Résolution d’une vente pour pannes à répétition du moteur

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Résolution d’une vente pour pannes à répétition du moteur
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La société Superbike a vendu une motocyclette neuve à monsieur [N] en avril 2015. Après des pannes répétées, un expert a été désigné, et en mai 2022, la cour a prononcé la résolution de la vente aux torts de Superbike, ordonnant la restitution du véhicule et le remboursement du prix d’achat, ainsi que des dommages et intérêts pour privation de jouissance. En mai 2023, Superbike a assigné monsieur [N] pour obtenir une astreinte liée à la restitution de la motocyclette. Un jugement de novembre 2023 a débouté monsieur [N] de ses demandes et a assorti l’obligation de restitution d’une astreinte. Monsieur [N] a fait appel, demandant la réformation du jugement et contestant la nécessité de l’astreinte. Superbike a également demandé la confirmation du jugement, incluant la liquidation de l’astreinte. La cour a finalement infirmé le jugement de première instance, déclarant qu’il n’y avait pas lieu d’assortir d’une astreinte la restitution du véhicule et a condamné Superbike aux dépens.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

17 octobre 2024
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
23/14594
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9

ARRÊT AU FOND

DU 17 OCTOBRE 2024

N° 2024/521

N° RG 23/14594

N° Portalis DBVB-V-B7H-BMGTX

[O] [N]

C/

S.A.S.U. SUPERBIKE

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me Frédéric DURAND

Me Laetitia MAGNE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l’exécution de TOULON en date du 07 Novembre 2023 enregistré au répertoire général sous le n° 23/03379.

APPELANT

Monsieur [O] [N]

né le 13 Mars 1950 à [Localité 3],

demeurant [Adresse 1] – [Localité 3]

représenté et plaidant par Me Frédéric DURAND, avocat au barreau de TOULON

INTIMÉE

S.A.S.U. SUPERBIKE,

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 4] – [Localité 2]

représentée et assistée par Me Laetitia MAGNE, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 Septembre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Cécile YOUL-PAILHES, Président

Madame Pascale POCHIC, Conseiller

Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Octobre 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Octobre 2024

Signé par Madame Cécile YOUL-PAILHES, Président et Madame Josiane BOMEA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS

Selon facture du 24 Avril 2015, la société Superbike vendait à monsieur [N] une motocyclette neuve de marque Rieju modèle RF3 Naked, au prix de 3 921,50 €.

Suite à des pannes à répétition du moteur, l’expert [U] désigné par ordonnance de référé du 13 septembre 2016, déposait son rapport, le 29 avril 2017.

Un arrêt infirmatif du 10 mai 2022 de la présente cour :

– prononçait la résolution de la vente du 23 avril 2015 aux torts exclusifs de la société Superbike,

– ordonnait la restitution du véhicule par monsieur [N] aux frais de cette dernière,

– condamnait la société Superbike à rembourser à monsieur [N] le prix de 3 799,00 €

– rejetait la demande d’indemnisation de dépréciation de la valeur du véhicule formée par la société Superbike,

– rejetait la demande de dommages et intérêts de monsieur [N] au titre de dépréciation de la motocyclette,

– condamnait la société Superbike à payer à monsieur [N] la somme de 1 500 € à titre de dommages et intérêts en indemnisation de la privation de jouissance du véhicule,

– condamnait la société Superbike à payer à monsieur [N] la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Le 3 mai 2023, la société Superbike faisait assigner monsieur [N] devant le juge de l’exécution de Toulon afin de faire assortir d’une astreinte de 100 €, à compter du 10 mai 2022, l’obligation de restitution de la motocyclette par monsieur [N].

Un jugement du 7 novembre 2023 du juge de l’exécution de Toulon :

– déboutait monsieur [N] de l’ensemble de ses prétentions,

– assortissait l’obligation de restitution de la motocyclette Rieju modèle RS3 Naked, issue de l’arrêt du 10 mai 2022, d’une astreinte de 100 € par jour de retard, passé un délai de huit jours à compter de la signification du jugement,

– condamnait monsieur [N] à payer à la société Superbike une indemnité de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Le jugement précité était notifié à monsieur [N] par lettre recommandée avec accusé de réception signé le 17 novembre 2023. Par déclaration du 28 novembre 2023 au greffe de la cour, monsieur [N] formait appel du jugement précité.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 31 juillet 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, monsieur [N] demande à la cour de :

– recevoir son appel,

– réformer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

– débouter la société Superbike de l’ensemble de ses demandes.

– en toutes hypothèses,

– relever que la société Superbike a repris possession de la moto le 17 janvier 2024.

