La société Sogefinancement a accordé un prêt personnel de 80 000 euros à Mme [Z] [D] en août 2015, remboursable en 84 mensualités. Un avenant a été signé en janvier 2016, augmentant le montant dû à 82 096,89 euros. En août 2019, Sogefinancement a assigné Mme [D] pour obtenir le paiement d’un solde de 67 675,30 euros, ainsi que des intérêts et des dépens. Le tribunal de Nanterre a déclaré l’affaire incompétente, la renvoyant au tribunal de proximité de Courbevoie. En septembre 2022, ce dernier a condamné Mme [D] à payer 62 700,52 euros, tout en lui accordant des dommages et intérêts de 13 958,26 euros pour défaut de mise en garde. Mme [D] a fait appel de ce jugement en mars 2023, demandant l’infirmation de certaines condamnations. Sogefinancement a également interjeté appel, contestant la décision sur les dommages et intérêts. La cour a déclaré irrecevable la demande de Sogefinancement concernant l’irrecevabilité de l’appel de Mme [D], a infirmé partiellement le jugement sur les dommages et intérêts, et a débouté Mme [D] de sa demande en la matière, tout en confirmant les autres dispositions du jugement. Mme [D] a été condamnée à payer des frais d’appel.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
DE
VERSAILLES
Code nac : 53B
Chambre civile 1-2
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 08 OCTOBRE 2024
N° RG 23/01818 – N° Portalis DBV3-V-B7H-VXYD
AFFAIRE :
[Z], [O] [D]
C/
S.A.S. SOGEFINANCEMENT prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Septembre 2022 par le Tribunal de proximité de Courbevoie
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 21-000510
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 08/10/24
à :
Me Tanguy RUELLAN
Me Stéphanie CARTIER
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE HUIT OCTOBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Madame [Z], [O] [D]
née le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 6]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentant : Me Tanguy RUELLAN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 696
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/011011 du 17/02/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de VERSAILLES)
APPELANTE
****************
S.A.S. SOGEFINANCEMENT prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 394 35 2 2 72
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Stéphanie CARTIER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 350 – N° du dossier 2305.257
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 20 Juin 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anne THIVELLIER, Conseillère chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Madame Anne THIVELLIER, Conseillère,
Madame Isabelle BROGLY, Magistrate honoraire,
Greffière, lors des débats : Madame Jeannette BELROSE,
Greffière, lors du prononcé de la décision : Madame Céline KOC,
Selon offre préalable acceptée le 25 août 2015, la société Sogefinancement a consenti à Mme [Z] [D] un prêt personnel pour un montant total de 80 000 euros, remboursable en 84 mensualités d’un montant de 1 168,68 euros hors assurances facultatives, au taux débiteur annuel fixe de 6%.
Le 20 janvier 2016, les parties ont signé un avenant de réaménagement du contrat de crédit portant sur la somme de 82 096,89 euros.
Par acte d’huissier de justice en date du 9 août 2019, la société Sogefinancement a fait assigner Mme [Z] [D] devant le tribunal judiciaire de Nanterre aux fins d’obtenir la condamnation de la défenderesse, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
– à lui payer une somme de 67 675,30 euros au titre du solde restant dû sur le prêt personnel « Expresso » n°36195900794, outre les intérêts au taux contractuel annuel de 6%, à compter de la mise en demeure du 25 juin 2019 et jusqu’au parfait paiement,
– à payer les dépens ainsi qu’une somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 code de procédure civile.
Par ordonnance rendue le 28 août 2020, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Nanterre s’est déclaré incompétent et a ordonné le renvoi de l’affaire devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Courbevoie.
