Responsabilité des Conseillers en Gestion de Patrimoine : Enjeux de Communication et Obligations de Suivi des Investissements

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Responsabilité des Conseillers en Gestion de Patrimoine : Enjeux de Communication et Obligations de Suivi des Investissements
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Contexte de l’Affaire

Madame [A] [E] veuve [X], monsieur [U] [W], madame [H] [F] épouse [G], madame [Z] [J], et monsieur [B] [D] ont investi entre 2013 et 2019 dans des produits financiers proposés par la société HUBERT DE NOBLADE CONSEIL CHARENTE, qui a été remplacée par la SARL PROSPERIA. Ces investissements visaient à financer le développement des groupes MARNE & FINANCE et BIO C’BON, permettant aux investisseurs d’acquérir des titres de sociétés qui investissaient dans des locaux commerciaux ou des magasins de la chaîne Bio c’bon.

Liquidation et Pertes Financières

Les investisseurs ont subi des pertes financières suite à la liquidation judiciaire du groupe BIO C BON et à l’inexécution des promesses de rachat de titres par la SAS MARNE & FINANCE. En conséquence, ils ont assigné la SARL PROSPERIA et son assureur, la SA MMA IARD, devant le tribunal judiciaire de Bordeaux pour obtenir une indemnisation de leurs préjudices.

Incident de Mise en État

Les sociétés PROSPERIA et MMA ont soulevé un incident de mise en état pour contester l’irrecevabilité des demandes pour cause de prescription. Cependant, le 30 août 2024, elles se sont désistées de cette demande et ont demandé au juge de débouter les demandeurs de leur demande de production de pièces, tout en sollicitant le paiement de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Arguments des Parties

Les sociétés PROSPERIA et MMA ont soutenu que les demandeurs ne prouvaient pas l’existence des conventions entre PROSPERIA et les groupes MARNE & FINANCE ou BIO C BON. Elles ont également affirmé que les documents demandés étaient inutiles pour résoudre le litige, arguant que la connaissance des commissions perçues n’affectait pas la responsabilité du conseiller en gestion de patrimoine.

Demande de Communication de Pièces

Les demandeurs ont insisté sur la nécessité de communiquer des pièces pour prouver les manquements allégués de leur conseiller en gestion de patrimoine. Ils ont demandé des conventions et des factures de commissions, affirmant que ces documents étaient essentiels pour établir la responsabilité de PROSPERIA et MMA.

Décision du Juge de la Mise en État

Le juge a constaté le désistement des sociétés PROSPERIA et MMA concernant l’irrecevabilité des demandes. Il a ordonné la communication de plusieurs pièces par PROSPERIA dans un délai d’un mois, sous peine d’astreinte. En revanche, il a rejeté les demandes de communication concernant un courrier de monsieur [I] [V] et une consultation préconisée par l’AMF, en raison de l’absence de preuve de leur existence.

Conclusion et Prochaines Étapes

Le juge a réservé les dépens et a débouté les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles. Il a également ordonné le renvoi du dossier à la mise en état continue pour le 08 janvier 2025, afin de permettre aux sociétés PROSPERIA et MMA de répondre aux prétentions des demandeurs.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

22 octobre 2024
Tribunal judiciaire de Bordeaux
RG n°
23/09080
N° RG 23/09080 – N° Portalis DBX6-W-B7H-YMUR

INCIDENT

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
5EME CHAMBRE CIVILE

59B

N° RG 23/09080 – N° Portalis DBX6-W-B7H-YMUR

Minute n° 2024/00

AFFAIRE :

[A] [X], [U] [W], [T] [Y] épouse [G], [Z] [J], [B] [D]

C/

S.A.R.L. PROSPERIA, S.A. MMA IARD

Grosse Délivrée
le :

à
Avocats :
Me Camille BAILLOT
Me Julie-anne BINZONI
la SELARL PECH DE LACLAUSE, BATHMANABANE & ASSOCIÉS
Me Dimitri PINCENT

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT

Le VINGT DEUX OCTOBRE DEUX MIL VINGT QUATRE

Nous, Madame Myriam SAUNIER, Vice-Présidente,
Juge de la Mise en Etat de la 5EME CHAMBRE CIVILE,

