Connexité des litiges relatifs aux droits à la retraite

·

·

Connexité des litiges relatifs aux droits à la retraite

Jugement du Conseil de Prud’hommes

Le 18 mars 2022, le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt a rendu un jugement en formation de départage. Ce jugement a déclaré recevables les demandes de dommages et intérêts de M. [X] concernant le préjudice AGIRC, tout en déclarant irrecevable la demande relative à la suppression des dispositions en faveur des expatriés, jugée prescrite. La société Crédit Agricole Corporate and Investment Bank (CACIB) a été condamnée à verser 184 000 euros à M. [X] pour perte de chance de retraite complémentaire, tandis que la société CA Indosuez a été condamnée à 16 000 euros pour la même raison. Les créances produiront des intérêts au taux légal à compter du jugement, et les parties ont été déboutées de toutes autres demandes.

Appel des Sociétés CACIB et CA Indosuez

Le 4 avril 2022, la société CACIB et la société CA Indosuez ont interjeté appel du jugement du conseil de prud’hommes. Par la suite, le 28 juin 2024, elles ont demandé un sursis à statuer en raison d’une affaire en cours devant la Cour de cassation, qui pourrait avoir des implications sur leur litige avec M. [X]. M. [X] a également demandé un sursis à statuer dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice.

Litiges Connexes

Trois litiges opposent la société CACIB à d’anciens salariés concernant des préjudices de retraite. M. [Z] a été débouté de ses demandes par un jugement antérieur, et son appel a été infirmé par la cour d’appel. M. [L] a également vu ses demandes déclarées prescrites. La société CACIB a demandé un sursis à statuer en attendant la décision de la Cour de cassation concernant M. [Z], arguant que les affaires de M. [X] et M. [Z] sont connexes.

Arguments des Parties

La société CACIB a fait valoir que les demandes de M. [X] et M. [Z] avaient été déclarées prescrites, et que la Cour de cassation devait se prononcer sur des questions de prescription et d’opposabilité de la suppression d’un dispositif de retraite. M. [X] a reconnu la similitude des affaires, mais a souligné qu’une décision antérieure de la Cour de cassation avait déjà statué sur des questions de prescription dans un contexte similaire.

Décision du Conseiller de Mise en État

Le conseiller de mise en état a décidé de surseoir à statuer dans l’attente de la décision de la Cour de cassation, considérant que celle-ci pourrait avoir une incidence directe sur le litige de M. [X]. Il a également ordonné la redistribution du dossier de M. [X] à la chambre 4-2 en raison de la connexité avec l’affaire de M. [L]. Les dépens ont été réservés.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

23 octobre 2024
Cour d’appel de Versailles
RG
22/01109
COUR D’APPEL

DE VERSAILLES

Chambre sociale 4-4

Prud’Hommes

Minute n°

N° RG 22/01109 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VDST

AFFAIRE : S.A. CREDIT AGRICOLE CORPORATE AND INVESTMENT BANK, S.A. CA INDOSUEZ C/ [X]

ORDONNANCE D’INCIDENT

Le VINGT TROIS OCTOBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE, Madame Aurélie PRACHE, magistrat chargé de la mise en état de la chambre sociale 4-4, a rendu l’ordonnance suivante, après que la cause en a été débattue en notre audience, le douze septembre deux mille vingt quatre, assistée de Madame Dorothée MARCINEK, greffière,

********************************************************************************************

DANS L’AFFAIRE ENTRE :

S.A. CREDIT AGRICOLE CORPORATE AND INVESTMENT BANK

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentant : Me Sophie PELICIER LOEVENBRUCK de la SCP FROMONT BRIENS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0107

S.A. CA INDOSUEZ

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentant : Me Sophie PELICIER LOEVENBRUCK de la SCP FROMONT BRIENS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0107

APPELANTES

C/

Monsieur [W] [X]

né le 15 octobre 1951 à [Localité 7]

de nationalité française

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentant : Me Benoît GUILLON de la SELARL GHL Associés, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0220 Plaidant: Me Anne-Sophie HETET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0220

