Droit de retrait et responsabilité professionnelle : Évaluation des motifs de sécurité en milieu de travail

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Droit de retrait et responsabilité professionnelle : Évaluation des motifs de sécurité en milieu de travail

Conclusions de la SASU Keolis Seine Sénart

La SASU Keolis Seine Sénart a déposé des conclusions le 20 janvier 2022, demandant à la cour de recevoir son appel et de réformer le jugement du conseil de prud’hommes. Elle conteste l’annulation de la mise à pied disciplinaire infligée à Mme [B] le 26 juillet 2019 et réclame le remboursement des sommes versées à la salariée, ainsi que le paiement des dépens.

Demandes de Mme [B]

Dans ses conclusions du 25 mars 2022, Mme [B] demande la confirmation du jugement du 15 octobre 2021, tout en contestant le montant des dommages et intérêts pour sanction abusive. Elle souhaite également l’annulation de la mise à pied, le versement de sommes spécifiques pour rappel de salaire et dommages-intérêts, ainsi que la remise d’un bulletin de paye conforme.

Contexte de la mise à pied

Le 26 juillet 2019, Mme [B] a été mise à pied pour avoir exercé un droit de retrait après avoir été informée de l’agression d’un collègue. Elle a quitté son service sans autorisation, invoquant un danger imminent, alors que la situation avait été sécurisée par les autorités.

Arguments de la société Keolis

La société soutient que Mme [B] a agi de manière inappropriée en ne prévenant pas sa hiérarchie avant de quitter son poste. Elle affirme que des mesures de sécurité étaient en place et que la salariée aurait dû utiliser les protocoles d’alerte disponibles.

Réponse de Mme [B]

Mme [B] conteste les allégations de la société, affirmant avoir informé son employeur de son droit de retrait par l’intermédiaire d’un assureur-nuit. Elle soutient que sa décision était justifiée par la gravité de l’agression subie par son collègue et l’absence de mesures de sécurité adéquates.

Analyse juridique

Selon le code du travail, un salarié peut exercer son droit de retrait en cas de danger grave et imminent. La cour a examiné si les conditions de ce droit étaient remplies et a constaté que Mme [B] avait des raisons de croire qu’elle était en danger, compte tenu des circonstances de l’agression.

Décision du conseil de prud’hommes

Le conseil de prud’hommes a annulé la sanction disciplinaire, ordonné la restitution des salaires et condamné l’employeur à verser des dommages et intérêts à Mme [B]. La cour a confirmé cette décision, rejetant les demandes de la SASU Keolis Seine Sénart.

Conséquences financières

La SASU Keolis Seine Sénart a été condamnée à payer des frais irrépétibles et les dépens de première instance, ainsi qu’une somme de 1 000 euros à Mme [B] pour couvrir ses frais d’appel.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

6 novembre 2024
Cour d’appel de Paris
RG
21/09040
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 3

ARRET DU 06 NOVEMBRE 2024

(n° , 2 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/09040 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CESXH

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Octobre 2021 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’EVRY-COURCOURONNES – RG n° 20/00196

APPELANTE

S.A.S.U. KEOLIS SEINE SENART

N° SIRET : 380 496 383

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Alexis GINHOUX, avocat au barreau de PARIS, toque P0237

INTIMEE- APPELANTE INCIDENT

Madame [Y] [B]

Née le 8 décembre 1967 à [Localité 6] (Maroc)

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Sandra MORENO-FRAZAK, avocat au barreau d’ESSONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 01 Octobre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Lisette SAUTRON, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Marie-Lisette SAUTRON, Présidente

Véronique MARMORAT, Présidente

Christophe BACONNIER, Président

Greffier, lors des débats : Madame Laetitia PRADIGNAC

ARRET :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Lisette SAUTRON, Présidente et par Laetitia PRADIGNAC, Greffière, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

APPEL DES FAITS ET PROCEDURE

Mme [Y] [B] a été engagée par contrat à durée indéterminée le 10 septembre 2012 par la SASU Keolis Seine Sénart, en qualité de conducteur, affectée aux bus de nuit du réseau Noctilien.

Dans le dernier état de la relation contractuelle, la rémunération mensuelle brute de Mme [B] s’élevait à 2 056,79 euros. La convention collective applicable est celle des transports routiers et des activités auxiliaires de transport. L’entreprise compte plus de 11 salariés.

Le 20 juin 2019, Mme [B] est convoquée à un entretien préalable à sanction disciplinaire, fixé à la date du 2 juillet 2019.

Par lettre du 26 juillet 2019, la SASU Keolis Seine Sénart a notifié à Mme [B] une mise à pied disciplinaire d’un jour, en lui reprochant d’avoir exercé irrégulièrement son droit de retrait dans la nuit du 14 au 15 juin 2019.

