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Le délai de prescription des cotisations sociales dues au GUSO est suspendu pendant la période contradictoire comprise entre la lettre d’observation et la notification d’une mise en demeure pour paiement des chefs de redressement.
L’article L 244-3 du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, prévoyait en matière de prescription des cotisations et majorations de retard, notamment, que l’avertissement ou la mise en demeure ne peut concerner que les cotisations exigibles au cours des trois années civiles qui précèdent l’année de leur envoi ainsi que les cotisations exigibles au cours de l’année de leur envoi (…), que l’avertissement ou la mise en demeure qui concerne le recouvrement des majorations de retard correspondant aux cotisations payées ou aux cotisations exigibles dans le délai fixé au premier alinéa doit être adressé avant l’expiration d’un délai de deux ans à compter du paiement des cotisations qui ont donné lieu à l’application desdites majorations, que les pénalités de retard appliquées en cas de production tardive ou de défaut de production des déclarations obligatoires relatives aux cotisations et contributions sociales et des déclarations annuelles des données sociales doivent être mises en recouvrement par voie de mise en demeure dans un délai de deux ans à compter de la date de production desdits documents ou, à défaut, à compter selon le cas soit de la notification de l’avertissement, soit de la mise en demeure prévus à l’article L. 244-2. En la cause, France Travail rapporte la preuve qu’il a respecté les délais pour la demande de paiement de cotisations : Le contrôle URSSAF a eu lieu en 2018 et ne pouvait porter que sur les cotisations dues en 2015, 2016 et 2017, le délai de prescription est suspendu pendant la période contradictoire comprise entre la lettre d’observation et la notification d’une mise en demeure pour paiement des chefs de redressement.La mise en demeure envoyée le 8 octobre 2018 reçue le 11 octobre 2018 fait mention des cotisations dues au titre de l’année 2015 au 31 décembre 2017. France Travail disposait ainsi d’un délai de 3 ans plus l’année d’exigibilité pour réclamer les cotisations. La demande de paiement des cotisations de mai 2015 n’était pas prescrite puisqu’il était possible de réclamer toute l’année 2015. Il en résulte que les sommes réclamées ne se trouvent pas prescrites. |
Résumé de l’affaire : L’ASSOCIATION a été contrôlée par l’URSSAF LORRAINE pour la période de 2015 à 2017, ce qui a conduit à un rappel de cotisations de 4 027 euros. PÔLE EMPLOI a ensuite mis en demeure l’ASSOCIATION de payer 4 847,06 euros pour des cotisations dues au Guichet Unique du Spectacle Occasionnel (GUSO). Une contrainte a été émise le 6 février 2019, signifiée le 26 février 2019. L’ASSOCIATION a formé opposition à cette contrainte devant le tribunal de Metz par lettre recommandée le 12 mars 2019. Le tribunal a déclaré le recours recevable et a demandé des détails sur les cotisations dues. PÔLE EMPLOI a fourni ces détails le 7 mai 2022. L’affaire a été fixée pour audience le 28 juin 2024, avec une décision mise en délibéré pour le 27 septembre 2024, prorogée au 7 octobre 2024. PÔLE EMPLOI demande la validation de la contrainte et le paiement des sommes dues, tandis que l’ASSOCIATION conteste la contrainte, invoquant la prescription pour certaines sommes et demandant des condamnations à son profit.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE METZ
_____________________________
[Adresse 3]
[Adresse 3] – [Localité 5]
☎ [XXXXXXXX01]
___________________________
Pôle social
JUGEMENT DU 07 OCTOBRE 2024
DEMANDERESSE :
POLE EMPLOI ETABLISSEMENT PUBLIC NATIONAL
[Adresse 2]
[Localité 7]
représentée par Me François BATTLE, avocat au barreau de METZ, avocat plaidant, vestiaire : D301
DEFENDERESSE :
Association [10]
[Adresse 4]
[Localité 6]
représentée par Maître Caroline RUMBACH de l’ASSOCIATION CORDEBAR-RUMBACH, avocats au barreau de METZ, avocats plaidant, vestiaire : B103 substituée par Maître Marion DESCAMPS de , avocats au barreau de METZ, avocats plaidant, vestiaire : D404
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Président : M. MALENGE Grégory
Assesseur représentant des employeurs : M. Philippe STENGER
Assesseur représentant des salariés : Mme Monique MASSINET
Assistés de RAHYR Solenn, Greffière,
a rendu, à la suite du débat oral du 28 juin 2024, le jugement dont la teneur suit :
Expéditions – Pièces (1) – Exécutoire (2)
à Me François BATTLE
Maître Caroline RUMBACH de l’ASSOCIATION CORDEBAR-RUMBACH
POLE EMPLOI ETABLISSEMENT PUBLIC NATIONAL
Association [10]
le
L’Association [10] (ci-après « l’ASSOCIATION ») a fait l’objet d’un contrôle diligenté par l’URSSAF LORRAINE (ci-après « l’URSSAF ») ayant pour objet l’application de la législation de sécurité sociale, portant sur la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017.
