adresse 1] [Localité 5] qu’elle a décidé de vendre, raison pour laquelle elle a donné mandat à l’agence Square Habitat.

Selon compromis de vente en date du 4 novembre 2021, l’association Assemblée Evangélique le Rocher a vendu l’immeuble à M. [B] [O] au prix de 125.000 euros.

L’acte prévoyait que la vente devait être réitérée par acte authentique au plus tard le 3 février 2022.

La vente a été conclue notamment sous condition suspensive d’obtention par l’acquéreur d’un prêt ou plusieurs prêts fournissant ensemble au moins la somme de 105.000 euros, comportant chacun une durée minimale de 25 années et productifs d’intérêts au taux nominal hors assurances de 1,6% au maximum.

Selon avenant en date du 24 décembre 2021, les parties ont convenu de reporter au 22 mars 2022 la date butoir à laquelle l’acte authentique devait être régularisé.

La date de signature a été fixée au 21 mars 2022, reportée au 28 mars 2022. M. [B] [O] ne s’est pas présenté au rendez-vous de signature. Deux jours plus tard, il a adressé un mail indiquant qu’il ne signerait pas l’acte authentique au motif que la mairie et l’urbanisme de [Localité 9] refusent son projet de transformation de l’entrepôt en immeuble à usage d’habitation.

Par acte d’huissier en date du 17 mai 2022, l’association Assemblée Evangélique le Rocher a fait sommation à M. [B] [O] d’avoir à se présenter devant le notaire le 24 mai 2022 aux fins de signature de l’acte authentique. Il ne s’est pas présenté.

Par courrier recommandé en date du 15 juin 2022 et par mail du même jour, par l’intermédiaire de son conseil, l’association Assemblée Evangélique le Rocher a notifié à M. [B] [O] la résolution du compromis à ses torts exclusifs et l’a mis en demeure d’avoir à lui régler la clause pénale et le montant des loyers non perçus par suite de la résiliation du bail.

Suivant exploit délivré le 12 octobre 2022, l’association Assemblée Evangélique Le Rocher a fait assigner M. [B] [O] devant le tribunal judiciaire de Lille aux fins d’obtenir paiement de la clause pénale et des loyers non perçus. L’affaire a été enrôlée sous le numéro 22/06425.

Puis, suivant exploit délivré le 17 mai 2023, M. [B] [O] a fait assigner la société Square Habitat Nord de France en intervention forcée aux fins d’engager sa responsabilité délictuelle et d’obtenir indemnisation. L’affaire a été enrôlée sous le numéro 23/04758.

Par ordonnance en date du 5 juillet 2023, les deux affaires ont été jointes sous le numéro 22/06425.

Les parties ont fait notifier leurs dernières écritures par voie électronique le 29 mars 2024 pour l’association Assemblée Evangélique le Rocher, le 13 mars 2024 pour M. [B] [O] et le 30 novembre 2023 pour la société Square Habitat.

La clôture des débats est intervenue le 29 mars 2024, et l’affaire fixée à l’audience du 2 septembre 2024.

* * * *

Aux termes de ses dernières écritures, l’association Assemblée Evangélique le Rocher demande au tribunal de :

Vu les articles 1103, 1104 et suivants du code civil,
Vu l’article 1226 du code civil,
Vu les pièces,

constater la résiliation du compromis de vente du 4 novembre 2021 portant sur la vente de l’immeuble à usage d’entrepôt situé [Adresse 1] à [Localité 5] au profit de M. [B] [O], suivant notification par courrier recommandé du 15 juin 2022 ;condamner M. [B] [O] à lui payer la somme de 12.500 euros au titre de la clause pénale avec intérêts au taux légal à compter du 15 juin 2022 ;condamner M. [B] [O] à lui payer la somme de 5.250 euros au titre des loyers non perçus par sa faute d’avril à octobre 2022 ;débouter M. [B] [O] de l’ensemble de ses demandes ;condamner M. [B] [O] à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;condamner M. [B] [O] aux dépens.
Aux termes de ses dernières écritures, M. [B] [O] demande au tribunal de :

