Réévaluation de la Capacité de Remboursement dans le Cadre d’un Plan de Redressement Financier

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Réévaluation de la Capacité de Remboursement dans le Cadre d’un Plan de Redressement Financier
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Monsieur [M] [Y] et Madame [Z] [P] épouse [Y] ont sollicité un traitement de leur situation de surendettement le 4 novembre 2022. La commission a déclaré leur dossier recevable le 29 novembre 2022. Le 5 septembre 2023, elle a évalué leurs ressources mensuelles à 4 071 euros et leurs charges à 2 273 euros, établissant une capacité de remboursement de 1 798 euros. Un rééchelonnement des dettes sur 37 mois à un taux d’intérêt de 0,00 % a été proposé.

Le couple a contesté ces mesures par courrier le 25 septembre 2023. Par jugement du 11 avril 2024, le juge des contentieux de la protection a modifié le plan de remboursement, le portant à 49 mois avec des conditions spécifiques. M. [Y] et Mme [Y] ont interjeté appel le 29 avril 2024, remettant en question la capacité de remboursement.

Lors de l’audience du 1er juillet 2024, ils ont précisé leurs revenus et charges, notamment le salaire de Mme [Y] et l’indemnité de M. [Y] en arrêt maladie. Les autres créanciers n’ont pas comparu. La cour a infirmé le jugement précédent, fixant la capacité de remboursement à 777 euros par mois et établissant un plan d’apurement sur 84 mois, avec des modalités précises concernant les versements et les obligations des débiteurs. Les dépens ont été laissés à la charge du Trésor public.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

8 octobre 2024
Cour d’appel de Grenoble
RG n°
24/01719
N° RG 24/01719 – N° Portalis DBVM-V-B7I-MHTS

No minute :

C2

Notifié par LRAR aux parties

le :

Copie délivrée aux avocats le :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

2E CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 8 OCTOBRE 2024

PROCÉDURE DE SURENDETTEMENT

Appel d’un jugement (no RG 23/05627) rendu par le juge des contentieux de la protection de Grenoble en date du 11 avril 2024 suivant déclaration d’appel du 25 avril 2024

APPELANTS :

Monsieur [M] [Y]

né le 14 Mai 1971 à [Localité 14]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne

Madame [Z] [P] épouse [Y]

née le 29 Mars 1977 à [Localité 15]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparante en personne

INTIMÉES :

Société [5], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

Chez [6]

[Adresse 11]

[Localité 4]

non comparante

Société [9], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

non comparante

Etablissement [12], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

Chez [6]

[Adresse 11]

[Localité 4]

non comparante

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Emmanuèle Cardona, présidente,

Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère,

Mme Ludivine Chetail, conseillère,

DÉBATS :

A l’audience publique du 1er juillet 2024, Mme Ludivine Chetail, conseillère faisant fonction de présidente chargée d’instruire l’affaire a entendu seule les parties en leurs explications, assistée de Mme Caroline Bertolo, greffière, en présence de Mme [E] [H], greffière stagiaire, conformément aux dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées ;

Il a été rendu compte à la cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu à l’audience de ce jour.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 4 novembre 2022, M. [M] [Y] et Mme [Z] [P] épouse [Y] ont saisi la [8] d’une demande de traitement de leur situation.

La commission a déclaré le dossier recevable le 29 novembre 2022.

Par décision du 5 septembre 2023, la commission a retenu pour les débiteurs des ressources mensuelles évaluées à 4 071 euros et des charges s’élevant à 2 273 euros, avec une capacité de remboursement de 1 798 euros et un maximum légal de remboursement 2 317,31 euros.

Compte tenu de ces éléments, la commission a retenu au titre des mesures imposées un rééchelonnement de tout ou partie des dettes sur une durée de 37 mois au taux d’intérêt de 0,00 %.

Des informations recueillies par la commission, il ressortait, en outre, que :

– Mme [Z] [P] épouse [Y], née le 29/03/1977, est responsable commerciale en CDI

– M. [M] [Y], né le 14/05/1971, est vendeur en CDI,

– ils sont mariés,

– ils ont deux enfants à charge (13 et 10 ans),

– ils disposent d’une épargne de 1 544,66 euros,

– le montant total du passif est de 71 677,67 euros,

– le maximum légal de remboursement est de 2 317,31 euros.

Par courrier en date du 25 septembre 202, M. [M] [Y] et Mme [Z] [P] épouse [Y] ont contesté les mesures imposées par la commission.