Le contrôle a donné lieu à une lettre d’observations de l’URSSAF en date du 8 juin 2018, ayant entraîné un rappel de cotisations et contributions sociales d’un montant de 4 027 euros.
Une mise en demeure a été adressée à l’ASSOCIATION par PÔLE EMPLOI de payer la somme de 4847,06 euros au titre de cotisations et contributions dues au Guichet Unique du Spectacle Occasionnel (ci-après le «GUSO») pour l’emploi d’artistes du spectacle à titre occasionnel.
Il convient d’indiquer que PÔLE EMPLOI agit en qualité de gestionnaire du GUSO.
Une contrainte a été émise le 6 février 2019 et signifiée à l’ASSOCIATION le 26 février 2019, par le directeur du GUSO en recouvrement de la somme de 4 847,06 euros.
Par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 12 mars 2019, l’ASSOCIATION a formé opposition à cette contrainte devant le pôle social du Tribunal de grande instance de Metz (devenu Tribunal judiciaire au 1er janvier 2020).
Le tribunal de céans a, par jugement avant dire droit en date du 11 février 2022, auquel il est renvoyé pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, déclaré le recours de l’ASSOCIATION [10] recevable et ordonné la réouverture des débats afin d’enjoindre PÔLE EMPLOI, service gestionnaire du GUSO, à communiquer le détail des calculs des cotisations dues par l’ASSOCIATION. Les droits des parties ont été réservés dans cette attente.
Le 3 janvier 2022, un nouveau conseil s’est constitué en lieu et place du conseil initialement chargé de la défense des intérêts de PÔLE EMPLOI.
Le 7 mai 2022, PÔLE EMPLOI a communiqué les pièces 9 à 10 contenants les détails de cotisations pour les exercices 2015, 2016 et 2017 sous forme de tableaux.
Après plusieurs renvois en mise en état à la demande des parties, l’affaire a reçu fixation à l’audience publique du 28 juin 2024, date à laquelle elle a été retenue et examinée.
A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 27 septembre 2024, délibéré prorogé au 7 octobre 2014.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Le PÔLE EMPLOI, en qualité de gestionnaire du GUSO, régulièrement représenté à l’audience par son avocat, s’en rapporte à ses dernières écritures et au dernier état de ses pièces communiquées sous bordereau reçus au greffe le 7 mai 2024 et le 10 septembre 2021.
Dans ses dernières conclusions, le PÔLE EMPLOI demande au tribunal de :
dire et juger l’opposition à la contrainte de l’ASSOCIATION [10] mal fondée ;dire et juger la contrainte recevable et bien fondée ;débouter la [10] du moyen de droit de prescription soulevée ;En conséquence, valider la contrainte N°H21757098 492604665 / 573601088849147-01 en date du 6 février 2019, signifiée le 26 février 2019, pour un montant de 4 847,06 euros ;Au besoin, condamner l’ASSOCIATION [10] à lui payer cette somme de 4 847,06 euros ;condamner l’ASSOCIATION [10] à lui payer la somme de 72,73 euros au titre des frais de signification ;condamner l’ASSOCIATION [10] à lui payer une somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du CPC ;dire et juger la décision à intervenir exécutoire par provision tant au regard des dispositions de l’article R.133-3 que de l’article R.142-10-6 du Code de la Sécurité sociale ;condamner l’ASSOCIATION [10] en tous les frais et dépens.
