Votre panier est actuellement vide !
Sauf disposition contraire, l’acheteur d’un bien mis aux enchères ne bénéficie pas de son droit de rétractation.
Sur le prix d’adjudication, l’article 1650 du code civil dispose : « La principale obligation de l’acheteur est de payer le prix au jour et au lieu réglés par la vente.». En cas de non récupération du bien acquis, celui-ci peut être vendu par la maison d’enchères pour le compte de l’adjudicataire. En la cause, il résulte de l’article intitulé « ENLEVEMENT ET RESPONSABILITE DES LOTS VENDUS » que l’adjudicataire devient légalement propriétaire et responsable de ses lots dès l’adjudication prononcée et qu’il doit enlever son bien le jour de la vente ou le lendemain. Pour les achats en ligne et sur ordre d’achat, l’acquéreur doit recevoir un email l’autorisant à prendre possession de son achat dans un délai maximal de 8 à 15 jours à compter de la vente. Il est précisé qu’au-delà de 15 jours pour tous les acheteurs (en salle ou sur internet), des frais de stockage seront facturés à hauteur de 10 euros par jour pour les véhicules utilitaires. Enfin, il est stipulé « Au-delà de 30 jours et sauf convention expresse, le bien sera considéré comme abandonné purement et simplement. Après relance par LRAR et sans réponse dans un délai de 8 jours, le bien sera revendu pour le compte de l’adjudicataire ou propriétaire initial si le lot n’a pas été réglé ». |
Résumé de l’affaire :
Contexte de la vente aux enchèresLa société Armor Enchères a été mandatée par la SARL Ambulance et Taxis du Littoral pour vendre un véhicule Citroen Jumper 3000 HDI 160 aux enchères publiques. Le 18 janvier 2021, M. [I] [T], gérant de la SAS Ambulances & Taxis [T], a remporté l’enchère pour un montant de 10.000 euros, soit 12.142 euros frais inclus. Après un paiement partiel de 2.300 euros, M. [T] a demandé la rétractation de la vente, estimant que le véhicule ne correspondait pas à ses attentes. Actions judiciairesSuite à la demande de rétractation, Armor Enchères a mis en demeure M. [T] de régler le solde du prix, sans succès. Le 1er décembre 2022, Armor Enchères a assigné M. [T] devant le tribunal judiciaire de Nîmes pour obtenir le paiement du solde, des frais de gardiennage, et des dommages et intérêts. Armor Enchères a également demandé la récupération du véhicule sous astreinte. Arguments de la société Armor EnchèresArmor Enchères a soutenu que M. [T] devait être condamné à titre personnel au paiement du prix, car il avait participé à la vente en son nom. Elle a affirmé que l’adjudication transférait la propriété et les risques au moment de la vente, et que les conditions générales stipulaient que l’acheteur devait récupérer son bien dans un délai de 15 jours, sous peine de frais de gardiennage. Réponse de M. [T] et de la SAS Ambulances & Taxis [T]M. [T] et la SAS Ambulances & Taxis [T] ont demandé la nullité du contrat de vente pour dol, arguant que le véhicule avait été présenté comme étant équipé pour l’ambulance, alors qu’il ne disposait pas de l’agrément nécessaire. Ils ont également demandé la restitution de la somme versée et des dommages et intérêts pour le préjudice subi. Décision du tribunalLe tribunal a déclaré irrecevables les demandes de nullité et de dommages-intérêts, en raison de l’absence de mise en cause du vendeur. Il a également jugé que M. [T] était personnellement responsable du paiement du solde de l’adjudication, condamnant M. [T] à verser 9.842 euros à Armor Enchères. Les frais de gardiennage ont été limités à 300 euros, et M. [T] a été contraint de récupérer le véhicule à ses frais dans un délai d’un mois, sous peine d’astreinte. Conséquences financièresEn plus des paiements dus, M. [T] a été condamné à verser 1.500 euros à Armor Enchères au titre de l’article 700 du code de procédure civile, tandis que sa demande d’indemnité de procédure a été rejetée. M. [T] a également été condamné aux dépens. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE Par mise à disposition au greffe
DE NIMES
Le 06 Novembre 2024
1ère Chambre Civile
N° RG 22/05465 – N° Portalis DBX2-W-B7G-JXSF
Minute n° JG24/
JUGEMENT
Le tribunal judiciaire de Nîmes, 1ère Chambre Civile, a dans l’affaire opposant :
S.A.R.L. ARMOR ENCHERES
Opérateur de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques – Agrément n°2002-165, inscrite au RCS de SAINT BRIEUC n° B 440 433 498, prise en la personne de ses représentants légaux, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par la SELARL DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, avocats au barreau de NIMES, avocats postulant,et par la SELARL SULTAN-LUCAS-DELOGIVIERE-PINIER-POIRIER, avocats au barreau d’ANGERS, avocats plaidant
à :
M. [I] [T]
né le 03 Août 1964 à [Localité 4],
demeurant [Adresse 2]
représenté par la SELARL P.L.M.C AVOCATS, avocats au barreau d’AVIGNON, avocats plaidant
La Société AMBULANCES & TAXIS [T],
Société par Actions Simplifiée au capital de 300 000 €,
Immatriculée au R.C.S. de NIMES sous le numéro 449 437 078,
Dont le siège social est sis [Adresse 2] à [Localité 4], Prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualité audit siège,
En qualité d’intervenant volontaire,
représenté par la SELARL P.L.M.C AVOCATS, avocats au barreau d’AVIGNON, avocats plaidant
Rendu publiquement le jugement contradictoire suivant, statuant en premier ressort après que la cause a été débattue en audience publique le 09 Septembre 2024 devant Nina MILESI, Vice-Présidente, statuant comme juge unique, assistée de Aurélie VIALLE, greffière, et qu’il en a été délibéré.
