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Le 16 juillet 2020, M. [L] [W] a acheté une moto DUCATI 796 Monster à M. [I] [V] pour 5000 euros. Après des réparations effectuées par un garage, il a été informé de la dangerosité du véhicule. Une expertise a révélé que la moto n’était pas conforme à son origine et avait subi des dommages non divulgués. M. [W] a alors assigné M. [V] pour obtenir la nullité de la vente et des réparations. Le tribunal a prononcé la résolution du contrat, ordonné la restitution du prix d’achat et condamné M. [V] à payer des frais. M. [W] a fait appel pour obtenir des sommes supplémentaires. M. [V] a demandé la confirmation du jugement initial. La cour d’appel a infirmé certaines décisions et a condamné M. [V] à verser des sommes supplémentaires à M. [W], tout en déboutant les parties du surplus de leurs demandes.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 23/00521 – N° Portalis DBV6-V-B7H-BIPDG
AFFAIRE :
M. [L] [W]
C/
M. [I] [V]
MCS/EH
Demande en garantie des vices cachés ou tendant à faire sanctionner un défaut de conformité
Grosse délivrée aux avocats
COUR D’APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU 16 OCTOBRE 2024
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Le SEIZE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE la Chambre civile de la cour d’appel de LIMOGES a rendu l’arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :
ENTRE :
Monsieur [L] [W]
né le 01 Juillet 1986 à [Localité 7],
demeurant [Adresse 1] – [Localité 3]
représenté par Me Julien MARET de la SELARL JULIEN MARET, avocat au barreau de LIMOGES
APPELANT d’une décision rendue le 04 MAI 2023 par le PRESIDENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LIMOGES
ET :
Monsieur [I] [V]
né le 20 Juillet 1968 à [Localité 4] (ETATS UNIS),
demeurant [Adresse 6] – [Localité 2]
représenté par Me Jean-philippe BOURRA, avocat au barreau de LIMOGES substitué par Me Florence VALADE, avocat au barreau de LIMOGES
INTIMÉ
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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l’affaire a été fixée à l’audience du 12 Juin 2024. L’ordonnance de clôture a été rendue le 29 mai 2024.
Conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile, Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, magistrat rapporteur, assistée de Madame Laetitia LUZIO SIMOES, greffier, a tenu seule l’audience au cours de laquelle elle a été entendue en son rapport. Les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Après quoi, Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 11 Septembre 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi. A cette date, le délibéré a été prorogé au 25 Septembre 2024, puis au 09 Octobre 2024 et au 16 Octobre 2024.
Au cours de ce délibéré, Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, a rendu compte à la Cour, composée de Mme Corinne BALIAN, Présidente de chambre,de Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller et de Monsieur Gérard SOURY, Conseiller. A l’issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l’arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
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EXPOSE DU LITIGE:
Le 16 juillet 2020, M. [L] [W] a acheté à M. [I] [V] pour le prix de 5000 euros, une moto DUCATl 796 Monster immatriculée [Immatriculation 5], affichant au compteur 14 453 kilomètres. Ce véhicule a été mis en circulation pour la première fois le 24 août 2011.
L’acheteur a fait effectuer la purge du liquide de frein, le remplacement de la batterie, du rétroviseur et de la plaque d’immatriculation pour un montant de 410,07 euros, selon facture du 22 juillet 2020.
Après essais par le garage MOTO MOVE, l’acheteur a été alerté sur la dangerosité du véhicule.
Une expertise amiable contradictoire a été réalisée à la diligence de son assureur. Le rapport établi le 7 octobre 2020 mentionne que le véhicule n’est pas conforme à son origine, et a subi un dommage dont l’acheteur n’a pas été informé.
Saisi par M. [W], le Juge des Référés du Tribunal judiciaire de Limoges a, par ordonnance de référé du 5 mai 2021, ordonné une expertise du véhicule confiée à M. [D], expert inscrit sur la liste des experts de la cour d’appel de Limoges.
