Accès au Chantier et Obligations de Paiement : Équilibre entre Maître d’Ouvrage et Entrepreneur

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Accès au Chantier et Obligations de Paiement : Équilibre entre Maître d’Ouvrage et Entrepreneur

M. [V] [B] a confié à la Sarl Nicolas Dieguez la réalisation de travaux de charpente, couverture et zinguerie pour sa maison individuelle, pour un montant total de 27 568,30 euros H.T. Les travaux achevés, une facture de 23 541,37 euros T.T.C. a été émise, dont M. [V] [B] a réglé 13 541,47 euros. La réception des travaux a été fixée au 10 juillet 2022 avec des réserves concernant des désordres à corriger.

Le 14 novembre 2022, la Sarl Nicolas Dieguez a assigné M. [V] [B] en référé pour obtenir l’accès au chantier afin de réaliser les travaux de reprise et le paiement d’un solde de 10 000 euros. Le juge des référés a ordonné à M. [V] [B] de laisser l’accès au chantier et de payer 10 000 euros, en plus de 800 euros pour les frais de justice.

M. [V] [B] a fait appel de cette ordonnance, contestant les décisions prises. La Sarl Nicolas Dieguez a demandé la confirmation de l’ordonnance en appel. L’affaire a été renvoyée à une audience ultérieure, et l’ordonnance de clôture a été rendue le 17 juin 2024. Le jugement a infirmé l’ordonnance en ce qui concerne l’accès au chantier, tout en confirmant les autres dispositions et condamnant M. [V] [B] aux dépens d’appel et à verser 1 000 euros à la Sarl Dieguez.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

17 octobre 2024
Cour d’appel de Toulouse
RG
23/01290
17/10/2024

ARRÊT N°393/2024

N° RG 23/01290 – N° Portalis DBVI-V-B7H-PLX7

I.MM/KM

Décision déférée du 24 Février 2023

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULOUSE

( 22/01926)

L.A.MICHEL

[V] [B]

C/

SARL NICOLAS DIEGUEZ

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

*

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

3ème chambre

*

ARRÊT DU DIX SEPT OCTOBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE

*

APPELANT

Monsieur [V] [B]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Sabrina VIDAL, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

SARL NICOLAS DIEGUEZ

prise en la personne de son gérant, domicilié ès qualités au dit siège social

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Gilles SOREL, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Maria HIRCHI de la SARL 2 M AVOCATS, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 26 Juin 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant I. MARTIN DE LA MOUTTE, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président délégué par ordonnance modificative du 15/04/2024

E. VET, conseiller

I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseiller

Greffière, lors des débats : I. ANGER

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par M. DEFIX, président, et par I. ANGER, greffière de chambre

Exposé du litige

Par devis en date du 8 mars 2022, accepté par le maître d’ouvrage le 17 mars 2022, M. [V] [B] a confié à la Sarl Nicolas Dieguez la réalisation, dans le cadre de l’édification de sa maison individuelle, du lot charpente couverture zinguerie pour la somme totale de 27 568,30 euros H.T., soit 33 081,96 euros T.T.C.

La Sarl Nicolas Dieguez a transmis à M. [V] [B], une fois les travaux achevés, une facture n°2022-028 en date du 8 juillet 2022 d’un montant de 23 541,37 euros T.T.C. correspondant au solde du marché.

M. [V] [B] a procédé à un règlement de 13.541,47 euros.

Par procès-verbal du 29 juillet 2022, la réception a été fixée au 10 juillet 2022 avec les réserves suivantes :

‘- à revoir voilage des planches de rive sur les 2 pignons hauts notamment en façade,

– descente gouttières pluviales restées en attente.’