Le 4 mai 2020, Mme [B] a saisi le conseil de prud’hommes d’Évry-Courcouronnes de demandes tendant finalement à :

– faire annuler sa mise à pied du 26 juillet 2019,

– faire condamner l’employeur à lui payer, avec intérêts au taux légal, les sommes suivantes :

. 134,65 euros de rappel de salaire,

. 13,45 euros de congés payés afférents,

. 1 000 euros de dommages et intérêts en réparation des préjudices nés de la sanction abusive,

. 1 500 euros d’indemnité de l’article 700 du code de procédure civile,

– faire condamner sous astreinte l’employeur à lui remettre une attestation Pôle emploi et un bulletin de paie.

Par jugement contradictoire rendu le 15 octobre 2021 et notifié le 21 octobre 2021, auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud’hommes d’Évry-Courcouronnes a :

– annulé la mise à pied du 26 juillet 2019,

– condamné la SASU Keolis Seine Sénart, en la personne de son représentant légal, à verser à Madame [B] les sommes suivantes :

‘ 134,65 euros au titre du rappel de salaire,

‘ 13,47 euros au titre des congés payés afférents,

avec intérêts au taux légal sur ces sommes à compter de la date de la réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de conciliation, soit le 8 juin 2020 ;

‘ 100,00 euros au titre des dommages-intérêts pour sanction abusive,

‘ 750,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

avec intérêts au taux légal sur ces sommes à compter du prononcé du présent jugement.

– ordonné la remise d’un bulletin de paye conforme au jugement,

– débouté Mme [B] du surplus de ses demandes,

– mis les entiers dépens à la charge de la partie défenderesse.

La SASU Keolis Seine Sénart a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique le 2 novembre 2021, en chaque chef du dispositif, sauf en ce qu’il a débouté la salariée du surplus de ses demandes.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 3 septembre 2024 et l’audience de plaidoiries a été fixée au 1er octobre 2024.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS

Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 20 janvier 2022, auxquelles la cour se réfère expressément pour l’exposé des moyens, la SASU Keolis Seine Sénart demande à la cour de :

– recevoir la SASU Keolis Seine Sénart en son appel et l’y dire bien fondée ;

– réformer le jugement entrepris en ce qu’il a :

. annulé la mise à pied disciplinaire en date du 26 juillet 2019 et condamné la société Keolis Seine Sénart à payer à Madame [B] les sommes de :

‘ 134,65 euros à titre de rappel de salaire,

‘ 13,47 euros au titre des congés payés y afférents,

avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la SASU Keolis Seine Sénart de la convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation,

‘ 100 euros à titre de dommages et intérêts pour sanction abusive,

‘ 750 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,

– condamné la société Keolis Seine Sénart aux dépens ;

Statuant à nouveau :

– débouter Madame [B] de l’ensemble de ses demandes ;

– la condamner aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 25 mars 2022, auxquelles la cour se réfère expressément pour l’exposé des moyens, Mme [B] demande à la cour de :

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Évry le 15 octobre 2021 sauf en ce qu’il n’a accordé que la somme de 100 euros au titre de dommages et intérêts pour sanction abusive,

Et par conséquent :

– annuler la mise à pied du 26 juillet 2019,

– condamner la SASU Keolis Seine Sénart, en la personne de son représentant légal, à lui verser les sommes suivantes :

‘ 134,65 euros au titre du rappel de salaire,

‘ 13,47 euros au titre des congés payés afférents,

‘ 1 000,00 euros au titre des dommages-intérêts pour sanction abusive,

‘ 2 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– assortir la décision des intérêts au taux légal,

– ordonner la remise d’un bulletin de paye conforme au jugement,

– débouter la SASU Keolis Seine Sénart de ses demandes,

– mettre les entiers dépens à la charge de la partie défenderesse,

A titre subsidiaire :

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Évry le 15 octobre 2021 en toutes ses dispositions,

– condamner la SASU Keolis Seine Sénart au versement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Le 26 juillet 2019, Mme [B] a été sanctionnée d’une mise à pied disciplinaire d’un jour dans une lettre rédigée en ces termes’:

‘ Dans la nuit du 14 au 15 juin 2019, vous assuriez votre service 9903 (Noctilien) en direction de [Localité 3]. L’un de vos collègues vous a avertie qu’il avait été agressé par un usager. Vous vous êtes alors arrêtée à [Localité 7] pour le recontacter. Vous avez ensuite repris votre service et votre ligne jusqu’à [Localité 8].