Vu les articles 1130 et suivants du code civil,
Vu l’article L.313-36 du code de la consommation,
Vu l’article 1240 du code civil ;

recevoir l’exception de nullité et prononcer la nullité de la vente pour vice du consentement ;débouter l’association Assemblée Evangélique le Rocher de l’ensemble de ses demandes ;subsidiairement, constater voir prononcer la caducité du compromis de vente signé le 4 novembre 2021 ;débouter l’association Assemblée Evangélique le Rocher de l’ensemble de ses demandes ;plus subsidiairement, dire qu’il n’a commis aucune faute et que la vente est non-avenue du fait de la défaillance de la condition suspensive d’obtention du certificat d’urbanisme ;débouter l’association Assemblée Evangélique le Rocher de l’ensemble de ses demandes ;encore plus subsidiairement, réduire à l’euro symbolique le montant de la condamnation au titre de la clause pénale ;débouter l’association Assemblée Evangélique le Rocher de sa demande de condamnation au titre des loyers non-perçus ;condamner la société Square Habitat Nord de France à lui payer la somme de 17.750 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi ;débouter la société Square Habitat Nord de France de l’ensemble de ses demandes ;

En tout état de cause :

condamner l’association Assemblée Evangélique le Rocher et la société Square Habitat Nord de France, ou l’une à défaut de l’autre, à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;condamner l’association Assemblée Evangélique le Rocher et la société Square Habitat Nord de France, ou l’une à défaut de l’autre, en tous les frais et dépens ;écarter l’exécution provisoire, compte tenu de la nature de l’affaire.
Aux termes de ses dernières écritures, la société Square Habitat Nord de France demande au tribunal de :

dire et juger infondées les demandes formulées à son encontre ;les rejeter ;condamner . [B] [O] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens de l’instance.
Pour l’exposé des moyens des parties, il sera fait application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile et procédé au visa des dernières conclusions précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la nullité du compromis de vente

La demande de l’association Assemblée Evangélique le Rocher tend à voir constater la résiliation du compromis de vente du 4 novembre 2021 et à obtenir paiement de la clause pénale et des loyers non perçus du fait de la non réitération de la vente. En réponse, M. [B] [O] fait valoir que son consentement à la vente a été vicié par une erreur ou un dol et qu’en conséquence le compromis de vente est nul. Cette demande d’annulation tend à anéantir rétroactivement le compromis de vente lequel serait, dans cette hypothèse, considéré comme n’ayant jamais existé de sorte qu’il convient d’examiner la demande de nullité en premier.

Sur l’erreur

L’article 1130 du code civil prévoit que « l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.
Leur caractère déterminant s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné ».

Les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.

Selon l’article 1132 du code civil, « l’erreur de droit ou de fait, à moins qu’elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu’elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant ».

Les qualités essentielles de la prestation sont celles qui ont été expressément ou tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté.

En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats que le 5 mars 2020, M. [B] [O] a adressé un mail à l’agent immobilier pour faire une offre d’achat du bien appartenant à l’association Assemblée Evangélique le Rocher au prix de 105.000 euros. Il expliquait le prix proposé par le fait que le bâtiment est un ancien garage et que « tout est à faire » pour effectuer une colocation, des studios ou même une résidence principale (pièce 1 du défendeur).

Dans ce mail, M. [B] [O] faisait ainsi savoir à son cocontractant qu’il projetait de transformer l’entrepôt en local à usage d’habitation et d’ailleurs l’association Assemblée Evangélique le Rocher ne conteste pas sérieusement avoir eu connaissance de ce projet de transformation préalablement à la signature du compromis de vente, même si cette signature est intervenue plusieurs mois après en raison du fait que la venderesse était engagée avec un autre acquéreur qui n’a finalement pas obtenu son financement.

