Expertise judiciaire : La nécessité d’établir la preuve des désordres dans un contexte de litige immobilier

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Expertise judiciaire : La nécessité d’établir la preuve des désordres dans un contexte de litige immobilier

Madame [L] [K] a assigné en référé Monsieur [P] [W] pour obtenir la désignation d’un expert judiciaire, après avoir constaté des fissures et un affaissement du sol dans son appartement, rénové entre octobre 2019 et janvier 2020. Elle a déclaré le sinistre à son assureur, qui a mandaté un expert, révélant que les travaux de Monsieur [P] [W] au rez-de-chaussée avaient causé des mouvements structurels. L’expert a également noté que Monsieur [P] [W] n’avait pas d’assurance responsabilité civile et a estimé les réparations à près de 14 000 euros. Malgré des relances, Monsieur [P] [W] n’a pas répondu, ni comparu à l’audience. Le juge a ordonné une expertise pour déterminer l’origine et l’étendue des désordres, ainsi que les responsabilités, et a fixé une provision de 3 000 euros pour les frais d’expertise à consigner par Madame [L] [K]. L’expert devra rendre son rapport dans un délai de six mois après la consignation. Les dépens sont laissés à la charge de Madame [L] [K].

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

11 octobre 2024
Tribunal judiciaire d’Évry
RG
24/00745
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au Nom du Peuple Français

Tribunal judiciaire d’EVRY
Pôle des urgences civiles
Juge des référés

Ordonnance du 11 octobre 2024
MINUTE N° 24/______
N° RG 24/00745 – N° Portalis DB3Q-W-B7I-QIJ5

PRONONCÉE PAR

Carol BIZOUARN, Première vice-présidente,
Assistée de Alexandre EVESQUE, greffier lors des débats à l’audience du 10 septembre 2024 et de Fabien DUPLOUY, greffier, lors du prononcé

ENTRE :

Madame [L] [K]
demeurant [Adresse 8]

représentée par Maître Eric FORESTIER de la SELEURL FORESTIER AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R197

DEMANDERESSE

D’UNE PART

ET :

Monsieur [P] [W]
demeurant [Adresse 8]

non comparant ni constitué

DÉFENDEUR
D’AUTRE PART

ORDONNANCE : Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe, réputée contradictoire et en premier ressort.

**************

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte délivré le 10 juillet 2024, Madame [L] [K] a assigné en référé devant le président du tribunal judiciaire d’Evry, Monsieur [P] [W], au visa de l’article 145 du code de procédure civile, afin d’obtenir la désignation d’un expert judiciaire.

Au soutien de sa demande, Madame [L] [K] expose que :
– elle a procédé à la remise à neuf complète de son appartement situé au 1er étage de l’immeuble sis [Adresse 8] à [Localité 12], entre le mois d’octobre 2019 et le mois de janvier 2020,
– or, le 18 janvier 2022, elle a constaté l’apparition d’importantes fissures dans la plupart des pièces ainsi que l’affaissement du sol,
– elle a donc déclaré le sinistre à son assureur qui a mandaté le cabinet POLYEXPERT afin de réaliser une expertise amiable au cours de laquelle il a été constaté que les travaux de rénovation de l’appartement du rez-de-chaussée réalisés par Monsieur [P] [W], en cours d’acquisition dudit bien, avaient occasionné un mouvement structurel de l’immeuble,
– dans un second rapport du 15 février 2023, l’expert a exposé que Monsieur [P] [W] n’avait souscrit aucune assurance en responsabilité civile lors de la réalisation des travaux de rénovation de son appartement, chiffrant les travaux réparatoires à la somme de 13.985,95 euros,
– Monsieur [P] [W] n’a pas répondu aux courriers et mise en demeure aux termes desquels lui était demandé la réparation du préjudice,
– par voie informelle, il a indiqué contester les conclusions de l’expert amiable et l’existence d’un lien de causalité entre les désordres apparus dans l’appartement de Madame [L] [K] et les travaux qu’il a entrepris,
– faute de trouver un accord amiable, cette dernière s’estime contrainte de saisir la juridiction de céans.

A l’audience du 10 septembre 2024, Madame [L] [K], représentée par son conseil, a soutenu son acte introductif d’instance et déposé ses pièces telles que visées dans l’assignation.

Bien que régulièrement assigné, Monsieur [P] [W] n’a pas comparu et n’a pas constitué avocat.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux écritures déposées et développées oralement à l’audience ainsi qu’à la note d’audience.

L’affaire a été mise en délibéré au 11 octobre 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

En application des dispositions de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

L’article 145 du code de procédure civile dispose que s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

Justifie d’un motif légitime au sens de ce texte la partie qui démontre la probabilité de faits susceptibles d’être invoqués dans un litige éventuel.

Madame [L] [K] justifie par la production des factures de remise à neuf de son appartement, des rapports d’expertise du cabinet POLYEXPERT des 5 octobre 2022 et 15 février 2023, du devis de la société SIMOES daté du 19 janvier 2023 et des courriers et mise en demeure adressés à Monsieur [P] [W], rendant vraisemblable l’existence des désordres invoqués, d’un motif légitime pour obtenir la désignation d’un expert en vue d’établir, avant tout procès, la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution du litige.

Il sera donc fait droit à la demande, aux frais avancés de Madame [L] [K], dans les termes du dispositif ci-dessous.