Greffier, lors des débats et du prononcé :
Isabelle SANCHEZ

DÉBATS
A l’audience d’incident 03 septembre 2024

Vu la procédure entre :

DEMANDEURS AU FOND
DEFENDEURS A L’INCIDENT

Madame [A] [X]
Rue Gaillard de Galard
32500 PAUILHAC

représentée par Me Julie-anne BINZONI, avocat au barreau de BORDEAUX, Me Dimitri PINCENT, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [U] [W]
Rue Gaillard de Galard
32500 PAUILHAC

représenté par Me Julie-anne BINZONI, avocat au barreau de BORDEAUX, Me Dimitri PINCENT, avocat au barreau de PARIS

Madame [T] [Y] épouse [G]
Le Moulin, rue du chemin du Moulin
16230 MANSLE

représentée par Me Julie-anne BINZONI, avocat au barreau de BORDEAUX, Me Dimitri PINCENT, avocat au barreau de PARIS

Madame [Z] [J]
12 rue Boileau
40100 DAX

représentée par Me Julie-anne BINZONI, avocat au barreau de BORDEAUX, Me Dimitri PINCENT, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [B] [D]
8 rue du Ponant
17137 MARSILLY

représenté par Me Julie-anne BINZONI, avocat au barreau de BORDEAUX, Me Dimitri PINCENT, avocat au barreau de PARIS

DEFENDERESSES AU FOND
DEMANDEURS A L’INCIDENT

S.A.R.L. PROSPERIA la SARL PROPERIA vient aux droits de la SARL HUBERT DE NOBLADE CONSEIL CHARENTE radiée le 25 octobre 2016 et de la SARL GROUPE HUBERT DE NOBLADE AVENIR radiée le 25 novembre 2021
9 Impasse Jules Hetzel
33700 MERIGNAC

représentée par Maître Arnaud PERICARD de la SELARL PECH DE LACLAUSE, BATHMANABANE & ASSOCIÉS, avocats au barreau de PARIS, Me Camille BAILLOT, avocat au barreau de BORDEAUX

S.A. MMA IARD
14 Boulevard Marie et Alexandre Oyon
72030 LE MANS

représentée par Maître Arnaud PERICARD de la SELARL PECH DE LACLAUSE, BATHMANABANE & ASSOCIÉS, avocats au barreau de PARIS, Me Camille BAILLOT, avocat au barreau de BORDEAUX

EXPOSE DU LITIGE

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Madame [A] [E] veuve [X], monsieur [U] [W], madame [H] [F] épouse [G], madame [Z] [J], et monsieur [B] [D], sont des clients de la société HUBERT DE NOBLADE CONSEIL CHARENTE, GROUPE HUBERT DE NOBLADE AVENIR, dirigée par monsieur [I] [V], aux droits de laquelle vient la SARL PROSPEIRA anciennement dénommée CONCEPT PATRIMOINE ETUDES INGENIERIE, société de conseil en gestion de patrimoine et en investissement financier.
Ils ont réalisé entre 2013 et 2019 des investissements financiers dans des produits « ICBS » et « BCBB » émis par les groupes MARNE & FINANCE et BIO C’BON.
Le principe des ces investissements, destinés à financer le développement des structures des groupes MARNE & FINANCE et BIO C’BON, était de permettre à des investisseurs privés d’acquérir des titres de sociétés support, lesquelles investissaient ensuite soit dans un local commercial (produits ICBS Bonus retraite, ICBS Bonus retraite 2, ICBS rendement patrimoine et ICBS rendement patrimoine 2) soit dans un magasin de la chaine Bio c’bon (BCBB rendement 2 ou BCBB EUROPE). A l’issue d’une période de blocage des fonds, l’investisseur pouvait se voir racheter ses titres à un prix prédéfini contractuellement composé du capital et d’intérêts.

Madame [A] [E] veuve [X], monsieur [U] [W], madame [H] [F] épouse [G], madame [Z] [J], et monsieur [B] [D] exposent avoir subi des pertes financières suite à la liquidation judiciaire du groupe BIO C BON et l’inexécution des promesses de rachat de titres par la SAS MARNE & FINANCE.