L’ASSOCIATION [10], représentée à l’audience par son avocat, s’en rapporte à ses dernières écritures et au bordereau de pièces reçus au greffe le 18 décembre 2023.
Dans ses dernières conclusions, l’ASSOCIATION [10] demande au Tribunal de :
dire et juger l’opposition à contrainte formée par l’ASSOCIATION [10], prise en la personne de son représentant légal, recevable et bien fondée ;constater qu’une partie des sommes visées par la contrainte signifiée à l’ASSOCIATION [10] est prescrite et ne peut donc plus faire l’objet d’un recouvrement par le GUSO;infirmer et mettre à néant la contrainte N°H 21757098, 492604665 / 573601088849147-01, du 6 février 2019 prise par Monsieur le directeur du GUSO, pour un montant de 4 847,06 euros et signifiée le 26 février 2019;déclarer le PÔLE EMPLOI pris en la personne de son représentant légal, irrecevable et mal fondée en ses demandes;débouter le PÔLE EMPLOI pris en la personne de son représentant légal, de l’intégralité de ses demandes;condamner le PÔLE EMPLOI pris en la personne de son représentant légal, à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du CPC;condamner le PÔLE EMPLOI pris en la personne de son représentant légal en tous les frais et dépens, y compris les frais de signification de la contrainte litigieuse.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, le tribunal se réfère expressément aux conclusions des parties pour un plus ample exposé des faits, des moyens invoqués et des prétentions émises.
Il n’y a pas lieu de statuer à nouveau sur ce point.
Sur la prescription des cotisations
MOYENS DES PARTIES
L’ASSOCIATION [10] se réfère à l’article L133-9-2 du Code de la sécurité sociale pour établir que l’exigibilité des cotisations était acquise au 10 mai 2015. Elle explique que les cotisations de plus de 3 ans ne peuvent pas être réclamées et que la mise en demeure datée du 8 octobre 2018 concerne des sommes de plus de 3 ans qui ne peuvent pas faire l’objet d’un recouvrement par le GUSO. Elle s’oppose aux arguments de PÔLE EMPLOI concernant le point de départ de la prescription à la date où le GUSO a eu connaissance des activités sans déclaration. Elle argue du fait qu’elle n’était pas tenue de faire la déclaration puisque les contrats conclus avec les artistes prestataires indiquaient que ces derniers devaient faire les déclarations au GUSO. Elle ajoute que par conséquent elle n’a pas fait de dissimulation volontaire et peut soutenir la prescription.
PÔLE EMPLOI conteste la référence à l’article L133-9-2 du Code de la sécurité sociale puisque ce texte ne concerne pas la prescription de trois ans évoquée. Elle explique que la contrainte a été émise suite au contrôle de l’URSSAF réalisé en juin 2018 concernant la période de janvier 2015 au 31 décembre 2017 et a révélé des sommes non déclarées au GUSO et que la mise en demeure du 8 octobre 2018 puis la contrainte du 26 février 2019 ont été adressées suite au contrôle de l’URSSAF.
PÔLE EMPLOI estime que dans tous les cas les cotisations de mai 2015 pouvaient encore être exigibles au moment de la mise en demeure puisque l’article L244-3 du Code de la sécurité sociale, dans son ancienne version prévoyait une exigibilité au cours des 3 années civiles qui précèdent l’année de leur envoi.
REPONSE DE LA JURIDICTION
L’article L 244-3 du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, prévoyait en matière de prescription des cotisations et majorations de retard, notamment, que l’avertissement ou la mise en demeure ne peut concerner que les cotisations exigibles au cours des trois années civiles qui précèdent l’année de leur envoi ainsi que les cotisations exigibles au cours de l’année de leur envoi (…), que l’avertissement ou la mise en demeure qui concerne le recouvrement des majorations de retard correspondant aux cotisations payées ou aux cotisations exigibles dans le délai fixé au premier alinéa doit être adressé avant l’expiration d’un délai de deux ans à compter du paiement des cotisations qui ont donné lieu à l’application desdites majorations, que les pénalités de retard appliquées en cas de production tardive ou de défaut de production des déclarations obligatoires relatives aux cotisations et contributions sociales et des déclarations annuelles des données sociales doivent être mises en recouvrement par voie de mise en demeure dans un délai de deux ans à compter de la date de production desdits documents ou, à défaut, à compter selon le cas soit de la notification de l’avertissement, soit de la mise en demeure prévus à l’article L. 244-2.