Par jugement en date du 11 avril 2024, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Grenoble a :

– Dit recevable en la forme le recours formé par M. [M] [Y] et Mme [Z] [P] épouse [Y],

– Arrêté les mesures propres à traiter la situation de surendettement de M. [M] [Y] et Mme [Z] [P] épouse [Y] selon les modalités suivantes :

les dettes sont rééchelonnées sur une durée de 49 mois,

le taux d’intérêt des prêts est ramené à zéro et les dettes reportées ou rééchelonnées ne produiront pas intérêts,

les dettes sont apurées selon le plan annexé à la présente décision,

– Dit que les versements devront intervenir le 10 de chaque mois, le plan commençant à s’appliquer à compter du mois de mai 2024,

– Dit que M. [M] [Y] et Mme [Z] [P] épouse [Y] devront prendre l’initiative de contacter les créanciers pour mettre en place les modalités pratiques de règlement des échéances,

– Rappelé qu’à défaut de paiement d’une seule de ces échéances à son terme, l’ensemble du plan est de plein droit caduc quinze jours après une mise en demeure adressée à M. [M] [Y] et Mme [Z] [P] épouse [Y] d’avoir à exécuter leurs obligations et restée infructueuse,

– Rappelé qu’aucune voie d’exécution ne pourra être poursuivie par l’un quelconque des créanciers pendant toute la durée d’exécution des mesures sauf à constater la caducité de ces dernières,

– Rappelé que les créances telles que définitivement arrêtées par la commission lors de l’établissement du passif ne peuvent avoir produit d’intérêts ou généré de pénalités de retard jusqu’à la mise en ‘uvre du plan résultant de la présente décision,

– Dit qu’il appartiendra à M. [M] [Y] et Mme [Z] [P] épouse [Y], en cas de changement significatif de leurs conditions de ressources à la hausse comme à la baisse, de ressaisir la commission de surendettement d’une nouvelle demande,

– Ordonné à M. [M] [Y] et Mme [Z] [P] épouse [Y] pendant la durée du plan de ne pas accomplir d’acte qui aggraverait leur situation financière, sauf autorisation préalable du juge, et notamment :

d’avoir recours à un nouvel emprunt,

de faire des actes de disposition étrangers à la gestion normale de leur patrimoine

– Rappelé qu’en application de l’article L.752-3 du code de la consommation ces mesures sont communiquées au fichier national recensant les informations sur les incidents de paiement caractérisés, géré par la Banque de France et qu’une inscription sera maintenue pendant toute la durée du plan sans pouvoir excéder sept ans,

– Rappelé qu’en application de l’article R.713-10 du code de la consommation la présente décision est exécutoire de plein droit à titre provisoire,

– Rappelé qu’en vertu de l’article R.722-1 du code de la consommation, il incombe à chacune des parties et, notamment, à M. [M] [Y] et Mme [Z] [P] épouse [Y], d’informer le secrétariat de la commission de surendettement des particuliers de tout changement d’adresse en cours de procédure,

– Laissé les dépens à la charge du Trésor Public.

Par courrier reçu au greffe de la cour le 29 avril 2024, M. [M] [Y] et Mme [Z] [P] épouse [Y] ont interjeté appel du jugement, contestant la capacité de remboursement retenue.

M. [M] [Y] et Mme [Z] [P] épouse [Y] ont été régulièrement convoqués par lettre recommandée dont les avis de réception ont été retournés le 29 mai 2024 signés par les destinataires.

Par courrier reçu au greffe de la cour le 5 juin 2024, l’établissement [7] indique qu’il ne pourra être présent ni représenté et sollicite une dispense de comparution.

Par courrier reçu au greffe de la cour le 5 juin 2024, le [10] indique qu’il ne pourra être présent ni représenté et sollicite la confirmation du jugement relativement à sa créance.

À l’audience du 1er juillet 2024, M. [M] [Y] et Mme [Z] [P] épouse [Y] sont présents et contestent la capacité de remboursement. Ils exposent que Mme [Y] est responsable commerciale et perçoit un salaire mensuel brut fixe de 2 900 euros outre les commissions et que M. [Y] est en arrêt maladie depuis le mois de mars 2023 et perçoit une indemnité de 850 euros. M. [Y] précise que la perspective de reprise d’emploi n’interviendra pas avant plusieurs mois. Ils ajoutent percevoir des allocations familiales pour leurs deux enfants de 11 et 14 ans à hauteur de 148 euros.

Relativement aux charges, ils font valoir un loyer de 657 euros outre des charges classiques, de la cantine scolaire et un important budget alimentation.

Mme [Y] fait état de frais d’essence à hauteur de 200 euros par mois pour aller travailler à [Localité 13] et explique devoir faire l’avance des frais médicaux. Enfin, ils font état de frais relatifs aux activités extrascolaires à hauteur de 210 euros et 410 euros.