L’expert judiciaire a déposé son rapport le 24 décembre 2021 dans lequel il a relevé plusieurs défectuosités sur le véhicule, et a conclu que le véhicule était inutilisable et impropre à son usage attendu, du fait des séquelles d’un choc à l’avant ayant donné lieu à une réparation non professionnelle.
Par acte de commissaire de justice du 31 mars 2022, M [W] a fait assigner M. [V] aux fins de voir prononcer la nullité de la vente et de le voir condamner à lui verser diverses sommes en remboursement du prix d’achat et des frais engagés, et en réparation de son préjudice moral.
M. [I] [V] n’a pas constitué avocat.
Par jugement réputé contradictoire du 4 mai 2023, le Tribunal judiciaire de Limoges a :
-prononcé la résolution du contrat de vente conclu entre M. [W] et M. [V] le 16 juillet 2020 pour la vente du véhicule moto DUCATI 796 Monster, immatriculée [Immatriculation 5], mis en circulation pour la première fois le 24/08/2011 ;
-condamné M. [V] à payer à M. [W] la somme de 5 000 euros en restitution du prix de vente ;
-ordonné à M. [V] après restitution de l’intégralité du prix d’achat, de reprendre à ses frais le véhicule moto DUCATI 796 Monster, immatriculée [Immatriculation 5] au garage où il se trouve ou au domicile de M. [W] dans le délai de 4 mois suivant la signification de la présente décision, et dit qu’a défaut de démarches effectuées en ce sens par M. [V] dans ce délai, M. [W] pourra en disposer comme il lui plaira ;
-condamné M. [V] à payer à M. [W] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
-débouté M. [W] de ses plus amples demandes ;
-condamné M. [V] aux entiers dépens comprenant les frais de la procédure de référé et les honoraires de l’expert judiciaire ;
-rappelé que l’exécution provisoire du jugement est de droit.
*****
Par déclaration du 6 juillet 2023 effectuée dans des conditions de forme et de délai non contestées, M. [W] a relevé appel de ce jugement en ce qu’il l’a débouté de ses plus amples demandes.
L’affaire a été orientée à la mise en état.
Par dernières conclusions signifiées et déposées le 14 mai 2024, M. [W] demande à la cour d’infirmer le jugement de ce chef, et de :
-condamner M. [V] à lui payer les sommes suivantes :
-325.67 euros, au titre des frais de mise en route de la moto ;
-2.586.41 euros au titre des frais d’assurance, montant arrêté au 12 juin 2024 à parfaire au jour de l’arrêt de la Cour à intervenir ;
-7.135,00 euros à titre d’indemnisation d’immobilisation du véhicule, montant arrêté au 12 juin 2024 à parfaire au jour de l’arrêt de la Cour à intervenir ;
-60 euros au titre des frais de remorquage du véhicule ;
-654.72 euros au titre des frais de gardiennage de la société BC MOTO ;
-condamner M. [V] à lui verser la somme de 3.000 euros en réparation de son préjudice moral ;
-débouter M. [V] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions;
-condamner M. [V] à lui verser la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Saisi par M. [V] d’un incident de mise en état tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions d’appel établies par M. [W] et prononcer la caducité de sa déclaration d’appel, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Limoges a, par ordonnance du 21 février 2024, débouté M. [V] de son incident.
Par conclusions au fond signifiées et déposées le 2 janvier 2024, M. [V] demande à la Cour de :
-confirmer purement et simplement le jugement de première instance ;
-débouter M. [W] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions en cause d’appel ;
-lui allouer une somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
-condamner M. [W] aux dépens d’appel.
*****
La Cour pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fait expressément référence au jugement entrepris, ainsi qu’aux dernières conclusions déposées.
La clôture de la procédure a été prononcée le 29 mai 2024.
L’appel est limité au rejet des demandes de M. [L] [W] aux fins de voir juger que M. [I] [V] connaissait les vices de la moto à la date de la vente, et de le voir condamner comme vendeur de mauvaise foi sur le fondement de l’article 1645 du Code civil au paiement de tous dommages et intérêts envers l’acheteur.