Par jugement contradictoire du 15 septembre 2022, le juge des contentieux et de la protection du tribunal de proximité de Courbevoie a :
– dit recevable l’action de la société Sogefinancement,
– condamné Mme [D] à payer à la société Sogefinancement,
* une somme de 62 700,52 euros, au titre du solde débiteur du crédit personnel nº 36195900794, souscrit le 25 août 2015, avec intérêts au taux contractuel de 6%, à compter de la mise en demeure reçue le 27 juin 2019,
* une somme de 100 euros, portant intérêts au taux légal, à compter du jugement,
– condamné la société Sogefinancement à payer à Mme [D] une somme de 13 958,26 euros, à titre de dommages et intérêts, pour défaut de vérification de la proportionnalité et de mise en garde à l’égard de l’emprunteuse,
– ordonné la compensation entre les créances réciproques des parties,
– dit que Mme [D] pourra s’acquitter du solde dû en 23 mensualités de 2 000 euros, la 24ème représentant le solde de la dette, y compris les intérêts, la première exigible avant le 30 du mois suivant la signification du jugement, les autres avant le 30 des mois suivants jusqu’à apurement,
– dit qu’en cas de non paiement d’une seule mensualité à son échéance, la totalité de la somme redeviendra exigible,
– rejeté toute autre demande,
– dit que les dépens seront à la charge de Mme [D],
– dit que l’exécution provisoire assortit la présente décision.
Par déclaration déposée au greffe le 17 mars 2023, Mme [D] a relevé appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 6 décembre 2023, Mme [D], appelante, demande à la cour de :
– dire que son appel est recevable et que les prétentions de cette dernière tendent aux mêmes fins qu’en première instance,
– infirmer la décision rendue par le tribunal de proximité de Courbevoie en ce qu’elle l’a condamnée à payer :
* à la société Sogefinancement une somme de 62 700,52 euros au titre des mensualités échues et impayées et du capital restant dû an 25 juin 2019,
* 100 euros an titre de la clause pénale,
* les intérêts au taux contractuel de 6% sur les sommes dues,
Et statuant à nouveau,
– dire que la société Sogefinancement n’a pas satisfait à son obligation d’information permettant sa subrogation dans l’exécution du contrat de prêt,
– condamner la société Sogefinancement au titre des manquements commis dans l’exécution du contrat à l’indemniser à hauteur des sommes restant dues par elle pour le remboursement du prêt personnel « Expresso » n°36195900794,
– ordonner la restitution des fonds éventuellement perçus par l’intimée au titre de l’exécution provisoire de la décision rendue en première instance,
– confirmer la décision rendue par le tribunal de proximité de Courbevoie en ce qu’elle a condamné la société Sogefinancement à lui payer à une somme de 13 958,26 euros à titre de dommages et intérêts, pour défaut de vérification de la proportionnalité et mise en garde à l’égard de l’emprunteuse,
– condamner la société Sogefinancement à la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 5 juin 2024, la société Sogefinancement, intimée et appelante à titre incident, demande à la cour de :
– la déclarer recevable et bien fondée en l’ensemble de ses moyens, fins et conclusions,
Y faisant droit,
– déclarer Mme [D] tant irrecevable que mal fondée en son appel et en l’ensemble de ses moyens, fins et conclusions,
– infirmer le jugement rendu le 15 septembre 2022 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Courbevoie en ce qu’il l’a condamnée à payer à Mme [D] une somme de 13 958,26 euros à titre de dommages et intérêts,
Statuant à nouveau,
– débouter Mme [D] de sa demande de dommages et intérêts,
En tout état de cause,
– condamner Mme [D] au paiement d’une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [D] aux dépens d’appel au profit de Me Cartier qui pourra les recouvrer dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 20 juin 2024.
Ainsi qu’il y avait été autorisé à l’audience, l’avocat de Mme [D] a transmis, via le RPVA, l’intégralité du jugement déféré, la page n°4 de la copie jointe à la déclaration d’appel étant manquante.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
A titre liminaire, il est précisé que compte tenu de la date de signature du contrat, il sera fait application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l’entrée en vigueur de la loi n°2010-737 du 1er juillet 2010 effective au 1er mai 2011 et antérieure à l’ordonnance du 14 mars 2016 entrée en vigueur le 1er juillet 2016.
