Contexte du litigeLa SA CARREFOUR BANQUE a accordé un crédit personnel de 19 900 euros à Monsieur [V] [F] le 24 octobre 2022, avec un taux nominal de 5,17% et un remboursement en 36 mensualités. Suite à des impayés, la banque a assigné Monsieur [V] [F] devant le tribunal judiciaire de Paris le 12 mars 2024, demandant le paiement de 19 989,91 euros, ainsi que des frais supplémentaires. Arguments de la SA CARREFOUR BANQUELa SA CARREFOUR BANQUE a soutenu que les mensualités n’avaient pas été payées régulièrement, entraînant la déchéance du terme le 5 juillet 2023. Elle a précisé que le premier incident de paiement avait eu lieu en mars 2023 et que sa créance n’était pas forclose. Déroulement de l’audienceL’audience a eu lieu le 2 septembre 2024, où la SA CARREFOUR BANQUE a demandé le bénéfice de son acte introductif d’instance. Monsieur [V] [F] ne s’est pas présenté, et le jugement a été réputé contradictoire. Analyse juridiqueLe juge a examiné la demande de paiement en se basant sur les dispositions du code de la consommation. Il a relevé d’office les moyens tirés de l’application de ce code, conformément à l’article R.632-1. La défaillance de l’emprunteur permet au prêteur d’exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus. Validité de la signature du contratLa signature électronique du contrat a été jugée régulière, car un certificat de prestataire de services de certification électronique a été produit, garantissant son intégrité et son lien avec l’acte. Nullité du contratLe déblocage des fonds a eu lieu après le délai de sept jours suivant l’acceptation du contrat, mais cela n’a pas entraîné de nullité, car les fonds ont été débloqués conformément aux règles en vigueur. Forclusion de la créanceLa demande de paiement n’était pas atteinte par la forclusion, car le premier incident de paiement non régularisé était survenu en mars 2023, et la demande a été faite dans les délais. Déchéance du termeLa SA CARREFOUR BANQUE a pu prononcer la déchéance du terme le 5 juillet 2023, après avoir envoyé une mise en demeure à Monsieur [V] [F] le 2 juin 2023, restée sans effet. Déchéance du droit aux intérêts contractuelsLe prêteur a été déchu de son droit aux intérêts, car il n’a pas respecté le formalisme informatif requis par le code de la consommation, notamment en ce qui concerne la consultation du fichier des incidents de paiement. Montant de la créanceMonsieur [V] [F] est tenu de rembourser 18 121,03 euros, correspondant au capital restant dû et à une clause pénale réduite à 1 euro. Les intérêts échus ne seront pas dus en raison de la déchéance du droit aux intérêts. Capitalisation des intérêtsLa demande de capitalisation des intérêts a été rejetée, car elle est prohibée dans le cadre des crédits à la consommation. Décision finaleLe tribunal a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels, réduit la clause pénale, et condamné Monsieur [V] [F] à verser la somme due à la SA CARREFOUR BANQUE, avec des intérêts au taux légal à compter du 5 juillet 2023. Les dépens ont été à la charge de Monsieur [V] [F]. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copie conforme délivrée
le :
à :Monsieur [V] [F]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :Me Stéphane GAUTIER
Pôle civil de proximité
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PCP JCP fond
N° RG 24/04106 – N° Portalis 352J-W-B7I-C4T6U
N° MINUTE :
JUGEMENT
rendu le lundi 28 octobre 2024
DEMANDERESSE
La société CARREFOUR BANQUE,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Stéphane GAUTIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #R0233
DÉFENDEUR
Monsieur [V] [F],
demeurant [Adresse 2]
non comparant, ni représenté
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Romain BRIEC, Juge des contentieux de la protection
assisté de Coraline LEMARQUIS, Greffière,
DATE DES DÉBATS
Audience publique du 02 septembre 2024
JUGEMENT
réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 28 octobre 2024 par Romain BRIEC, Juge des contentieux de la protection assisté de Coraline LEMARQUIS, Greffière
Décision du 28 octobre 2024
PCP JCP fond – N° RG 24/04106 – N° Portalis 352J-W-B7I-C4T6U
Selon offre préalable acceptée le 24 octobre 2022, la SA CARREFOUR BANQUE a consenti à Monsieur [V] [F] un crédit personnel d’un montant en capital de 19900 euros remboursable au taux nominal de 5,17% (soit un TAEG de 5,30%) en 36 mensualités de 598,03 euros hors assurance.
