Régularité de la mise en demeure et conséquences d’une inexécution des obligations contractuelles dans le cadre de prêts immobiliers.

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Régularité de la mise en demeure et conséquences d’une inexécution des obligations contractuelles dans le cadre de prêts immobiliers.

La CAISSE RÉGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL LOIRE HAUTE-LOIRE a accordé deux prêts à Monsieur [X] [J] et Madame [K] [W] en octobre 2017. En octobre 2020, Monsieur [J] a demandé une suspension des échéances, accordée pour trois mois. En mars et novembre 2022, la banque a mis en demeure les emprunteurs de régulariser leurs paiements. En décembre 2022, la banque a prononcé la déchéance du terme des prêts, réclamant un total de 129 966,81 €. En mai 2023, la banque a assigné les emprunteurs devant le tribunal, demandant la confirmation de la déchéance et le paiement des sommes dues. Madame [K] [W] a contesté la déchéance et les demandes de la banque. Le tribunal a condamné solidairement les emprunteurs à verser des montants spécifiques pour chaque prêt, tout en déboutant les parties de leurs demandes supplémentaires. L’exécution provisoire de la décision a été maintenue.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

15 octobre 2024
Tribunal judiciaire de Saint-Etienne
RG
23/02300
N° RG 23/02300 – N° Portalis DBYQ-W-B7H-H2K2

N° minute:

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE SAINT-ETIENNE

1ère Chambre Civile

JUGEMENT DU 15 OCTOBRE 2024

ENTRE:

CAISSE RÉGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL LOIRE HAUTE LOIRE
prise en la personne de son représentant légal
dont le siège social est sis [Adresse 5]

représentée par Maître Grégoire MANN de la SELARL LEXLUX AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE (avocat postulant) et Maître Grégoire MANN de la SELARL LEX MENSA AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE (avocat plaidant)

ET:

Monsieur [X] [J]
né le [Date naissance 2] 1990 à [Localité 7]
demeurant [Adresse 4]

non représenté

Madame [K] [W]
née le [Date naissance 1] 1994 à [Localité 6] (69)
demeurant chez M.[Y] [V] – [Adresse 3]

représentée par Maître Lidya LAOUBI, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 42218-2023-003259 du 07/07/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Saint-Etienne )

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Antoine GROS
Greffier : Valérie DALLY

DÉBATS: à l’audience publique du 17 Septembre 2024. L’affaire a été mise en délibéré au 15 Octobre 2024.

DÉCISION: réputée contradictoire, prononcée par mise à disposition au greffe, en matière civile, en premier ressort.

FAITS ET PROCÉDURE:

Par actes sous seing-privé en date du 30 octobre 2017, la CAISSE RÉGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL LOIRE HAUTE-LOIRE a consenti à Monsieur [X] [J] et Madame [K] [W] deux prêts:
– Un prêt immobilier n°00001519767 d’un montant de 108 696 € au taux de 1,94%, remboursable en 300 mensualités;
– Un prêt immobilier n°00001519768 d’un montant de 27 174€, au taux de 1,34% remboursable en 300 mensualités;

Monsieur [J] faisait, le 26 octobre 2020, une demande de suspension des échéances des prêts pour une durée de 3 mois, qui lui était accordée.

Par courriers recommandés avec accusé de réception en date du 11 mars 2022 et 16 novembre 2022, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL LOIRE HAUTE-LOIRE mettait en demeure Monsieur [J] et Madame [W] de régulariser les échéances impayées et les soldes débiteurs en comptes courant sous peine de déchéance du terme.

Par courriers recommandés avec accusé de réception en date du 5 décembre 2022, la banque prononçait la déchéance du terme des prêts et mettait en demeure Monsieur [J] et Madame [W] de régler la somme totale de 129 966,81 €, au titre des prêts immobiliers n°00001519767 et n°00001519768 et du solde débiteur en compte courant.