INTIME

*********************************************************************************************

Copies certifiées conformes délivrées aux avocats le —————

FAITS ET PROCEDURE

Par jugement du 18 mars 2022 le conseil de prud’hommes, en formation de départage, de Boulogne-Billancourt (section encadrement) a:

– déclaré recevables les demandes de dommages et intérêts afférentes au préjudice AGIRC

– déclaré irrecevable comme étant prescrite la demande de dommages et intérêts afférente à la suppression sans compensation des dispositions de l’article 19 III des statuts de la caisse de retraite de la banque Indosuez (CRBI) en faveur des expatriés

– condamné la société Crédit agricole corporate and investment bank (CACIB) à verser à M. [X] la somme de 184 000 euros au titre de la perte de chance de bénéficier d’une retraite complémentaire AGIRC plus élevée

– condamné la société CA Indosuez venant aux droits de la société CA Indosuez wealth group (CAIWG) à verser à M. [X] la somme de 16 000 euros au titre de la perte de chance de bénéficier d’une retraite complémentaire AGIRC plus élevée

– dit que les créances indemnitaires produiront intérpets au taux légal à compter du présent jugement conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil

– débouté les parties de toutes leurs autres demandes

– ordonné l’exécution provisoire

– condamné in solidum la société Crédit agricole corporate and investment bank et la société CA Indosuez venant aux droits de la société CA Indosuez wealth group à verser à M. [X] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

– condamné la société Crédit agricole corporate and investment bank et la société CA Indosuez venant aux droits de la société CA Indosuez wealth groupe aux dépens.

Par déclaration adressée au greffe le 4 avril 2022, la société SA Crédit Agricole corporate and investment bank (ci-après CACIB) et la société CA Indosuez ont interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions d’incident reçues au greffe le 28 juin 2024, la société CACIB et la société CA Indosuez venant aux droits de la société CA Indosuez Wealth demandent au conseiller de la mise en état de:

– ordonner le sursis à statuer dans l’intérêt d’une bonne justice dans l’attente de l’arrêt que doit prononcer la Cour de cassation dans l’affaire CACIB c/ [P] [Z],

– débouter tout contestant au présent et réserver les dépens.

Par conclusions en réponse reçues au greffe le 5 août 2024, M. [X] demande au conseiller de la mise en état de:

– Ordonner le sursis à statuer dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice de la présente affaire dans l’attente du prononcé de l’arrêt de la Cour de cassation à intervenir dans l’affaire [Z] ‘ CACIB.

MOTIFS

Sur la demande de sursis à statuer

En application de l’article 789 du code de procédure civile auquel renvoie l’article 907 du même code dans leurs versions applicables au présent litige, le conseiller de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent pour statuer sur les exceptions de procédure, au nombre desquelles figure la demande de sursis à statuer.

Aux termes de l’article 378 du code de procédure civile, la décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine.

Hors les cas où la mesure de sursis à statuer est prévue par la loi, le juge apprécie discrétionnairement l’opportunité du sursis à statuer dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice.

Le caractère non suspensif du pourvoi en cassation n’interdit pas au juge de surseoir à statuer dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice lorsqu’il estime que la solution du pourvoi est de nature à avoir une incidence directe sur la solution du litige.

En l’espèce, il résulte des écritures et des pièces des parties que trois litiges opposent la société Cacib à d’anciens salariés qui revendiquent une indemnisation au titre de deux préjudices de retraite résultant selon eux d’une part d’une insuffisance d’assiette de cotisation à l’AGIRC durant leurs périodes d’expatriation et d’autre part de la suppression unilatérale d’un dispositif de retraite anticipée :

– M. [P] [Z], lequel a été débouté de ses demandes par jugement du conseil de prud’hommes de Nanterre du 17 juin 2020.

M. [Z] a interjeté appel de cette décision et par arrêt rendu le 11 janvier 2024, la chambre sociale 4-3 de la cour d’appel de Versailles a infirmé le jugement après avoir déclaré prescrites les demandes du salarié.