En réponse à la demande reconventionnelle en nullité du contrat de vente pour dol, elle réplique que cette demande est irrecevable car elle n’est pas le vendeur du véhicule, ayant seulement été mandatée par la SARL Ambulances et Taxis du Littoral pour procéder à la vente aux enchères, de sorte qu’elle n’est pas partie au contrat.
Elle soutient que les défendeurs ne rapportent pas la preuve de l’existence de manœuvres frauduleuses ou de l’existence d’une intention dolosive. Elle affirme qu’il était visible, avant la vente, que le véhicule était vendu sans équipement nécessaire à l’activité d’ambulance ; que cela ressortait :
des photographies du véhicule publiées sur internet avant la vente aux enchères, de la mention sur le bordereau selon laquelle le véhicule était vendu sans agrément.
Elle sollicite le rejet de la demande reconventionnelle de condamnation au paiement de dommages et intérêts en soutenant qu’ils ne démontrent pas les conditions nécessaires pour engager sa responsabilité.
*
Aux termes de leurs dernières écritures, notifiées par voie dématérialisée le 23 août 2024, se fondant sur les dispositions des articles 1130, 1131, 1137, 1138, 1139 et 1240 du code civil, l’article préliminaire du code de la consommation, l’article R.6312-1 du code de la santé publique et la jurisprudence, M. [T] et la SAS Ambulances & Taxis [T] demandent au tribunal de :
dire et juger le contrat de vente nul en raison du dol ; débouter en conséquence la société Armor Enchères de toutes ses demandes ;ordonner à la société Armor Enchères la restitution de la somme de 2.300 euros versée par M. [T] ; condamner la société Armor Enchères à verser la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts à M. [T] en réparation du préjudice subi ;condamner la société Armor Enchères au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
A titre liminaire, M. [T] sollicite sa mise hors de cause à titre personnel et indique que s’il a acquis le véhicule en son nom personnel, cette acquisition a été réalisée pour la société dont il est l’un des gérants, dans le cadre de l’activité de celle-ci. Il affirme que cela est confirmé par l’impossibilité pour un particulier d’obtenir la délivrance de l’agrément sanitaire.
Les défendeurs exposent que M. [T] a été victime d’un dol car le véhicule était annoncé comme vendu avec « équipement ambulance » même s’il ne disposait pas de l’agrément d’ambulance alors qu’en réalité il s’agissant d’un simple fourgon.
Reconventionnellement, il sollicite la condamnation de la société Armor Enchères au paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au titre du dol.
*
La clôture est intervenue le 26 août 2024 suivant ordonnance du juge de la mise en état du 4 avril 2024. L’affaire a été plaidée à l’audience 9 septembre 2024. A cette date, les parties ont été informées que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 6 novembre 2024.
A titre liminaire, il convient de recevoir l’intervention volontaire de la société Ambulances & Taxis [T].
Sur l’irrecevabilité de la demande en nullité de la vente formée à l’encontre du mandataire du vendeur et de la demande de dommages-intérêts subséquente
L’article 32 du code de procédure civile dispose : « Est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir ».
Il est constant que la SARL Ambulances et Taxis du littoral a donné mandat à la société Armor Enchères de vendre le véhicule Citroen Jumper 3000.
En agissant en justice pour obtenir le paiement du solde du prix à l’encontre de M. [T], la société Armor Enchères se prévaut également d’un mandat de la part du propriétaire.