Dans un autre mail du 11 juin 2021, M. [B] [O] rappelait à l’agent immobilier qu’il convenait d’intégrer au compromis de vente une clause suspensive relative à l’accord de la mairie sur sa déclaration préalable de travaux, ce qui montre là encore que l’acquisition projetée avait pour but la modification de la destination de l’immeuble (pièce 2 du défendeur). Il ne souhaitait pas faire l’acquisition d’un entrepôt.

Contrairement à ce que soutient la venderesse, la transformation de l’entrepôt en un immeuble à usage d’habitation est donc bien entrée dans le champ contractuel et constituait un élément déterminant du consentement de l’acheteur, et ce, quand bien même aucune condition suspensive d’obtention d’un permis de construire n’a été intégrée, ce qui pourrait relever d’une négligence de l’agence immobilière eu égard au mail envoyé par M. [B] [O] le 11 juin.

Pour mener à bien son projet, M. [B] [O] s’est, dès le mois de juin 2021, soit bien avant la signature du compromis, rapproché du service urbanisme de la ville de [Localité 9] pour connaître les démarches à effectuer pour créer une colocation de deux ou trois chambres sur un bâtiment de 100 m2 sans jardin. Il voulait notamment savoir s’il fallait un permis de construire et s’il fallait créer une place de parking (pièce 5 du défendeur).

A compter de la signature du compromis, M. [B] [O], qui avait déjà au préalable obtenu un accord de la banque pour son prêt, a débuté les démarches administratives en vue de la réalisation de son projet de réhabilitation de l’entrepôt.

Il a d’abord déposé une demande de déclaration préalable à la réalisation de travaux, ce qu’il lui avait été conseillé de faire par le service de l’urbanisme, mais cette demande a été rejetée le 27 janvier 2022 dès lors que les travaux envisagés sont soumis au dépôt d’un permis de construire (pièce 23 du défendeur).

Il a alors déposé un permis de construire pour la création d’un logement de six pièces et sur deux niveaux (pièce 24 du défendeur). Ce permis de construire a été refusé le 2 août 2022 (pièce 22 du défendeur).

Les échanges intervenus le 24 mars 2022 entre M. [B] [O] et Mme [C] [V], architecte conseil de la ville de [Localité 9], permettent de comprendre que le projet de réhabilitation de l’entrepôt existant en une habitation n’était pas faisable (pièce 11 du défendeur). Il lui était alors suggéré de procéder à une nouvelle construction en rassemblant les fonds de parcelles voisines tout en précisant que « en l’état, il est difficile d’imaginer l’implantation d’un logement dans ce type de bâti précaire ».

Suite à cela, M. [B] [O] a proposé un projet de nouvelle construction le 29 mars 2022. Le lendemain, l’architecte, Mme [V], a répondu ceci (pièce 13 du défendeur) :
« Les immeubles d’habitation de la rue étant sur un gabarit en r+1+ toiture, conforter le gabarit du hangar existant dans le cadre d’une nouvelle construction ne permet pas de conduire à un projet qui puisse s’intégrer harmonieusement avec l’environnement proche et faire l’objet d’un avis favorable.
On cherchera plutôt à reconstituer un front bâti avec l’immeuble mitoyen de gauche en retrouvant des accroches (gabarit, hauteur, alignement des baies…) sous réserve du respect des règles d’urbanisme correspondant à la parcelle.
La parcelle telle qu’elle est actuellement, issue d’une division parcellaire, au vu de sa faible profondeur n’offre pas de faisabilité intéressante d’un point de vue urbain.
En remplacement de ce linéaire sans qualité aujourd’hui, il sera attendu une nouvelle construction d’intérêt (projet d’architecture et urbain, de par sa composition, traitement, aspect…) ».