Arrivée à la gare de [Localité 8], vous avez décidé d’exercer ‘un droit de retrait’ sans vous concerter avec vos collègues, selon vos dires. Vous avez alors déposé vos clients puis êtes rentrée au dépôt de l’entreprise, sans autorisation préalable de votre hiérarchie, à savoir Monsieur Assurance-vieillesse de nuit. Alors même que ce dernier a tenté de vous joindre par téléphone à plusieurs reprises, vous ne lui avez pas répondu.

Selon vos explications, vous avez invoqué avoir  »anticipé » le danger alors que vous étiez à [Localité 7], soit à environ 50 minutes du lieu de l’agression.

Vous avez décidé par vous-même, sans autorisation préalable de votre encadrement, de ne pas effectuer la fin de votre course. Vous êtes rentrée directement au dépôt. Vous n’ignorez pas que les courses non effectuées, outre le désagrément pour les usagers de ne pas bénéficier du service public de transport prévu, entraînent des pénalités financières pour l’entreprise au regard du contrat Noctilien qui nous lie à notre donneur d’ordre.

Ces incidents n’ont pas non plus été sans conséquence sur la qualité du service fourni dans la mesure où les usagers ont été privés de transport, qui plus est, la nuit.

Arrivée au dépôt de [Localité 4], vous ne vous êtes pas présentée à la régulation et n’avez pas signalé votre intention d’exercer votre droit de retrait. Vous êtes ensuite restée sur le dépôt jusqu’à la fin de votre service.

Votre comportement est contraire à l’article 4 du règlement intérieur intitulé  »prévention des accident » qui précise’:  »les salariés ont l’obligation de respecter les consignes qui leur sont données par le personnel d’encadrement pour l’exécution de leur travail et notamment les instructions relatives à la sécurité’.

Également l’article 12 intitulé  »discipline concernant la durée du travail et les horaires’»’: chaque salarié doit se trouver à son poste, en tenue de travail, et se consacrer exclusivement à l’exercice de ses fonctions, du début à la fin. Le non-respect des horaires caractérise l’irrégularité dans le travail ».

Enfin, l’article 14 intitulé  »discipline au travail » qui énonce’: le personnel est soumis, de façon générale aux directives et instructions émanant de la direction de l’entreprise et devra en particulier se conformer aux ordres donnés par les responsables hiérarchiques directs …il est obligatoire de façon générale…de respecter les consignes de travail imparties à chaque service.

Votre décision de rentrer au dépôt sans l’autorisation préalable constitue un abandon de poste. Le fait de ne pas prévenir votre hiérarchie et la régulation est contraire aux procédures et consignes de l’entreprise.

Lors de votre entretien, nous avons entendu vos explications. Nous considérons à juste titre que votre droit de retrait n’est pas justifié puisque vous n »étiez pas personnellement en situation de danger grave et imminent, comme le précise la définition du droit de retrait. D’autant qu’à l’heure où vous avez décidé d’exercer votre droit de retrait, la zone où se trouvait votre collègue agressé était déjà sécurisé par la police, les pompiers et l’assureur de nuit.

Nous ne pouvons tolérer de votre part ce manque de professionnalisme.

Outre le fait que votre attitude nuit à la bonne organisation du service auquel vous appartenez, vous avez, par vos agissements inappropriés, porté atteinte à la qualité de service que nous souhaitons offrir à nos clients et à l’image de l’entreprise.

Par conséquent, et au regard des explications que vous nous avez fournies lors de cet entretien, nous avons décidé de vous notifier par la présente une mise à pied disciplinaire d’un jour qui sera versée à votre dossier personnel. Celle-ci interviendra le dimanche 11 août 2019. Cette journée de mise à pied ne vous sera pas rémunérée et vous ne pourrez pas vous présenter sur le dépôt’.

La société Keolis Seine Sénart soutient que Mme [B] aurait décidé, après avoir été informée de l’agression de son collègue, d’exercer son droit de retrait et de cesser son service commercial, sans information préalable à sa hiérarchie, et qu’elle aurait demandé à tous les passagers de descendre à l’arrêt Gare de [Localité 8], avant de rentrer au dépôt. La société fait valoir que le réseau Noctilien mettrait pourtant à disposition une régulation dédiée disponible toute la nuit via un bouton d’alerte, qui n’aurait pas manqué de répondre immédiatement si la salariée l’avait contacté, d’une pochette avec tous les protocoles de sécurité et coordonnées nécessaires, d’un téléphone portable à disposition du conducteur et de l’agent d’accompagnement, le conducteur étant toujours accompagné par cet agent ou par un autre conducteur, ainsi que la permanence d’un assureur-nuit disposé à prendre les mesures adaptées.