Des échéances étant demeurées impayées, la SA CARREFOUR BANQUE a fait assigner Monsieur [V] [F] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris, par acte de commissaire de justice en date du 12 mars 2024, en paiement des sommes suivantes, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
– 19989,91 euros au titre du crédit et de l’indemnité légale de 8% (18730,67+1259,24), avec intérêts contractuels au taux de 5,30% à compter du 5 juillet 2023, avec prononcé de la résiliation judiciaire aux torts de l’emprunteur si le tribunal estimait la déchéance du terme irrégulière, et avec capitalisation des intérêts,
– 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l’instance.
Au soutien de sa demande, la SA CARREFOUR BANQUE fait valoir que les mensualités d’emprunt n’ont pas été régulièrement payées, ce qui l’a contraint à prononcer la déchéance du terme le 5 juillet 2023, rendant la totalité de la dette exigible. Elle précise que le premier incident de paiement non régularisé se situe au mois de mars 2023 et que sa créance n’est ainsi pas forclose.
L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 2 septembre 2024.
A cette audience, la SA CARREFOUR BANQUE, représentée par son conseil, a sollicité le bénéfice de son acte introductif d’instance. La forclusion, la nullité, la déchéance du droits aux intérêts contractuels (FIPEN, notice d’assurance, FICP, vérification solvabilité) et légaux ont été mis dans le débat d’office, sans que le demandeur ne présente d’observations supplémentaires sur ces points.
Bien que régulièrement assigné à étude, Monsieur [V] [F] n’a pas comparu et ne s’est pas fait représenter. Conformément à l’article 473 du code de procédure civile, il sera statué par jugement réputé contradictoire.
La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 28 octobre 2024.
Selon l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur la demande en paiement
Le présent litige est relatif à un crédit soumis aux dispositions de la loi n°2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu’il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation issue de l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et du décret n°2016-884 du 29 juin 2016.
L’article R.632-1 du code de la consommation permet au juge de relever d’office tous les moyens tirés de l’application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par le juge à l’audience du 2 septembre 2024.
L’article L.312-39 du code de la consommation prévoit qu’en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restantes dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application de l’article 1231-5 du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret. L’article D.312-16 du même code précise que lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l’article L.312-39, il peut demander une indemnité égale à 8% du capital restant dû à la date de la défaillance.
Ce texte n’a toutefois vocation à être appliqué au titre du calcul des sommes dues qu’après vérification de la régularité de la signature du contrat, de l’absence de cause de nullité du contrat, de l’absence de forclusion de la créance, de ce que le terme du contrat est bien échu et de l’absence de déchéance du droit aux intérêts conventionnels.
Sur la signature du contrat
Aux termes de l’article 1366 du code civil, l’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité. L’article 1367 du même code ajoute que la signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique identifie son auteur. Elle manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte. Lorsqu’elle est électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache.
Il en résulte qu’il existe deux types de signatures dites électroniques, la différence se situant au niveau de la charge de la preuve :
– la signature électronique « qualifiée », répondant aux conditions de l’article 1367 du code civil et obtenue dans les conditions fixées par le décret n° 2001-272 du 30 mars 2001 (auquel s’est substitué le décret n°2017-1416 du 28 septembre 2017 lequel renvoie au règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014), laquelle repose sur un certificat qualifié de signature électronique délivré au signataire par un prestataire de services de certification électronique (PSCE) notamment après identification du signataire, signature dont la fiabilité est présumée,
– la signature électronique « simple » ne répondant pas à ces conditions (signature accompagnée d’un certificat électronique qui n’est pas qualifié ou sans vérifications de l’identité du signataire) et qui n’est pas dépourvue de toute valeur, mais pour laquelle il appartient à la SA CARREFOUR BANQUE de justifier en outre que les exigences de fiabilité de l’article 1367 du code civil sont respectées, à savoir l’identification de l’auteur et l’intégrité de l’acte, pour la vérification desquels sont examinés les éléments extérieurs suivants : production de la copie de la pièce d’identité, absence de dénégation d’écriture, paiement de nombreuses mensualités, échéancier de mensualités, existence de relations contractuelles antérieures entre le signataire désigné et son cocontractant etc.
En l’espèce, un certificat de PSCE a été produit, de sorte que la signature électronique peut être qualifiée et sa fiabilité peut donc être présumée.
En ces conditions, la régularité de la signature sera reconnue.
Sur la nullité du contrat
Aux termes de l’article L.312-25 du code de la consommation, pendant un délai de sept jours à compter de l’acceptation du contrat par l’emprunteur, aucun paiement, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, ne peut être fait par le prêteur à l’emprunteur ou pour le compte de celui-ci, ni par l’emprunteur au prêteur.