M. [Z] a formé le 26 avril 2024 un pourvoi en cassation (n°24-14.551) à l’encontre de cette décision.

– M. [W] [X], lequel a, par jugement de départage du conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt du 18 mars 2022, été déclaré recevable en ses demandes de dommages-intérêts afférentes au préjudice AGIRC et irrecevable en sa demande de dommages-intérêts afférente à la suppression sans compensation des dispositions de l’article 19-III des statuts de la caisse de retraite de la banque Indosuez en faveur des expatriés, laquelle a été jugée prescrite.

La société Cacib, condamnée en paiement au profit de M. [X], a interjeté appel de la décision.

– M. [N] [L], dont les demandes ont été déclarées prescrites par jugement du conseil de prud’hommes de Nanterre rendu le 7 juin 2021.

L’appel interjeté par M. [L] a été enregistré sous le numéro RG 21/02235 à la chambre sociale 4-2 de la présente cour. Une demande de sursis à statuer a été formée par la société Cacib dans l’attente de l’arrêt à rendre par la Cour de cassation dans l’affaire concernant M. [Z].

La société Cacib fait valoir que les demandes de M. [X] et de M. [Z] ont été déclarées prescrites en application du délai de prescription biennal propre aux actions en matière d’exécution du contrat de travail, à l’issue d’un débat portant tant sur la nature du délai de prescription que sur son point de départ, que la Cour de cassation est appelée à se prononcer sur ces deux points et sur la question de l’opposabilité de la suppression par un accord collectif d’un dispositif de retraite anticipée, alors que M. [L] et M. [X] présentent les mêmes moyens. Elle expose que c’est d’ailleurs en raison de la connexité existante entre ces deux dernières affaires qu’elle demande concomitamment la redistribution du dossier de M. [X] à la chambre sociale 4-2 saisie de l’appel, plus ancien, de M. [L].

M. [X] admet la similitude du fond des affaires qui l’opposent, ainsi que M. [Z], à la société Cacib. Il fait cependant valoir que la Cour de cassation a, dans une affaire concernant d’autres parties, statué sur ce « problème de prescription » dans un arrêt du 24 juin 2024 portant sur la question de la prescription applicable à l’action du salarié fondée sur le manquement de l’employeur à son obligation d’affilier son personnel à un régime de prévoyance complémentaire et de régler les cotisations qui en découlent.

Or dans l’affaire concernant M. [Z], la Cour de cassation va devoir trancher, non seulement la question de la nature de la prescription des demandes du salarié, mais également celle du point de départ du délai de la prescription ainsi applicable.

Dans son mémoire ampliatif, M. [Z] soutient notamment que dans les contentieux afférents à l’action en responsabilité du salarié contre son employeur pour insuffisance de cotisations de retraite, le point de départ du délai de prescription ne peut être antérieur au jour de la liquidation des droits à la retraite mais que, par exception, lorsque l’employeur a une obligation d’information vis-à-vis du salarié, le délai de prescription court du jour où l’employeur a rempli son obligation d’information ou, si cette obligation n’a pas été remplie, à la date où le salarié a eu connaissance de ses droits.

Il est donc d’une bonne administration de la justice de surseoir à statuer dans la présente procédure, dans l’attente de la décision de la Cour de cassation dans le pourvoi n°n°24-14.551 qui est de nature à avoir une incidence directe sur la solution du litige concernant M. [X].

En conséquence, il sera fait droit à la demande de sursis à statuer.

Sur la demande de redistribution

Il convient d’ordonner la redistribution du dossier RG n°22/01109 de M. [X] à la chambre 4-2 en raison de son lien de connexité avec l’affaire de M. [L].

Sur les demandes accessoires

Les dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS:

Le conseiller de la mise en état,

Sursoit à statuer dans l’attente de la décision que doit rendre la Cour de cassation saisie d’un pourvoi n°24-14.551 à l’encontre de l’arrêt enregistré sous le RG n° 20/01571 rendu le 11 janvier 2024 par la chambre sociale 4-3 de la présente cour concernant M. [P] [Z],

Dit que l’instance sera poursuivie à l’initiative de la partie la plus diligente,

Ordonne la redistribution du présent dossier enrôlé sous le numéro de RG n°22/01109 à la chambre 4-2,

Réserve les dépens.

La greffière La magistrat de la mise en état


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x