Par actes délivrés les 24 octobre et 02 novembre 2023, madame [A] [E] veuve [X], monsieur [U] [W], madame [H] [F] épouse [G], madame [Z] [J], et monsieur [B] [D] ont fait assigner la SARL PROSPERIA et son assureur de responsabilité la SA MMA IARD devant le tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins d’indemnisation de leurs préjudices.

Par conclusions spécialement adressées au juge de la mise en état le 14 mai 2024, les sociétés PROSPERIA et MMA ont soulevé un incident de mise en état tendant à l’irrecevabilité des prétentions formées à son encontre pour cause de prescription, lequel a été audiencé le 03 septembre 2024.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 30 août 2024, les sociétés PROSPERIA et MMA se sont désistées de leur demande d’irrecevabilité des prétentions formées à leur encontre et demandent au juge de la mise en état de débouter les demandeurs de leur demande de production de pièces. Elles sollicitent la condamnation des demandeurs au paiement des dépens et à leur payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour s’opposer à la demande reconventionnelle de communication de pièces formée par les demandeurs à l’instance, les sociétés PROSPERIA et MMA font valoir en premier lieu, au visa des articles 11 et 138 et suivants du code de procédure civile, qu’ils ne démontrent pas que les conventions entre PROPSPERIA et MARNE ET FINANCE ou BIO C BON et des factures dont ils réclament la communication existent. Selon elles, cette preuve ne saurait se déduire du seul fait que certains conseillers en gestion de patrimoine aient pu conclure de telles conventions.

En deuxième lieu, elles ajoutent que les documents sollicités sont inutiles à la résolution du litige sur les deux fondements soutenus par les demandeurs.
D’une part, au regard de l’obligation d’information et de conseil, elles exposent que le débat porte sur le fait de savoir si les demandeurs ont investi en connaissance de leurs engagements et des risques encourus, et que dès lors ni des factures, ni des conventions ne sont susceptibles d’avoir un effet sur une acceptation en connaissance de cause des risques des investissements réalisés. Elles font valoir que la connaissance de sa rémunération résultant de ces contrats est indifférente à l’appréciation d’une éventuelle responsabilité, et qu’il ne peut être tiré du commissionnement qu’elle n’aurait pas agi au mieux des intérêts de ses clients. Elles prétendent qu’il est vain pour les demandeurs de se prévaloir d’une décision de la commission des sanctions de l’autorité des marchés financiers (AMF) du 11 avril 2018 dès lors qu’il n’existe aucune automaticité entre une sanction prononcée par une autorité administrative et une éventuelle condamnation au titre d’une action visant à engager la responsabilité civile professionnelle.
S’agissant du courrier du 25 septembre 2018 prétendument adressé par monsieur [I] [V], président de PROSPERIA et de la compagnie des conseillers en gestion de patrimoine, à MARNE & FINANCE, à la suite d’une alerte émise par l’AMF le 27 juillet 2018, elles prétendent que l’argumentation développée est farfelue et repose sur une source anonyme. Elles indiquent que cette demande est procéduralement impossible, ni la compagnie des conseillers de gestion de patrimoine, ni son président n’étant partie à l’instance, de sorte qu’il ne peut être demandé à PROSPERIA, en sa qualité de tiers, de communiquer un document qu’elle ne possède pas. Elles ajoutent que cette demande est dénuée d’intérêt puisque dans un courrier du 18 décembre 2018 l’AMF a finalement décidé de ne pas ouvrir de procédure de sanction à l’encontre de MARNE & FINANCE ou de ses dirigeants, rendant sans objet les mises en garde émises le 27 juillet 2018.

Concernant la demande de communication d’une consultation d’un conseiller en restructuration préconisée par l’AMF dans son courrier du 17 mars 2021 auquel monsieur [V] aurait eu recours en sa qualité de président de la compagnie des conseillers en gestion de patrimoine, les sociétés PROSPERIA et MMA font valoir que les demandeurs ne démontrent pas l’existence d’une telle consultation, que le courrier de l’AMF n’était qu’une invitation sans valeur contraignante, et que cette information n’a aucun lien de causalité avec le préjudice évoqué par les demandeurs puisque les investisseurs ayant conclu ou non l’avenant en cause se retrouvent aujourd’hui dans la même situation, alors qu’il n’est pas démontré d’obligation de suivi par PROSPERIA des investissements réalisés.

