[V] [N] a engagé la SASU RL ENERGIE pour la fourniture et l’installation d’un poêle à granulé et d’une VMC à double flux pour un montant de 8 290 euros TTC, les travaux étant sous-traités à la SASU RL CONSEILS. Suite à des problèmes de fonctionnement du poêle, notamment des ratés d’allumage et un dégagement de fumée, [V] [N] a assigné les deux sociétés en référé pour obtenir une attestation d’assurance décennale et une expertise. Les défenderesses ont demandé le rejet des demandes de [V] [N], arguant qu’elles n’avaient pas été informées des désordres et qu’elles avaient toujours manifesté leur volonté d’intervenir. Le tribunal a ordonné à la SASU RL ENERGIE de fournir l’attestation d’assurance, a désigné un expert pour évaluer les travaux et a imposé une provision de 2 500 euros à [V] [N] pour la rémunération de l’expert. Les parties doivent également collaborer avec l’expert et fournir les documents nécessaires à sa mission. [V] [N] a été condamné aux dépens.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Minute N° 2024/ 390
N° RG 24/00326 – N° Portalis DBXU-W-B7I-HZE4
Le
1 CE + 1 CCC à Me SPAGNOL – 18
1 CCC à
Me ABRY-LEMAITRE – 10
2 CCC au service des expertises
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE D’ EVREUX
JURIDICTION DES RÉFÉRÉS
ORDONNANCE DU 16 OCTOBRE 2024
DEMANDEUR :
Monsieur [V] [N]
né le 19 Juillet 1950 à [Localité 10]
Profession : Retraité
de nationalité Française, demeurant [Adresse 6]
représenté par Me Laurent SPAGNOL, avocat au barreau de l’EURE, avocat plaidant/postulant, vestiaire : 18
DÉFENDERESSE :
S.A.S.U. RL CONSEILS
Immatriculée au RCS de Créteil sous le numéro 853 202 406
dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par Me Delphine ABRY-LEMAITRE, avocat au barreau de l’EURE
S.A.S.U. RL ENERGIE
Immatriculée au RCS de Créteil, sous le numéro 903 553 212
Dont le siège social se situe au [Adresse 3]
représentée par Me Delphine ABRY-LEMAITRE, avocat au barreau de l’EURE
PRÉSIDENT : Sabine ORSEL
GREFFIER : Christelle HENRY
DÉBATS : en audience publique du 18 septembre 2024
ORDONNANCE :
– contradictoire, rendue publiquement et en premier ressort,
– mise à disposition au greffe le 16 octobre 2024
– signée par Sabine ORSEL, Présidente du Tribunal Judiciaire et Christelle HENRY, greffier
N° RG 24/00326 – N° Portalis DBXU-W-B7I-HZE4 – ordonnance du 16 octobre 2024
Selon devis du 2 juin 2022, [V] [N] a confié à la SASU RL ENERGIE la fourniture et la pose d’un poêle à granulé et d’une VMC à double flux dans sa maison située [Adresse 6] à [Localité 9], moyennant la somme de 8 290 euros TTC. Les travaux ont été sous-traité à la SASU RL CONSEILS.
Se plaignant d’un défaut de fonctionnement du poêle, engendrant des ratés d’allumage, ayant pour conséquence un important dégagement de fumée, [V] [N] a, par actes des 17 et 31 juillet 2024, fait assigner la SASU RL CONSEILS et la SASU RL ENERGIE devant le président de ce tribunal, statuant en référé, aux fins de voir :
ordonner à la SASU RL ENERGIE, sous astreinte de 50 euros par jour à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir, d’avoir à fournir une attestation d’assurance décennale au titre de l’année 2022 ;ordonner une expertise au visa de l’article 145 du code de procédure civile ;statuer ce que de droit sur les dépens et les frais irrépétibles.
Dans leurs dernières conclusions signifiées électroniquement le 17 septembre 2024, la SASU RL CONSEILS et la SASU RL ENERGIE demandent au président de ce tribunal, statuant en référé, de :
À titre principal,
débouter [V] [N] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;les mettre hors de cause ;À titre subsidiaire,
prendre acte de leurs protestations et réserves ;En tout état de cause,
condamner [V] [N] à leur verser la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;condamner [V] [N] aux dépens.
