La SA BNP Paribas Personal Finance a accordé un crédit à M. [O] [D] pour l’achat d’un adoucisseur d’eau, d’un montant de 8 185 euros, remboursable en 183 mensualités à un taux de 5,65 %. Suite à des impayés, la banque a mis en demeure M. [O] [D] de régler une somme de 224,73 euros, avec un délai de 15 jours, sous peine de déchéance du terme. Après une assignation en paiement, le tribunal a condamné M. [O] [D] à verser 2 747,65 euros à la banque, tout en déboutant celle-ci de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile. M. [O] [D] a fait appel, demandant un report de la dette en raison de son incarcération et de son absence de revenus, tout en ne contestant pas le montant de la créance. La banque a demandé la confirmation du jugement initial. La cour a finalement confirmé le jugement, rejeté la demande de report de la dette de M. [O] [D], et l’a condamné aux dépens d’appel.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 17/10/2024
N° de MINUTE : 24/758
N° RG 22/03550 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UM5A
Jugement (N° 21-003250) rendu le 28 Mars 2022 par le Juge des contentieux de la protection de Lille
APPELANT
Monsieur [O] [D]
né le [Date naissance 2] 1972 à [Localité 7] – de nationalité Française
Centre pénitentiaire de [Localité 5] [Localité 8] – N° écrou 44104 – [Adresse 4]
[Localité 8]
Représenté par Me Emmanuelle Osmont, avocat au barreau de Boulogne sur Mer, avocat constitué
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 59178/02/22/007744 du 23/09/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Douai)
INTIMÉE
SA BNP Paribas Personal Finance agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Francis Deffrennes, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
DÉBATS à l’audience publique du 12 juin 2024 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Harmony Poyteau
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Yves Benhamou, président de chambre
Samuel Vitse, président de chambre
Catherine Ménegaire, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2024 après prorogation du délibéré du 03 octobre 2024 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Anne-Sophie Joly, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 29 mai 2024
Selon offre préalable acceptée le 17 mars 2014, la SA BNP Paribas Personal Finance a consenti à M. [O] [D] un crédit accessoire à la vente d’un adoucisseur d’eau d’un montant de 8 185 euros, remboursable en 183 mensualités, au taux nominal annuel de 5,65 %.
Des échéances étant impayées, le conseil de la SA BNP Paribas Personal Finance, par courrier recommandé avec accusé de réception du 23 août 2021, a mis en demeure M. [O] [D] de lui régler la somme de 224,73 dans un délai de 15 jours, lui indiquant que passé ce délai, la déchéance du terme du contrat de crédit serait acquise.
Par exploit d’huissier de justice en date du 3 novembre 2021, la banque a fait assigner M. [O] [D] en paiement.
Par jugement réputé contradictoire du 28 mars 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille a :
– déclaré la SA BNP Paribas Personal Finance recevable en son action,
– condamné M. [O] [D] à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 2 747,65 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 3 novembre 2021,
– débouté la SA BNP Paribas Personal Finance de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [O] [D] au paiement des dépens,
– rappelé que le présent jugement est exécutoire par provision.
Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 20 juillet 2022, M. [O] [D] a relevé appel de l’ensemble des chefs de ce jugement sauf en ce qu’il a déclaré l’action de la SA BNP Personal Finance recevable.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 4 novembre 2022, l’appelant demande à la cour de :
Vu les dispositions de l’article L.314-20 du code de la consommation,
vu les dispositions de l’article 1343-5 du code civil,
– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lille en ce qu’il a :
– condamné M. [O] [D] à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 2 747,65 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 3 novembre 2021,
– condamné M. [O] [D] au paiement des dépens,
– rappelé que le présent jugement est exécutoire par provision.
statuant à nouveau,
– constater que M. [O] [D] est incarcéré et sans revenu,
– constater que M. [O] [D] ne conteste pas le bien-fondé, ni le montant de la créance de la SA BNP Paribas Personal Finance,
– accorder à M. [O] [D] un report de la dette à hauteur de 2 747,65 euros à deux ans à compter de l’arrêt à intervenir devenu définitif,
– statuer sur les dépens comme en matière d’aide juridictionnelle.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 27 décembre 2022, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :
Vu les anciens articles L.311-1 et suivants du code de la consommation dans leur version applicable en la cause,
vu l’ancien article 1134 du code civil dans sa version applicable en la cause,
vu l’article 9 du code de procédure civile,
– confirmer le jugement rendu par le juge des contentieux la protection du tribunal judiciaire de Lille le 28 mars 2022 en toutes ses dispositions, notamment en ce qu’il a déclaré la SA BNP Paribas Personal Finance recevable en son action et en ce qu’il a condamné M. [O] [D] à lui payer la somme de 2 747,65 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 3 novembre 2021,
– constater la carence probatoire de M. [O] [D],
– constater, dire et juger que M. [O] [D] ne conteste absolument pas le bien-fondé et le montant la créance,
– par conséquent, débouter M. [O] [D] de l’intégralité de ses prétentions, demandes fins et conclusions,
– condamner M. [O] [D] à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
– condamner M. [O] [D] aux entiers frais et dépens y compris ceux d’appel, dont distraction au profit de Me Francis Deffrennes, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l’exposé de leurs moyens.