Toutefois, l’existence de ce mandat, au demeurant non produit, ne confère pas à la société Armor Enchères la qualité de vendeur du véhicule.
Par conséquent, aucune demande de nullité de la vente ne peut avoir lieu sans la mise en cause préalable du vendeur, à savoir la SARL Ambulances et Taxis du Littoral. Les défendeurs n’ont pas procédé à cette assignation en intervention forcée de sorte que leurs demandes en nullité et en dommages-intérêts ne peuvent qu’être jugées irrecevables et ne seront pas examinées au fond.
Sur la demande en paiement du prix et de frais de gardiennage
Sur l’identité de l’acquéreurM. [T] soutient s’être porté porté acquéreur de l’ambulance en son nom et pour les besoins de son activité professionnelle pour en conclure que c’est sa société qui serait seule partie au contrat. Ce n’est cependant pas le motif de l’acquisition qui détermine l’identité d’un cocontractant.
Dans les rapports entre le vendeur et son mandataire, d’une part, et l’acquéreur d’autre part, seul M. [T] est partie au contrat puisque seul son nom apparaît sur le bordereau d’acquéreur et sur la demande de rétractation de la vente, à l’exclusion de toute référence à la société qu’il représenterait. Par conséquent, M. [T] a acquis le véhicule en son nom personnel et non en qualité de représentant de la société qu’il dirige.
La société Armor Enchères dirige ses demandes à l’encontre des deux défendeurs et sollicite leur condamnation solidaire alors même que la vente n’a été conclue qu’au profit d’une personne juridique.
Par conséquent, les demandes en paiement du prix et des frais de gardiennage formées à l’encontre de la société Ambulances et Taxis [T] seront déclarées irrecevables.
Sur le prix d’adjudication L’article 1650 du code civil dispose : « La principale obligation de l’acheteur est de payer le prix au jour et au lieu réglés par la vente.».
En l’espèce, il ressort des débats et notamment du bordereau acheteur que M. [T] a été désigné adjudicataire du véhicule pour un prix de 10.000 euros, outre 2.142 euros de frais liés à la vente. Deux paiements pour la somme totale de 2.300 euros ont d’ores et déjà été faits.
Par conséquent, M. [T] sera condamné au paiement de la somme de 9.842 euros au titre du solde du prix d’adjudication comprenant le prix de vente et les frais liés.
Sur les frais de gardiennage Il résulte de l’article intitulé « ENLEVEMENT ET RESPONSABILITE DES LOTS VENDUS » que l’adjudicataire devient légalement propriétaire et responsable de ses lots dès l’adjudication prononcée et qu’il doit enlever son bien le jour de la vente ou le lendemain.
Pour les achats en ligne et sur ordre d’achat, l’acquéreur doit recevoir un email l’autorisant à prendre possession de son achat dans un délai maximal de 8 à 15 jours à compter de la vente.
Il est précisé qu’au-delà de 15 jours pour tous les acheteurs (en salle ou sur internet), des frais de stockage seront facturés à hauteur de 10 euros par jour pour les véhicules utilitaires.
Enfin, il est stipulé « Au-delà de 30 jours et sauf convention expresse, le bien sera considéré comme abandonné purement et simplement. Après relance par LRAR et sans réponse dans un délai de 8 jours, le bien sera revendu pour le compte de l’adjudicataire ou propriétaire initial si le lot n’a pas été réglé ».
En l’espèce, la société Armor Enchères sollicite le remboursement de frais de gardiennage à hauteur de 15.816 euros, soit pendant une période de plus de trois ans alors même que le contrat prévoyait la possibilité pour le vendeur de limiter ces frais en procédant à la revente du bien. Par conséquent, les frais de gardiennage seront limités à la somme de 300 euros, correspondant à 30 jours à 10 euros. M. [T] sera condamné à payer à la société Armor Enchères la somme de 300 euros.
Sur la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive
Il est constant que l’exercice d’une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner en naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d’erreur équivalente au dol.
En l’espèce, M. [T] ne rapporte pas la preuve d’un tel comportement de la part des défendeurs et sera débouté de sa demande.
Sur les demandes accessoires
M. [T] perd le procès et doit être condamné aux dépens.
L’équité commande sa condamnation à payer à la société Armor Enchères une somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNE M. [I] [T] à payer à la société Armor Enchères la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE la demande d’indemnité de procédure des défendeurs ;
CONDAMNE M. [I] [T] aux dépens.
Le présent jugement a été signé par Nina MILESI, Vice-Présidente et par Aurélie VIALLE, greffière présente lors de sa mise à disposition.
Le Greffier, Le Président,