Par acte en date du 14 novembre 2022, la Sarl Nicolas Dieguez a fait assigner M. [V] [B] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Toulouse aux fins de voir, au visa de l’article 835 du code de procédure civile :

– condamner M. [V] [B], sous astreinte financière de 500 € par jour de retard commençant à courir à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir, à laisser libre l’accès au chantier à la SARL Nicolas Dieguez en vue de la réalisation des travaux de reprise des désordres réservés,

– se réserver la faculté de liquider I ‘astreinte et d’en ordonner une nouvelle le cas échéant,

– condamner M. [V] [B] par provision au paiement du solde du marché d’un montant global de 10 000 € dans les conditions suivantes :

* paiement de la somme de 5 000 à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir,

* paiement de la somme de 5 000 € à l’achèvement des travaux de reprise,

* condamner le défendeur au paiement de la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

Par ordonnance réputée contradictoire en date du 24 février 2023, au visa de l’article 835 du code de procédure civile, le juge des référés a :

Au principal, renvoyé les parties à se pourvoir au fond comme elles aviseront, mais dès à présent,

– enjoint à M. [V] [B] de laisser libre l’accès au chantier à la SARL Nicolas Dieguez en vue de la réalisation des travaux de reprise des désordres réservés, dans le délai d’un mois suivant la signification de la présente décision, et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, passé ce délai et pendant deux mois,

– condamné M. [V] [B] à payer à la Sarl Nicolas Dieguez par provision la somme de 10 000 euros dans les conditions suivantes :

* paiement de la somme de 5 000 euros à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir,

* paiement de la somme de 5 000 euros à l’achèvement des travaux de reprise,

– condamné M. [V] [B] à payer à la SARL Nicolas Dieguez la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamné M. [V] [B] aux dépens.

Par ordonnance du 22 août 2023, le juge des référés saisi à la requête de M.[B] a ordonné, au contradictoire de la Sarl Nicolas Dieguez et de la Sas Maaf assurances une mesure d’expertise judiciaire relative aux désordres invoqués.

La consignation mise à la charge de M.[B] n’ayant pas été réglée, la caducité de la mesure d’instruction a été constatée par ordonnance du juge chargé du suivi des expertises.

Par déclaration en date du 7 avril 2023, M. [V] [B] a relevé appel de l’ordonnance du 24 février 2023 qui l’a condamné au paiement provisionnel du solde du prix et l’ayant enjoint à permettre à la SARL Nicolas Dieguez d’accéder au chantier, dont il critique l’ensemble des dispositions.

Prétentions des parties

Vu les conclusions signifiées le 31 mai 2023 auxquelles il est fait expressément référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, de M. [V] [B] demandant à la cour, au visa de l’article 835 du code de procédure civile, de :

– le déclarer recevable en son appel,

– infirmer l’ordonnance de référé du 24 février 2023 en ce qu’elle :

* l’a enjoint de laisser le libre accès au chantier de la SARL Nicolas Dieguez en vue de la réalisation des travaux de reprise des désordres réservés dans le délai d’un mois suivant la signification de la présente décision sous astreinte de 100 € par jour de retard passé ce délai et pendant 2 mois,

* l’a condamné à payer à la SARL Nicolas Dieguez par provision, la somme de 10 000 € dans les conditions suivantes : 5 000 € à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir, 5 000 € à l’achèvement des travaux de reprise,

* l’a condamné à payer à la SARL Nicolas Dieguez la somme de 800 € sur le fondement de l’article 700 ainsi qu’aux entiers dépens,

y ajoutant, 

– débouter la SARL Nicolas Dieguez de l’intégralité de ses prétentions à son encontre

– condamner la SARL Nicolas Dieguez à lui payer la somme de 2 400 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Vu les conclusions notifiées le 19 janvier 2024 auxquelles il est fait expressément référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, de la Sarl Nicolas Dieguez demandant à la cour, au visa des articles 802, 803 et 907du code de procédure civile, des articles 808 et 835 du code de procédure civile, de l’article 1792-6 du code civil, de :

– confirmer l’ordonnance entreprise du tribunal judiciaire de Toulouse en date du 24 février 2023 en ce qu’elle a :

* enjoint à M. [V] [B] de lui laisser libre l’accès au chantier en vue de la réalisation des travaux de reprise des désordres réservés, dans le délai d’un mois suivant la signification de la présente décision, et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, passé ce délai et pendant deux mois,

* condamné M. [V] [B] à lui payer par provision la somme de 10 000 euros dans les conditions suivantes :

– paiement de la somme de 5 000 euros à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir,

– paiement de la somme de 5 000 euros à l’achèvement des travaux de reprise,

* condamné M. [V] [B] à lui payer la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamner M. [V] [B] à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamner M. [V] [B] aux entiers dépens de l’instance,

– rappeler l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

L’affaire, initialement fixée à l’audience du 22 janvier 2024, a été renvoyée à l’audience du 26 juin 2024.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 17 juin 2024.