Sur la recevabilité de l’appel
La société Sogéfinancement soutient que l’appel de Mme [D] est irrecevable aux motifs qu’elle demande à la cour de la condamner à lui verser des dommages et intérêts d’un montant équivalent aux sommes restant dues par elle pour le remboursement du prêt alors qu’elle ne sollicite pas l’infirmation du chef du jugement ayant limité le montant de sa demande de dommages et intérêts mais au contraire sa confirmation. Elle en déduit qu’elle ne remet pas la chose jugée en question devant la juridiction d’appel comme exigé par l’article 561 du code de procédure civile.
Elle soutient en outre qu’en application de l’article 910-4 du code de procédure civile, toute demande ultérieure de Mme [D] tendant à l’infirmation de ce chef du jugement serait irrecevable.
Mme [D] réplique que son appel est recevable en faisant valoir que la société Sogéfinancement fait abstraction du caractère limité de l’appel. Elle expose qu’elle ne pouvait pas interjeter appel de la totalité de la décision puisque le premier juge avait bien reconnu la responsabilité précontractuelle de la banque et l’a condamnée à lui verser des dommages et intérêts à ce titre, ce dont elle demande la confirmation. Elle relève que le tribunal l’a déboutée de ses autres demandes et l’a condamnée à verser le solde du prêt, ce dont elle a interjeté appel en estimant notamment que la faute de la banque dans l’exécution du contrat de prêt n’avait pas été caractérisée en première instance.
Sur ce,
En application de l’article 914 du code de procédure civile, les parties ne sont plus recevables à invoquer devant la cour d’appel la caducité ou l’irrecevabilité de l’appel après la clôture de l’instruction, à moins que leur cause ne survienne ou ne soit révélée postérieurement.
Il convient ainsi de déclarer irrecevable la demande de la société Sogefinancement visant à déclarer l’appel de Mme [D] irrecevable. En tout état de cause, la demande eût-elle été déclarée recevable que la cour l’eût rejetée pour être manifestement mal fondée, les moyens soulevés par la société Sogéfinancement au soutien de cette demande n’étant pas de nature à entraîner l’irrecevabilité de l’appel de Mme [D] comme il le sera démontré ci-après, s’agissant de l’effet dévolutif de l’appel.
Sur la demande en paiement de la banque au titre du prêt
La société Sogefinancement fait valoir que Mme [D] se borne à demander l’infirmation du seul chef du jugement l’ayant condamnée à payer la somme de 62 700,52 euros au titre des sommes restant dues au titre du prêt sans formuler expressément de prétention en résultant, à savoir le débouté de sa demande en paiement, de sorte que la cour ne peut que confirmer la condamnation en paiement.
Mme [D] ne répond pas sur ce point.
Sur ce,
Il résulte de l’article 542 du code de procédure civile que l’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel.
En application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.
En l’absence de telle ou telle prétention au dispositif des conclusions d’une partie, le juge ne peut statuer dessus et une demande d’infirmation du jugement (ou de tel ou tel chef de ce jugement), ne suffit pas à constituer une prétention au sens de l’article 954 sur le fond des demandes qui ont été tranchées par ce jugement (Civ. 2ème, 10 décembre 2020, n°19-16.137).
En l’espèce, il apparaît que tant dans sa déclaration d’appel que dans ses dernières conclusions, Mme [D] demande l’infirmation du chef du jugement l’ayant condamnée à verser à la société Sogéfinancement la somme de 62 700,52 euros restant due au titre du prêt.
Pour autant, elle ne formule aucune demande à ce titre dans le dispositif de ses conclusions puisqu’elle sollicite la condamnation de la société Sogéfinancement à l’indemniser à hauteur des sommes dues par elle en remboursement du prêt au titre des manquements commis par la banque dans l’exécution du contrat en soutenant qu’elle n’a pas satisfait à son obligation d’information permettant sa subrogation dans l’exécution du prêt. Dans le corps de ses conclusions, elle précise que le préjudice qu’elle a subi peut être chiffré à hauteur des sommes auxquelles elle a été condamnée dans la décision rendue en première instance.
En conséquence, la cour, qui n’est saisie par Mme [D] d’aucune demande au titre des sommes restant dues au titre du prêt, ne peut que confirmer ce chef du jugement déféré.
