Résiliation de bail commercial : Conditions et conséquences en cas de loyers impayés et de mauvaise foi alléguée du bailleur

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Résiliation de bail commercial : Conditions et conséquences en cas de loyers impayés et de mauvaise foi alléguée du bailleur
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Contexte du Bail Commercial

Monsieur [T] [E] et Madame [L] [E] ont conclu un bail commercial avec Madame [F] [Y] le 5 juin 2022 pour un local à [Localité 4], avec un loyer mensuel de 620 euros HT et des charges de 10 euros.

Commandement de Payer

En raison de loyers impayés, un commandement de payer de 5.114,81 euros a été délivré à Madame [F] [Y] le 20 octobre 2023, visant la clause résolutoire du bail.

Assignation en Référé

Après l’inefficacité du commandement, Monsieur [T] [E] et Madame [L] [E] ont assigné Madame [F] [Y] en référé le 19 décembre 2023 pour obtenir la résiliation du bail, son expulsion et une indemnité provisionnelle d’occupation.

Incompétence Territoriale

Le 2 juillet 2024, le juge des référés du Tribunal judiciaire de Toulon a déclaré son incompétence et a transmis le dossier au Tribunal judiciaire de Draguignan.

Demandes Réitérées

Le 2 octobre 2024, les demandeurs ont réitéré leurs demandes, sollicitant un montant de 11.194,39 euros pour les loyers et charges impayés.

Réponse de Madame [F] [Y]

Madame [F] [Y] a demandé le rejet des demandes et a proposé une compensation entre les loyers réclamés et une diminution de loyer, tout en demandant 2.500 euros pour ses frais.

Conditions de la Clause Résolutoire

Selon l’article L.145-41 du code de commerce, la clause résolutoire ne s’applique qu’un mois après un commandement infructueux, qui doit mentionner ce délai.

Preuve de l’Inexécution

Pour invoquer l’exception d’inexécution, le locataire doit prouver l’impossibilité d’utiliser les lieux. Les éléments fournis par Madame [F] [Y] n’ont pas suffi à établir cette impossibilité.

Mauvaise Foi du Bailleur

La mauvaise foi du bailleur dans l’application de la clause résolutoire a été examinée, mais les preuves n’ont pas permis de la caractériser.

Acquisition de la Clause Résolutoire

La clause résolutoire a été acquise le 21 novembre 2023, car Madame [F] [Y] n’a pas satisfait aux exigences du commandement.

Expulsion et Indemnité Provisionnelle

Le juge a ordonné l’expulsion de Madame [F] [Y] et a fixé une indemnité provisionnelle d’occupation de 651,70 euros à compter du 21 novembre 2023.

Condamnation au Paiement

Madame [F] [Y] a été condamnée à verser 11.194,39 euros pour les loyers et charges impayés, ainsi qu’à payer les dépens et 1.500 euros pour les frais de procédure.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

6 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Draguignan
RG n°
24/06134
T R I B U N A L J U D I C I A I R E
D E D R A G U I G N A N
____________

O R D O N N A N C E D E R E F E R E

REFERE n° : N° RG 24/06134 – N° Portalis DB3D-W-B7I-KLOB

MINUTE n° : 2024/ 557

DATE : 06 Novembre 2024

PRESIDENT : Madame Laetitia NICOLAS

GREFFIER : M. Alexandre JACQUOT

DEMANDEURS

Monsieur [M] [E], demeurant [Adresse 3] – [Localité 4]
représenté par Me Isabelle SCHENONE, avocat au barreau de MARSEILLE

Madame [L] [E], demeurant [Adresse 3] – [Localité 4]
représentée par Me Isabelle SCHENONE, avocat au barreau de MARSEILLE

DEFENDERESSE

Madame [F] [Y] exerçant sous le nom commercial UN JOUR UNE FLEUR, demeurant [Adresse 1] – [Localité 4]
représentée par Me BRUNET, avocat au barreau de TOULON (avocat postulant) et Me Stéphanie LE MEIGNEN, avocat au barreau de MARSEILLE (avocat plaidant)

DEBATS : Après avoir entendu à l’audience du 02/10/2024, les parties comparantes ou leurs conseils ont été avisées que la décision serait rendue le 23/10/2024 et prorogée au 06/11/2024. L’ordonnance a été rendue ce jour par la mise à disposition de la décision au greffe.