PÔLE EMPLOI rapporte la preuve qu’il a respecté les délais pour la demande de paiement de cotisations :
Le contrôle URSSAF a eu lieu en 2018 et ne pouvait porter que sur les cotisations dues en 2015, 2016 et 2017, le délai de prescription est suspendu pendant la période contradictoire comprise entre la lettre d’observation et la notification d’une mise en demeure pour paiement des chefs de redressement.La mise en demeure envoyée le 8 octobre 2018 reçue le 11 octobre 2018 fait mention des cotisations dues au titre de l’année 2015 au 31 décembre 2017.
PÔLE EMPLOI disposait ainsi d’un délai de 3 ans plus l’année d’exigibilité pour réclamer les cotisations. La demande de paiement des cotisations de mai 2015 n’était pas prescrite puisqu’il était possible de réclamer toute l’année 2015.
Il en résulte que les sommes réclamées ne se trouvent pas prescrites.
L’exception de prescription sera rejetée.
Sur la régularité de la contrainte
Aux termes de l’article R 133-3 du Code de la sécurité sociale, la contrainte doit être précédée d’une mise en demeure non contestée et restée infructueuse. En outre, il est de jurisprudence constante que la contrainte doit permettre au cotisant d’avoir connaissance de la nature, la cause et de l’étendue de son obligation, qui peut être précisé par une simple référence à la mise en demeure. Elle doit également comporter la signature manuscrite de l’agent habilité et non une simple griffe.
Il est par ailleurs constant que la mise en demeure préalable délivrée par un organisme social à l’adresse du débiteur produit effet à son encontre quel que soit le mode de délivrance de cette mise en demeure (voir notamment Civ .2ème, 14 janvier 2010, pourvoi n°09-11183 ).
La contrainte litigieuse du 6 février 2019, signifiée le 26 février 2019, a été précédée d’une mise en demeure du 8 octobre 2018, reçue le 11 octobre 2018.
La contrainte fait expressément référence à la mise en demeure du 8 octobre 2018, et détaille le montant des sommes dues au titre des cotisations du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017 par l’ASSOCIATION.
Par conséquent, la contrainte est régulière.
Sur la créance invoquée par POLE EMPLOI
MOYENS DES PARTIES
Aux termes de son opposition à contrainte, l’ASSOCIATION contestait le principe des cotisations.
Elle explique qu’elle a fait appel à plusieurs artistes et qu’elle n’avait pas à effectuer de déclaration au GUSO et estime qu’il fallait vérifier si le prestataire avait rempli ses obligations de déclaration et de paiement, puisque cette obligation ne pesait plus sur elle du fait du contrat :
le contrat de Monsieur [F] [V] en 2015 stipulait, qu’il devait se charger des formalités de déclarations et de cotisations et que l’organisme social devait vérifier si ce dernier était défaillant. Elle ajoute que subsidiairement qu’il n’existe pas d’explications quant au calcul des cotisations, ni dans les conclusions de PÔLE EMPLOI, ni dans le PV de l’URSSAF. Elle indique ne pas comprendre que la prestation était de 1 700 euros et que les cotisations soient de 1 264 euros.La proposition commerciale du groupe [8] en 2016 comprenait le paiement des prestations sociales. Elle estime que le montant demandé de 414 euros pour une prestation de 625 euros par PÔLE EMPLOI n’est pas clair et ne correspond pas au tableau du site de l’URSSAF et est différent par rapport aux autres taux de cotisation réclamés pour les autres contrats (66,24% au lieu de 74,35%). Elle demande des explications de la part de PÔLE EMPLOI.le contrat de Monsieur [E] [S] stipulait également dans son article IX « l’artiste fera son affaire personnelle de toutes les déclarations et demandes administratives en temps opportun, charges sociale ou autres afférents à la manifestation ». Elle estime que le montant demandé de 580 euros pour une prestation de 650 euros par PÔLE EMPLOI n’est pas clair et ne correspond pas au tableau du site de l’URSSAF soit 89,23 % qui est aussi différent par rapport aux autres contrats.Pour l’animation du 15 janvier 2017 de Messieurs [L] et [O], elle conteste également les montants réclamés pour une prestation de 760 euros avec des cotisations de 671 euros et le taux appliqué (88,88 % encore différents des autres).Pour l’animation du 18 mai 2017 de l’orchestre [9], elle reconnaît l’absence involontaire de déclaration au GUSO, suite à la confusion due au décès d’un invité sur scène. Elle conteste pour autant les montants réclamés pour une prestation de 1 400 euros avec des cotisations de 1 098 euros et le taux appliqué (78,42 % encore différents des autres).