D’autre part, au regard d’une prétendue obligation de suivi qui découlerait de la perception de commissions sur encours, les sociétés PROSPERIA et MMA font valoir que les obligations du conseiller en gestion de patrimoine ne peuvent être étendues au-delà de ses obligations d’information et de conseil. Ainsi elles prétendent que ses obligations ne sont notamment pas étendues aux difficultés pratiques auxquelles le client peut être exposé à l’occasion de la réalisation de l’opération proposée par le professionnel. Elles en concluent que cela permet de déduire l’absence d’obligation légale de suivi d’investissement, l’intervention du conseiller en gestion de patrimoine et en investissements financiers se limitant à aider à la souscription de l’opération. La société PROPSPERIA expose n’avoir souscrit aucun engagement contractuel au titre du suivi des investissements conseillés au profit des investisseurs, la perception des commissions sur encours n’ayant aucun impact sur ses obligations à leur égard.
Elles ajoutent que les développements des demandeurs relatifs à la prétendue obligation d’amélioration du service au client, découlant de la perception de commissions dans la durée, sont inopérants dès lors qu’il ressort de leurs dossiers de souscription des investissements que le rachat des fonds était bloqué pour une durée comprise entre 2 et 5 ans, situation dans laquelle l’AMF écarte tout devoir de conseil dans sa recommandation 2013-10 produite par les demandeurs.

En dernier lieu, la société PROSPERIA fait valoir, qu’à supposer qu’elle ait conclu une telle convention d’apporteur d’affaires avec les sociétés BIO C BON et MARNE & FINANCE, les demandeurs ne sauraient se prévaloir du contenu des obligations prévues au contrat en application de l’effet relatif des contrats prévu par l’article 1199 du code civil.

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 02 septembre 2024, Madame [A] [E] veuve [X], monsieur [U] [W], madame [H] [F] épouse [G], madame [Z] [J], et monsieur [B] [D] demandent au juge de la mise en état de :

donner acte à la société PROSPERIA et à MMA de leur désistement de la fin de non-recevoir,enjoindre aux sociétés PROSPERIA et MMA IARD à transmettre et à produire au débat, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l’ordonnance et, passé ce délai, sous astreinte de 250 € par jour de retard :à madame [A] [X] :la convention conclue entre la société CONCEPT PATRIMOINE et la SAS MARNE & FINANCE au titre de la commercialisation des produits « ICBS RENDEMENT PATRIMOINE » et « BCBB RENDEMENT 2 »,la convention conclue par CONCEPT PATRIMOINE au titre de la commercialisation du produit « BCBB EUROPE »,les factures des commissions que la société CONCEPT PATRIMOINE a perçues à l’occasion de la signature des souscriptions « ICBS RENDEMENT PATRIMOINE » (6 juin 2014), « BCBB RENDEMENT 2 » (11 mars 2016) et « BCBB EUROPE » (14 mai 2019) de madame [A] [X],les factures des commissions sur encours perçues par la société CONCEPT PATRIMOINE entre 2014 et 2020 en rémunération de suivi des trois investissements réalisés par madame [C] [X], à monsieur [U] [W] :la convention conclue entre la société CONCEPT PATRIMOINE et la SAS MARNE & FINANCE au titre de la commercialisation du produit « ICBS RENDEMENT PATRIMOINE 2 »,les factures des commissions que la société CONCEPT PATRIMOINE a perçues à l’occasion de la signature de la souscription « ICBS RENDEMENT PATRIMOINE 2 » (28 novembre 2017) de monsieur [U] [W],les factures des commissions sur encours perçues par la société CONCEPT PATRIMOINE entre 2017 et 2020 en rémunération de suivi de l’investissement réalisé par monsieur [U] [W],à madame [T] [G] :la convention conclue entre la société HUBERT DE NOBLADE CONSEIL CHARENTE et la SAS MARNE & FINANCE au titre de la commercialisation des produits « ICBS RENDEMENT PATRIMOINE » et « ICBS BONUS RETRAITE »,