Elles font valoir que :
[V] [N] ne justifie aucunement le fait de les attraire, puisqu’elles n’ont eu de cesse de manifester un souhait d’intervention et n’ont par ailleurs pas été informées du désordre invoqué ;rien ne justifie qu’elles participent à l’éventuelle mesure d’instruction ordonnée, pouvant, le cas échéant, être entendues par l’expert judiciaire en qualité de simple sachant ;la mesure apparaît dès lors inutile.
Sur la demande de communication de pièces
Il résulte de l’article L. 241-1 du code des assurances que toute personne physique ou morale, dont la responsabilité décennale peut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du code civil, doit être couverte par une assurance, dont elle doit justifier à l’ouverture du chantier.
Les entreprises spécialisées en matière de construction peuvent en outre se faire assurer au titre de leur responsabilité civile et pour les autres garanties prévues au code civil.
La compagnie d’assurance est susceptible de prendre en charge le sinistre et offre, a priori, une solvabilité plus importante que l’entreprise de construction. Le maître d’ouvrage a donc intérêt à connaître les coordonnées du contrat d’assurances afin de pouvoir, le cas échéant, le mobiliser.
Compte tenu de la mise en demeure infructueuse du 29 mars 2024, cette obligation sera assortie d’une astreinte.
N° RG 24/00326 – N° Portalis DBXU-W-B7I-HZE4 – ordonnance du 16 octobre 2024
Sur la demande d’expertise
L’article 145 du code de procédure civile dispose que « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ».
Le motif légitime est un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse, qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont l’objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée, à condition que cette mesure, qui doit être pertinente et utile, ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d’autrui.
Ainsi, si le demandeur à la mesure d’instruction n’a pas à démontrer l’existence des faits qu’il invoque puisque cette mesure in futurum est justement destinée à les établir, il doit néanmoins justifier d’éléments rendant crédibles ses suppositions et justifier que le litige potentiel n’est pas manifestement voué à l’échec et que la mesure est de nature à améliorer la situation probatoire du demandeur.
Le fait que des démarches amiables aient été ou pas préalablement entreprises est sans intérêt pour la caractérisation du motif légitime.
En l’espèce, le demandeur justifie notamment par un rapport d’expertise unilatéral de la plausibilité de dysfonctionnements graves de l’installation vendue et posée par les défendeurs dont il est dès lors susceptible de pouvoir rechercher la responsabilité dans le cadre d’un litige futur. Un motif légitime est donc caractérisé à faire établir la réalité et les causes de ces dommages de façon contradictoire et il sera fait droit à la demande.
Sur les frais du procès
La partie défenderesse à une demande d’expertise ordonnée sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ne peut être considérée comme la partie perdante au sens des articles 696 et 700 du même code.
[V] [N] sera donc tenu aux dépens.