La jurisprudence sanctionne la violation de ce texte par la nullité du contrat en vertu de l’article 6 du code civil, laquelle entraîne le remboursement par l’emprunteur du capital prêté (Ccass civ 1ère, 22 janvier 2009, 03-11.775).
En l’espèce, le déblocage des fonds a eu lieu le 8 novembre 2022, soit postérieurement au délai de sept jours précité courant à compter du 24 octobre 2022, de sorte qu’aucune nullité n’est encourue.
Sur la forclusion
L’article R. 312-35 du code de la consommation dispose que les actions en paiement à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur dans le cadre d’un crédit à la consommation, doivent être engagées devant le tribunal d’instance dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Ainsi, le prêteur est forclos pour l’intégralité de sa créance, dès lors que deux ans se sont écoulés depuis la première échéance impayée et non régularisée.
La règle de computation de l’article 641 du code de procédure civile s’applique, de sorte que le délai expire le jour de la dernière année qui porte le même quantième que le jour de l’évènement qui fait courir le délai (Civ 1°,17 mars 1998, 96-15.567).
En l’espèce, au regard de l’historique du compte produit, il apparaît que le premier incident de paiement non régularisé est intervenu pour l’échéance de mars 2023 de sorte que la demande effectuée le 12 mars 2024 n’est pas atteinte par la forclusion.
Sur la déchéance du terme
Aux termes de l’article 1315 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Par ailleurs, selon l’article 1103 du code civil, les conventions légalement formées engagent leurs signataires et en application de l’article 1224 du même code, lorsque l’emprunteur cesse de verser les mensualités stipulées, le prêteur est en droit de se prévaloir de la déchéance du terme et de demander le remboursement des fonds avancés soit en raison de l’existence d’une clause résolutoire soit en cas d’inexécution suffisamment grave. L’article 1225 précise qu’en présence d’une clause résolutoire, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s’il n’a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l’inexécution.
En matière de crédit à la consommation en particulier, la jurisprudence est venue rappeler qu’il résulte des dispositions de l’article L.312-39 du code de la consommation, que si le contrat de prêt d’une somme d’argent peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d’une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle (Ccass Civ 1ère, 3 juin 2015 n°14-15655 ; Civ 1ère, 22 juin 2017 n° 16-18418).
Il appartient au prêteur de se ménager la preuve de l’envoi d’une telle mise en demeure et de s’assurer que la mise en demeure a bien été portée à la connaissance du débiteur (Ccass Civ 1ère, 2 juillet 2014, n° 13-11636).
En l’espèce, le contrat de prêt contient une clause d’exigibilité anticipée en cas de défaut de paiement (article 2.3) et une mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme de payer la somme de 1841,93 euros précisant le délai de régularisation (de 8 jours) a bien été envoyée le 2 juin 2023 ainsi qu’il en ressort de l’avis de recommandé produit. De sorte qu’en l’absence de régularisation dans le délai, ainsi qu’il en ressort de l’historique de compte, la SA CARREFOUR BANQUE a pu régulièrement prononcer la déchéance du terme le 5 juillet 2023.
Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels
Il appartient au créancier qui réclame des sommes au titre d’un crédit à la consommation de justifier du strict respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation, en produisant des documents contractuels conformes, ainsi que la copie des pièces nécessaires.
En premier lieu, aux termes de l’article L312-16 du code de la consommation, avant de conclure un contrat de crédit, le prêteur doit vérifier la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations. Celles-ci sont fournies par l’emprunteur lui-même et par les éléments tirés du fichier des incidents de paiement (FICP), lequel doit être consulté par l’organisme de crédit, selon les modalités prescrites par l’arrêté du 26 octobre 2010. Cet arrêté précise, en son article 2, que le FICP doit obligatoirement être consulté par l’organisme de crédit avant toute décision effective d’octroyer un crédit à la consommation. La consultation du FICP doit porter sur la situation du ou des emprunteurs qu’il convient d’évaluer au moment où la souscription du contrat de crédit est envisagée et doit donc se faire ni trop tôt, ni trop tard, sous peine d’être considérée comme non valable, ce qui équivaut à un défaut de consultation sanctionnée de la déchéance du droit aux intérêts.
En l’espèce, aucun justificatif de la consultation du FICP n’est produit.
