Conflit contractuel relatif à l’exécution d’une installation photovoltaïque : enjeux de conformité et contestations sur l’obligation de paiement.

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Conflit contractuel relatif à l’exécution d’une installation photovoltaïque : enjeux de conformité et contestations sur l’obligation de paiement.
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Constitution du contrat

Le 9 mai 2022, Madame [X] [P] a signé un contrat de maîtrise d’ouvrage déléguée avec la société OTOVO France pour l’installation de panneaux photovoltaïques sur sa toiture, pour un montant total de 15.612 euros TTC.

Réception des travaux

Le 15 juillet 2022, Madame [P] a signé un procès-verbal de réception des travaux sans réserve, confirmant ainsi l’achèvement de l’installation.

Assignation en référé

Le 30 mai 2024, la SAS OTOVO France a assigné Madame [X] [P] en référé devant le Tribunal Judiciaire de Nîmes, demandant le paiement de la somme de 15.612 euros, ainsi que des intérêts de retard et des frais de recouvrement, en plus d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Audience et renvois

L’affaire a été appelée à l’audience du 19 juin 2024, puis renvoyée à deux reprises avant d’être retenue pour l’audience du 2 octobre 2024.

Arguments de la SAS OTOVO France

Lors de l’audience, la SAS OTOVO France a soutenu que l’obligation de paiement de Madame [P] était non sérieusement contestable, affirmant avoir respecté ses engagements contractuels. Elle a également contesté les allégations de non-conformité des équipements installés, précisant que les différences étaient mineures et que l’installation était fonctionnelle.

Arguments de Madame [X] [P]

Madame [X] [P] a contesté le caractère non contestable de l’obligation de paiement, invoquant une inexécution contractuelle due à la non-conformité des équipements installés. Elle a également soulevé la nullité du contrat pour réticence dolosive, arguant que la société avait installé un matériel différent de celui convenu sans son accord.

Demande de Madame [X] [P]

Madame [P] a demandé au tribunal de déclarer ses demandes recevables et fondées, de débouter la société OTOVO de ses demandes, et de condamner cette dernière à lui verser une somme au titre de l’article 700 du CPC, ainsi qu’aux dépens.

Décision du tribunal

Le tribunal a rejeté les demandes provisionnelles de la SAS OTOVO France, considérant que les contestations de Madame [P] sur l’obligation de paiement étaient suffisamment sérieuses pour justifier un débat au fond. La société a conservé la charge des dépens, et aucune condamnation sur le fondement de l’article 700 du CPC n’a été prononcée.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

6 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Nîmes
RG n°
24/00357
MINUTE N°
RG – N° RG 24/00357 – N° Portalis DBX2-W-B7I-KPG5
Me Eliott ASSOULINE
Me Sigride BANY
Me Xavier COTTIN
la SELARL EVE SOULIER – JEROME PRIVAT – THOMAS AUTRIC
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NÎMES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
RENDUE LE 06 NOVEMBRE 2024

PARTIES :

DEMANDERESSE

S.A.S. OTOVO FRANCE, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° Siret 812 853 919 000 31, prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis [Adresse 2]
representée par Maître COTTIN Xavier, avocat au barreau de NIMES, (postulant), Maître Eliott ASSOULINE, avocat au barreau de LYON (plaidant)

DEFENDERESSE

Mme [X] [P], demeurant [Adresse 1]
représentée par Maître Thomas AUTRIC de la SELARL EVE SOULIER – JEROME PRIVAT – THOMAS AUTRIC, avocats au barreau de NIMES (postulant), Me Sigride BANY, avocat au barreau de PARIS (plaidant)

Ordonnance contradictoire, en premier ressort, prononcée par Emmanuelle MONTEIL, Première vice-présidente, tenant l’audience des référés, par délégation de Madame le président du tribunal judiciaire de Nîmes, assistée de Halima MANSOUR, Greffier, présente lors des débats et du prononcé du délibéré, après que la cause a été débattue à l’audience publique du 02 octobre 2024 où l’affaire a été mise en délibéré au 06 novembre 2024, les parties ayant été avisées que l’ordonnance serait prononcée par sa mise à disposition au greffe du tribunal judiciaire.

MINUTE N°
RG – N° RG 24/00357 – N° Portalis DBX2-W-B7I-KPG5
Me Eliott ASSOULINE
Me Sigride BANY
Me Xavier COTTIN
la SELARL EVE SOULIER – JEROME PRIVAT – THOMAS AUTRIC

EXPOSE DU LITIGE

Le 9 mai 2022, Madame [X] [P] a conclu un contrat de maitrise d’ouvrage déléguée avec la société OTOVO France pour l’installation de panneaux photovoltaïques sur la toiture de son domicile sis [Adresse 1] à [Localité 3] moyennant un prix de 15.612 euros TTC.