Le président du tribunal judiciaire,
ENJOINT à la SASU RL ENERGIE de communiquer à [V] [N] une attestation d’assurance décennale au titre de l’année 2022 ;
ASSORTIT cette obligation d’une astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard, pendant 90 jours, à l’expiration d’un délai de 8 jours à compter de la signification de la présente ordonnance ;
ORDONNE une mission d’expertise confiée à :
[F] [M]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Port : [XXXXXXXX01] Mél : [Courriel 7]
expert inscrit sur la liste de la cour d’appel ;
DIT que l’expert aura pour mission de :
Après avoir pris connaissance de tous documents contractuels et techniques, tels que l’acte de vente, plans, devis, marchés et autres et s’être rendu sur les lieux situés aux [Adresse 6] après y avoir préalablement convoqué les parties et leurs avocats respectifs ;
Situer et décrire l’immeuble avant les travaux, préciser qui en était le propriétaire, le ou les occupants, décrire son utilisation.Décrire les travaux, tant d’un point de vue matériel que juridique, en identifiant chaque partie intervenue, son rôle et leurs relations contractuelles.Réception. Dire si l’ouvrage a fait l’objet d’une réception expresse ; le cas échéant, en préciser la date, indiquer les réserves y figurant en relation avec les griefs allégués. En l’absence de réception expresse, fournir tous éléments techniques et de fait de nature à déterminer la date à laquelle l’ouvrage était en état d’être conforme à son usage. Préciser quels griefs étaient apparents à cette date. En l’absence d’accord des parties sur la date de la réception, préciser quels griefs étaient apparents pour chacune des dates en débat.Décrire la façon dont l’ouvrage a été utilisé et entretenu après réception. Préciser et décrire les travaux intervenus postérieurement à la réception.Mentionner les griefs allégués par le ou les demandeurs, rappeler les discussions et les expertises amiables intervenues.Rappeler la mission d’expertise qui vous a saisi, sa date, la juridiction qui vous a désigné et la mission qui vous a été confiée. Mentionner les ordonnances ultérieures étendant les opérations d’expertise à d’autres parties ou d’autres dommages.Lister les pièces qui ont été communiquées par chaque partie. Lister les réunions d’expertise, et la façon dont chaque partie y a été convoquée. Lister chacun des dires.Numéroter les griefs allégués dans l’assignation et les conclusions du demandeur, et, le cas échéant, sans nécessité d’extension de mission, tous griefs ayant d’évidence la même cause mais révélés postérieurement à l’assignation, en regroupant le cas échéant les griefs identiques sous le même numéro.Pour chaque grief, répondre aux questions suivantes (10 à 13), avant de passer au suivant Constat.1. Décrire le grief (désordre, malfaçon, non façon, non-conformité contractuelle…).
2. Préciser où il se situe, le photographier si cela est possible ou le représenter.Préciser la date d’apparition du grief dans toutes ses composantes, son ampleur et ses conséquences (date des premières manifestations, aggravation éventuelle depuis la réception des travaux). Dire notamment si le grief était apparent à la réception.
Nature du grief. Préciser ensuite s’il s’agit d’une malfaçon, d’une non-conformité contractuelle ou d’un grief esthétique. Estimer son importance. Préciser de façon motivée si le grief compromet, actuellement ou indiscutablement avant l’expiration d’un délai de dix ans après la réception de l’ouvrage, la solidité de celui-ci ou si, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, il le rend impropre à sa destination. Dans le cas où ce grief constituerait un dommage affectant l’ouvrage dans un de ses éléments d’équipement sans rendre l’immeuble impropre à sa destination, dire si cet élément fait ou non indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, fondation, ossature, clos ou couvert. Dans l’affirmative, préciser si ce grief affecte la solidité du bien ou son bon fonctionnement.Causes du grief et imputabilité. Donner tous éléments motivés sur les causes et origines du grief en précisant s’il est imputable à la conception, à un défaut de direction ou de surveillance, à l’exécution, aux conditions d’utilisation ou d’entretien, à une cause extérieure. Dans le cas de causes multiples, évaluer, sous forme de pourcentage, de façon motivée notamment au regard des règles et pratiques professionnelles et des circonstances particulières du déroulement des travaux, la gravité respective des manquements d’ordre technique commis par chacun des intervenants concernés.Reprise du grief. Donner toutes observations sur la nature des travaux propres à remédier au grief. Les décrire. Indiquer leur durée prévisible et décrire la gêne qu’ils peuvent occasionner pour le ou les occupants de l’immeuble. Chiffrer, à partir des devis fournis par les parties, éventuellement assistées d’un maître d’œuvre, le coût de ces travaux. Évaluer les moins-values résultat des dommages non réparables techniquement.À l’issue, établir un tableau de synthèse reprenant chaque grief, le numéro des pages de votre rapport qui le concerne, sa nature, l’imputabilité et le chiffrage des travaux de reprise.Fournir tous éléments de nature à permettre ultérieurement à la juridiction saisie d’évaluer les préjudices de toute nature, directs ou indirects, matériels ou immatériels résultant des griefs.Fournir tous éléments de nature à permettre ultérieurement à la juridiction saisie d’évaluer le préjudice de jouissance subi ou pouvant résulter des travaux de remise en état.Faire toutes observations utiles au règlement du litige.