Sur la demande de Mme [D] en dommages et intérêts
* pour défaut de vérification de la proportionnalité et devoir de mise en garde de la banque
A titre liminaire, la cour relève que si Mme [D] demande la confirmation du chef du jugement ayant condamné la société Sogéfinancement à lui verser la somme de 13 958,26 euros à titre de dommages et intérêts en raison des manquements de la banque à son obligation de vérification de proportionnalité et à son devoir de mise en garde à son égard, la société Sogefinancement a interjeté appel incident de ce chef du jugement, de sorte que la cour en est saisie conformément aux articles 542 et 954 du code de procédure civile.
Le premier juge a motivé l’octroi de dommages et intérêts par le fait que la société Sogéfinancement avait fait état de sa connaissance du patrimoine de Mme [D] et de son ex-époux sans apporter aux débats les éléments correspondants et qu’il n’était pas suffisamment établi qu’elle avait respecté son obligation de vérification de proportionnalité et son devoir de mise en garde à l’égard de l’emprunteuse.
Au soutien de sa demande de confirmation de ce chef du jugement, Mme [D] expose que le premier juge a bien caractérisé les manquements de la société Sogéfinancement au niveau précontractuel sans développer de moyens particuliers. En application du dernier alinéa de l’article 954 du code de procédure civile, elle est donc réputée s’approprier les motifs du jugement.
Poursuivant l’infirmation de ce chef du jugement, la société Sogéfinancement demande à la cour de débouter Mme [D] de sa demande de dommages et intérêts.
Elle fait valoir que le premier juge a fait une mauvaise appréciation des faits. Elle relève que Mme [D] a signé la fiche de dialogue relative à ses ressources et charges accompagnée de justificatifs de laquelle il ne ressortait pas d’endettement excessif au jour de la conclusion du prêt, de sorte qu’elle n’était tenue d’aucun devoir de mise en garde, ajoutant avoir consulté le FICP. Elle en conclut avoir suffisamment vérifié la solvabilité de l’emprunteuse.
Elle relève que sa connaissance du patrimoine de Mme [D] résulte des pièces qu’elle a produites à l’instance et qui ne font que confirmer sa parfaite solvabilité.
Sur ce,
Le devoir de mise en garde consiste pour l’établissement de crédit à alerter l’emprunteur au regard de ses capacités financières et du risque d’endettement né de l’octroi du prêt. Il oblige les établissements de crédit à vérifier l’aptitude du client à rembourser le crédit consenti au regard de ses capacités financières au jour de sa souscription.
Ce devoir de mise en garde ne s’applique qu’à l’égard d’un emprunteur non averti, étant relevé qu’il n’est pas allégué ni démontré par la banque que Mme [D] pourrait être qualifiée d’emprunteur averti.
Ce devoir de mise en garde du banquier n’existe qu’en cas de risque d’endettement excessif de l’emprunteur qui doit être apprécié au regard de ses biens, y compris immobiliers, et ressources à la date de souscription du prêt.
Il incombe à l’établissement de crédit, conformément à l’article 1353 alinéa 2 du code civil de prouver qu’il a rempli son devoir de mise en garde (Com., 11 décembre 2007, n°03-20.747). Mais il convient cependant qu’au préalable, l’emprunteur établisse qu’à l’époque de la souscription du prêt litigieux, sa situation financière justifiait l’accomplissement d’un tel devoir. Il appartient donc à l’emprunteur qui invoque le manquement de la banque à son obligation de mise en garde, d’apporter la preuve d’un risque d’endettement qui serait né de l’octroi du crédit (Civ. 1ère, 4 juin 2014, n°13-10.975).
En l’espèce, il ressort de la fiche de dialogue paraphée par Mme [D] et qui lui est donc opposable, laquelle est en outre corroborée par les pièces justificatives alors remises à la banque (avis d’imposition 2014 sur les revenus 2013 et relevés bancaires des mois d’avril à juin 2015) qu’elle a déclaré des revenus d’un montant total de 6 383 euros incluant un salaire de 1 166 euros et une pension alimentaire de 5 217 euros dont 1 000 euros pour l’enfant. Elle n’y a fait état d’aucune charge, hors dépenses courantes de la vie quotidienne.