Dans des mails ultérieurs, Mme [V] lui conseillera de racheter une partie de l’arrière de la parcelle voisine pour plus de faisabilité (pièce 13 du défendeur) et confirmera que la construction d’une maison individuelle à la place de l’entrepôt est très contrainte en raison des dispositions du Plan Local d’Urbanisme eu égard aux dimensions de la parcelle qui est peu profonde (moins de 6,50 m) et permet peu de surface au-delà du rez-de-chaussée du fait du gabarit imposé en fond de parcelle (pièce 16 du défendeur). En effet, le Plan Local d’Urbanisme prévoit que, dans le cas d’une unité foncière d’une profondeur inférieure ou égale à 15 m (ce qui est le cas en l’espèce), la hauteur des constructions ne doit pas excéder 3,50 m sur la limite séparative non latérale au dessus de cette hauteur. Par ailleurs, les toitures et superstructures doivent être comprises dans un gabarit à 45° par rapport à l’horizontale à partir de la ou les limites séparatives concernées. Ainsi, l’arrêté municipal de rejet du permis de construire indique que la nouvelle toiture du projet n’est pas comprise dans le gabarit délimité par un angle de 45° par rapport à l’horizontale à partir de 3,50 m sur la limite séparative non latérale (pièce 22 du défendeur).

En outre, Mme [V] explique dans son mail du 16 avril 2022 que la construction d’un logement ne doit pas dépasser 60% d’emprise au sol, produire 20% d’espace vert en pleine terre et présenter un stationnement.

En d’autres termes, sur la parcelle acquise, seule une construction en rez-de-chaussée pouvait être envisagée en raison dès règles du Plan Local d’Urbanisme et ses dimensions restreintes (112 m2) rendaient difficiles de respecter le plan d’occupation des sols et de prévoir un stationnement, sauf à envisager d’acquérir le fonds des parcelles voisines ce qui a été suggéré par l’architecte de la ville.

Il peut dès lors être considéré, contrairement à ce que soutient l’association Assemblée Evangélique le Rocher, que le projet de transformation de l’entrepôt en habitation, pour y accueillir une colocation, des studios ou une résidence principale, tel que souhaité par l’acquéreur est impossible en raison des règles d’urbanisme de la commune et non simplement contraint. En effet, seule une construction beaucoup plus restreinte était envisageable.

Le consentement de M. [B] [O] a donc été vicié par une erreur sur les qualités essentielles du bien acquis puisqu’il pensait acheter un bien pouvant faire l’objet d’une réhabilitation en immeuble à usage d’habitation aux fins d’y accueillir une colocation, des studios ou une résidence principale, ce qui n’est pas le cas.

Il ne peut être considéré que cette erreur était inexcusable eu égard à la complexité des règles d’urbanisme, lesquelles ont été transmises à M. [B] [O] au fur et à mesure de ses questionnements dans le cadre de l’instruction de ses demandes et postérieurement à la signature du compromis, et au fait que, dans un mail du 11 juin 2021, l’agent immobilier lui avait indiqué que l’ancien acheteur « avait fait une demande à la mairie qui lui avait demandé d’acquérir une place de parking pour réaliser la transformation du bâtiment », de sorte qu’il a pu penser qu’il s’agissait de la seule condition à la faisabilité de son projet.

Par suite de cette erreur, le compromis de vente est entaché de nullité.

Dès lors, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur l’existence d’un dol ni même sur la résiliation du compromis aux torts exclusifs de l’acheteur dès lors que celui-ci est rétroactivement anéanti et est censé n’avoir jamais existé.

Par voie de conséquence, l’association Assemblée Evangélique le Rocher sera déboutée de ses demandes indemnitaires.

Sur la responsabilité de l’agence immobilière

L’article 1240 du code civil prévoit que :

“Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.”

En tant qu’intermédiaire professionnel et négociateur d’acte, l’agent immobilier est tenu d’une obligation de conseil envers l’acquéreur potentiel d’un bien immobilier. Il est notamment tenu de vérifier personnellement la consistance matérielle et juridique des biens vendus par son entremise.

M. [B] [O], qui entend rechercher la responsabilité de l’agence Square Habitat, doit rapporter la preuve d’une faute commise par elle, d’un dommage subi et d’un lien de causalité entre la faute et le dommage.

