Contexte de l’affaireEn 2009, la société Evolis Promotion a entrepris la construction d’un ensemble immobilier à [Localité 9], en tant que maître d’ouvrage. Pour ce projet, elle a souscrit une assurance dommages-ouvrage et une police CNR auprès de la société Albingia. Les travaux ont été répartis entre plusieurs entreprises, chacune ayant son propre assureur. La réception des travaux a eu lieu le 14 décembre 2010. Problèmes rencontrésLe syndicat des copropriétaires a signalé des infiltrations provenant du toit-terrasse du troisième étage, affectant deux appartements. En réponse, il a saisi le juge des référés le 4 novembre 2020 pour demander une expertise judiciaire. La société Evolis Promotion a ensuite appelé en cause les entreprises impliquées dans la construction et leurs assureurs par un exploit du 13 novembre 2020. Expertise judiciaireL’expert judiciaire a rendu son rapport le 26 octobre 2021, fournissant des éléments sur les problèmes d’infiltration. En parallèle, la société Albingia a assigné plusieurs parties devant le tribunal judiciaire de Nîmes le 10 décembre 2020, demandant une provision de 100.000 euros pour le sinistre, ainsi qu’une indemnité de procédure. Incidents de procédureLe 14 septembre 2024, la société Axa, en tant qu’assureur de la société Qualiconsult, a soulevé une irrecevabilité des demandes de la société Albingia. Les autres assureurs, y compris ceux de M. [T] et de la société Languedoc Construction, ont formulé des demandes similaires, contestant l’intérêt à agir de la société Albingia. Arguments des partiesLes assureurs ont soutenu que la société Albingia n’avait pas payé d’indemnité au titre de sa garantie dommages-ouvrage et qu’elle ne pouvait donc pas exercer d’action subrogatoire. La société Albingia, de son côté, a affirmé qu’elle était toujours exposée à un recours du syndicat des copropriétaires et a demandé que la responsabilité des constructeurs soit déclarée. Décision du juge de la mise en étatLe juge de la mise en état a décidé de renvoyer la question de l’irrecevabilité de l’action de la société Albingia au juge du fond, précisant que la recevabilité de l’action subrogatoire ne pouvait être déterminée qu’à ce niveau. Les demandes accessoires concernant les dépens et l’article 700 du code de procédure civile ont été réservées et rejetées. Conclusion de l’instanceLe juge a fixé la clôture de l’instruction au 20 décembre 2024 et a programmé une audience de plaidoirie pour le 13 janvier 2025. L’ordonnance a été signée par le juge de la mise en état et le greffier. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
❑ certifiée conforme
délivrée le
à la SCP ALBERTINI-ALEXANDRE-L’HOSTIS
la SCP B.C.E.P.
la SELARL CHABANNES-RECHE-BANULS
la SELARL DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE
la SELARL FAVRE DE THIERRENS BARNOUIN VRIGNAUD MAZARS DRIMARACCI
ORDONNANCE DU : 24 Octobre 2024
DOSSIER N° : N° RG 21/00094 – N° Portalis DBX2-W-B7F-I4WW
AFFAIRE : S.A. ALBINGIA C/ S.A. AXA FRANCE IARD Es qualité d’assureur de la Sté LANGUEDOC CONSTRUCTION, Société SMABTP, [N] [F] membre de la SELARL MJ ALPES, Compagnie d’assurance AXA ASSURANCES AXA QUALICONSULT, Société QUALICONSULT, [M] [Z]
MINUTE N° : OR24/
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NIMES
1ère Chambre Civile
ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
*********
S.A. ALBINGIA,
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par la SELARL CHABANNES-RECHE-BANULS, avocats au barreau de NIMES, avocats postulant, et par la SCP NABA & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant
à :
S.A. AXA FRANCE IARD
Es qualité d’assureur de la Sté LANGUEDOC CONSTRUCTION, dont le siège social est sis [Adresse 6]
représentée par la SCP B.C.E.P., avocats au barreau de NIMES, avocats plaidant
Société SMABTP,
dont le siège social est sis [Adresse 7]
représentée par la SELARL FAVRE DE THIERRENS BARNOUIN VRIGNAUD MAZARS DRIMARACCI, avocats au barreau de NIMES, avocats plaidant
Mme [N] [F] membre de la SELARL MJ ALPES,
demeurant [Adresse 8]
n’ayant pas constitué avocat
Compagnie d’assurance AXA ASSURANCES
recherchée en qualité d’assureur de la société QUALICONSULT, dont le siège social est sis [Adresse 5]
représentée par la SELARL DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, avocats au barreau de NIMES, avocats plaidant
Société QUALICONSULT,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par la SELARL DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, avocats au barreau de NIMES, avocats plaidant
M. [M] [Z],
demeurant [Adresse 3]
représenté par la SCP ALBERTINI-ALEXANDRE-L’HOSTIS, avocats au barreau d’AVIGNON, avocats plaidant
Mutuelle des Architectes Français société d’assurance mutuelle, entreprise privée régie par le code des assurances ayant son siège [Adresse 4], es qualité d’assureur de M. [M] [Z]
représenté par la SCP ALBERTINI-ALEXANDRE-L’HOSTIS, avocats au barreau d’AVIGNON, avocats plaidant
************
Nous, Nina MILESI, Vice-Présidente, agissant comme juge de la mise en état, assistée de Aurélie VIALLE, greffière,
Après débats à l’audience du 19 septembre 2024 avons rendu l’ordonnance suivante :
Courant 2009, la société Evolis Promotion, en qualité de maître d’ouvrage, a fait procéder à la construction d’un ensemble immobilier sur la commune d’[Localité 9].
