Interprétation stricte de la loi pénale en matière de faillite civile : enjeux et implications.

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Interprétation stricte de la loi pénale en matière de faillite civile : enjeux et implications.
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Procédure de redressement et liquidation judiciaire

M. [N] [K] et Mme [R] [X] ont été soumis à une procédure de redressement puis de liquidation judiciaire, conformément à la législation sur la faillite civile en Alsace-Moselle, par des jugements rendus par le tribunal judiciaire les 22 juin 2015 et 5 février 2016.

Poursuites pour banqueroute

Suite à cette procédure, ils ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel pour banqueroute par détournement d’actif. Le tribunal a déclaré les prévenus coupables et les a condamnés à neuf mois d’emprisonnement avec sursis probatoire.

Appel du jugement

Les deux prévenus ainsi que le ministère public ont interjeté appel du jugement rendu par le tribunal correctionnel.

Critique de l’arrêt attaqué

Le moyen soulevé conteste l’arrêt attaqué qui a déclaré Mme [X] et M. [K] coupables de banqueroute par détournement ou dissimulation d’actif, en arguant que la loi pénale doit être interprétée strictement. Il est soutenu que seuls les détournements ou dissimulations d’actif commis par des personnes spécifiquement mentionnées dans le code de commerce peuvent être incriminés.

Réponse de la Cour

La Cour a examiné les articles du code de commerce et a conclu que la liste des personnes susceptibles d’être condamnées pour banqueroute ne comprend pas celles ayant fait l’objet d’une faillite civile de droit local en Alsace-Moselle. Ainsi, ces personnes ne peuvent pas être poursuivies pour banqueroute.

Établissement du délit de banqueroute

L’arrêt attaqué a établi que les prévenus, ayant bénéficié d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires, avaient détourné ou dissimulé une partie de leur actif au détriment de leurs créanciers. Les juges ont constaté qu’ils avaient dissipé 212 000 euros provenant de la vente de leur maison à travers divers versements et dépenses somptuaires.

Conclusion de la Cour d’appel

La cour d’appel a conclu que les prévenus avaient commis le délit de banqueroute par détournement d’actif, confirmant ainsi le jugement sur leur culpabilité. Toutefois, cette décision a été jugée en contradiction avec les textes législatifs pertinents, entraînant une cassation sans nécessité d’examiner d’autres griefs.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

6 novembre 2024
Cour de cassation
Pourvoi n°
23-85.314
N° G 23-85.314 F-B

N° 01335

GM
6 NOVEMBRE 2024

CASSATION

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 6 NOVEMBRE 2024

M. [N] [K] et Mme [R] [X] ont formé des pourvois contre l’arrêt de la cour d’appel de Metz, chambre correctionnelle, en date du
1er août 2023, qui, pour banqueroute, les a condamnés à quinze mois d’emprisonnement avec sursis, 75 000 euros d’amende et a prononcé sur les intérêts civils.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Piazza, conseiller, les observations de la société Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [N] [K] et Mme [R] [X], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l’audience publique du 2 octobre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Piazza, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. M. [N] [K] et Mme [R] [X] ont fait l’objet d’une procédure de redressement puis de liquidation judiciaire, selon la procédure de faillite civile locale applicable en Alsace-Moselle, par jugements du tribunal judiciaire des 22 juin 2015 et 5 février 2016.

3. Ils ont ensuite été poursuivis devant le tribunal correctionnel pour banqueroute par détournement d’actif.

4. Le tribunal les en a déclarés coupables et les a condamnés à neuf mois d’emprisonnement avec sursis probatoire.

5. Ils ont relevé appel du jugement, ainsi que le ministère public.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré Mme [X] et M. [K] coupables de banqueroute par détournement ou dissimulation d’actif, alors :

« 1°/ que la loi pénale est d’interprétation stricte ; qu’en déclarant les prévenus, particuliers ayant bénéficié d’une procédure de faillite civile de droit local Alsacien Mosellan, coupables de banqueroute, quand seuls sont incriminés les détournements ou dissimulations d’actif commis par les personnes visées à l’article L. 654-1 du code de commerce, la cour d’appel a violé les articles 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 111-3, 111-4 du code pénal, L. 654-1, L. 654-2 et L. 670-1 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 654-1, L. 654-2, 2°, et L. 670-1 du code de commerce :

7. Le premier de ces textes fait état d’une liste limitative des personnes physiques susceptibles de se voir condamnées pour banqueroute, dans laquelle n’entrent pas les personnes énumérées au troisième, lequel ne procède à aucune extension de l’applicabilité des deux premiers, ce dont il résulte que la personne physique ayant fait l’objet d’une faillite civile de droit local d’Alsace-Moselle, prévue à l’article L. 670-1 précité, ne peut être poursuivie pour banqueroute.

8. Pour dire établi le délit de banqueroute à l’égard des prévenus, l’arrêt attaqué énonce que sont coupables du délit de banqueroute les personnes bénéficiant d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires en vertu des règles de droit local, qui ont détourné ou dissimulé tout ou partie de leur actif au détriment de leurs créanciers.

9. Les juges relèvent que les prévenus ont, sciemment et de manière concertée, dissipé la somme de 212 000 euros dont ils disposaient à l’ouverture de la procédure, provenant de la vente de leur maison, en procédant entre juin et novembre 2015 à divers versements et à des dépenses somptuaires.

10. Ils en déduisent qu’en procédant ainsi, ils ont commis le délit de banqueroute par détournement d’actif et que le jugement doit être confirmé sur la culpabilité.

11. En se déterminant ainsi, la cour d’appel a méconnu les textes susvisés.

12. La cassation est par conséquent encourue, sans qu’il y ait leu d’examiner les autres griefs.


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