Conséquences de l’absence de comparution et modalités d’expertise dans le cadre d’une procédure civile

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Conséquences de l’absence de comparution et modalités d’expertise dans le cadre d’une procédure civile

Le défendeur ne s’étant pas présenté, le juge a statué conformément aux articles 472 et 473 du code de procédure civile, rendant une décision réputée contradictoire. La S.A.R.L. BATI CONCEPT a demandé une expertise judiciaire pour examiner une possible incompatibilité entre le mortier et les briques utilisées. Cette demande a été acceptée, car elle répondait à un motif légitime. Une consignation complémentaire a été imposée à la S.A.R.L. BATI CONCEPT en raison des diligences supplémentaires. Les dépens, y compris les frais d’expertise, ont été mis à sa charge. Concernant les frais irrépétibles, le juge a décidé que chaque partie supporterait ses propres frais. Enfin, l’exécution provisoire de la décision a été confirmée, conformément aux dispositions du code de procédure civile.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

15 octobre 2024
Tribunal judiciaire de Lille
RG
24/00874
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Référés expertises – OC RG initial n°22/536
N° RG 24/00874 – N° Portalis DBZS-W-B7I-YIAS
SL/ST

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
DU 15 OCTOBRE 2024

DEMANDERESSE :

S.A.R.L. BATI CONCEPT
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée par Me Claire TITRAN, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDERESSES :

Société GROUPAMA NORD EST
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Emmanuel MASSON, avocat au barreau de LILLE

S.A.S. BOIS & MATERIAUX
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 6]
représentée par Me Alban POISSONNIER, avocat au barreau de LILLE

S.A.S. CANTILLANA
[Adresse 9]
[Localité 8]
non comparante

S.A. BRIQUETERIES DU NORD
[Adresse 7]
[Localité 4]
représentée par Me Julien HAQUETTE, avocat au barreau de LILLE

JUGE DES RÉFÉRÉS : Samuel TILLIE, Premier Vice-Président adjoint, suppléant le Président en vertu des articles R. 212-4 et R. 212-5 du Code de l’Organisation Judiciaire

GREFFIER : Sébastien LESAGE

DÉBATS à l’audience publique du 24 Septembre 2024

ORDONNANCE du 15 Octobre 2024
LA JUGE DES RÉFÉRÉS

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil et avoir mis l’affaire en délibéré, a statué en ces termes :

Par ordonnance du 15 novembre 2022, rectifiée par ordonnance du 10 janvier 2023, le juge des référés de Lille, saisi par M. [R] [S] et Mme [D] [L], a ordonné une expertise judiciaire dans le cadre d’un litige les opposant à la S.A.R.L. BATI CONCEPT et à la S.A.R.L. NORD CONCEPT BÂTIMENT (instance n°RG 22/536).

Sur ordonnance du 2 mai 2023, le juge chargé du contrôle des expertises a finalement désigné M. [I] [N] en remplacement du précédent expert commis.

Par ordonnance du 5 décembre 2023, le juge des référés de Lille a rendu communes à la S.A. BRIQUÈTERIES DU NORD les opérations de cette expertise judiciaire (22/1363).

Par actes séparés délivrés à sa demande les 26 avril 2024, 30 avril 2024, 13 mai 2024, la S.A.R.L. BATI CONCEPT a fait assigner la S.A.S. CANTILLANA, la S.A. BRIQUÈTERIES DU NORD, la CAISSE REGIONALE D’ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES DU NORD EST (GROUPAMA NORD EST) et la S.A.S. BOIS & MATERIAUX exerçant sous l’enseigne RESEAU PRO devant le président du tribunal judiciaire de Lille statuant en référé afin notamment de voir ordonner une expertise judiciaire au visa de l’article 145 du code de procédure civile.

L’affaire a été appelée à l’audience le 11 juin 2024 la première fois. Elle a finalement été retenue après deux renvois sollicités par au moins l’une des parties lors de l’audience du 24 septembre 2024.

A cette audience, la S.A.R.L. BATI CONCEPT représentée par son avocat a soutenu oralement les demandes détaillées dans son acte introductif d’instance, sauf à se désister de ses demandes formées contre GROUPAMA NORD EST, à savoir :
– Sans reconnaissance de responsabilité, étendre les opérations d’expertise et dire les opérations à venir opposables à :
– la société BRIQUETERIE DU NORD,
– la société BOIS & MATERIAUX,
– la société CANTILLANA
– la compagnie GROUPAMA NORD EST
– Réserver les dépens

Régulièrement assignée, la S.A.S. CANTILLANA n’a pas constitué avocat.

Selon conclusions notifiées par voie électronique le 7 juin 2024, déposées et soutenues à l’audience, représentée par son conseil, la S.A. BRIQUÈTERIES DU NORD formule protestations et réserves d’usage.

Dans ses écritures signifiées par voie électronique le 2 septembre 2024, déposées à l’audience, GROUPAMA NORD EST sollicite :
– le débouté de ses demandes de la S.A.R.L. BATI CONCEPT,
– la condamnation de la même à lui verser 1 200 € au titre des frais irrépétibles et aux dépens.

Se prévalant oralement de ses conclusions notifiées par voie électronique le 10 juin 2024, déposées à l’audience, la S.A.S. BOIS & MATERIAUX sollicite :
– le donné acte de ses protestations et réserves d’usage,
– la charge à la partie demanderesse de la consignation,
– la condamnation de la même aux dépens.

Il est renvoyé aux écritures précitées pour plus de précisions sur les prétentions et moyens débattus au visa des articles 445 et 446-1 du code de procédure civile.