Il est acquis que la société Square Habitat connaissait le projet de réhabilitation de M. [B] [O] puisqu’elle lui a indiqué, dans un mail du 11 juin 2021 que l’ancien acheteur avait fait une demande à la mairie et qu’il lui avait été demandé d’acquérir une place de parking pour réaliser la transformation du bâtiment (pièce 2 de M. [O]).

S’il ne peut être reproché à l’agence immobilière de ne pas s’être renseigné auprès des services de l’urbanisme sur les règles applicables s’agissant de la réhabilitation projetée et de ne pas avoir réclamé un certificat d’urbanisme, en revanche, il peut lui être reproché, alors qu’elle a rédigé le compromis de vente du 4 novembre 2021, de ne pas avoir inséré à cet acte une condition suspensive d’obtention des autorisations administratives nécessaires à la réalisation du projet souhaité par M. [B] [O], ce qu’il lui a d’ailleurs expressément réclamé dans un mail du 11 juin 2021 et ce à quoi elle a répondu, le 3 novembre 2021 lors de l’envoi du projet de compromis, qu’elle avait pris en compte les remarques faites à l’époque (pièce 7 de M. [O]) laissant ainsi entendre qu’elle avait effectivement inséré une condition suspensive, ce qui n’est pas le cas.

Il doit ainsi être retenu une faute à l’encontre de la société Square Habitat.

M. [B] [O] réclame à son encontre la somme de 17.750 euros correspondant au montant de la clause pénale et aux loyers réclamés par la venderesse. Dès lors que le compromis de vente est annulé et que celui-ci n’est pas condamné à verser ces sommes à l’association Assemblée Evangélique Le Rocher, il ne subit pas le préjudice qu’il invoque.

S’agissant des reproches faits par l’acquéreur à l’encontre de l’agence immobilière relativement au raccordement au tout-à-l’égout et à l’occupation du bien, M. [B] [O] ne démontre pas davantage l’existence d’un préjudice qui serait résulté de ces prétendus manquements puisque le compromis de vente est annulé et qu’il n’est pas condamné à régler le montant de la clause pénale et des loyers.

Dans ces conditions, les demandes formées à l’encontre de l’agence Square Habitat seront rejetées.

Sur l’exécution provisoire

En application de l’article 514 du code de procédure civile, en vigueur depuis le 1er janvier 2020 dans sa rédaction issue du décret 2019-1333 du 11 décembre 2019 :

“ Les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.”

Il n’y a lieu ni d’ordonner l’exécution provisoire, laquelle assortit le jugement par l’effet de ce décret, ni de déroger à ce principe.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

L’article 696 du Code de procédure civile dispose : « la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie ».

Par ailleurs, il résulte des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile que“Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1° A l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; […]
Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations. […]”.

Dans l’instance l’opposant à M. [B] [O], l’association Assemblée Evangélique le Rocher, qui succombe, sera condamnée aux dépens ce qui entraîne rejet de sa demande au titre des frais irrépétibles.

L’équité commande de la condamner à payer à M. [B] [O] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans l’instance opposant opposant M. [B] [O] à la société Square Habitat Nord de France, il convient de dire que chacun conservera la charge de ses dépens et de rejeter les demandes au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement par jugement contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en premier ressort,

Dit que le compromis signé le 4 novembre 2021 entre l’association Assemblée Evangélique le Rocher et M. [B] [O] est nul,

Déboute en conséquence l’association Assemblée Evangélique le Rocher de l’intégralité de ses demandes indemnitaires,

Dans l’instance opposant l’association Assemblée Evangélique le Rocher et M. [B] [O],

Condamne l’association Assemblée Evangélique le Rocher aux dépens de l’instance,

Condamne l’association Assemblée Evangélique le Rocher à payer à M. [B] [O] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Dans l’instance opposant M. [B] [O] à la société Square Habitat Nord de France,

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens,

Dit n’y avoir lieu à indemnité au titre des frais irrépétibles,

Déboute les parties de leurs autres demandes,

Rappelle que la présente décision est exécutoire de droit par provision.

Le greffier, Le président,


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