L’ASSOCIATION conteste également le fait que pour l’ensemble des contrats et prestations le montant de l’assiette retenue et la taxation de plus de 70% ne sont pas expliqués dans les tableaux produits. Elle ne comprend pas pourquoi le point de départ est le montant des cotisations.
Dans tous les cas, elle considère que les éléments produits ne lui permettent pas de comprendre les calculs avancés.
PÔLE EMPLOI en réponse argue du fait que la contrainte est justifiée puisque la lettre d’observations détaille le montant retenu pour le calcul des cotisations. Elle ajoute que l’Association n’apporte pas d’éléments de calcul contraires :
Le contrat de Monsieur [F] [V] étant un contrat d’engagement et de travail conclu avec l’association prouve que l’ASSOCIATION devait procéder aux déclarations au GUSO ;Pour le [8], il s’agit d’une réintégration dans l’assiette des cotisations des frais perçus par les salariés intermittents, correspondant aux explications de la lettre d’observations ;Pour Monsieur [E] [S], il appartenait à l’Association en qualité d’organisateur de spectacle de vérifier la déclaration et le paiement des contributions et cotisations. Elle indique qu’un échange de courrier a eu lieu entre l’URSSAF et l’ASSOCIATION pour expliquer les modalités de calcul.
PÔLE EMPLOI détaille les modalités de calcul des contributions pour chaque année en précisant qu’il est parti du montant des cotisations à verser pour retrouver l’assiette de calcul :
pour 2015, 1 264 euros de cotisations à verser pour une assiette de calcul de 1 637,32 euros ;pour 2016, 414 euros de cotisations à verser pour une assiette de calcul de 531,20 euros (avec une réintégration de 625 euros indiquées par l’URSSAF) ;pour 2017, 2 349 euros cotisations à verser pour une assiette de calcul de 2 997,37 euros (pour un montant total indiqué dans la lettre d’observations de 2 810 euros)
PÔLE EMPLOI précise qu’il s’agit des cotisations patronales et salariales dues expliquant un taux de plus de 70 % avec une assiette et des taux en vigueur le dernier jour de contrat.
Il ajoute que le détail des calculs et les textes applicables du Code du travail et du Code de la sécurité sociale ont été visés dans la lettre d’observations et le procès-verbal de l’URSSAF qui ont servi de référence au GUSO.
REPONSE DE LA JURIDICTION
Sur le bien-fondé du redressement
En application de l’article L311-2 du code de la sécurité sociale, sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d’une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l’un ou de l’autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat.
Suivant l’article L311-3 15° du même code, sont notamment compris parmi les personnes auxquelles s’impose l’obligation prévue à l’article L.311-2 ci-dessus, même s’ils ne sont pas occupés dans l’établissement de l’employeur ou du chef d’entreprise, même s’ils possèdent tout ou partie de l’outillage nécessaire à leur travail et même s’ils sont rétribués en totalité ou en partie à l’aide de pourboires : 15° les artistes du spectacle et les mannequins auxquels sont reconnues applicables les dispositions des articles L762-1 et suivants (artistes du spectacle), L763-1 et L763-2 (mannequins) du code du travail. Les obligations de l’employeur sont assumées à leur égard par les entreprises, établissements, services, associations, groupements ou personnes qui font appel à eux, même de façon occasionnelle.