Par actes d’huissier du 25 et 26 mai 2023, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL LOIRE HAUTE-LOIRE a fait assigner devant le tribunal judiciaire de SAINT-ETIENNE Monsieur [X] [J] et Madame [K] [W] et demandait, sur le fondement de l’article 1224 et suivants et 1231-5 du Code civil, de:
– DEBOUTER Madame [K] [W] de l’intégralité de ses demandes fins et conclusions et :
A titre principal,
– JUGER que la déchéance du terme a régulièrement été prononcée par elle,
A défaut,
– PRONONCER la résolution judiciaire des prêts n°00001519767 et 00001519768
En tout état de cause,
– CONDAMNER solidairement Monsieur [X] [J] et Madame [K] [W] à lui verser la somme de 111 722.84 €, outre intérêt au taux de 1.94 % à compter du 1er février 2023 au titre du prêt n°00001519767
– CONDAMNER solidairement Monsieur [X] [J] et Madame [K] [W] à lui verser la somme de 27 095.69 €, outre intérêts au taux de 1.34 % à compter du 1er février 2023 au titre du prêt n°00001519768
– CONDAMNER solidairement Monsieur [X] [J] et Madame [K] [W] à lui verser la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Grégoire MANN, Avocat, sur son affirmation de droit ;

– DIRE et JUGER que l’exécution provisoire de la décision à intervenir et nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire ;
– DIRE que dans l’hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations par le jugement à intervenir, l’exécution devra être réalisée par l’intermédiaire d’un huissier de justice, le montant des sommes retenues par l’huissier, en application de l’article A444-32 du Code de Commerce, portant modification du décret du 12 décembre 1996 (tarif des huissiers) devra être supporté par le débiteur en sus de l’application de l’article 700 du C.P.C.

Dans ses dernières conclusions, Madame [K] [W] demandait au Tribunal, sur le fondement des articles 1103, 1104, 1231-5 et 1343-5 du Code civil, de :
– JUGER que la déchéance du terme des prêts est nulle et non avenue à son égard ;
– DEBOUTER la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Loire Haute-Loire de toutes ses demandes comme étant infondées et injustifiées ;
A titre subsidiaire,
– DEBOUTER la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Loire Haute-Loire de sa demande de majoration du taux d’intérêt contractuel de 3 points concernant les intérêts de retard sur les échéances impayées antérieurement à la déchéance du terme concernant les deux prêts ;
– DEBOUTER la Caisse Régionale de Crédit Mutuel Loire Haute-Loire de sa demande en paiement des indemnités de recouvrement de 7% concernant les deux prêts ;
– DIRE n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– DEBOUTER la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Loire Haute-Loire de sa demande effectuée au titre des dépens.

Monsieur [X] [J] n’a pas constitué avocat.

MOTIF:

1/ Sur la régularité de la déchéance du prêt :

Madame [W] fait valoir que :
– elle n’a pas été régulièrement mise en demeure et n’a pas reçu la déchéance du terme ;
– Monsieur [X] [J] a signé à sa place les recommandés de la mise en demeure du 11 mars 2022 et de la déchéance du terme du 5 décembre 2022 ;
– elle n’était donc pas informée de l’arrêt du paiement des échéances des prêts.

Or, le contrat précise que Monsieur [J] et Madame [W] sont codébiteurs solidaires, dès lors il suffit que l’un des deux ait été régulièrement informé de la déchéance du terme : la mise en demeure adressée à un codébiteur solidaire produit effet à l’égard de tous.

En l’espèce, Monsieur [X] [J] a signé les trois lettres recommandées le mettant en demeure de payer et l’informant de la déchéance du terme.

Par conséquent, il peut être considéré que la déchéance du terme a été régulièrement mise en œuvre, et Madame [W] ne peut faire valoir une absence d’information relative au paiement des échéances des prêts.

Au surplus, il est constant que les consorts [J] [W] ont cessé de rembourser les échéances de leurs prêts immobiliers depuis le mois de décembre 2021 et, que, depuis cette date, seul un règlement de 197.32 € est intervenu en janvier 2023, ne permettant pas de régulariser les différentes échéances impayées, de sorte que cette absence de règlement constitue une inexécution suffisamment grave, au sens de l’article 1224 du Code Civil, pour justifier la résolution du contrat des prêts n°00001519767 et 00001519768.

2/ Sur la demande en paiement:

Conformément aux articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et doivent être formés, négociés et exécutés de bonne foi.

La demande de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL LOIRE HAUTE-LOIRE est fondée sur la production des pièces suivantes :
– les offres de prêt acceptées par les défendeurs le 16 octobre 2017;
– le tableau d’amortissement des deux prêts ;
– les lettres de mise en demeure en date du 11 mars et 16 novembre 2022 et les lettres recommandées du 5 décembre 2022 prononçant la déchéance du terme des prêts;
– le décompte actualisé des créances au 31 janvier 2023.