Elle a souscrit une assurance dommages-ouvrage et une police CNR auprès de la société Albingia.
Les différents lots ont été répartis de la façon suivante :
M. [M] [Z] : maître d’œuvre de conception, assuré auprès de la MAF ;l’EURL Coord-Tech, maître d’œuvre d’exécution, aujourd’hui radiée et assurée par la SMABTP ; la société Languedoc Construction, pour le lot « gros-œuvre terrassement », assurée auprès de la société Axa France Iard, M. [Y] [T], exerçant sous l’enseigne AECT, pour le lot « étanchéité », aujourd’hui radié, assuré auprès de la société Axa France Iard, la SARL Paracier, lot serrurerie, assurée auprès de la SMABTP.
La réception est intervenue le 14 décembre 2010.
Se plaignant d’infiltrations en provenance du toit-terrasse couvrant le 3ème étage et affectant deux appartements, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble a saisi le juge des référés aux fins de voir ordonnée une expertise judiciaire par assignation du 4 novembre 2020.
Par exploit du 13 novembre 2020, la société Evolis Promotion a appelé en la cause les entreprises ayant participé à l’opération de construction et leurs assureurs
L’expert judiciaire a rendu son rapport le 26 octobre 2021.
Par acte délivré le 10 décembre 2020, la société Albingia a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Nîmes :
M. [Z] et son assureur la MAF, la société Qualiconsult, la société Axa France Iard recherchée en sa qualité d’assureur de la société Languedoc Construction, de M. [T] et de la société Qualiconsult, Maître [N] [F], membre de la SELARL MJAlpes, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Paracier, la SMABTP en qualité d’assureur de l’EURL Coord-Tech et de la société Paracier,
aux fins de :
condamner les requises à payer une provision de 100.000 euros à valoir sur le sinistre, outre une indemnité de procédure de 10.000 euros ; ordonner le sursis à statuer dans l’attente du dépôt du rapport.
Par des conclusions du 14 septembre 2024, la société Axa, en qualité d’assureur de la société Qualiconsult, a saisi le juge de la mise en état d’un incident tenant à l’irrecevabilité des demandes de la société Albingia.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 19 septembre 2024 la société Qualiconsult et son assureur la société Axa demandent au juge de la mise en état de :
débouter la société Albingia de ses demandes, déclarer irrecevable l’action de la société Albingia, condamner la société Albingia à leur payer la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens.
La société Axa expose que l’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré contre les tiers ; qu’en l’occurrence, la société Albingia n’a payé aucune indemnité au titre de sa garantie dommages-ouvrage ; qu’elle a d’ailleurs opposé un refus de garantie au syndicat des copropriétaires ; qu’elle ne peut dès lors pas exercer d’action subrogatoire et ne dispose donc d’aucun intérêt à agir.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 4 mars 2024, la société Axa en qualité d’assureur de M. [T], demande au juge de la mise en état de :
déclarer irrecevable l’action de la société Albingia, condamner la société Albingia à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens.