Dès lors, le ratio charges-revenus, en y incluant la mensualité du crédit affecté d’un montant de 1 220,68 euros, s’établit à 19,12% et 22,67% en ne tenant pas compte de la pension alimentaire pour l’enfant, et n’excède donc pas le taux d’endettement maximum habituellement autorisé de 33%, de sorte qu’il n’en ressort pas une inadéquation du crédit consenti.
Dans le cadre de l’instance, elle produit son avis d’imposition 2016 sur les revenus 2015 mentionnant un revenu annuel de 50 853 euros (incluant des salaires de 14 205 euros et des pension alimentaire de 24 000 euros et 12 648 euros pour l’enfant), soit un revenu mensuel de 4 237 euros, de sorte que le ratio charges-revenus en y incluant la mensualité du crédit affecté s’établit à 28,81% et 38,34% avec la pension alimentaire pour l’enfant, soit, dans cette seule hypothèse, un taux légèrement supérieur au taux habituellement autorisé. Mme [D] ne fait toujours pas état de charges particulières de logement. Elle produit un jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 31 janvier 2019 l’ayant condamnée à payer à la société Société Générale la somme de 112 579,93 euros en sa qualité de caution solidaire des engagements de sa société 61 faubourg Partner Investment qu’elle avait pris en novembre 2011 à hauteur de 250 000 euros et qui existait donc au jour du prêt.
Il convient de relever, à l’instar de la société Sogefinancement, qu’il ressort des pièces que Mme [D] verse aux débats (pièce 3 et 13) qu’elle était propriétaire, encore en 2011, à 50% d’un appartement estimé à 3 500 000 euros grevé d’un emprunt de 800 000 euros où elle réside encore à ce jour, et d’un studio estimé à 500 000 euros sans que l’appelante s’explique sur ces éléments et soutienne qu’elle n’en était plus propriétaire au jour de la souscription du prêt. Son avis d’imposition sur les revenus 2015 fait apparaître des revenus de capitaux mobiliers (4 euros) établissant qu’elle disposait alors d’une épargne.
Il ne résulte donc pas de ce qui précède que le crédit litigieux n’était pas adapté aux capacités financières de Mme [D], qui a au surplus remboursé le prêt pendant plus de deux ans, le premier incident de paiement non régularisé datant du 30 mars 2018, et que la banque était ainsi tenue à un devoir de mise en garde et de conseil pouvant engager sa responsabilité.
Il convient en conséquence de débouter Mme [D] de sa demande de dommages et intérêts sur ce fondement.
* pour manquements de la banque dans l’exécution du contrat
En cause d’appel, Mme [D] demande des dommages et intérêts d’un montant égal aux sommes au paiement desquelles elle a été condamnée au titre du prêt sur un autre fondement, en faisant valoir un manquement de la banque dans l’exécution du contrat au visa de l’article 1231-1 du code civil.
Elle soutient la société Sogéfinancement a manqué à ses obligations contractuelles en n’exécutant pas son obligation d’information prévue par l’article L. 312-36 du code de la consommation, à savoir la possibilité qui lui était offerte de conserver son assurance nonobstant l’absence de remboursement du prêt et en retardant le plus possible la déchéance du terme. Elle affirme que si la société Sogéfinancement l’avait informée de la possibilité de continuer à régler les cotisations d’assurance du prêt, elle aurait pu faire reconnaître son invalidité avant la déchéance du terme et se prévaloir de l’assurance emprunteur.
Elle fait valoir que les impayés au titre du prêt résultent de la dégradation de son état de santé au fil des années, ce dont la banque était au courant puisqu’elle a prononcé la déchéance du terme plus d’un an après le premier incident de paiement et qu’elle ne l’a pas prévenue que son état de santé justifiait la mise en jeu de la garantie invalidité/incapacité temporaire de travail. Elle explique ce manquement par le fait que la banque a voulu éviter la prise en charge du prêt par l’assurance qu’elle lui avait recommandée, à savoir la société Sogecap, car elles appartiennent toutes deux au même groupe.
