Résiliation d’un contrat de crédit : enjeux de la forclusion et des obligations contractuelles

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Résiliation d’un contrat de crédit : enjeux de la forclusion et des obligations contractuelles

La société Natixis financement a accordé à M. [Z] [U] un crédit renouvelable de 10’000 euros le 5 août 2010, avec des mensualités minimales de 3 % et des intérêts variant de 9,44 à 16,80 % selon l’utilisation du crédit. À partir du 6 septembre 2019, des paiements sont restés impayés, conduisant BPCE financement à mettre en demeure M. [U] le 2 novembre 2020. Après la résiliation du contrat le 18 novembre 2020, BPCE a assigné M. [U] en paiement, mais le tribunal a constaté la forclusion de l’action en paiement, déclarant irrecevables les demandes de BPCE. En appel, BPCE a contesté cette décision, demandant la résiliation du contrat et le paiement de 11’339,50 euros. La cour d’appel a finalement déclaré BPCE recevable dans son action, condamnant M. [U] à payer 9’700,25 euros avec intérêts, ainsi qu’une somme de 750 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et a statué sur les dépens.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

17 octobre 2024
Cour d’appel d’Orléans
RG
22/02137
COUR D’APPEL D’ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 17/10/2024

la SELARL MALTE AVOCATS

ARRÊT du : 17 OCTOBRE 2024

N° : 229 – 24

N° RG 22/02137

N° Portalis DBVN-V-B7G-GUSJ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Juge des contentieux de la protection de MONTARGIS en date du 05 Avril 2022

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265281087936461

S.A. BPCE FINANCEMENT ANCIENNEMENT NATIXIS FINANCEMENT Agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social

[Adresse 4]

[Localité 5]

Ayant pour avocat Me Arthur DA COSTA, membre de la SELARL MALTE AVOCATS, avocat au barreau d’ORLEANS

D’UNE PART

INTIMÉ : – Timbre fiscal dématérialisé N°:-/-

Monsieur [Z] [U]

né le [Date naissance 2] 1965 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Défaillant

D’AUTRE PART

DÉCLARATION D’APPEL en date du : 06 Septembre 2022

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 04 Juillet 2024

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l’audience publique du JEUDI 05 SEPTEMBRE 2024, à 9 heures 30, devant Madame Fanny CHENOT, Conseiller Rapporteur, par application de l’article 805 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :

Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d’Appel d’ORLEANS,

Madame Fanny CHENOT, Conseiller,

Monsieur Damien DESFORGES, Conseiller,

Greffier :

Monsieur Axel DURAND, Greffier lors des débats,

Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier lors du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé publiquement par arrêt de défaut le JEUDI 17 OCTOBRE 2024 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE :

Selon offre préalable acceptée le 5 août 2010, la société Natixis financement a consenti à M. [Z] [U] une ouverture de crédit renouvelable d’un montant maximum de 10’000’euros remboursable par mensualités d’un montant minimal de 3’% du solde débiteur, avec intérêts compris entre 9,44 et 16,80’% l’an selon le montant du crédit utilisé.

Des échéances étant restées impayées à compter du 6 septembre 2019, la société BPCE financement, anciennement dénommée Natixis financement, a mis en demeure M. [U] de régulariser la situation sous huitaine sous peine de déchéance du terme, par courrier présenté comme ayant été adressé sous pli recommandé le 2 novembre 2020.

La société BPCE financement a résilié son concours le 18 novembre 2020 et vainement mis en demeure M. [U] de lui régler la somme totale de 10’539,54’euros par courrier recommandé du 4 février 2021 réceptionné le 12 février suivant.

Par acte du 22 décembre 2021, la société BPCE a fait assigner M. [U] en paiement devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Montargis qui, par jugement réputé contradictoire du 5 avril 2022, en retenant que le premier incident de paiement non régularisé constituant le point de départ du délai de forclusion prévu à l’article L. 311-37 [ancien] du code de la consommation devait être fixé, après imputation des paiements, au 6 décembre 2019, a’:

– constaté la forclusion de l’action an paiement engagée par la société BPCE financement au titre du contrat de prêt n° 4307 762 853 1100 consenti le 5 août 2010 à M. [Z] [U]

Par conséquent’:

– déclaré irrecevables l’ensemble des demandes formulées par la société BPCE financement à l’encontre de M. [Z] [U],

– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société BPCE financement aux dépens.