Le premier juge a considéré qu’ il n’était pas prouvé que M. [I] [V] , qui n’a pas la qualité de vendeur professionnel, aurait été informé du vice affectant la moto avant de la céder à M. [L] [W].
Il sera rappelé que la résolution du contrat de vente de la moto a été prononcée par le premier juge sur la base du rapport d’expertise judiciaire et d’un rapport d’une expertise amiable qui a mis en évidence :
-que la moto présentait les séquelles d’un choc à l’avant qui avait donné lieu à une réparation non professionnelle réalisée à moindres frais ;
-que le cadre et la fourche restaient déformés et devaient être remplacés ;
-que de nombreuses pièces ont été remplacées par des éléments qui ne correspondaient pas à cette moto ;
-que ces désordres étaient présents au moment de la vente et rendaient l’engin inutilisable et impropre à son usage ;
-que le coût des réparations s’élève selon devis à la somme de 6742,77 € ;
-que le véhicule achété 5000 € était économiquement réparable.
Le prononcé de la résolution de la vente pour vice caché tenant aux défauts mis en évidence par l’expertise judiciaire n’est pas discutée par les parties pas plus que les restitutions réciproques en découlant, de sorte que la décision entreprise est donc définitive de ces chefs.
Interrogé par l’expert judiciaire, M. [I] [V] a dit ne pas être l’auteur de l’accident qui avait endommagé la moto, ni des réparations qui n’ont pas été réalisées dans les règles de l’art.
Il est établi qu’il a acquis le véhicule le 19 février 2019.
Il ressort de l’expertise amiable et de l’expertise judiciaire que le cadre de la moto avait été repeint, la peinture ayant été poncée lors de l’expertise amiable pour faire apparaître le numéro de série. Or, dans une lettre recommandée adressée à M. [L] [W] le 1 er août 2020, M. [I] [V] a précisé que il avait comparé la carte grise au numéro de cadre et de moteur lorsqu’il a acheté la moto. Il s’évince donc de ce courrier que le cadre a nécessairement été repeint après l’achat de la moto par M. [I] [V] et que ce dernier n’a pu raisonnablement ignorer les désordres relatifs au cadre et à la fourche de la moto lors de cette opération.
M. [L] [W] se prévaut également de SMS échangés avec M. [I] [V] ( sa pièce 13 ) qu révélent que M. [I] [V] avait changé diverses pièces sur l’engin.
Dans ces conditions, il est suffisamment établi par ces éléments de fait que M. [I] [V] n’ignorait pas les graves défauts de la moto lorsqu’il l’a vendue à M. [L] [W] et que cette connaissance exlut sa bonne foi.
Selon l’article 1645 du code civil, si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur.
En vertu de ce texte, M. [L] [W] est fondé à réclamer paiement à M. [I] [V] au vu des justificatifs qu ‘il produit les sommes suivantes :
-325.67 euros, au titre des frais de mise en route de la moto (facture du 22 juillet 2020) ;
-60 euros au titre des frais de remorquage du véhicule dans le cadre des opérations d’expertise ;
-654.72 euros au titre des frais de gardiennage de la société BC MOTO (facture du 19 mars 2022).
Il sollicite également le remboursement des frais d’assurance de la moto (2.586.41 euros) depuis l’achat du véhicule jusqu’au 12 juin 2024, soit 47 mois X 55,03€. Il lui incombe de justifier du paiement de la cotisation d’assurance pour toute la période demandée. Or , il se borne à produire le contrat d’assurance souscrit le 16 juillet 2020 auprès de La Mutuelle des motards, sans verser aux débats une attestation de cet assureur confirmant le paiement de l’assurance de la moto pour toute la période réclamée. En l’état de cette seule pièce, il sera accordé à M. [L] [W] le remboursement des cotisations d’assurance pour une année, soit la somme de 660,44€, M. [L] [W] ne démontrant avoir poursuivi l’assurance de son véhicule avec les mêmes garanties jusqu’au 12 juin 2024 alors qu’il avait été informé par l’expertise amiable réalisée le 7 octobre 2020 des vices cachés rendant la moto impropre à son usage, et ne permettant pas sa circulation sur la voie publique.