En second lieu, le contrat lui-même doit mentionner les conditions d’exercice du droit de rétractation (art. R. 312-10, 5° et art. R. 312–14 annexe point 5.1 du code de la consommation), c’est-à-dire rappeler notamment les règles de computation de ce délai, telles qu’elles découlent des articles 641 alinéa 1 et 642 alinéas 1 et 2 du code de procédure civile. La CJUE souligne l’importance fondamentale du droit de rétractation (CJUE, 26 mars 2020, aff. C-66/19, Kreissparkasse Saarlouis : Europe 2020). A défaut, l’article L. 312-28 du code de la consommation n’est pas respecté et la déchéance du droit aux intérêts est encourue (art. L. 341-4 du code de la consommation).
En l’espèce, s’il est fait référence au droit de rétractation dans le contrat (article 1.2), les règles de computation du délai de rétractation ne sont pas exposées même succinctement.
En ces conditions le prêteur ne peut qu’être déchu totalement du droit aux intérêts.
Sur le montant de la créance
Aux termes de l’article L.341-8 du code de la consommation, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu. Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.
En l’espèce, le prêteur a été déchu du droit aux intérêts de sorte qu’il n’y a pas lieu de faire droit à sa demande formulée au titre des intérêts échus ; les sommes versées au titre des intérêts seront imputées sur le capital restant dû.
Au regard de l’historique du prêt, il y a lieu de faire droit à la demande en paiement de la SA CARREFOUR BANQUE à hauteur de la somme de 18120,03 euros au titre du capital restant dû (19900-1779,97).
Il sera par ailleurs rappelé qu’en application de l’article 1152 devenu 1231-5 du code civil, le juge peut réduire d’office le montant de la clause pénale par le juge si elle est manifestement excessive. En l’espèce, la limitation légale de la créance du prêteur déchu du droit aux intérêts rend manifestement excessive la clause pénale de 8% du capital dû à la date de la défaillance contenue au contrat de prêt, laquelle sera réduite à 1 euro.
Monsieur [V] [F] est ainsi tenu au paiement de la somme totale de 18121,03 euros correspondant au capital restant dû et à la clause pénale.
Le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, en vertu de l’article 1153 devenu 1231-6 du code civil, sur le capital restant dû, majoré de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l’article L.313-3 du code monétaire et financier.
Ces dispositions légales doivent cependant être écartées s’il en résulte pour le prêteur la perception de montants équivalents ou proches de ceux qu’il aurait perçus si la déchéance du droit aux intérêts n’avait pas été prononcée, sauf à faire perdre à cette sanction ses caractères de dissuasion et d’efficacité (CJUE 27 mars 2014, affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA / Fesih Kalhan).
En l’espèce, le crédit personnel a été accordé à un taux d’intérêt annuel fixe de 5,17%. Dès lors, les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal majoré de cinq points ne seraient pas significativement inférieurs à ce taux conventionnel. Il convient en conséquence de ne pas faire application de l’article 1231-6 du code civil dans son intégralité et de dire que la somme restante due en capital au titre de ce crédit portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure de payer effectuée simultanément au prononcé de la déchéance du terme sans majoration de retard, soit le 5 juillet 2023.
Sur la capitalisation des intérêts
La capitalisation des intérêts, dit encore anatocisme, est prohibée concernant les crédits à la consommation, matière dans laquelle les sommes qui peuvent être réclamées sont strictement et limitativement énumérées. En effet, l’article L.312-38 du code de la consommation rappelle qu’aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L.312-39 et L.312-40 ne peuvent être mis à la charge de l’emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles.
La demande de capitalisation sera par conséquent rejetée, et les condamnations ne pourront porter que sur les seules sommes précédemment fixées.
Sur les demandes accessoires
Le défendeur, qui succombe, supportera les dépens, en application de l’article 696 du code de procédure civile.
L’équité commande de n’allouer aucune somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l’article 514 du code de procédure civile.
Le juge des contentieux de la protection, statuant publiquement, après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe réputé contradictoire et en premier ressort,
PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts contractuels de la SA CARREFOUR BANQUE au titre du prêt souscrit par Monsieur [V] [F] le 24 octobre 2022, à compter de cette date ;
RÉDUIT l’indemnité sollicitée par la SA CARREFOUR BANQUE au titre de la clause pénale à 1 euro ;
ÉCARTE l’application de l’article L.313-3 du code monétaire et financier ;
CONDAMNE en conséquence Monsieur [V] [F] à verser à la SA CARREFOUR BANQUE la somme de 18121,03 euros au titre du capital restant dû et de la clause pénale avec intérêts au taux légal à compter du 5 juillet 2023 ;
CONDAMNE Monsieur [V] [F] aux dépens ;
REJETTE le surplus des demandes ;
RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.
La greffière Le juge des contentieux de la protection