les factures des commissions que la société HUBERT DE NOBLADE CONSEIL CHARENTE a perçues à l’occasion de la signature des souscriptions « ICBS RENDEMENT PATRIMOINE » (13 novembre 2014) et « ICBS BONUS RETRAITE» (2 avril 2013) de madame [T] [G],les factures des commissions sur encours perçues par la société HUBERT DE NOBLADE CONSEIL CHARENTE entre 2013 et 2016 en rémunération de suivi de l’investissement réalisé par madame [T] [G],les factures des commissions sur encours perçues par la société CONCEPT PATRIMOINE devenue PROSPERIA entre 2016 et 2020 au titre de la reprise du suivi des investissements de madame [G],à madame [Z] [J] :la convention conclue entre la société CONCEPT PATRIMOINE et la SAS MARNE & FINANCE au titre de la commercialisation du produit « ICBS BONUS RETRAITE 2 »,les factures des commissions que la société CONCEPT PATRIMOINE a perçues à l’occasion de la signature de la souscription « ICBS BONUS RETRAITE 2 » (23 novembre 2013) de madame [Z] [J],les factures des commissions sur encours perçues par la société CONCEPT PATRIMOINE entre 2013 et 2020 en rémunération de suivi de l’investissement réalisé par madame [Z] [J],à monsieur [B] [D] :la convention conclue entre la société GROUPE HUBERT DE NOBLADE AVENIR et la SAS MARNE & FINANCE au titre de la commercialisation des produits « ICBS RENDEMENT PARTIMOINE 2 » et « ICBS BONUS RETRAITE 2 »,les factures des commissions que la société GROUPE HUBERT DE NOBLADE AVENIR a perçues à l’occasion de la signature des souscriptions « ICBS RENDEMENT PARTIMOINE 2 » (17 novembre 2017) et « ICBS BONUS RETRAITE 2 » (13 mai 2015) de monsieur [B] [D],les factures des commissions sur encours perçues par la société GROUPE HUBERT DE NOBLADE AVENIR entre 2013 et 2020 en rémunération de suivi de l’investissement réalisé par monsieur [B] [D],à madame [A] [X], monsieur [U] [W], madame [T] [G], madame [Z] [J] et monsieur [B] [D] :le courrier adressé par monsieur [I] [V], en qualité de Président de la Compagnie des CGPI, au Président de la SAS MARNE & FINANCE du 25 septembre 2018,la consultation telle que préconisée par l’Autorité des marchés financiers dans sa mise en garde du 17 mars 2021.condamner in solidum PROSPERIA et MMA IARD au paiement des dépens et à leur payer une somme de 8.000 euros au titre des frais irrépétibles.
Au soutien de leur prétention de communication de pièces, les demandeurs à l’instance, font valoir au visa des articles 11 et 788 du code de procédure civile, et 10 du code civil, que les pièces réclamées sont nécessaires à la solution du litige par le tribunal.
Ils exposent qu’en violation des obligations imposées par l’article L541-8-1 5° du code monétaire et financier, l’article 325-6 du règlement général de l’AMF, et l’article 325-16, le conseiller en investissement financier PROSPERIA a toujours dissimulé la nature de la relation d’affaires existant entre les groupes BIO C BON et MARNE & FINANCE, et le commissionnement en résultant. Ils prétendent qu’il convient de mettre fin à cette illicéité et de permettre au tribunal de détenir l’ensemble des éléments d’appréciation de l’exécution de la mission de conseil des intermédiaires successifs.
Ils ajoutent que la commission de sanction de l’AMF a considéré, dans une décision du 11 avril 2018, qu’un taux de commissionnement variant entre 5 et 10% des collectes est de nature à créer un risque de conflit d’intérêt, et que l’obligation d’amélioration de la qualité de service de conseil dans la durée en contrepartie de la perception de commissions sur encours a été spécifiquement rappelé en mars 2021 par l’AMF aux conseillers en investissements financiers partenaires du groupe MARNE & FINANCE qui avaient recommandé le produit ICBS. Ils indiquent que PROSPERIA ne démontre ni même n’allègue de rendez-vous annuels de conseil avec ses clients au titre du suivi de leurs placements pourtant vraisemblablement rémunérés à hauteur de 0,6% HT par an entre 2013 et 2020.
Ils ajoutent que monsieur [V], en sa qualité de président de la compagnie des conseillers en gestion de patrimoine a reçu en 2018, dont la première le 27 juillet 2018, les mises en garde successives de l’autorité des marchés financiers spécifiques aux offres d’investissement BCBB et ICBS. Ils prétendent qu’ils ont été informés par une source anonyme de ce qu’il a relayé cette mise en garde, notamment par un courrier du 25 septembre 2018. Ils exposent en solliciter la production afin de démontrer sa complaisance à l’égard du groupe MARNE & FINANCE, cette lettre étant susceptibles de démontrer qu’il a omis quantité de questionnements essentiels visant à protéger les épargnants.
Ils font valoir que suite à une nouvelle mise en garde de l’autorité des marchés financiers en raison de l’impossibilité d’honorer les promesses de rachat et invitant les conseillers financiers à prendre attache avec un conseiller en restructuration avant de conseiller les clients sur une signature d’avenants, il est nécessaire de savoir s’il a été effectivement recouru à une telle consultation, avant la conclusion d’avenants par monsieur [D] et madame [G].