S’agissant de sa demande d’indemnité pour l’immobilisation du véhicule s’élevant à la somme de 7135 € arrêtée au 12 juin 2024, l’expert judiciaire a précisé que la privation de jouissance peut être évaluée à 1 millième de la valeur du véhicule par jour de privation. S’il est exact que la moto a été immobilisée depuis son achat le 16 juillet 2020, M. [L] [W] ne peut solliciter la privation de jouissance du véhicule jusqu’au 12 juin 2024 alors que la résolution de la vente avec restitutions réciproques a été prononcée le 4 mai 2023 et que cette décision était assortie de l’exécution provisoire de droit permettant à M. [L] [W] de faire exécuter la décision dès cette date.
La privation de jouissance sera donc indemnisée pour la période comprise entre le 16 juillet 2020 et le 4 mai 2023. Par ailleurs, M. [L] [W] n’a pas précisé l’usage qu’il comptait faire de la moto achetée (déplacements pour motifs professionnels et de loisrs et vie privée, ou usage occasionnel à des fins de loisirs) ; il n’a produit aucune facture de location d’un autre véhicule.
Dans ces conditions , la privation de jouissance du véhicule pour la période retenue (16 juillet 2020 au 4 mai 2023) sera indemnisée par l’allocation d’une somme forfaitaire de 1500 € et M. [L] [W] sera débouté du surplus de sa demande.
Sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral sera accueillie, dès lors qu’il a acquis la moto pour un prix de 5000 € correspondant à la valeur d’un véhicule du même type en bon état, que ce n’est qu’à l’occasion du bridage de la moto, opération requise pour lui permettre de conduire cet engin sur la voie publique, que le garage sollicité a constaté les vices cachés affectant la moto et la rendant impropre à son usage ; l’expertise judiciaire a révélé qu’un acheteur profane,ce qui était le cas de Monsieur [W], ne pouvait déceler le vice affectant le cadre et la fourche de l’engin, de sorte que la confiance de M. [L] [W] a été trompée, qu’il s’est trouvé exposer aux tracas d’une procédure judiciaire alors qu’il avait dès la réalisation de l’expertise amiable le 18 novembre 2020 proposé à son vendeur l’annulation de la vente, ce que ce dernier a refusé, contraignant M. [L] [W] à engager une instance.
Le préjudice moral incontestable subi par M. [L] [W] sera justement réparé par l’allocation d’une indemnité de 1000 €.
M. [L] [W] sera débouté du surplus de ses demandes indemnitaires.
* Sur les demandes accessoires :
La condamnation de M. [I] [V] à payer à M. [L] [W] , les dépens de première instance incluant le coût de l’expertise judiciaire et les frais de la procédure de référé, ainsi qu’une indemnité de 1500 € en vertu des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, non frappée d’appel, est définitive.
Tenu aux dépens d’appel, M. [I] [V], qui succombe sera condamné à payer à M. [L] [W] une indemnité supplémentaire de 2000 € en cause d’appel en application de l’article 700 du code de procédure civile.
La Cour d’appel statuant publiquement, par décision contradictoire rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’appel limité de M. [L] [W] ;
INFIRME les dispositions critiquées du jugement déféré ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
CONDAMNE M. [I] [V] , sur le fondement de l’article 1645 du code civil, à payer à M. [L] [W] les sommes suivantes avec intérêts au taux légal à compter du 4 mai 2023 :
-325.67 € au titre des frais de mise en route de la moto ;
-60 € au titre des frais de remorquage du véhicule ;
-654.72 € au titre des frais de gardiennage de la société BC MOTO ;
-1500 € au titre de la privation de jouissance du véhicule ;
– 660,44€ au titre des frais d’assurance automobile ;
-1000 € au titre du préjudice moral ;
Y ajoutant,
CONDAMNE M. [I] [V] à verser à M. [L] [W] une somme de 2000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel ;
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;
DIT que les dépens d’appel seront supportés par M. [I] [V].
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
Emel HASSAN. Corinne BALIAN.