– juger n’y avoir lieu à fixation d’une astreinte, ni à liquidation d’astreinte,

– condamner la société Superbike à lui payer une indemnité de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Il soutient que sa demande de sursis à statuer était recevable au motif qu’il peut être ordonné d’office par le juge en toutes circonstances. Il était bien fondé en l’état d’une procédure de référé en cours pour la restitution de la moto par le garage Auto Lagoubran. L’ordonnance du 9 novembre 2023 a dit n’y avoir lieu à référé et il a donc été contraint de payer les frais de gardiennage pour récupérer la moto et la restituer avant d’exercer une action en remboursement contre la société Superbike.

Il fonde le rejet de la demande de fixation d’une astreinte sur l’incidence du litige l’opposant au garage tiers Auto Lagoubran dès lors que cette rétention résulte du refus de l’intimée de réceptionner la moto aux fins de réparation dans le cadre de la garantie.

De plus, l’arrêt du 10 mai 2022 ordonne la restitution de la moto aux frais de la société Superbike et son dispositif ne mentionne pas le rejet de sa demande de remboursement des frais de gardiennage. Ses motifs précisent qu’il n’est pas fait droit à sa demande au seul motif de la production d’un devis et non d’une facture acquittée. Dès lors qu’il n’est pas responsable du défaut de restitution de la moto, il conclut au défaut de nécessité d’ordonner une astreinte.

Par ailleurs, il s’oppose à la modification du point de départ de l’astreinte, lequel ne peut qu’être postérieur au jugement déféré l’ayant prononcée, et invoque le défaut de signification de l’arrêt du 10 mai 2022.

Enfin, il relève l’irrecevabilité de la demande de liquidation de l’astreinte au motif qu’il s’agit d’une demande nouvelle en cause d’appel.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 22 février 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, la société Superbike demande à la cour de :

– confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a fait partir l’astreinte passé un délai de 8 jours suivant la signification dudit jugement.

– En conséquence, dire et juger que l’obligation de restitution de la motocyclette de marque Rieju par monsieur [N] doit être assortie d’une astreinte à hauteur de 100 € par jour de retard à compter du 10 mai 2022,

– débouter monsieur [N] de toutes ses demandes,

– Y ajoutant, liquider l’astreinte à la somme de 61 700 € pour la période courant du 10 mai 2022 jusqu’au 17 janvier 2024,

– condamner monsieur [N] à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens de l’instance.

Elle soutient que l’exception de sursis à statuer non soulevée in limine litis est irrecevable. En outre, elle n’était pas fondée dès lors que les frais de gardiennage de la moto auraient dû être payés dès l’année 2016.

Elle fonde la confirmation du jugement en ce qu’il a prononcé une astreinte sur le fait qu’elle a exécuté les causes de l’arrêt du 10 mai 2022 mais que monsieur [N] ne lui a pas restituée la moto.

De plus, l’arrêt précité a expressément débouté monsieur [N] de sa demande de condamnation à lui payer les frais de gardiennage. Ce dernier connaissait le montant desdits frais depuis un courrier du 21 avril 2016 du garage Auto Lagoubran. Elle affirme avoir refusé de prendre possession de la moto en début d’année 2016 compte tenu de sa position de non-garantie avant toute procédure judiciaire de sorte qu’elle n’est pas responsable desdits frais. Elle conclut à l’absence d’incidence des frais de gardiennage sur la nécessité de contraindre monsieur [N] à restituer la moto.

Elle conclut à la confirmation du jugement déféré sur le principe de l’astreinte sauf à en fixer le point de départ à la date de l’arrêt du 10 mai 2022. Compte tenu de l’effet dévolutif de l’appel, elle demande la liquidation de l’astreinte jusqu’au 17 janvier 2024, date de la restitution, soit à hauteur de 61 700 €.

L’instruction de la procédure était close par ordonnance du 13 août 2024.

MOTIVATION DE LA DÉCISION

– Sur l’exception de sursis à statuer,

L’article 378 du code de procédure civile dispose que la décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’il détermine.

L’article 74 du même code dispose que les exceptions doivent, à peine d’irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir.

Le droit positif considère que la demande de sursis à statuer doit à peine d’irrecevabilité être présentée avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir ( Civ 2ème 18 décembre 2008 ).

En l’espèce, en première instance, monsieur [N] a demandé à titre principal, le débouté des demandes de la société Superbike, et à titre subsidiaire, le sursis à statuer dans l’attente de la décision du juge des référés.