La société BPCE financement a relevé appel de cette décision par déclaration du 6 septembre 2022, en critiquant expressément tous les chefs du jugement en cause.

Dans ses dernières conclusions remises au greffe le 15 novembre 2022, signifiées le 22 novembre suivant à M. [U], la société BPCE finanement demande à la cour de’:

– déclarer la société BPCE financement (anciennement dénommée Natixis financement) recevable et bien fondée en son appel formé contre le jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Montargis en date du 5 avril 2022 (RG n° 22/00001),

Et, y faisant droit,

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

* constaté la forclusion de l’action en paiement engagée par la Société BPCE financement au titre du contrat de prêt n° 4307 762 853 1100 consenti le 5 août 2010 à M. [Z] [U],

* déclaré irrecevables l’ensemble des demandes formées par la Société BPCE financement à l’encontre de M. [Z] [U],

* dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamné la société BPCE financement aux dépens,

Et, statuant à nouveau,

Vu notamment les articles 1134 (ancien) et 1184 (ancien) du code civil,

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

Vu les pièces produites aux débats,

– déclarer la société BPCE financement recevable et bien fondée en toutes ses demandes,

– prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit conclu entre la société BPCE financement (anciennement dénommée la société Natixis financement), d’une part, et M. [Z] [U], d’autre part, suivant offre préalable acceptée le 5 août 2010, en raison des manquements graves de ce dernier à ses obligations contractuelles,

– condamner M. [Z] [U] à payer à la société BPCE financement la somme de 11’339,50’euros, majorée des intérêts au taux contractuel de 5,05 % l’an sur la somme de 9’999,50’euros, à compter du 20 novembre 2020 jusqu’au jour du complet et parfait paiement

– condamner M. [Z] [U] à payer à la société BPCE financement la somme de 2’000’euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [Z] [U] aux entiers frais et dépens, de première instance et d’appel,

– rejeter toutes prétentions, fins et conclusions plus amples ou contraires.

Pour un plus ample exposé des faits et des moyens de l’appelante, il convient de se reporter à ses dernières conclusions récapitulatives.

L’instruction a été clôturée par ordonnance du 4 juillet 2024, pour l’affaire être plaidée le 5 septembre suivant et mise en délibéré à ce jour, sans que M. [U], assigné le 22 novembre 2022 en l’étude du commissaire de justice instrumentaire, ait constitué avocat.

A l’audience, la cour a observé que le crédit litigieux avait été renouvelé pour la dernière fois le 5 août 2020, que la fin de non-recevoir tirée de la forclusion biennale lui apparaissait en conséquence devoir être examinée, en application de l’article 12 du code de procédure civile, non pas sur le fondement de l’ancien article L. 311-37 du code de la consommation visé par le premier juge, mais sur celui de l’article R. 312-35 du même code, et a autorisé la société BCPE à formuler le cas échéant ses observations au moyen d’une note en délibéré à transmettre sous quinzaine.

L’appelante n’a pas transmis d’observations dans le délai imparti.

SUR CE, LA COUR :

Il résulte de l’article 472 du code de procédure civile que si, en appel, l’intimé ne conclut pas, il est néanmoins statué sur le fond, et que la cour ne fait droit aux prétentions de l’appelant que dans la mesure où elle les estime régulières, recevables et bien fondées, étant précisé que par application de l’article 954, dernier alinéa, du même code, la partie qui ne conclut pas est réputée s’approprier les motifs du jugement entrepris.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la forclusion biennale :

Selon l’article R. 312-35 du code de la consommation, dans sa version applicable au dernier renouvellement du crédit litigieux, le 5 août 2020, les actions en paiement engagées à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’évènement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.

Cet évènement est caractérisé par’:

– le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme’;

– ou le premier incident de paiement non régularisé’;

– ou le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d’un contrat de crédit renouvelable ;

– ou le dépassement, au sens du 13° de l’article L. 311-1, non régularisé à l’issue du délai prévu à l’article L. 312-93.

Au cas particulier, il résulte de l’historique du crédit que la première échéance impayée, échue au 6 septembre 2019, a été partiellement régularisée par un prélèvement intervenu le 6 décembre 2019 à hauteur de 241 euros, lequel a couvert le montant de l’échéance (229 euros) et une partie de l’indemnité conventionnelle de retard (12 euros sur 18,32 euros exigibles).