MOTIVATION

Il convient à titre liminaire de constater le désistement des société PROSPERIA et MMA, accepté par les défendeurs à l’incident, de leur prétention d’irrecevabilité tenant à la prescription des demandes.

Sur la demande de communication de pièces

En vertu de l’article 788 du code de procédure civile, le juge de la mise en état exerce tous les pouvoirs nécessaires à la communication, à l’obtention et à la production des pièces.

– conventions conclues au titre de la commercialisation des produits et des factures de commission perçues par la société PROSPERIA,

En l’espèce, si la société PROSPERIA prétend que les demandeurs ne démontrent pas l’existence de ces conventions, il convient de constater d’une part qu’il s’agit pour eux d’une preuve impossible dès lors qu’ils ne sont pas « partie » à ces conventions et qu’elles ne leur ont pas été communiquées, et d’autre part que la société PROSPERIA se contente d’arguer sur le terrain de la charge de la preuve mais ne conteste pas formellement le principe de leur existence. Pour démontrer le principe de l’existence de telles conventions, les demandeurs à l’instance produisent des exemples desdites conventions conclues par la société MARNE & FINANCE avec d’autres conseillers en gestion de patrimoine.

S’agissant de l’intérêt de la production de telles conventions et des facturations correspondantes, il convient de relever que l’action est introduite par madame [A] [E] veuve [X], monsieur [U] [W], madame [H] [F] épouse [G], madame [Z] [J], et monsieur [B] [D] aux fins d’obtenir l’indemnisation de leur préjudice au titre d’un manquement commis par leur conseilleur en gestion de patrimoine et en investissements financiers.
Or, les manquements allégués sont de deux ordres : d’une part en phase précontractuelle au titre de l’absence de mise en garde sur la nature des produits, à savoir le capital-risque et l’inadéquation de ces placements avec les objectifs d’investissements des clients, et d’autre part, durant le cours du contrat d’investissement, des manquements dans sa mission de suivi au bénéfice de ses clients.

L’action n’est donc pas uniquement fondée sur un manquement au devoir de conseil et sur l’acceptation en connaissance de cause de leurs engagements et des risques encourus au titre de laquelle la communication des pièces sollicitées n’apparait effectivement pas pertinente dès lors qu’il est constant que les conseillers en gestion de patrimoine bénéficient d’une rémunération à hauteur des affaires apportées.
L’action est également fondée au motif d’un manquement allégué à une obligation de suivi, laquelle serait renforcée selon les demandeurs en raison de l’existence d’une rémunération sur l’encours de l’investissement.
Or, il n’appartient pas au juge de la mise en état d’apprécier le bienfondé du moyen soutenu au regard de l’existence ou non d’une telle obligation. En revanche il apparaît nécessaire de favoriser la production desdites pièces afin de permettre aux parties d’échanger sur l’existence ou non du commissionnement, son montant éventuel et son impact sur les obligations du conseiller en gestion de patrimoine et d’investissement financier au regard des dispositions du code civil et du code monétaire et financier invoquées par ses clients.
Leur qualité de tiers au contrat ne leur interdit pas d’invoquer les conditions et obligations de ce contrat au soutien de leur prétention, leur demande ne portant pas sur l’exécution même de ce contrat, mais sur les obligations résultant d’une rémunération éventuelle du conseiller à leur égard.