Elle soutient que la faute de la banque est apparue à plusieurs reprises; que l’avenant de réaménagement a augmenté la somme empruntée de plus de 2 000 euros et a eu pour conséquence de retarder le point de départ du délai de forclusion.
Elle fait valoir, au titre du lien de causalité, que son état de santé n’a cessé de se dégrader (trouble dépressif puis maladie chronique),ce qui a entraîné la reconnaissance d’un taux d’incapacité et une allocation adulte handicapée.
Au titre du préjudice, elle relève que du fait de ses problèmes de santé, elle n’était plus en mesure de travailler et de régler les mensualités du prêt, ajoutant que sa société a été placée en liquidation judiciaire. Elle soutient s’être entretenue de ses difficultés avec son banquier à plusieurs reprises et que celui-ci a tout fait pour qu’elle reprenne les paiements puisque la déchéance du terme n’a été prononcée que le 25 juin 2019. Elle relève qu’elle avait souscrit une assurance qui aurait dû la subroger et régler la somme réclamée par la société Sogéfinancement qui ne l’a pas actionnée.
La société Sogéfinancement soutient que cette demande est prescrite en application de l’article L. 114-1 du code des assurances car elle dérive de l’assurance facultative souscrite pour garantir le prêt.
Sur le fond, elle s’oppose à cette demande en faisant valoir qu’elle n’a commis aucune faute dans l’exécution de ses obligations en relevant que Mme [D] ne justifie d’aucun arrêt de travail, alors que les garanties souscrites concernent une incapacité entraînant un tel arrêt ; qu’elle ne justifie d’aucune démarche auprès de la banque ou de l’assureur pour déclarer son sinistre; que sa maladie a été diagnostiquée postérieurement à la déchéance du terme de même que la reconnaissance de sa situation d’adulte handicapé et que la dépression dont elle justifie est exclue de la prise en charge de l’assurance.
Elle soutient qu’en tout état de cause, Mme [D] ne justifie d’aucun préjudice dès lors qu’il est pas démontré que toute prise en charge était exclue.
Elle conteste avoir été informée de la situation de Mme [D], ce qui explique la déchéance du terme qui a été prononcée plus tard afin de lui permettre de reprendre le remboursement du prêt, ce dont elle ne peut se plaindre désormais. Elle ajoute que l’argument relatif à l’appartenance de la compagnie d’assurance au groupe Société Générale n’est pas pertinent dans la mesure où en l’absence de prise en charge par l’assurance, c’est elle qui supporte le montant restant dû. Enfin, elle affirme qu’à aucun moment, elle n’a été informée que l’état de santé de Mme [D] justifiait la mise en jeu de la garantie.
Sur ce,
* Sur la recevabilité de la demande
En application de l’article L. 114-1 du code des assurances, toutes actions dérivant d’un contrat d’assurance sont prescrites par deux ans à compter de l’événement qui y donne naissance.
En l’espèce, la demande de Mme [D] en dommages et intérêts ne découle pas du contrat d’assurance souscrit auprès de la Sogecap comme le soutient à tort la société Sogéfinancement mais elle est fondée sur la responsabilité contractuelle de la banque dans le cadre du contrat de prêt laquelle se prescrit par 5 ans en application de l’article 2224 du code civil qui précise que le point de départ de l’action court à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Dès lors, le point de départ du délai de prescription ne saurait être antérieur à la date à laquelle le dommage a été révélé, soit en l’espèce la déchéance du terme en l’absence de subrogation de la banque, à savoir le 25 juin 2019. La demande de dommages et intérêts sur ce fondement ayant été formée par conclusions signifiées le 15 juin 2023, elle n’encourt aucune prescription et sera donc déclarée recevable.
* Sur le fond
Il résulte de l’article L. 311-22-2 du code de la consommation que dès le premier manquement de l’emprunteur à son obligation de rembourser, le prêteur est tenu d’informer celui-ci des risques qu’il encourt au titre des articles L. 311-24 et L. 311-25 du présent code ainsi que, le cas échéant, au titre de l’article L. 141-3 du code des assurances.