Le prélèvement intervenu le 6 février 2020 à hauteur de 243 euros a régularisé l’incident de paiement du mois de septembre 2019 en ce qu’il a permis de solder l’indemnité de retard restée exigible depuis le 13 septembre 2019 à hauteur de 6,32 euros (18,32 -12), puis a partiellement régularisé l’échéance du mois d’octobre 2019 en permettant le paiement de l’échéance de 232 euros et d’une partie de l’indemnité de retard afférente à ce deuxième incident de paiement (4,68 euros sur les 18,56 euros rendus exigibles au 10 octobre 2019).

Le prélèvement intervenu le 6 mai 2020 à hauteur de 243’euros a régularisé l’incident du mois d’octobre 2019 en soldant la portion de l’indemnité de retard exigible depuis le 10 octobre 2019 à hauteur de 13,88 euros, puis a partiellement régularisé l’échéance du mois de novembre 2019 en permettant le paiement de 229,12 euros sur le montant de l’échéance exigible au 6 novembre 2019 (236 euros).

Le dernier prélèvement intervenu le 28 septembre 2020 à hauteur de 265 euros a régularisé l’incident de paiement du mois de novembre 2019 en soldant le montant restant exigible de l’échéance du 6 novembre (6,88 euros), a régularisé l’incident de paiement du mois de décembre 2019 en permettant le paiement de l’échéance exigible le 6 décembre 2019 (241 euros), puis très partiellement régularisé l’incident de paiement du 6 janvier 2020 en permettant le paiement d’une somme de 17,12 euros sur le montant de l’échéance exigible à cette date (241 euros).

Il s’infère de cet historique que, après imputation des paiements conformément aux dispositions de l’article 1342-10 du code civil, le premier incident de paiement non régularisé au sens de l’article R. 312-35 du code de la consommation doit être fixé au 6 janvier 2020.

La société BCPE financement a introduit son action en paiement par assignation du 22 décembre 2021, soit moins de deux ans après le premier incident de paiement non régularisé.

Elle doit dès lors être déclarée recevable en son action, par infirmation du jugement entrepris.

Sur le fond :

Aux termes de l’article 1224 du code civil, la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.

Lorsque, comme en l’espèce, le contrat contient une clause résolutoire que le créancier n’a pas mis en oeuvre ou pas correctement mis en oeuvre, rien ne l’empêche de solliciter la résolution judiciaire du contrat puisque l’article 1227 prévoit que la résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice.

En cessant progressivement de rembourser le crédit qui lui avait été consenti, M. [U] a gravement failli ses obligations. Le contrat litigieux sera dès lors résilié, à la date de l’assignation conformément aux dispositions de l’article 1229 du code civil et de celles de l’article L. 312-39 du code de la consommation aux termes duquel le prêteur peut, en cas de défaillance de l’emprunteur, exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés, le tout produisant intérêts au taux contractuel, outre une indemnité de 8’% calculée sur le capital restant dû.

Au vu regard du contrat de prêt, de l’historique et du dernier décompte en date du 19 novembre 2020, la créance de la société BCPE financement sera arrêtée ainsi qu’il suit’:

– mensualités impayées’: 3’337,97 euros

– capital restant dû’: 5’891 euros

– indemnité de 8’%’: 471,28 euros

Soit un solde de 9’700,25 euros

Dès lors, M. [U], qui ne justifie d’aucun paiement ni d’aucun fait libératoire au sens de l’article 1353 du code civil, sera condamné à payer à la société BCPE financement la somme sus-mentionnée de 9’700,25 euros, avec intérêts au taux conventionnel de 5,05’% l’an sur la somme de 5’891’euros à compter du 22 décembre 2021, date de l’assignation.

Sur les demandes accessoires :

M. [U], qui succombe au sens de l’article 696 du code de procédure civile, devra supporter les dépens de première instance et d’appel et sera condamné à régler à la société BCPE financement une indemnité de procédure qui sera équitablement fixée à 750’euros.

PAR CES MOTIFS

Infirme la décision entreprise en toutes ses dispositions critiquées,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés’:

Déclare la société BPCE financement recevable en son action,

Condamne M. [Z] [U] à payer à la société BPCE Développement, pour solde du crédit souscrit le 5 août 2010, la somme de 9’700,25 euros, avec intérêts au taux conventionnel de 5,05’% l’an sur la somme de 5’891’euros à compter du 22 décembre 2021,

Condamne M. [Z] [U] à payer à la société BCPE financement la somme de 750’euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [Z] [U] aux dépens de première instance et d’appel.

Arrêt signé par Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d’Appel d’ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


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