Les articles L762-1 et suivants sont codifiés depuis 2008 aux articles L.7121-1 et suivants du code du travail qui disposent :
L.7121-1 : « Les dispositions du présent code sont applicables aux artistes du spectacle, sous réserve des dispositions particulières du présent chapitre. »
L.7121-2 : « Sont considérés comme artistes du spectacle, notamment :
1° L’artiste lyrique ;
2° L’artiste dramatique ;
3° L’artiste chorégraphique ;
4° L’artiste de variétés ;
5° Le musicien ;
6° Le chansonnier ;
7° L’artiste de complément ;
8° Le chef d’orchestre ;
9° L’arrangeur-orchestrateur ;
10° Le metteur en scène, le réalisateur et le chorégraphe, pour l’exécution matérielle de leur conception artistique ;
11° L’artiste de cirque ;
12° Le marionnettiste ;
13° Les personnes dont l’activité est reconnue comme un métier d’artiste-interprète par les conventions collectives du spectacle vivant étendues. »
L7121-3: « Tout contrat par lequel une personne s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un artiste du spectacle en vue de sa production, est présumé être un contrat de travail dès lors que cet artiste n’exerce pas l’activité qui fait l’objet de ce contrat dans des conditions impliquant son inscription au registre du commerce. »
L7121-4 : « La présomption de l’existence d’un contrat de travail subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération, ainsi que la qualification donnée au contrat par les parties. Cette présomption subsiste même s’il est prouvé que l’artiste conserve la liberté d’expression de son art, qu’il est propriétaire de tout ou partie du matériel utilisé ou qu’il emploie lui-même une ou plusieurs personnes pour le seconder, dès lors qu’il participe personnellement au spectacle. »
L7121-5 : « La présomption de salariat prévue à l’article L. 7121-3 ne s’applique pas aux artistes reconnus comme prestataires de services établis dans un Etat membre de la Communauté européenne ou dans un autre Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen où ils fournissent habituellement des services analogues et qui viennent exercer leur activité en France, par la voie de la prestation de services, à titre temporaire et indépendant. »
L.7121-6 : « Le contrat de travail d’un artiste du spectacle est individuel. »
L7121-7 : « Le contrat de travail peut être commun à plusieurs artistes lorsqu’il concerne des artistes se produisant dans un même numéro ou des musiciens appartenant au même orchestre. Dans ce cas, le contrat de travail désigne nominativement tous les artistes engagés et comporte le montant du salaire attribué à chacun d’eux. Il peut être revêtu de la signature d’un seul artiste, à condition que le signataire ait reçu mandat écrit de chacun des artistes figurant au contrat.
L’artiste contractant dans ces conditions conserve la qualité de salarié. »
L7121-7-1 : « Les employeurs relevant du champ d’application du guichet unique fixé à l’article L.7122-22 doivent, en l’absence de dispositions conventionnelles spécifiques aux artistes et techniciens du spectacle au titre de leur activité principale, lorsqu’ils emploient un artiste ou un technicien du spectacle, les faire bénéficier des dispositions d’une convention collective des activités du spectacle et s’y référer dans le formulaire de déclaration d’emploi. »
En l’espèce, l’URSSAF lors de son contrôle a constaté que l’ASSOCIATION a organisé les 25 avril 2015, 15 janvier 2017 et 18 mai 2017 différentes animations, notamment en faisant appel à un transformiste, des musiciens, et deux orchestres.
Dans la mesure où il s’agit d’artistes du spectacle les dispositions des articles L311-3 du Code de la sécurité sociale et L7121-3 du Code du travail trouvent application et ainsi l’artiste bénéficie d’une présomption de salariat et, par voie de conséquence, du statut social protecteur accordé au salarié par le Code du travail. Cette présomption de salariat est une présomption simple.
Il convient d’examiner chaque prestation pour savoir si la présomption d’existence d’un contrat de travail doit être admise.
Le contrat de Monsieur [F] [V] conclu le 16 mars 2015 est intitulé « CONTRAT D’ENGAGEMENT ET DE TRAVAIL », l’ASSOCIATION ne rapporte pas la preuve que l’artiste était inscrit au Registre du Commerce, lui permettant d’exercer de manière indépendante. Dans ces conditions, la présomption de salariat n’étant pas renversée, l’ASSOCIATION avait pour obligation de payer les cotisations salariales et patronales afférentes à la prestation. Le fait d’avoir à payer les boissons et repas est sans incidence sur la qualification de contrat de travail.