Le 15 juillet 2022, Madame [P] a signé un procès-verbal de réception des travaux sans réserve.

Par acte de commissaire de justice en date du 30 mai 2024, la SAS OTOVO FRANCE, a assigné en référé Madame [X] [P] devant Madame la Présidente du Tribunal Judiciaire de Nîmes, aux fins de voir, au visa des articles 1103 du code civil et 835 du Code de procédure civile :
– CONDAMNER à titre provisionnel Madame [X] [P] à payer à la SAS OTOVO FRANCE la somme de 15.612 euros correspondant au reste à charge conformément à la facture n°OFR_494 émise par la SAS OTOVO France ;
– CONDAMNER à titre provisionnel Madame [X] [P] à payer à la SAS OTOVO FRANCE la somme de 744,50 euros correspondant aux intérêts de retard de paiement de la créance conformément à la facture n°OFR_494 émise par la SAS OTOVO France ;
– CONDAMNER à titre provisionnel Madame [X] [P] à payer à la SAS OTOVO FRANCE la somme de 40 euros correspondant aux frais de recouvrement ;
– CONDAMNER Madame [X] [P] à payer à la SAS OTOVO FRANCE la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– CONDAMNER Madame [X] [P] aux entiers dépens.

L’affaire a été appelée à l’audience du 19 juin 2024 et a été retenue à l’audience du 2 octobre 2024 après deux renvois contradictoires.

A cette dernière audience, la SAS OTOVO FRANCE a repris oralement les termes de ses conclusions responsives et récapitulatives auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des faits et moyens soulevés. Elle soutient que l’obligation de Madame [P] de payer la somme de 15.612 euros TTC est non sérieusement contestable. En ce sens, elle estime avoir satisfait à son obligation principale tenant la signature du contrat de maitrise d’œuvre déléguée le 9 mai 2022 et celle du procès- verbal de fin de travaux le 15 juillet 2022. Elle expose que la non-conformité de la passerelle de communication et des panneaux installés du matériel installé telle qu’alléguée par la défenderesse ne saurait constituer une contestation sérieuse fondée de nature à faire échec au versement d’une provision à valoir sur le règlement de la facture. Elle explique que l’unique différence entre les deux passerelles de communication est la capacité de surveiller la consommation électrique de la maison et de joindre un stockage batterie. Concernant les panneaux photovoltaïques, il s’agit de modèles identiques à la seule différence que l’un possède une garantie constructeur plus étendue que l’autre. En tout état de cause, la société souligne que Madame [P] bénéficie d’une installation fonctionnelle. Enfin, elle signale la déloyauté de la défenderesse en ce que la société l’a vainement depuis le 25 septembre 2022 mise en demeure de s’acquitter du prix des travaux et a tenté de trouver un accord en proposant notamment de remplacer les passerelles litigieuses ou une extension de garantie couvrant les panneaux photovoltaïques. S’agissant du montant pénalités de retard, la SAS OTOVO France expose que la facture mentionnait que « en cas de retard, une pénalité égale à 3 fois le taux d’intérêt légal sera exigible ». Elle soutient qu’à la date d’exigibilité de la créance, le taux d’intérêt légal était de 0,77% ce qui correspond à un taux conventionnel de 2,31%. Elle observe également qu’au 4 juillet 2024, Madame [P] a accumulé 657 jours de retard. En conséquence, la SAS OTOVO France conclut au rejet des demandes de Madame [X] [P] et maintient ses demandes initiales sauf à porter la demande de condamnation provisionnelle à valoir sur les intérêts de retard de paiement de la créance à la somme de 648,15 euros.