Cette alerte ne fait pas obstacle à ce que, si les difficultés de remboursement ne sont pas rapidement résolues, le prêteur puisse régler de manière temporaire et pour une durée fixée par lui la cotisation d’assurance du crédit pour lequel des impayés ont été constatés, afin de permettre le maintien de la couverture assurantielle.
En l’espèce, la société Sogefinancement ne justifie pas avoir informé Mme [D], dès les premiers impayés, des risques encourues en raison de sa défaillance dans les remboursements et plus particulièrement de la déchéance de la garantie de l’assurance en cas de non paiement des primes.
En revanche, la banque n’était pas tenue d’informer Mme [D] que son état de santé justifiait la mise en jeu de l’assurance ni d’actionner elle-même la mise en jeu de la garantie, et ce d’autant que l’emprunteur ne justifie pas l’avoir avisée de ses difficultés. En effet, le fait que la déchéance du terme n’ait été prononcée qu’en juin 2019 ne signifie pas que la société Sogefinancement était au courant de sa situation médicale, étant ajouté qu’elle ne produit aucun élément établissant qu’elle aurait informé la banque ou l’assurance de sa situation.
De même, la proposition d’un avenant par la banque, qu’elle a au surplus accepté, ne saurait caractériser une faute de la banque.
Quant à son préjudice, Mme [D] ne justifie pas d’une exclusion du bénéfice du contrat d’assurance pour défaut de paiement des cotisations ni de la perte d’une chance de bénéficier de la garantie prévue par l’assurance, en l’espèce la garantie ‘décès – perte totale et irréversible d’autonomie, invalidité et incapacité temporaire totale de travail’ en établissant qu’elle remplissait les conditions de prise en charge.
En effet, si elle produit une carte mobilité inclusion daté du 10 septembre 2020 et justifie d’une reconnaissance d’un taux d’incapacité par la maison départementale des personnes handicapées compris entre 50 et 80 % et de la perception d’une allocation adulte handicapé à compter du 1er février 2020, il est relevé que ces éléments sont postérieurs à la déchéance du terme prononcée le 25 juin 2019. De même, ses problèmes de santé (maladie chronique du foie) ont été diagnostiqués postérieurement en juillet 2019.
Elle justifie par ailleurs d’une hospitalisation du 11 au 23 mars 2017 et d’un suivi régulier en consultation d’avril 2017 à septembre 2019 pour troubles dépressifs selon l’attestation de son psychiatre. Elle ne justifie pas pour autant d’un arrêt de travail ni d’une incapacité de travail en résultant durant cette période, Mme [D] ne rapportant pas la preuve de ce qu’elle n’était plus en mesure de travailler depuis son hospitalisation et même postérieurement.
En conséquence, faute de rapporter la preuve d’un préjudice résultant de la faute de la banque, Mme [D] sera déboutée de sa demande en dommages et intérêts également sur ce fondement.
Le chef du jugement ayant condamné la société Sogefinancement à verser à Mme [D] des dommages et intérêts est en conséquence infirmé.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Mme [D] qui succombe devant la cour est condamnée aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions relatives à l’aide juridictionnelle.
Elle est en outre condamnée à verser à la société Sogefinancement la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,
Déclare irrecevable la demande de la société Sogefinancement visant à déclarer l’appel de Mme [D] irrecevable ;
Infirme partiellement le jugement déféré en ce qu’il a condamné la société Sogefinancement à verser à Mme [D] la somme de 13 958,26 euros à titre de dommages et intérêts ;
Statuant à nouveau,
Déboute Mme [D] de sa demande en dommages et intérêts ;
Confirme le jugement déféré en ses autres dispositions dévolues à la cour ;
Y ajoutant,
Rejette toute autre demande ;
Condamne Mme [Z] [D] à payer à la société Sogefinancement la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [Z] [D] aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions relatives à l’aide juridictionnelle et qui pourront être recouvrés par Me Cartier conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Céline KOC, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, Le Président,