Pour le contrat conclu avec le [8] pour l’animation du 23 avril 2016, l’ASSOCIATION ne rapporte pas la preuve que l’orchestre ou les artistes étaient inscrits au Registre du Commerce. Par ailleurs, il y a lieu de constater que l’ASSOCIATION avait déclaré une partie des salaires soit 70 euros par artiste. Dans ces conditions, la présomption de salariat trouve à s’appliquer et les cotisations salariales et patronales devaient être payées sur la totalité du salaire par l’ASSOCIATION.
Pour le contrat de Monsieur [E] [S] du 15 janvier 2017, bien que le contrat d’engagement stipule que « l’artiste fera son affaire personnelle de toutes les déclarations et demandes administratives en temps opportun, charges sociales ou autres afférents à la manifestation ». Il est bien rappelé que « l’employeur est seul responsable du spectacle qu’il organise ».
L’ASSOCIATION ne rapporte pas la preuve que l’artiste était inscrit au Registre du Commerce, dans ces conditions, l’employeur devait payer les cotisations salariales et patronales afférentes à ce contrat de travail, la présomption n’étant pas renversée.
En ce qui concerne la prestation de Messieurs [L] et [O] faisant partie de l’orchestre [9] en date du 15 janvier 2017, l’ASSOCIATION ne conteste pas la présomption, mais l’assiette et le montant des cotisations réclamées. L’ASSOCIATION était par conséquent redevable des cotisations patronales et salariales pour cette prestation.
Concernant l’animation de l’Orchestre [9] du 29 avril 2017, aucun document n’est versé au débat concernant cette prestation. Dans la lettre d’observations, il est indiqué que dans la comptabilité de l’ASSOCIATION une somme de 1 400 euros a été versée en espèce. Il y a également lieu de constater que la présomption n’est pas renversée et qu’en vertu de l’existence d’un contrat de travail pour cette prestation, l’ASSOCIATION devait verser les cotisations patronales et salariales et effectuer une déclaration auprès du GUSO.
Il sera rappelé que la déclaration au GUSO doit se faire avant le début d’exécution du travail pour que la déclaration préalable d’embauche soit régulièrement bien effectuée, le fait qu’une personne soit morte pendant le spectacle ne peut pas justifier le fait que l’ASSOCIATION n’ait pas effectué sa déclaration avant le début du spectacle.
Pour les années 2015 et 2016, 2017, l’ASSOCIATION qui organise occasionnellement des spectacles vivants ne rapporte pas de preuve permettant de renverser la présomption de salariat. Elle avait par conséquent l’obligation d’effectuer les formalités par le biais du GUSO, pour la déclaration d’embauche des artistes et pour le paiement de toutes les cotisations sociales, ce qu’elle n’a que partiellement effectué pour les artistes de l’orchestre [8].
Dès lors c’est à juste titre que l’URSSAF a considéré que les contrats de Monsieur [F] [V], des musiciens et chanteurs du [8], de Monsieur [E] [S], de Messieurs [L] et [O] et des artistes de l’Orchestre [9] étaient des contrats de travail entrant dans le champ d’application des dispositions des articles L. 311-2 et L.311-3° du Code de la sécurité sociale et que les sommes versées par l’ASSOCIATION aux artistes étaient des salaires devant donner lieu au versement de cotisations sociales.
Sur l’assiette des cotisations
Les cotisations de la sécurité sociale sont assises sur les revenus d’activités, ainsi les cotisations sont dues sur la rémunération que l’employeur verse au salarié.
Le cachet versé à l’artiste constitue le salaire qui est soumis à des cotisations.
Les cotisations et contributions sociales sont calculées sur une assiette constituée de la rémunération
proprement dite ainsi que, le cas échéant, des primes, gratifications, avantages en nature ou espèces,
alloués au salarié (article L 242-1 du code de la sécurité sociale).
Il résulte de la combinaison des articles L. 242-1 et L. 243-1 du code de la sécurité sociale que, sauf dispositions particulières contraires, les cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales sont calculées sur le montant brut, avant précompte s’il y a lieu de la part des cotisations et contributions supportées par le salarié, des sommes et avantages compris dans l’assiette des cotisations.