La société Axa, en qualité d’assureur de la société Languedoc Construction, développe des moyens identiques à ceux de la société Qualiconsult et de son assureur Axa.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 6 mars 2024, la société Axa en qualité d’assureur de la société Languedoc Construction demande au juge de la mise en état de :
déclarer irrecevable l’action de la société Albingia pour défaut d’intérêt à agir ; dire n’y avoir lieu à sursoir à statuer ; débouter la société Albingia de ses demandes ; condamner la société Albingia au paiement d’une somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La société Axa, en qualité d’assureur de la société Languedoc Construction, développe des moyens identiques à ceux de la société Axa.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 14 décembre 2023, la SMABTP en qualité d’assureur des société Coord Tech et Paracier demande au juge de la mise en état de :
dire et juger la société Albingia irrecevable en ses demandes faute de justifier de la subrogation aux droits du syndicat des copropriétaires [Adresse 10] et d’une action en garantie exercée par le syndicat des copropriétaires ou la société EVOLIS à son encontre, dire et juger irrecevable la société Albingia en sa demande de sursis à statuer,la débouter en conséquence de l’intégralité de ses demandes, la condamner à payer à la SMABTP, ès qualité d’assureur de COORD TECH et PARACIER, une somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,débouter la société Albingia de ses demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile et la condamner aux entiers dépens.
La SMABTP développe des moyens identiques à ceux de la société Axa s’agissant de l’irrecevabilité des demandes de la société Albingia relatives à la responsabilité des constructeurs.
Elle soutient que la demande de sursis à statuer constitue une exception de procédure, qui doit, à peine d’irrecevabilité être soulevée avant toute défense au fond, sous peine d’irrecevabilité ; qu’en l’espèce, la demande de sursis à statuer de la société est présentée après sa défense au fond et doit, de ce fait, être déclarée irrecevable.
Aux termes de ses dernières conclusions d’incident du 16 mai 2024, la société Albingia demande au juge de la mise en état de :
débouter les défendeurs à l’instance de leurs demandes visant à voir déclarer ses demandes irrecevables pour défaut d’intérêt et de qualité à agir ; ordonner le sursis à statuer jusqu’à ce que le syndicat des copropriétaires [Adresse 10] ait introduit une action au fond en ouverture du rapport de M. [S] [G] ou jusqu’à l’expiration du délai pendant lequel la concluante est exposée à son recours ; ordonner un retrait du rôle de l’instance ; condamner in solidum la compagnie Axa et les autres parties qui se sont associées à l’incident à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’incident qui sera distrait par Maître Christine Banuls ; rejeter les demandes de condamnation au paiement d’une indemnité de procédure formée à son encontre.
La société Albingia expose être toujours exposée au recours du syndicat des copropriétaires au titre de la police dommages-ouvrage et au titre de la police CNR et ce jusqu’au 6 janvier 2031 ; que dans l’hypothèse où les dommages seraient retenus comme étant de nature décennale, la compagnie Albingia aurait vocation à former des recours contre les constructeurs concernés et leurs assureurs ; qu’elle sollicite donc que la responsabilité des sociétés Languedoc Construction, AECT et Paracier soient déclarées responsables dans les proportions retenue par l’expert judiciaire.
M. [Z] et la MAF n’ont pas conclu sur l’incident.
Maître [F], liquidateur de la société Paracier, n’a pas constitué avocat.
A l’audience du 19 septembre 2024, la décision a été mise en délibéré au 24 octobre 2024.
Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir
L’article 31 du code de procédure civile dispose : « L’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé ».
En application de l’article L. 121-12 du code des assurances, l’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur.
En application de l’article 126 du code de procédure civile, le défaut de qualité à agir de l’assureur dommages-ouvrages peut toujours être régularisé tant que le juge du fond n’a pas statué. L’assureur dommages-ouvrage a en effet jusqu’au jour où le juge du fond statue pour pouvoir justifier de sa subrogation.
Il s’ensuit que la recevabilité de l’action subrogatoire ne peut être déterminée que par le juge du fond et non par le juge de la mise en état. Par conséquent, il convient de renvoyer la question de la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir de la société Albingia au juge du fond.
Sur les demandes accessoires
Les dépens seront réservés. Il n’y a pas lieu de faire application, à ce stade de la procédure, de l’article 700 du code de procédure civile. Les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.
Nous, juge de la mise en état, statuant publiquement, par ordonnance réputé contradictoire, non susceptible d’appel :
RENVOYONS la question de la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir de la société Albingia au juge du fond ;
RENVOYONS l’affaire à l’audience de plaidoirie du lundi 13 janvier 2025 à 09h00 ;
FIXONS la clôture de l’instruction à la date du vendredi 20 décembre 2024 ;
RÉSERVONS les dépens.
La présente ordonnance a été signée par Nina MILESI, Vice-Présidente, et par Aurélie VIALLE, greffière présente lors de la mise à disposition.
Le greffier, Le juge de la mise en état,