copie exécutoire à
Me Stéphanie LE MEIGNEN
Me Isabelle SCHENONE

copie dossier

délivrées le

Envoi par Comci à
Me Stéphanie LE MEIGNEN
Me Isabelle SCHENONE

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte sous seing privé du 5 juin 2022, Monsieur [T] [E] et Madame [L] [E] ont donné à bail commercial à Madame [F] [Y], exerçant sous l’enseigne UN JOUR UNE FLEUR, un local situé [Adresse 2] à [Localité 4], moyennant paiement d’un loyer mensuel de 620 euros HT, payable d’avance le 1er de chaque mois, outre les provisions sur charges d’un montant de 10 euros.

Madame [F] [Y] ayant laissé certains loyers impayés, Monsieur [T] [E] et Madame [L] [E] lui ont fait délivrer le 20 octobre 2023, un commandement de payer la somme de 5.114,81 euros au principal, auquel est annexé un décompte, visant la clause résolutoire et lui manifestant son intention de s’en prévaloir.

Ce commandement étant demeuré infructueux, par actes du 19 décembre 2023, auquel il est expressément fait référence pour un plus ample exposé des faits, de ses moyens, prétentions et demandes, Monsieur [T] [E] et Madame [L] [E] ont fait assigner Madame [F] [Y], exerçant sous l’enseigne UN JOUR UNE FLEUR, en référé devant le président du tribunal judiciaire de Toulon, aux fins de voir constater la résiliation du bail, prononcer l’expulsion de l’occupant et de fixer une indemnité provisionnelle d’occupation à hauteur de 651,70 euros par mois. Il est sollicité en outre sa condamnation au paiement des sommes de 5.913,41 euros à titre de provision à valoir sur les loyers et charges impayés arrêtés au 1er décembre 2023, de 1.800 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civil et aux dépens, en ce compris les frais du commandement de payer.

Par ordonnance du 2 juillet 2024, le juge des référés du Tribunal judiciaire de Toulon s’est déclaré incompétent territorialement au profit du Tribunal judiciaire de Draguignan et a ordonné la transmission du dossier par le greffe.

Par conclusions notifiées par RPVA le 2 octobre 2024, Monsieur [T] [E] et Madame [L] [E] ont réitéré leurs demandes relatives à l’acquisition de la clause résolutoire et accessoires et ont sollicité le paiement de la somme de 11.194,39 euros à titre de provision à valoir sur le paiement des loyers et charges impayés arrêtés au 1er septembre 2024.

Par conclusions déposées à l’audience, Madame [F] [Y] a sollicité a sollicité à titre principal, le rejet des demandes, à titre subsidiaire, d’ordonner la compensation entre les montants des loyers réclamés et le montant de la diminution réclamée. Il est sollicité en tout état de cause, la condamnation des demandeurs au paiement de la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

SUR QUOI,

Aux termes de l’article L.145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

L’article 835 du code de procédure civile prévoit par ailleurs : « le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire. ».

Il est de principe que pour justifier le défaut de paiement du loyer et invoquer l’exception d’inexécution le locataire doit rapporter la preuve de l’impossibilité totale d’utiliser les lieux loués pour son activité.

En l’espèce, s’il résulte des pièces versées aux débats qu’un sinistre est survenu dans le local le 20 juillet 2022 et malgré la production du rapport de constatation du 3 mai 2023, faisant état de des désordres affectant le plafond au niveau de la pièce principale de l’arrière-boutique et constatant que le tableau n’a pas de boitier de protection, ces éléments ne permettent pas pour autant d’établir que Madame [F] [Y] a été empêchée d’exercer son activité commerciale, de sorte que l’exception d’inexécution sera écartée.

Par ailleurs, il est constant que si les clauses résolutoires s’imposent aux juges, leur application reste subordonnée aux exigences de la bonne foi, par application de l’article 1134 du code civil, de sorte que la mauvaise foi du bailleur dans la mise en œuvre de la clause résolutoire neutralise ses effets.

Il est admis que le bailleur avait agi de mauvaise foi, lorsqu’il fait délivrer un commandement de payer dans le but de se soustraire aux travaux lui incombant et réclamés par le preneur avant la délivrance de la mise en demeure d’avoir à effectuer les travaux.

