Recours contre une contrainte : enjeux de délais et de compétence dans le recouvrement des cotisations sociales

·

·

Recours contre une contrainte : enjeux de délais et de compétence dans le recouvrement des cotisations sociales

Contexte de l’affaire

Monsieur [H] [F] a saisi le tribunal judiciaire de Lyon le 1er juillet 2019 pour former opposition à une contrainte établie par le Directeur de la CIPAV, signifiée le 11 mars 2019, pour un montant de 8 119,01 € en cotisations et majorations de retard pour les exercices 2011, 2012 et 2013.

Arguments de l’URSSAF

L’URSSAF Ile-de-France, représentant la CIPAV, a soulevé l’irrecevabilité de l’opposition de Monsieur [F], arguant qu’elle avait été formée après le délai légal. Elle a également demandé la validation de la contrainte pour son montant total et la condamnation de Monsieur [F] au paiement de cette somme, en justifiant sa qualité pour agir et en affirmant que les cotisations n’étaient pas prescrites.

Réponse de Monsieur [F]

Monsieur [F] a contesté la qualité d’action de l’URSSAF et a soulevé la péremption de l’instance, affirmant que les cotisations étaient prescrites et que les montants réclamés n’étaient pas justifiés. Il a demandé une indemnité de 1000 € à l’URSSAF en vertu de l’article 700 du code de procédure civile.

Décision du tribunal

Le tribunal a reconnu la compétence de l’URSSAF Ile-de-France pour le recouvrement des cotisations dues par Monsieur [F]. Il a déclaré l’opposition de Monsieur [F] irrecevable pour cause de forclusion, ayant été formée après l’expiration du délai légal. La contrainte a été validée, et Monsieur [F] a été condamné à payer les frais de signification ainsi que les entiers dépens.

Conclusion

Le jugement a été prononcé le 7 novembre 2024, confirmant la validité de la contrainte et la responsabilité de Monsieur [F] pour les frais engagés.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

7 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Lyon
RG
19/02107
MINUTE N° :

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON

POLE SOCIAL – CONTENTIEUX GENERAL

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

JUGEMENT DU :

MAGISTRAT :

ASSESSEURS :

DÉBATS :

PRONONCE :

AFFAIRE :

NUMÉRO R.G :

7 novembre 2024

Julien FERRAND, président

Stéphanie DE MOURGUES, assesseur collège employeur
Yasmina SEMINARA, assesseur collège salarié

assistés lors des débats par Sophie RAOU, greffière

tenus en audience publique le 5 septembre 2024

jugement contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé en audience publique le 7 novembre 2024 par le même magistrat assisté par Anne DESHAYES, greffière

URSSAF ILE-DE-FRANCE VENANT AUX DROITS DE LA CIPAV
C/ Monsieur [H] [F]

N° RG 19/02107 – N° Portalis DB2H-W-B7D-UBUS

DEMANDERESSE

URSSAF ILE-DE-FRANCE VENANT AUX DROITS DE LA CIPAV,
dont le siège social est sis [Localité 2]
représentée par la SELAS EPILOGUE AVOCATS,
avocats au barreau de LYON, vestiaire : 1733

DÉFENDEUR

Monsieur [H] [F],
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Paul-richard ZELMATI, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 650

Notification le :
Une copie certifiée conforme à :

URSSAF ILE-DE-FRANCE VENANT AUX DROITS DE LA CIPAV
[H] [F]
la SELAS EPILOGUE AVOCATS, vestiaire : 1733
Me Paul-richard ZELMATI, vestiaire : 650
Une copie revêtue de la formule exécutoire :

la SELAS EPILOGUE AVOCATS, vestiaire : 1733
Une copie certifiée conforme au dossier

EXPOSE DU LITIGE

Par courrier daté du 29 mai 2019 reçu au greffe le 1er juillet 2019, Monsieur [H] [F] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de former opposition à la contrainte établie le 28 janvier 2015 par le Directeur de la CIPAV et signifiée le 11 mars 2019 pour un montant de 8 119,01 € en cotisations et majorations de retard dues au titre des exercices 2011, 2012 et 2013.

Aux termes de ses conclusions reprises à l’audience du 5 septembre 2024, l’Union de Recouvrement des cotisations de Sécurité Sociale et d’Allocations Familiales (URSSAF) Ile-de-France venant aux droits de la Caisse Interprofessionnelle de Prévoyance et d’Assurance Vieillesse (CIPAV) soulève à titre principal l’irrecevabilité de l’opposition formée au-delà du délai légal prévu par l’article R. 133-3 du code de la sécurité sociale alors en vigueur dès lors que la contrainte a été régulièrement signifiée à étude.