Afin d’assurer l’exécution de cette décision, cette communication de pièces sera ordonnée sous astreinte selon les modalités précisées au dispositif de la présente ordonnance.

Sur le courrier adressé par monsieur [V] en qualité de président de la compagnie des CGPI au président de la SAS MARNE ET FINANCE
La demande à ce titre sera rejetée en ce que d’une part la preuve de l’existence de ce courrier n’est pas rapportée, les demandeurs évoquant uniquement une source anonyme. D’autre part ce courrier, à supposer qu’il existe, n’émane pas de la société PROSPERIA elle-même et son contenu ne pourra donc pas justifier d’un manquement commis par cette dernière, peu important les prises de position éventuelles de son dirigeant dans un autre cadre.

Sur la consultation préconisée par l’autorité des marchés financiers dans sa mise en garde du 17 mars 2021
La demande à ce titre doit être rejetée en ce que les demandeurs ne démontrent pas l’existence effective d’une telle consultation. Il appartiendra à la juridiction de tirer toute conséquence de son absence de production volontaire par la société PROSPERIA si elle a été réalisée ou de l’absence de réalisation de celle-ci en dépit de la sollicitation de l’AMF en ce sens, dans l’appréciation d’un éventuel manquement de la société PROSPERIA à son obligation d’information et de conseil et à l’obligation alléguée de suivi de ses clients, si celle-ci était due, et des manquements caractérisés.

Sur les frais de la procédure d’incident

En application de l’article 790 du code de procédure civile, le juge de la mise en état peut statuer sur les dépens et les demandes formées par application de l’article 700.

Dépens
En vertu de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En l’espèce, la procédure poursuivant son cours, il convient de réserver les dépens de la procédure d’incident et de dire qu’ils suivront le sort de ceux de l’instance au fond.

Frais irrépétibles
En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer : 1° A l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;[…]

En l’espèce, les dépens étant réservés, il convient de débouter les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles de l’incident dont chacune conservera la charge.

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en état, statuant par ordonnance contradictoire, susceptible de recours selon les modalités de l’article 795 du code de procédure civile, prononcée par mise à disposition au greffe,

Constate le désistement de la SARL PROPSPERIA et de la SA MMA de leur prétention d’irrecevabilité ;

Ordonne la communication par la SARL PROSPERIA des pièces suivants dans le délai d’un mois suivant la signification de l’ordonnance :

à madame [A] [X] :la convention conclue entre la société CONCEPT PATRIMOINE et la SAS MARNE ET FINANCE au titre de la commercialisation des produits « ICBS RENDEMENT PATRIMOINE » et « BCBB RENDEMENT 2 »,la convention conclue par CONCEPT PATRIMOINE au titre de la commercialisation du produit « BCBB EUROPE »,les factures des commissions que la société CONCEPT PATRIMOINE a perçues à l’occasion de la signature des souscriptions « ICBS RENDEMENT PATRIMOINE » (6 juin 2014), « BCBB RENDEMENT 2 » (11 mars 2016) et « BCBB EUROPE » (14 mai 2019) de madame [A] [X],les factures des commissions sur encours perçues par la société CONCEPT PATRIMOINE entre 2014 et 2020 en rémunération de suivi des trois investissements réalisés par madame [C] [X], à monsieur [U] [W] :la convention conclue entre la société CONCEPT PATRIMOINE et la SAS MARNE ET FINANCE au titre de la commercialisation du produit « ICBS RENDEMENT PATRIMOINE 2 »,les factures des commissions que la société CONCEPT PATRIMOINE a perçues à l’occasion de la signature de la souscription « ICBS RENDEMENT PATRIMOINE 2 » (28 novembre 2017) de monsieur [U] [W],les factures des commissions sur encours perçues par la société CONCEPT PATRIMOINE entre 2017 et 2020 en rémunération de suivi de l’investissement réalisé par monsieur [U] [W],à madame [T] [G] :la convention conclue entre la société HUBERT DE NOBLADE CONSEIL CHARENTE et la SAS MARNE ET FINANCE au titre de la commercialisation des produits « ICBS RENDEMENT PATRIMOINE » et « ICBS BONUS RETRAITE »,les factures des commissions que la société HUBERT DE NOBLADE CONSEIL CHARENTE a perçues à l’occasion de la signature des souscriptions « ICBS RENDEMENT PATRIMOINE » (13 novembre 2014) et « ICBS BONUS RETRAITE» (2 avril 2013) de madame [T] [G],les factures des commissions sur encours perçues par la société HUBERT DE NOBLADE CONSEIL CHARENTE entre 2013 et 2016 en rémunération de suivi de l’investissement réalisé par madame [T] [G],les factures des commissions sur encours perçues par la société CONCEPT PATRIMOINE devenue PROSPERIA entre 2016 et 2020 au titre de la reprise du suivi des investissements de madame [G],