Le premier juge a justement retenu l’irrecevabilité de l’exception de procédure soulevée à titre subsidiaire par monsieur [N] après une défense au fond. Dans le silence du jugement déféré, le premier juge a discrétionnairement considéré, comme le droit positif l’y autorise ( Civ 1ère 9 mars 2004 n°99-19-922 ), donc sans être tenu de s’en expliquer, qu’il n’y avait pas lieu de prononcer d’office un sursis à statuer.

Enfin, la demande de monsieur [N] de réformation du jugement déféré de ce chef est sans objet devant la cour dès lors qu’il ne lui demande pas de statuer à nouveau et de prononcer un sursis à statuer.

– Sur la fixation d’une astreinte assortie à l’obligation de restituer la motocyclette Rieju,

L’article L 131-1 alinéa 2 du code des procédures civiles d’exécution dispose que le juge de l’exécution peut assortir d’une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité.

L’article 503 du code de procédure civile dispose que les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu’après leur avoir été notifiés à moins que l’exécution n’en soit volontaire.

En l’espèce, l’arrêt du 10 mai 2022 de la cour d’appel d’Aix en Provence ‘ ordonne la restitution du véhicule par monsieur [N] à la Sarl Superbike, ce, aux frais de cette dernière’.

La signification de l’arrêt du 10 mai 2022 par la société Superbike à monsieur [N] a pour objet d’informer ce dernier de l’intention de la première d’obtenir l’exécution de l’arrêt précité. Elle constitue un préalable obligatoire à l’exécution de la décision.

Dès lors que la société Superbike ne justifie pas avoir fait signifier l’arrêt du 10 mai 2022 à monsieur [N], elle n’établit pas la nécessité d’assortir l’obligation de restitution de la motocyclette Rieju d’une astreinte.

De plus, la nécessité précitée suppose que l’exécution de l’obligation de faire invoquée soit matériellement possible. Or, il est établi qu’au jour où le premier juge a statué, la motocyclette à restituer se trouvait entre les mains d’un tiers, la société Teisseire Martinese à l’enseigne Garage Auto Lagoubran Dépannage, laquelle exerçait son droit de rétention fondée sur le non-paiement de frais de gardiennage d’un montant liquidé à 25 909,20 € ( cf courrier du 10 novembre 2022 ) sans commune mesure avec l’enjeu du litige constitué par la résolution d’un contrat de vente d’une motocyclette neuve au prix de 3 799 €. Ainsi, au jour du prononcé du jugement déféré, monsieur [N] était dans l’impossibilité matérielle d’exécuter son obligation de restitution.

De plus, il subsiste un contentieux entre monsieur [N] et la société Superbike sur la contribution définitive au paiement des frais de gardiennage de la motocyclette dès lors que le courrier du 21 avril 2016 du Garage Auto Lagoubran Dépannage établit le refus de l’intimée de réceptionner cette dernière et que le dispositif de l’arrêt du 10 mai 2022, seul revêtu de l’autorité de chose jugée, ne rejette pas la demande indemnitaire de monsieur [N] au titre de ces frais. Les motifs de l’arrêt rejettent la demande au seul motif de la production d’un devis et non d’une facture et le juge du fond a été saisi, le 21 février 2024, pour statuer sur cette contribution.

Ainsi, au jour où le juge de l’exécution a statué sur la demande de fixation d’une astreinte, il ne pouvait être fait grief à monsieur [N] du défaut de paiement de la somme de 25 909,20 € TTC demandée par le tiers détenteur. Il n’était pas en mesure d’exécuter son obligation de restitution de la motocyclette et la nécessité de fixer une astreinte n’était pas établie.

Par conséquent, le jugement déféré sera infirmé dans toutes ses dispositions et statuant à nouveau, il sera dit n’y avoir lieu à assortir d’une astreinte l’obligation de restitution de la motocyclette prononcée par l’arrêt du 10 mai 2022.

Dès lors, la demande de liquidation d’astreinte formée par la société Superbike devant la cour est devenue sans objet.

– Sur les demandes accessoires,

La société Superbike, partie perdante, supportera les dépens de première instance et d’appel.

L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après débats en audience publique et après en avoir délibéré, conformément à la loi, par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe,

INFIRME le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

STATUANT à nouveau,

Dit n’y avoir lieu à assortir d’une astreinte, l’injonction, prononcée par l’arrêt du 10 mai 2022, à l’encontre de monsieur [O] [N] de restitution du véhicule à la société Superbike,

Y ajoutant,

DIT sans objet la demande de liquidation de l’astreinte prononcée par le jugement déféré,

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Superbike aux dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


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