Les autres créanciers, intimés et régulièrement convoqués n’ont pas comparu ; les avis de réception de leurs convocations ont été retournés entre le 29 mai et le 3 juin 2024, étant revêtus de la signature ou du tampon de réception du destinataire.

Le présent arrêt sera réputé contradictoire en application des dispositions de l’article 474 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient d’indiquer, à titre liminaire, que l’appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d’appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d’une partie par la cour est subordonnée à l’indication orale à l’audience par cette partie ou son représentant qu’elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut pas prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les parties non comparantes.

Sur la situation des débiteurs

Conformément aux dispositions de l’article L 733-13 du code de la consommation, le juge saisi de la contestation prévue à l’article L. 733-10 prend tout ou partie des mesures définies aux articles L. 733-1, L. 733-4 et L. 733-7. Dans tous les cas, la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage est déterminée dans les conditions prévues à l’article L. 731-2.

En l’espèce, pour déterminer une mensualité de remboursement de 1 318 euros, le premier juge a tenu compte de revenus globaux de 3 591 euros pour des charges totales de 2 273 euros.

En regard des éléments dont dispose la cour, il convient d’actualiser les ressources des époux [Y] comme suit :

Ressources : 3 398 euros

– Indemnité M. [Y] : 850 euros

– Salaire mensuel moyen Mme [Y] (moyenne du cumul imposable en mai 2024 et des trois dernières fiches de paie produites) : 2 400 euros

– Prestations familiales : 148 euros

Concernant les charges, il convient de reprendre les forfaits actualisés de la commission de surendettement incluant l’alimentation, le transport, l’habillement, les dépenses diverses, les frais de mutuelle, l’eau / énergie hors chauffage, la téléphonie / internet, l’assurance habitation et le chauffage.

Pour le poste transport, si le juge conserve la possibilité de prendre en compte une charge supplémentaire en sus du forfait lorsqu’il existe des frais particuliers sur la base de justificatifs, il n’apparaît pas justifié en l’espèce, compte tenu du trajet domicile/travail de Mme [Y] d’ajouter les frais d’essence dont elle se prévaut.

Il convient néanmoins d’ajouter les frais relatifs aux activités extrascolaires de leurs enfants.

Ainsi, les charges s’élèvent à la somme de 2 621 euros.

– logement : 657 euros

– Forfait chauffage : 250 euros

– Forfait de base : 1 282 euros

– Forfait habitation : 243 euros

– Impôts : 137 euros

– Activités enfants : 52 euros ((210+410)/12)

En application de l’article R. 731-1 du code de la consommation, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l’apurement des dettes est calculée par référence au barème des quotités saisissables, de manière à ce qu’une partie des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage lui soit réservée par priorité.

Ainsi, la part des ressources mensuelles à affecter théoriquement à l’apurement des dettes des époux [Y] s’élève, en application du barème de saisie des rémunérations, à la somme de 1 489,03 euros.

Toutefois, le juge comme la commission doivent toujours rechercher la capacité réelle de remboursement du débiteur eu égard à ses charges particulières qui s’élève en l’espèce à la somme de 3 398 -2 621 = 777 euros

Dès lors, un plan de redressement tenant compte de ces éléments sera établi sur une durée de 84 mois à taux 0,00%, permettant l’apurement total du passif, dans les conditions fixées au dispositif de la présente décision.

En conséquence, le jugement déféré sera infirmé.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi :

Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau,

Fixe la capacité de remboursement mensuelle de M. [M] [Y] et Mme [Z] [P] épouse [Y] à 777 euros,

Arrête un plan d’apurement sur 84 mois selon les modalités ci-annexées,

Dit que les versements devront intervenir avant le 10 de chaque mois, le plan commençant à s’appliquer à compter du mois suivant la notification de la présente décision,

Invite les débiteurs à mettre en place les virements bancaires automatiques conformes à ces mesures,

Dit que dans les deux mois suivant tout événement de nature à augmenter sa capacité de remboursement, les débiteurs devront sous peine de déchéance, informer la commission de surendettement des particuliers de leur nouvelle situation afin qu’un nouvel échelonnement des dettes soit établi,

Dit qu’en cas de non respect du plan, et faute de régularisation par les débiteurs dans les deux mois de la mise en demeure adressée par lettre recommandée avec avis de réception qui sera délivrée à cet effet, le plan sera caduc et chaque créancier recouvrera l’intégralité de ses droits de poursuites et d’exécution,

Dit qu’à peine de déchéance, les débiteurs devront également s’abstenir de contracter tout nouvel emprunt ou de prendre tout nouvel engagement qui aggraverait leur situation financière,

Laisse les dépens à la charge du Trésor public.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, présidente de la deuxième chambre civile et par Mme Solène ROUX, greffière présente lors de la mise à disposition, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE                                        LA PRÉSIDENTE


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