Mme [B] conteste les allégations de la société, en ce qu’elle aurait immédiatement informé son employeur de son droit de retrait, par le biais de son représentant M. [T], assureur-nuit ce soir-là, qui se trouvait à côté de son collègue victime de violences alors qu’elle était au téléphone avec lui. Elle fait valoir qu’un autre salarié, M. [M], aurait également prévenu l’assureur-nuit, aucun conducteur n’ayant réussi à joindre la régulation. Par ailleurs, la salariée soutient qu’elle aurait été légitime à exercer son droit de retrait cette nuit-là, en ce qu’elle aurait eu un motif raisonnable de se retirer d’une situation dangereuse, notamment au regard de la violente agression de son collègue, de son hospitalisation, de l’absence d’interpellation de l’agresseur, de l’absence de mesures prises pour garantir la sécurité des conducteurs, de l’absence d’agents accompagnateurs, et de l’absence d’instructions données à l’assureur-nuit, faisant craindre un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.

Aux termes de l’article L. 4131-1 du code du travail, le travailleur alerte immédiatement l’employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection. Il peut se retirer d’une telle situation. L’employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d’une défectuosité du système de protection.

Aux termes de l’article L. 4131-3 du même code, aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l’encontre d’un travailleur ou d’un groupe de travailleurs qui se sont retirés d’une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou la santé de chacun d’eux.

Il résulte de ces dispositions que lorsque les conditions de l’exercice du droit de retrait ne sont pas réunies, le salarié s’expose à une retenue sur salaire, sans que l’employeur soit tenu de saisir préalablement le juge du bien-fondé de l’exercice de ce droit par le salarié.

Il n’est pas contesté que le 15 juin 2019 à 3 heures du matin un chauffeur de bus Noctilien s’est fait agresser physiquement par un usager, à la gare de [5]. Selon les plans des lignes de bus, cette gare se situe également sur le circuit de Mme [B] qui devait y faire halte environ 20 minutes après l’agression. Il est également acquis au débat que la salariée a cessé son activité, est rentrée au dépôt, faisant valoir son droit de retrait.

L’employeur justifie l’existence de personnel d’accompagnement dont les missions, telles que décrites dans le document  »Flex Flux », ne sont pas centrées sur la sécurité. Il ne justifie cependant pas leur présence ou leur disponibilité au moment de l’agression. Il justifie en revanche que la salariée, comme ses collègues, était accompagnée d’un autre salarié, dont la mission n’est cependant pas d’assurer la sécurité du conducteur.

Les protocoles de sécurité produits par l’employeur concernent des situations où le conducteur est directement agressé ou déjà dans une situation avérée de danger ce qui n’est pas le cas de figure en litige.

Aucune autre preuve n’est rapportée au dossier.

Il ressort de ces éléments et de la lettre de sanction, que Mme [B] s’est retrouvée dans une situation où sa tournée devait, dans les 20 minutes, passer par la gare où s’était déroulée l’agression de son collègue, sans être assurée de trouver une situation sécurisée, aucune pièce du dossier de l’employeur ne permettant de justifier qu’un dispositif ait été mis en place pour sécuriser la fin de la tournée, l’agresseur n’ayant par ailleurs pas été arrêté. Pourtant, lors d’une réunion du CHSCT du 10 janvier 2017, il avait été préconisé la mise en place d’une déviation automatique en cas d’agression, ce qui n’a pas été fait.

C’est donc par une analyse pertinente des éléments du dossier que le conseil de prud’hommes a considéré que la salariée avait, à 3 heures du matin, des motifs raisonnables de penser que la situation présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.

En outre, c’est vainement que l’employeur reproche à la salariée un usage irrégulier de son droit de retrait faute d’avoir prévenu son employeur, dès lors qu’il ne justifie pas la disponibilité du service de régulation, contestée par la salariée, laquelle a prévenu l’assureur-nuit. Or, celui-ci est, selon sa fiche de mission, chargé d’accompagner les conducteurs en cas d’incident et réaliser les remontées aux régulateurs.

C’est finalement à raison que le conseil des prud’hommes a annulé la sanction disciplinaire, ordonné la restitution des salaires, et condamné l’employeur au paiement de dommages et intérêts, justement évalués à 100 euros.

Succombant, l’employeur supportera les frais irrépétibles et les dépens de première instance par confirmation, ainsi que ceux d’appel, et sera à ce titre condamné au paiement d’une somme de 1 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 15 octobre 2021 par le conseil de prud’hommes d’Evry-Courcouronnes’;

Y ajoutant,

Déboute la SASU Keolis Seine Sénart de sa demande en remboursement de ses frais irrépétibles d’appel’;

Condamne la SASU Keolis Seine Sénart à payer à Mme [Y] [B] la somme de 1 000 euros.

Le greffier La présidente


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