Les créances de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL LOIRE HAUTE-LOIRE s’établissent comme suit :

Au titre du prêt n° 00001519767:
– échéances impayées du 15.12.2021 au 05.12.2022………………………….5 410,48€
– intérêts de retard aux taux de 1,94% + 3% arrêtés au 05.12.2022 ………….2 870,00€
– capital restant dû au 05.12.2022 ………………………………………………..96 227,00 €
– intérêts au taux contractuel de 1,94% du 15.11.2022 au 05.12.2022…………103,71€
– indemnité de recouvrement 7 %………………………………………………………7 308,97€
– A déduire du règlements du 05.01.2023…………………………………….. – 197,32 €
————————–
Total : 111 722,84 €

Au titre du prêt n° 00001519768:
– échéances impayées du 15.12.2021 au 05.12.2022…………………………….1 279,80€
– intérêts de retard aux taux de 1,34% + 3% arrêtés au 05.12.2022………………700,00€
– capital restant dû au 05.12.2022………………………………………………..23 325,91 €
– intérêts au taux contractuel de 1,34% du 15.11.2021 au 05.12.2022 …………………..17,37 €
– indemnité de recouvrement 7 %…………………………………………………..1 772,61€

————————–
Total : 27 095,69€

Au regard de l’ensemble des justificatifs et pièces versés au débat, les créances de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL LOIRE HAUTE-LOIRE à l’égard de Monsieur [J] et Madame [W] apparaissent certaines, liquides et exigibles au titre du capital, des échéances impayées, intérêts et frais.

Néanmoins, il convient de réduire d’office les indemnités de recouvrement manifestement excessives sur le fondement de l’article 1231-5 du Code Civil à
– 500 € au titre du prêt immobilier n°00001519767,
– 100 € au titre du prêt immobilier n°00001519768.

Pour la même raison, il convient de réduire d’office les intérêts au taux contractuel majoré précédant la déchéance du terme, respectivement à :
– 1140 € au titre du prêt immobilier n°00001519767,
– 230 € au titre du prêt immobilier n°00001519768.

Par conséquent, Monsieur [X] [J] et Madame [K] [W] seront condamnés solitairement à régler à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL LOIRE HAUTE-LOIRE la somme de 102 683,50 €, outre intérêts au taux conventionnel de 1,94% l’an à compter du 1er février 2023 au titre du prêt immobilier n°00001519767.

De plus, Monsieur [X] [J] et Madame [K] [W] seront condamnés solitairement à régler à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL LOIRE HAUTE-LOIRE la somme de 24 953,08 €, outre intérêts au taux conventionnel de 1,34% l’an à compter du 1er février 2023 au titre du prêt immobilier n°00001591768.

3/ Sur les autres demandes:

Il n’est pas équitable en l’espèce de condamner quiconque sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de l’article 514 du code civil, l’exécution provisoire est de droit.

En l’espèce, il n’a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de la présente décision.

PAR CES MOTIFS:

Le Tribunal Judiciaire, statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe de façon réputée contradictoire et en premier ressort ;

CONDAMNE solidairement Monsieur [X] [J] et Madame [K] [W] à verser à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL LOIRE HAUTE-LOIRE la somme de 102 683,50 €, outre intérêt au taux contractuel de 1,94% à compter du 1er février 2023, au titre du prêt immobilier n°00001519767 ;

CONDAMNE solidairement Monsieur [X] [J] et Madame [K] [W] à verser à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL LOIRE HAUTE-LOIRE la somme de 24 953,08 €, outre intérêt au taux contractuel de 1,34% à compter du 1er février 2023, au titre du prêt immobilier n°00001519768;

DEBOUTE les parties du surplus de leur demande ;

CONDAMNE solidairement Monsieur [X] [J] et Madame [K] [W] aux entiers dépens de l’instance dont distraction au profit de Maître Grégoire MANN ;

DIT qu’il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de la présente décision ;

DIT que dans l’hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans le jugement, l’exécution forcée devra être réalisée par l’intermédiaire d’un commissaire de justice, le montant des sommes retenues par lui en application de l’article A444-35 du Code de commerce, devra être supporté par le débiteur en sus de l’application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

LA GREFFIERE, LE PRÉSIDENT,
Valérie DALLY Antoine GROS

Copie exécutoire à:
Me Lidya LAOUBI
Me Grégoire MANN

Le


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