PAR CES MOTIFS,

Le juge des référés, statuant publiquement par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort :

ORDONNE une mesure d’expertise et DESIGNE en qualité d’expert :

Monsieur [X] [R]
Expert judiciaire près la cour d’appel de Paris
[Adresse 4]
[Localité 5]
Tél : [XXXXXXXX01]
Fax : [XXXXXXXX02]
Email : [Courriel 9]

Avec mission de :
– relever et décrire les désordres allégués dans l’assignation et les pièces telles que visées dans le bordereau de communication de pièces annexé affectant le bien immobilier de Madame [L] [K] situé au 1er étage de l’immeuble sis [Adresse 8] à [Localité 12],
– en détailler l’origine, les causes et l’étendue et fournir tous éléments permettant à la juridiction de déterminer à quels intervenants ces désordres sont imputables et dans quelles proportions,
– en cas de désordres constatés rechercher si les désordres proviennent également d’une non-conformité aux règles de l’art ou aux documents contractuels, d’une exécution défectueuse, et/ou d’un défaut de conseil,
– dire notamment si ces désordres trouvent, totalement u partiellement leur cause dans les travaux réalisés dans l’appartement situé au-dessous de celui-ci et appartenant à Monsieur [P] [W],
– indiquer les conséquences de ces désordres, malfaçons et inachèvements quant à la solidité, l’habitabilité, l’esthétique des ouvrages et plus généralement quant à l’usage qui peut en être attendu ou quant à la conformité à sa destination,
– déterminer la date d’apparition des désordres,
– à partir de devis d’entreprises fournis par les parties, sur proposition, le cas échéant du maître d’œuvre de leur choix, donner un avis sur la ou les solutions appropriées pour remédier aux désordres entachant l’ouvrage et sur le coût des travaux utiles,
– donner son avis sur les préjudices et coûts induits par ces désordres et sur leur évaluation, dès lors que ces demandes sont présentées de manière motivée par les parties,
– plus généralement, fournir tous éléments techniques et de fait, de nature à permettre à la juridiction éventuellement saisie de déterminer les responsabilités encourues et d’évaluer s’il y a lieu les préjudices subis,
– faire les comptes entre les parties ;

RAPPELLE qu’en application de l’article 278 du code de procédure civile, l’expert peut prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne ;

DIT que pour procéder à sa mission l’expert devra :
– convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise,
– se faire remettre toutes pièces utiles à l’accomplissement de sa mission, notamment, s’il le juge utile, les pièces définissant le marché, les plans d’exécution, le dossier des ouvrages exécutés,
– se rendre sur les lieux et si nécessaire en faire la description, au besoin en constituant un album photographique et en dressant des croquis,
– à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations, l’actualiser ensuite dans le meilleur délai :
– en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations ;
– en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s’en déduisent ;
– en fixant aux parties un délai pour procéder aux interventions forcées ;
– en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ;

– au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport (par ex: réunion de synthèse ; communication d’un projet de rapport), et y arrêter le calendrier de la phase conclusive de ses opérations :
– en fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse,
– en rappelant aux parties, au visa de l’article 276 alinéa 2 du code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au-delà de ce délai.

DIT qu’en cas d’urgence ou de péril en la demeure reconnue par l’expert, l’expert déposera un pré-rapport, ou une note aux parties valant pré-rapport, précisant la nature, l’importance et le coût de ces travaux ;

DIT que sur avis de l’expert, le demandeur ou tout autre partie concernée par lesdits désordres pourra faire exécuter à ses frais avancés, pour le compte de qui il appartiendra, les travaux estimés indispensables par l’expert, sous la direction du maître d’œuvre de la demanderesse, par des entreprises qualifiées de son choix ;

FIXE à la somme de 3.000 euros le montant de la provision concernant les frais d’expertise qui devra être consignée par Madame [L] [K] auprès du régisseur d’avances et de recettes de ce tribunal, [Adresse 7] à [Localité 10] ([Courriel 11] / tél : [XXXXXXXX03] ou [XXXXXXXX06]) dans un délai de six semaines au plus tard après la date de délivrance par le greffe aux parties de la présente ordonnance, sans autre avis ;

DIT que faute de consignation de la provision dans ce délai impératif, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l’expert sera caduque et de nul effet ;

DIT que l’expert sera saisi de sa mission par l’envoi d’une copie certifiée conforme de la présente ordonnance et ne commencera ses opérations qu’après avis de la consignation qui lui sera adressée par le greffe ;

DIT que l’expert effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1du code de procédure civile et qu’il déposera l’original de son rapport, auquel sera joint, le cas échéant, l’avis du technicien qu’il s’est adjoint, sous la forme d’un exemplaire papier et numérique sous la forme d’un fichier PDF (CD ou clé USB) au greffe du service du contrôle des expertises du tribunal judiciaire d’Evry, [Adresse 7] à [Localité 10] dans un délai de 6 mois à compter de l’avis de la consignation effectuée qui lui sera adressée par le greffe, sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du juge du contrôle ;

DIT que l’expert judiciaire adressera un exemplaire de son rapport à chacune des parties sous la forme papier ou numérique en fonction du choix des parties et à défaut de précision sous la forme numérique et en fera mention dans son rapport ;

DIT qu’en déposant son rapport, l’expert adressera aux parties et à leurs conseils une copie de sa demande de rémunération ;

DIT que l’exécution de la mesure d’instruction sera suivie par le magistrat en charge du contrôle des expertises ;

INVITE les parties, dans le but de limiter les frais d’expertise, à utiliser la voie dématérialisée via l’outil OPALEXE pour leurs échanges contradictoires avec l’expert et la communication des documents nécessaires à la réalisation de la mesure d’expertise ;

LAISSE les dépens à la charge de Madame [L] [K].

Ainsi fait et prononcé par mise à disposition au greffe, le 11octobre 2024, et nous avons signé avec le greffier.

Le Greffier, Le Juge des Référés,


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