En l’espèce, s’il résulte de la facture n° 1612 réglée le 6 août 2022 que le bailleur a effectué les travaux de réparations de la tuyauterie de la salle de bain se situant dessus de l’arrière-boutique, qui est le lieu d’origine du sinistre, lui incombant.

Il ressort des pièces produites que le point de discorde concerne les travaux de reprise du plafond de l’arrière-boutique dont les travaux, qui n’ont pas été effectués.

Or, aux termes du rapport d’expertise amiable du 27 juin 2023, l’expert a estimé que les travaux de peinture et de revêtement du plafond constituent un embellissement locatif, pour lesquels Madame [F] [Y] a été indemnisée par le versement d’un chèque à hauteur de 759,38 euros par son assureur.

Dans ces conditions, la mauvaise foi du bailleur dans la mise en œuvre de la clause résolutoire n’est pas caractérisée, de sorte qu’elle ne sera pas retenue.

Dès lors, Madame [F] [Y], exerçant sous l’enseigne UN JOUR UNE FLEUR n’ayant pas satisfait aux causes du commandement dans le mois de sa délivrance ni saisi le juge aux fins de délai, il convient de constater l’acquisition de la clause résolutoire à la date du 21 novembre 2023.

Son maintien dans les lieux en l’absence de titre et l’atteinte au droit de propriété ainsi causé constitue un trouble manifestement illicite que le juge des référés doit faire cesser en prononçant son expulsion, ainsi que celle de tous occupants de son chef, le cas échéant avec l’assistance de la force publique, et en fixant une indemnité provisionnelle d’occupation, égale au montant du loyer qui aurait été dû si le bail n’avait pas été résilié, soit 651,70 euros à compter du 21 novembre 2023, jusqu’à la libération complète des lieux.

Sur la demande de provision, il ressort des pièces que la créance n’est pas sérieusement contestable de sorte qu’il convient de condamner Madame [F] [Y], exerçant sous l’enseigne UN JOUR UNE FLEUR à verser à Monsieur [T] [E] et Madame [L] [E] la somme de 11.194,39 euros, à titre de provision à valoir sur les loyers, charges et indemnités d’occupation échues impayés arrêtés au 31 août 2024, sans qu’aucune compensation éventuelle ne soit justifiée.

Madame [F] [Y], exerçant sous l’enseigne UN JOUR UNE FLEUR sera condamnée aux dépens, en ce compris les frais de commandement de payer et devra, en outre, à son adversaire une somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des référés, statuant en référé par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

Vu l’article L.145-41 du code de commerce,
Vu l’article 835 du code de procédure civile,
Vu l’article 700 du code de procédure civile,

CONSTATONS l’acquisition de la clause résolutoire insérée au contrat de bail conclu le 5 juin 2022, entre Monsieur [T] [E] et Madame [L] [E] et Madame [F] [Y], exerçant sous l’enseigne UN JOUR UNE FLEUR à la date du 21 novembre 2023 ;

ORDONNONS, à défaut de restitution volontaire des lieux dans le mois de la signification de la présente ordonnance, l’expulsion de la Madame [F] [Y], exerçant sous l’enseigne UN JOUR UNE FLEUR et de tout occupant de son chef des lieux loués avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d’un serrurier ;

CONDAMNONS Madame [F] [Y], exerçant sous l’enseigne UN JOUR UNE FLEUR à payer à Monsieur [T] [E] et Madame [L] [E] une indemnité provisionnelle d’occupation d’un montant de 651,70 euros à compter du 21 novembre 2023, jusqu’à la libération complète des lieux ;

CONDAMNONS Madame [F] [Y], exerçant sous l’enseigne UN JOUR UNE FLEUR à payer à Monsieur [T] [E] et Madame [L] [E] une somme de 11.194,39 euros, à titre de provision à valoir sur les loyers, charges et indemnités d’occupation échues impayés arrêtés au 31 août 2024 ;

DISONS n’y avoir lieu à référé pour le surplus des prétentions ;

CONDAMNONS Madame [F] [Y], exerçant sous l’enseigne UN JOUR UNE FLEUR aux dépens, frais de commandement inclus ;

CONDAMNONS Madame [F] [Y], exerçant sous l’enseigne UN JOUR UNE FLEUR à payer à Monsieur [T] [E] et Madame [L] [E] une somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe, les jours, mois et an susdits.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


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