A titre subsidiaire, elle sollicite la validation de la contrainte pour son entier montant, soit 8119,01 € ainsi que la condamnation de Monsieur [F] au paiement de cette somme, en faisant valoir :

– que l’URSSAF Ile-de-France a qualité pour agir aux fins de recouvrer les cotisations des travailleurs indépendants qui relevaient de la CIPAV en application des dispositions de la loi du 23 décembre 2021 et du décret du 2 mars 2023 ;

– que le délai de péremption de l’instance n’a pu courir en l’absence de diligences mises à la charge des parties jusqu’à leur convocation ;

– qu’au regard des dates de la mise en demeure et de la signification de la contrainte, ni les cotisations, ni l’action en recouvrement ne sont prescrites ;

– que les cotisations ont été calculées sur des bases réduites au vu des revenus nuls déclarés par le cotisant et qu’une régularisation pour 2013 est intervenue au titre de l’année 2011 ;

– que Monsieur [F] n’a pas présenté de demande de réduction au titre des retraites complémentaires 2012 et 2013.

Elle conclut au rejet des demandes de Monsieur [F] et sollicite sa condamnation au paiement d’une indemnité de 300 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions et des observations formulées à l’audience du 5 septembre 2024, Monsieur [H] [F] soulève :

– l’irrecevabilité de l’action engagée par l’URSSAF Ile-de-France qui ne justifie pas de sa qualité pour agir ;

– la péremption de l’instance en l’absence d’acte interruptif accompli dans le délai de deux ans à compter de la signification de la contrainte.

Il fait valoir :

– que le délai de forclusion n’a pas couru en l’absence de signification à personne de la contrainte et de justification des diligences ;

– que les cotisations réclamées au titre des années 2011 à 2015 sont prescrites, la contrainte ayant été signifiée plus de trois ans après leur exigibilité ;

– que les montants des cotisations ne sont pas justifiés.

Il sollicite la condamnation de l’URSSAF Ile-de-France au paiement d’une indemnité de 1000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la qualité pour agir :

En application des dispositions combinées de l’article 12 III C de la loi n°2021-1754 du 23 décembre 2021 et de l’article 3 du décret n°2023-148 du 2 mars 2023, l’URSSAF Ile-de-France est compétente depuis le 1er janvier 2023 pour le recouvrement de l’ensemble des cotisations et dettes afférentes dues par les travailleurs indépendants affiliés antérieurement aux organismes mentionnés à l’article L. 640-1 du code de la sécurité sociale.

L’URSSAF Ile-de-France a dès lors qualité pour agir aux fins de recouvrer les cotisations dues par Monsieur [F] au titre des années 2011 à 2013.

Sur la recevabilité de l’opposition à contrainte :

Aux termes de l’article R. 133-3 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige,  » (…) Le débiteur peut former opposition par inscription au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort duquel il est domicilié ou pour les débiteurs domiciliés à l’étranger, au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort de l’organisme créancier par lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressée au secrétariat dudit tribunal dans les quinze jours à compter de la notification ou de la signification.(…) »

La contrainte établie le 28 janvier 2015 a été signifiée à étude par acte d’huissier le 11 mars 2019. L’huissier a confirmé la certitude du domicile en constatant la présence du nom de Monsieur [F] sur l’interphone et la boîte aux lettres. Il a fait état des diligences effectuées en l’absence de personne présente, en déposant la copie de l’acte à son étude après avoir laissé un avis de passage et en adressant la lettre prévue par les dispositions de l’article 658 du code de procédure civile.

Au regard de ces diligences, le délai de forclusion a régulièrement couru à compter du 11 mars 2019 et a expiré le 26 mars 2019 à minuit.

L’opposition formée tardivement par courrier daté du 29 mai 2019 reçu au greffe le 1er juillet 2019 est en conséquence irrecevable.

Sur les autres demandes :

Aux termes de l’article R. 133-6 du code de la sécurité sociale : « les frais de signification de la contrainte faite dans les conditions de l’article R. 133-3, ainsi que de tous actes de procédure nécessaires à son exécution, sont à la charge du débiteur, sauf lorsque l’opposition a été jugée fondée. »

L’opposition étant irrecevable, les frais de signification de la contrainte émise le 28 janvier 2015, dont il est justifié pour un montant de 72,88 €, seront mis à la charge de Monsieur [F].

Il apparaît conforme à l’équité de laisser aux parties la charge des frais exposés non compris dans les dépens.

Monsieur [F] sera condamné au paiement des entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

Le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,

Déclare recevable l’action engagée par l’URSSAF Ile-de-France venant aux droits de la CIPAV ;

Déclare l’opposition formée par Monsieur [H] [F] irrecevable pour cause de forclusion;

Constate que la contrainte émise le 28 janvier 2015 et signifiée le 11 mars 2019 pour une somme globale de 8 119,01 € en cotisations et majorations de retard au titre des exercices 2011, 2012 et 2013, a acquis tous les effets d’un jugement notamment le bénéfice de l’hypothèque judiciaire ;

Condamne Monsieur [H] [F] à verser à l’URSSAF Ile-de-France venant aux droits de la CIPAV la somme de 72,88 € au titre des frais de signification ;

Déboute les parties de leurs autres demandes ;

Rappelle que la décision du Tribunal est exécutoire de droit à titre provisoire et que tous les actes de procédure nécessaires à l’exécution de la contrainte, sont à la charge du débiteur ;

Condamne Monsieur [H] [F] au paiement des entiers dépens.

Ainsi jugé et prononcé en audience publique le 7 novembre 2024, et signé par le président et la greffière.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x