Motifs

La Sarl Dieguez fait valoir que bien que contestant les critiques formées par le maître de l’ouvrage relatives aux planches de rives, elle a proposé, pour satisfaire aux exigences esthétiques de ce dernier, de procéder au remplacement de 12 m linéaires, correspondant aux planches présentant une déformation, sur les 72, 65 m linéaires posés, ce que M.[B] n’a pas accepté.

Elle indique en outre que le raccordement des descentes ne figurait pas au devis et n’était pas à sa charge.

Elle estime enfin que rien ne justifie que le solde du marché soit retenu par le maître de l’ouvrage.

Dans ses dernières écritures, M.[B] ne fait plus état de l’absence de raccordement des gouttières, et indique qu’il ne s’est jamais opposé à la reprise des désordres par la société Dieguez mais que le périmètre de ces reprises n’a pas fait l’objet d’un accord entre les parties. Il estime que l’existence d’une contestation sérieuse fait obstacle au paiement du solde du prix.

Au soutien de ses prétentions, la Sarl Dieguez verse aux débats outre le devis initial, les factures et le procès-verbal de réception avec réserves, les courriers et correspondances électroniques échangés entre les parties dont il résulte que M.[B] a refusé le remplacement à l’identique des planches présentant une déformation dès lors qu’il n’était pas assuré que le phénomène ne se reproduirait pas à l’avenir et sollicité le remplacement de l’intégralité des planches posées par des matériaux fournis par un autre fournisseur.

Le premier juge a retenu par des motifs pertinents que la cour fait siens que si la garantie d’achèvement impose au maître d’oeuvre de réparer les dommages signalés, elle n’autorise pas le maître de l’ouvrage à exiger la réfection de l’ensemble des travaux réalisés au seul motif d’un risque éventuel de réitération des désordres.

En l’espèce, en outre, M.[B] a lui-même, en s’abstenant de consigner la provision mise à sa charge, fait obstacle à la mesure d’expertise relative aux désordres constatés.

Il convient par conséquent de donner acte à la Sarl Dieguez de ce que dans le cadre de la garantie de parfait achèvement, elle s’engage à remplacer les 12 m de planches de rives présentant des déformations.

Il y a lieu également de constater que, seul le comportement du maître de l’ouvrage a fait obstacle à l’exécution des travaux de reprise.

Dès lors, la demande en paiement d’une provision correspondant au solde du marché n’est pas sérieusement contestable.

L’ordonnance déférée doit être confirmée sur ce point.

En revanche, s’il ne peut refuser de payer le prix, le maître de l’ouvrage demeure libre de refuser la réalisation des travaux de reprise et rien ne justifie qu’il soit contraint de permettre l’accès de l’entrepreneur au chantier pour la réalisation de ces travaux.

Il appartiendra par conséquent à M. [B] d’accepter ou non la réalisation des travaux de reprise que la Sarl Dieguez s’est engagée à réaliser.

L’ordonnance déférée sera infirmée en ce qu’elle a enjoint à M.[B] de laisser la Sarl Dieguez accéder au chantier.

M.[B] qui succombe principalement à l’instance supportera les dépens.

Il devra en outre indemniser la SARL Nicolas Dieguez du montant des frais irrépétibles qu’elle a été contrainte d’exposer pour faire valoir ses droits en cause d’appel.

Par ces motifs

Infirme l’ordonnance déférée mais seulement en ce qu’elle a enjoint à M. [V] [B] de laisser libre l’accès au chantier à la SARL Nicolas Dieguez en vue de la réalisation des travaux de reprise des désordres réservés,

La confirme pour le surplus,

Condamne M.[V] [B] aux dépens d’appel,

Condamne M.[V] [B] à payer à la Sarl Dieguez la somme de 1.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

I.ANGER E.DEFIX


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