La décision a été mise en délibéré pour être prononcée par mise à disposition du greffe le 15 octobre 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la non-comparution du défendeur et l’office du juge

L’article 472 du code de procédure civile énonce que « si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond » et que « le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée ».
L’article 473 du même code dispose que « lorsque le défendeur ne comparaît pas, le jugement est rendu par défaut si la décision est en dernier ressort et si la citation n’a pas été délivrée à personne. Le jugement est réputé contradictoire lorsque la décision est susceptible d’appel ou lorsque la citation a été délivrée à la personne du défendeur ».

En l’espèce, il convient donc de statuer dans les conditions de l’article 472 par décision réputée contradictoire conformément à l’article 473.

Sur la demande d’expertise judiciaire

L’article 145 du code de procédure civile dispose que, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.
Ce motif légitime s’apprécie sur la base d’un possible litige futur présentant un objet et un fondement déterminés de façon suffisante. Ils peuvent notamment être étayés par des éléments donnant crédit aux suppositions de celui qui réclame une expertise judiciaire.
Le recours à l’expertise n’est donc pas subordonné à une absence de contestation sérieuse ou à l’urgence.
En revanche, il peut être opposé à une demande d’expertise judiciaire le fait que le litige futur soit, de manière manifeste, voué à l’échec à raison d’un obstacle de fait ou de droit.
Dès lors que l’existence d’un motif légitime est établie, il ne peut être opposé à la demande d’expertise judiciaire qu’elle serait ordonnée en vue de suppléer la carence d’une partie dans l’administration de la preuve au visa de l’article 146 du code de procédure civile.

En l’espèce, la S.A.R.L. BATI CONCEPT fait valoir que l’hypothèse d’une incompatibilité entre le mortier utilisé et les briques employées est explorée dans le cadre des opérations d’expertise. A ce titre, elle réclame l’extension de ces opérations au contradictoire des fabricants de l’une et de l’autre ainsi que son fournisseur.

Il sera fait droit à cette demande dès lors que leur mise en cause répond à l’exigence d’un motif légitime au sens des dispositions précitées.

Une consignation complémentaire sera mise à la charge de la S.A.R.L. BATI CONCEPT compte tenu des diligences supplémentaires résultant de sa demande d’ordonnance commune.

Sur les dépens

L’article 491 du code de procédure civile fait obligation au juge des référés de statuer sur les dépens.

En l’espèce, l’expertise étant ordonnée à la demande et dans l’intérêt de la S.A.R.L. BATI CONCEPT, il convient de mettre à sa charge les dépens, en ce compris l’avance des frais d’expertise.

Sur les frais irrépétibles

L’article 700 du code de procédure civile dispose notamment que le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée et peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations. Il précise que les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu’elles demandent.

En l’espèce, à ce stade, il n’est pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles.

Sur l’exécution provisoire

En vertu de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement. Toutefois, l’article 514-1 du même code précise le juge ne peut écarter l’exécution provisoire de droit lorsqu’il statue en référé.

DECISION

Par ces motifs, le juge des référés statuant après débat en audience publique, par ordonnance réputée contradictoire prononcée par mise à disposition au greffe rendue en premier ressort ;

Vu l’ordonnance du juge des référés de Lille du 15 novembre 2022, rectifiée par ordonnance du 10 janvier 2023 ;
Vu l’ordonnance du juge chargé du contrôle des expertises du 2 mai 2023 désignant M. [N] en remplacement de l’expert précédemment saisi ;
Vu l’ordonnance du juge des référés de Lille du 5 décembre 2023 rendant communes les opérations d’expertise à la S.A. BRIQUÈTERIES DU NORD ;
Vu l’ordonnance du juge chargé du contrôle des expertises du 21 décembre 2023 portant extension de la mission de l’expert ;

Constate que la S.A.R.L. BATI CONCEPT s’est désistée de ses demandes à l’égard de la CAISSE REGIONALE D’ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES DU NORD EST (GROUPAMA NORD EST)

Déclare communes à la S.A.S. CANTILLANA, à la S.A. BRIQUÈTERIES DU NORD et à la S.A.S. BOIS & MATERIAUX exerçant sous l’enseigne RESEAU PRO les opérations d’expertise ordonnées par l’ordonnance du juge des référés de Lille du 15 novembre 2022 dans l’instance n°RG 22/536, rectifiée par ordonnance du 10 janvier 2023 ;

Ordonne à chacune de ces sociétés de communiquer sans délai à l’expert commis, M. [N], tous les documents nécessaires à l’accomplissement de sa mission ;

Fixe à 2 000 € (deux mille euros) le montant de la provision complémentaire à valoir sur les frais d’expertise que la S.A.R.L. BATI CONCEPT devra avoir consigné auprès de la régie d’avances et de recettes du tribunal judiciaire de Lille au plus tard le 12 novembre 2024 ;

Précise que si elle parvenait à l’expert après le dépôt de son rapport, les dispositions de la présente ordonnance seraient caduques ;

Accorde à l’expert un délai supplémentaire de deux mois pour accomplir sa mission ;

Condamne la S.A.R.L. BATI CONCEPT aux dépens liés à la présente instance en ordonnance commune ;

Déboute la CAISSE REGIONALE D’ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES DU NORD EST (GROUPAMA NORD EST) de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rappelle que la présente ordonnance est exécutoire à titre provisoire.

La présente ordonnance a été signée par le juge et le greffier.

LE GREFFIER LE JUGE DES RÉFÉRÉS

Sébastien LESAGE Samuel TILLIE


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