Madame [X] [P] a repris oralement les termes de ses conclusions en défense n°1 auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des faits et moyens soulevés. Pour s’opposer au caractère non contestable de l’obligation de paiement, elle soulève en premier lieu une inexécution contractuelle de la SAS OTOVO France caractérisée par la non-conformité du matériel installé avec celui prévu au contrat. Elle expose que la passerelle installée est de type Envoy-S standard alors que celle commandée était de type Envoy-S Metered. Quant aux panneaux photovoltaïques installés (modèle DUO PEAK BLK ML G9 couvert par une garantie constructeur de 12 ans), ils ne correspondent pas non plus à ceux commandés (modèle Hanwha DUO PEAK BLK ML G9+ couvert par une garantie constructeur de 25 ans). En second lieu, Madame [P] soulève la nullité du contrat de maitrise d’œuvre déléguée alléguant la réticence dolosive de la société. Elle expose que le bon de commande contenait les caractéristiques essentielles des biens vendus et que la société a délibérément procédé à une installation ne répondant pas aux caractéristiques essentielles sans l’en informer et sans recueillir au préalable son accord.
En conséquence, elle demande à Madame la Présidente du Tribunal Judiciaire de Nîmes de :
– la DECLARER recevable et bien fondée en ses demandes ;
– DEBOUTER la société OTOVO de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
– Subsidiairement, dire que la demande de la société OTOVO se heurte à une contestation sérieuse et la renvoyer à mieux se pourvoir au fond ;
En tout état de cause,
– CONDAMNER la société OTOVO à payer à Madame [P] la somme de 1.700 euros au titre de l’article 700 du CPC ;
– CONDAMNER la société OTOVO aux entiers dépens.

L’affaire a été mise en délibéré au 6 novembre 2024, par mise à disposition au greffe.

MOTIFS

1- Sur les demandes de provision

Aux termes de l’article 835 alinéa 2 du Code de procédure civile :
« Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire. »

Il ressort des éléments produits aux débats qu’aux termes du contrat de maitrise d’œuvre déléguée conclu le 9 mai 2022, la SAS OTOVO France devait satisfaire à l’installation de panneaux Hanwha Q.PEAK DUO BLK ML G-9+ 375, d’onduleurs enphase IQ 7+ (1-Phase) (et Envoy-S Metered) ainsi que d’un compteur intelligent Enphase ENV-S-WM1-230 (Envoy-S Metered/1-Phase) (20A) moyennant un prix de 15.612 euros TTC.

Le procès-verbal de fin de travaux a été signé par l’ensemble des parties le 15 juillet 2022 avec réception sans réserve.
A ainsi été éditée la facture n°OFR_2594 le 1er septembre 2022, date à compter de laquelle, il était contractuellement prévu que le maître d’ouvrage devait s’acquitter du paiement du prix des travaux auprès de la société sous quinzaine.

Il ressort de l’article 7 du contrat de maitrise d’œuvre déléguée signé par les parties ainsi que de la facture que « en cas de retard de paiement, sous réserve d’avoir reçu la facture et après une relance adressée par LRAR infructueuse pendant un délai de sept jours, le Maître d’Ouvrage sera redevable d’un intérêt de retard correspondant à trois fois le taux d’intérêt légal ».

Madame [P] ne s’est aucunement acquittée du paiement du prix des prestations arguant d’un manquement de la société à son obligation de délivrance conforme au bon de commande.

La SAS OTOVO France reconnaît que la passerelle de communication posée (à savoir une passerelle Envoy-S standard) n’est pas celle contractuellement prévue au contrat (à savoir une passerelle Envoy-S Metered). Elle ne conteste pas que le remplacement de cette passerelle par un autre modèle n’a pas été porté à la connaissance de Madame [P].

La SAS OTOVO France reconnaît que les panneaux installés (à savoir le modèle Q Cells 375 G9) ne sont pas ceux contractuellement prévus au contrat (à savoir le modèle Hanwha DUO PEAK BLK ML G 9+). Elle ne conteste pas que cette substitution de modèle et ses conséquences n’ont pas été portées à la connaissance de Madame [P].

Tenant ces modifications unilatérales des termes du contrat liant les parties, et nonobstant l’absence de dysfonctionnement de l’installation, Madame [X] [P] soulève des contestations quant à son obligation de paiement présentant un caractère suffisamment sérieux pour justifier un débat au fond sur les contours des obligations réciproques des co-contractants.

En conséquence, les demandes provisionnelles sont rejetées.

2- Sur les demandes accessoires

La SAS OTOVO France conserve la charge des dépens.

Il n’y a pas lieu à condamnation sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Emmanuelle MONTEIL, 1ère vice-présidente, juge des référés,

Statuant par décision contradictoire, par mise à disposition au greffe, susceptible d’appel,

Vu l’article 835 alinéa 2 du Code de procédure civile,

REJETTE les demandes provisionnelles de la SAS OTOVO France ;

DIT n’y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

LAISSE à la SAS OTOVO France la charge des dépens ;

RAPPELLE que la présente ordonnance bénéficie de l’exécution provisoire de droit ;

La Greffière La 1ère vice-présidente


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