La clôture de l’affaire a été rendue le 29 mai 2024 et l’affaire plaidée à l’audience de la cour du 12 juin 2024.
Les textes du code de la consommation mentionnés dans l’arrêt sont ceux issus de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 applicable à la date de conclusion du crédit.
Sur la créance de la SA BNP Paribas personal finance
Estimant que la banque n’avait pas respecté ses obligations prévues par les articles L.311-6, L.311-9 du code de la consommation dans leur rédaction issue de la loi précitée, le premier juge a déchu la banque de son droit aux intérêts contractuels en application de l’article L.311-48 du même code et a en conséquence condamné M. [O] [D] à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 2 747,65 euros, correspondant au capital emprunté déduction faite des remboursements effectués, augmentée des intérêts légaux non majorés courant à compter de l’assignation du 3 novembre 2021.
Les parties ne contestant ni le principe ni l’étendue de la déchéance du droit aux intérêts, ni le montant de la condamnation prononcée, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné M. [O] [D] à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 2 747,65 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 3 novembre 2021.
Sur la demande de report de la dette
Au visa des articles L.314-20 du code de la consommation et 1343-5 du code civil, M. [O] [D] demande le report de sa dette à deux ans, au motif qu’il est incarcéré à la maison d’arrêt de [Localité 8] depuis le 25 juin 2020 et qu’il est ainsi dans l’impossibilité de régler sa dette.
Selon l’article L.313-12 issu de l’ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006 applicable à la date de conclusion du contrat, ‘L’exécution des obligations du débiteur peut être, notamment en cas de licenciement, suspendue par ordonnance du juge d’instance dans les conditions prévues aux articles 1244-1 à 1244-3 du code civil. L’ordonnance peut décider que, durant le délai de grâce, les sommes dues ne produiront point intérêt.
En outre, le juge peut déterminer dans son ordonnance les modalités de paiement des sommes qui seront exigibles au terme du délai de suspension, sans que le dernier versement puisse excéder de plus de deux ans le terme initialement prévu pour le remboursement du prêt ; il peut cependant surseoir à statuer sur ces modalités jusqu’au terme du délai de suspension.’
Ce texte prévoit donc la possibilité de suspendre judiciaire le remboursement du crédit au cours de son exécution. En l’espèce, la déchéance du terme du contrat de crédit ayant été prononcée, les dispositions de l’article L.313-12 devenu L.314-20 du code de la consommation ne trouvent pas à s’appliquer.
En application de l’article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. Il appartient au débiteur qui sollicite un tel délai d’apporter des éléments de preuve concernant sa situation financière, à savoir notamment ses revenus et ses charges prévisibles, éléments permettant de penser raisonnablement qu’il est en capacité de régler l’intégralité de sa dette dans le délai proposé. Il convient également de tenir compte du montant et de l’ancienneté de la dette et des efforts déjà accomplis pour l’honorer.
Par ailleurs, pour qu’il soit fait application de la disposition précitée, le débiteur doit tout à la fois être malheureux et de bonne foi.
En l’espèce, M. [O] [D] ne produit qu’un certificat de présence édité le 26 juillet 2022 par le Directeur du centre pénitentiaire de [Localité 5]-[Localité 6]-[Localité 8]. S’il justifie qu’à la date du 26 juillet 2022, il était incarcéré depuis le 25 juin 2020, il ne produit cependant aucune pièce complémentaire relative la peine d’emprisonnement à laquelle il a été condamné, telle la décision de justice, ni ne justifie s’il est encore, à ce jour, incarcéré ou non, en sorte que la juridiction n’est pas en mesure d’examiner sa situation personnelle actuelle. Il n’est par ailleurs nullement démontré que l’appelant pourrait revenir à meilleure fortune dans le délai de deux ans permettant d’envisager une suspension de la dette.
Dès lors, au regard ces éléments, la demande de suspension est rejetée.
Sur les demandes accessoires
Les motifs du premier juge méritant d’être adoptés, le jugement est confirmé en ses dispositions relatives à l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
M. [O] [D], qui succombe, est condamné aux dépens d’appel en application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
En équité, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, et la SA BNP Paribas Personal Finance sera déboutée de sa demande à ce titre.
La cour statuant par arrêt contradictoire ;
Confirme le jugement entrepris ;
Y ajoutant ;
Déboute M. [O] [D] de sa demande de report de la dette ;
Déboute la SA BNP Paribas Personal Finance de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [O] [D] aux dépens d’appel.
Le greffier
Anne-Sophie JOLY
Le président
Yves BENHAMOU