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Plusieurs syndicats et sociétés de gestion collective ont contesté la validité de plusieurs annexes de la Convention collective nationale de l’édition phonographique du 30 juin 2008. La Cour de cassation a validé l’annexe III de la Convention collective. Cette annexe ouvre la possibilité pour l’artiste-interprète d’autoriser, lors de la signature de contrat de travail avec le producteur, la fixation, la première utilisation et les utilisations secondaires de sa prestation (sans intervention d’une société de gestion collective). Dès lors que l’autorisation est donnée individuellement par le salarié lors de la signature du contrat de travail, l’annexe III ne porte pas atteinte aux droits des artistes-interprètes ni à ceux de la SPEDIDAM, à laquelle ceux-ci demeurent libres d’adhérer.
En instituant une cession directe des droits de propriété intellectuelle aux producteurs de phonogrammes par le contrat de travail et en réglementant les conditions de rémunération des droits cédés, les syndicats professionnels n’ont pas contourné le système de gestion collective des droits de propriété intellectuelle des artistes-interprètes en évinçant, du processus de cession qu’ils ont institué.
L’article L. 212-3 du code de la propriété intellectuelle renvoie aux dispositions du code du travail pour les rémunérations auxquelles donne lieu l’exercice des droits exclusifs des artistes-interprètes salariés. Le contrat de travail de l’artiste peut donc inclure des stipulations relatives à la cession de droits de l’artiste et les modalités de leur cession peuvent relever de la négociation collective et non de la gestion collective.
Pour rappel, l’article III.23.21 de l’annexe III de la Convention collective intitulé « Exercice du droit d’autoriser » prévoit que l’autorisation de l’artiste-interprète est exigée pour « chaque mode d’exploitation de sa prestation » ; l’article III.22.1 dénombre désormais six modes d’exploitation A, B, C, D, E incluant une diversité d’utilisations et visant, chacun l’ensemble des actes (reproduction, mise à la disposition et communication au public, en intégralité ou par extrait, actes de publicité des exploitations ….). Ces dispositions instituent des montants minimaux de rémunération dus à l’artiste-interprète au titre des modes d’exploitation de sa prestation qu’il est susceptible d’autoriser lors de la signature de son contrat de travail. La nomenclature des modes d’exploitation ne méconnaît pas l’exigence d’une autorisation de l’artiste-interprète pour chaque utilisation de sa prestation dès lors qu’elle est seulement indicative, les parties conservant toute liberté, dans le cadre du contrat de travail, de restreindre, rubrique par rubrique, l’étendue des autorisations données.
Les six modes d’exploitation applicables sont les suivants :
Mode A : Exploitation de phonogrammes par voie de mise à disposition du public, inclus : i) la mise à disposition du public sous forme matérielle d’exemplaires de phonogrammes hors location, notamment par la vente, l’échange ou le prêt ; ii) la mise à disposition du public sous forme immatérielle d’exemplaires de phonogrammes communiqués à la demande par un service de communication électronique, notamment par voie de téléchargement ou de flux continu interactif (« streaming »), telle que prévue à l’article 3.2 de la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 ;
Mode B : Mise à disposition du public sous forme matérielle d’exemplaires de phonogrammes par location ;
Mode C : Exploitation de phonogrammes par des services de communication électronique, de façon incorporée à des programmes composés d’une suite ordonnée d’émissions sonores destinés à être reçus simultanément par l’ensemble du public ou une catégorie de public, inclus : i) la réalisation et la diffusion de, programmes qui n’entrent pas dans le champ des dispositions de l’article L 214-1 du code de la propriété intellectuelle ; ii) la réalisation et la diffusion de publicités radiophoniques ; iii) la réalisation et la diffusion de bandes play-back partiel en direct.
Mode D : Exploitation de phonogrammes non couverte par un autre mode d’exploitation visé à la présente nomenclature, notamment aux fins d’une communication au public ne relevant pas d’un de ces modes d’exploitation, inclus : i) l’illustration sonore de spectacles ; ii) la réalisation et l’exploitation de bases de données pour la sonorisation de lieux publics ; iii) la réalisation et la communication de publicités sonores dans des lieux publics (ce mode a été censuré par la Cour de cassation car relevant de la licence légale) ; iv) la réalisation et la communication d’attentes musicales téléphoniques ; v) la réalisation et la communication de messageries téléphoniques ; vi) le stockage, de phonogrammes à des fins d’archivage ou d’étude.
Mode E : Exploitation de phonogrammes incorporés dans des vidéogrammes (ou de captations audiovisuelles), inclus : i) la réalisation et l’exploitation de vidéomusiques ; ii) la réalisation et l’exploitation de films cinématographiques ; iii) la réalisation et l’exploitation de publicités audiovisuelles ; iv) la réalisation et l’exploitation d’autres vidéogrammes.
Mode F : Exploitation de phonogrammes incorporés dans des produits multimédias, inclus : i) la réalisation et l’exploitation de jeux vidéo ; ii) la réalisation et l’exploitation d’encyclopédies interactives ; iii) la réalisation et l’exploitation de bases de données pour des bornes de consultation interactive situées dans des lieux, publics ; iv) la réalisation et l’exploitation de sites web. ».
A noter que chaque, mode d’exploitation vise l’ensemble des actes (notamment : reproduction, mise à disposition et communication au public, en intégralité ou par extrait) qui y sont liés, de même que les actes de publicité des exploitations, produits ou services concernés.
Les juges suprêmes ont également validé la pratique dite du « quitus au producteur ». Le nouveau protocole additionnel au titre III de l’annexe n° 3 accorde aux artistes-interprètes qui ont participé à la fixation d’enregistrements avant le 1er juillet 1994, un complément de rémunération pour les modes d’exploitation des dits enregistrements (désignés comme le « fond de catalogue ») autres que sous la forme de phonogrammes publiés à des fins de commerce et pour lesquels aucune rémunération n’avait été prévue par contrat. Ce complément de rémunération est de 6 % des recettes relatives aux enregistrements produits en France avant l’entrée en vigueur de la convention collective réparties par la société de perception et de répartition des droits à laquelle appartient l’employeur (producteur). Après identification des artistes-interprètes, des avis de mise en paiement leur seront adressés, accompagnés d’un quitus au producteur (modèle type).
En signant ce quitus, l’artiste-interprète confirme son autorisation pour l’ensemble des modes d’exploitation fixés par la nomenclature et reconnaît avoir perçu la rémunération complémentaire de 6%. A noter que les artistes interprètes demeurent libres de contester l’exploitation qu’ils n’ont pas autorisée et d’agir en réparation de leur préjudice.
La Cour de cassation a néanmoins censuré le mode D de cession des droits de l’artiste interprète (cession des droits de réalisation et de communication de publicités sonores dans des lieux publics). En effet, l’utilisation de phonogrammes dans des publicités sonores constitue une communication directe dans un lieu public, au sens de l’article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle, et relève du régime de la licence légale.
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