à madame [Z] [J] :la convention conclue entre la société CONCEPT PATRIMOINE et la SAS MARNE ET FINANCE au titre de la commercialisation du produit « ICBS BONUS RETRAITE 2 »,les factures des commissions que la société CONCEPT PATRIMOINE a perçues à l’occasion de la signature de la souscription « ICBS BONUS RETRAITE 2 » (23 novembre 2013) de madame [Z] [J],les factures des commissions sur encours perçues par la société CONCEPT PATRIMOINE entre 2013 et 2020 en rémunération de suivi de l’investissement réalisé par madame [Z] [J],à monsieur [B] [D] :la convention conclue entre la société GROUPE HUBERT DE NOBLADE AVENIR et la SAS MARNE ET FINANCE au titre de la commercialisation des produits « ICBS RENDEMENT PARTIMOINE 2 » et « ICBS BONUS RETRAITE 2 »,les factures des commissions que la société GROUPE HUBERT DE NOBLADE AVENIR a perçues à l’occasion de la signature des souscriptions « ICBS RENDEMENT PARTIMOINE 2 » (17 novembre 2017) et « ICBS BONUS RETRAITE 2 » (13 mai 2015) de monsieur [B] [D],les factures des commissions sur encours perçues par la société GROUPE HUBERT DE NOBLADE AVENIR entre 2013 et 2020 en rémunération de suivi de l’investissement réalisé par monsieur [B] [D],Dit que faute de communication de ses pièces dans le délai d’un mois suivant la signification de la présente ordonnance, la SARL PROSPERIA sera redevable d’une astreinte provisoire d’un montant de 15 euros par jour de retard pendant un délai de trois mois ;

Dit que le juge de la mise en état de la 5ème chambre du tribunal judiciaire de Bordeaux se réserve la liquidation de l’astreinte ;

Déboute madame [A] [E] veuve [X], monsieur [U] [W], madame [H] [F] épouse [G], madame [Z] [J], et monsieur [B] [D] de leur demande de communication du courrier adressé par monsieur [I] [V], en qualité de Président de la Compagnie des CGPI, au Président de la SAS MARNE ET FINANCE du 25 septembre 2018, et de la consultation telle que préconisée par l’Autorité des marchés financiers dans sa mise en garde du 17 mars 2021.

Réserve les dépens ;
N° RG 23/09080 – N° Portalis DBX6-W-B7H-YMUR

Déboute la SARL PROSPERIA, la SA MMA et madame [A] [E] veuve [X], monsieur [U] [W], madame [H] [F] épouse [G], madame [Z] [J], et monsieur [B] [D] de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Ordonne le renvoi du dossier à la mise en état continue du 08 janvier 2025 pour conclusions de la SARL PROSPERIA et la SA MMA en réponse aux prétentions à l’assignation, et avec communication des pièces ;

La présente décision a été signée par Madame Myriam SAUNIER, Juge de la mise en état, et par Madame Isabelle SANCHEZ, Greffier.

LE GREFFIER LE JUGE DE LA MISE EN ETAT


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