DIT que [V] [N] devra consigner la somme de 2 500 euros, à titre de provision à valoir sur la rémunération de l’expert,à la régie de ce tribunal dans le délai impératif de deux mois à compter de la notification de la présente décision, à peine de caducité de la désignation de l’expert ;
DIT que l’expert, en concertation avec les parties, définira un calendrier prévisionnel de ses opérations à l’issue de la première réunion d’expertise et qu’il actualisera le calendrier en tant que de besoin, notamment en fixant un délai aux parties pour procéder aux extensions de mission nécessaire, aux interventions forcées ;
DIT que dans les trois mois de sa saisine, l’expert indiquera aux parties et au juge chargé du contrôle des expertises le montant prévisible de sa rémunération définitive, notamment au regard de l’intérêt du litige, afin que soit éventuellement fixée une provision complémentaire dans les conditions de l’article 280 du code de procédure civile ;
DIT que préalablement au dépôt de son rapport, l’expert adressera aux parties, le cas échéant par voie électronique uniquement, un pré-rapport, répondant à tous les chefs de la mission et destiné à provoquer leurs observations ; qu’il devra fixer aux parties un délai d’au moins quatre semaines pour le dépôt de leurs dires éventuels, leur rappellera qu’il n’est pas tenu de répondre aux observations transmises après cette date limite et précisera la date de dépôt de son rapport ;
DIT que l’expert devra déposer son rapport au greffe de la juridiction, accompagné des pièces jointes (qui pourront être transmises sur un support numérique), dans le délai de 6 mois à compter de la date de réception de l’avis de consignation de la provision, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile de manière motivée auprès du juge chargé du contrôle des expertises ;
RAPPELLE que l’expert joindra au dépôt du rapport d’expertise sa demande de rémunération et que les parties disposeront alors de 15 jours pour formuler auprès du juge du contrôle des expertises leurs observations sur cette demande ;
RAPPELLE que l’expert pourra recueillir des informations orales, ou écrites, de toutes personnes susceptibles de l’éclairer ;
RAPPELLE qu’en vertu des dispositions de l’article 278 du code de procédure civile, l’expert peut prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un technicien d’une spécialité distincte de la sienne, et DIT que, dans une telle éventualité, il devra présenter au magistrat chargé du contrôle des expertises une demande de consignation complémentaire correspondant à la rémunération possible du sapiteur ;
DIT que l’expert joindra au rapport d’expertise :
la liste exhaustive des pièces consultées ;le nom des personnes convoquées aux opérations d’expertise en précisant pour chacune d’elle la date d’envoi de la convocation la concernant et la forme de cette convocation ;le nom des personnes présentes à chacune des réunions d’expertise ;la date de chacune des réunions tenues ;les déclarations des tiers entendus par lui, en mentionnant leur identité complète, leur qualité et leurs liens éventuels avec les parties ;le cas échéant, l’identité du technicien dont il s’est adjoint le concours, ainsi que le document qu’il aura établi de ses constatations et avis – document qui devra également être joint à la note de synthèse ou au projet de rapport ;
DÉSIGNE le juge chargé du contrôle des expertises de ce tribunal à effet de suivre l’exécution de cette mesure d’instruction ;
RAPPELLE qu’en application de l’article 275 du code de procédure civile, les parties doivent remettre sans délai à l’expert tous les documents que celui-ci estime nécessaires à l’accomplissement de sa mission ; qu’à défaut, la production sous astreinte de ces documents peut être ordonnée par le juge ;
RAPPELLE qu’en application de l’article 273 du code de procédure civile, les experts doivent informer le juge de l’avancement de leurs opérations et diligences ;
DIT qu’en cas de difficultés, l’expert ou les représentants des parties en référeront immédiatement au juge chargé du service du contrôle des expertises au besoin à l’adresse suivante : [Courriel 8] ;
DIT que si les parties viennent à se concilier, l’expert, conformément à l’article 281 du code de procédure civile, constatera que sa mission est devenue sans objet et en fera rapport au juge chargé du contrôle des expertises ;
CONDAMNE [V] [N] aux entiers dépens ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.
La greffière La présidente
Christelle HENRY Sabine ORSEL