Par jugement en date du 11 février 2022, il a été demandé à PÔLE EMPLOI de communiquer le détail des calculs des cotisations dues par l’ASSOCIATION.
Le 5 mai 2022, PÔLE EMPLOI a, suivant bordereau de communication n°2, produit les pièces 9 à 10 se rapportant aux détails de calcul des cotisations pour les exercices 2015 2016 et 2017. Il indique qu’il a effectué ces calculs à partir des cotisations réclamées.
Il convient de rappeler que l’article 1353 du Code civil dispose que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Si l’opposant a la charge de rapporter la preuve du caractère infondé des cotisations appelées en recouvrement par l’organisme social, il incombe néanmoins à l’organisme social, considéré comme le demandeur dans le cadre d’une opposition à contrainte, de rapporter la preuve du principe et du montant de la créance pour laquelle il a délivré une contrainte en justifiant avoir calculé les cotisations conformément aux dispositions définies aux articles susvisés.
L’examen des tableaux produits et l’indication de la méthode de calcul effectuée par PÔLE EMPLOI ne permet ni au contribuable, ni au tribunal d’avoir une connaissance exacte du mode de calcul effectif réalisé par l’URSSAF au moment de son contrôle.
L’incompréhension de l’ASSOCIATION est justifiée d’autant plus que l’organisme de recouvrement, en la personne de PÔLE EMPLOI, propose un autre mode de calcul que celui de l’URSSAF, qui a été contraint de partir d’une assiette (le salaire retenu) pour en arriver à un résultat correspondant à des cotisations.
Dans la mesure où le calcul produit par PÔLE EMPLOI a été effectué à partir des cotisations correspondant au résultat et non à l’assiette retenue par l’URSSAF pour calculer les cotisations dues, il s’ensuit que ce mode de calcul ne peut pas justifier le montant des cotisations ainsi réclamées.
Il sera relevé que le tribunal de céans avait déjà constaté dans son jugement avant dire droit qu’aucun des documents (lettre d’observations du 8 juin 2018, lettre en réponse du 11 juillet 2018 et procès-verbal de l’URSSAF) ne donne le détail des calculs applicables aux cotisations dues par l’ASSOCIATION et que l’annexe de la lettre d’observations n’est toujours pas produite.
En l’absence de l’indication de la nature de l’assiette retenue et des différences entre les sommes indiquées au titre des prestations dans la lettre d’observations et l’assiette de calcul telle qu’indiquée dans le tableau produit par PÔLE EMPLOI, il y a lieu de dire que PÔLE EMPLOI ne justifie pas du montant de sa créance.
Dès lors, la contrainte sera annulée
Sur les dépens
Aux termes de l’article R133-6 du code de la sécurité sociale, « Les frais de signification de la contrainte faite dans les conditions prévues à l’article R133-3, ainsi que de tous actes de procédure nécessaires à son exécution, sont à la charge du débiteur, sauf lorsque l’opposition a été jugée fondée. »
L’article 696 du code de procédure civile dispose que « La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
Les conditions dans lesquelles il peut être mis à la charge d’une partie qui bénéficie de l’aide juridictionnelle tout ou partie des dépens de l’instance sont fixées par les dispositions de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020. »
En l’espèce, au regard de l’annulation de la contrainte, POLE EMPLOI, partie succombante, sera condamné aux dépens de l’instance, les frais de signification de la contrainte et, le cas échéant, les frais de son exécution forcée restant en conséquence à sa charge.
Sur les frais irrépétibles
Suivant l’article 700 du code de procédure civile, « Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1° A l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2° Et, le cas échéant, à l’avocat du bénéficiaire de l’aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l’aide aurait exposés s’il n’avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l’article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 .
Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu’elles demandent.
La somme allouée au titre du 2° ne peut être inférieure à la part contributive de l’Etat majorée de 50 %. »
En l’espèce, PÔLE EMPLOI, partie succombante, sera condamné à payer la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
La demande formée par POLE EMPLOI au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera par contre rejetée.
Sur l’exécution provisoire
L’exécution provisoire du présent jugement est de droit par application des dispositions de l’article R133-3 alinéa 4 du code de la sécurité sociale.