Évaluation des vices cachés d’un véhicule d’occasion : nécessité d’une expertise judiciaire pour trancher le litige entre un acheteur et un vendeur professionnel.

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Évaluation des vices cachés d’un véhicule d’occasion : nécessité d’une expertise judiciaire pour trancher le litige entre un acheteur et un vendeur professionnel.
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Le 12 avril 2023, M. [P] a acheté un véhicule d’occasion, une Citroën DS 3, auprès de la SAS DF CARS pour 7 400 euros. Suite à des problèmes avec le véhicule, son assureur, Pacifica, a mandaté une expertise amiable qui a eu lieu le 23 août 2023. Le 15 septembre 2023, Pacifica a demandé à DF CARS de se positionner sur les conclusions de l’expertise. Le 3 janvier 2024, M. [P] a assigné DF CARS en justice pour obtenir la résolution de la vente, la restitution du véhicule, le remboursement du prix d’achat, des frais engagés, une indemnisation pour préjudice moral, ainsi qu’une expertise judiciaire. M. [P] soutient que le véhicule présente des vices cachés qui rendent son utilisation impossible. DF CARS, de son côté, conteste les conclusions de l’expertise et affirme que le véhicule n’a que des défaillances mineures. L’affaire a été mise en délibéré pour décision le 7 octobre 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

7 octobre 2024
Tribunal judiciaire de Lille
RG n°
24/00867
TRIBUNAL JUDICIAIRE
de LILLE
[Localité 11]

☎ :[XXXXXXXX01]

N° RG 24/00867
N° Portalis DBZS-W-B7I-X62P

N° de Minute : L 24/00499

JUGEMENT ORDONNANT EXPERTISE

DU : 07 Octobre 2024

[V] [P]

C/

S.A.S. DF CARS

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT DU 07 Octobre 2024

DANS LE LITIGE ENTRE :

DEMANDEUR(S)

M. [V] [P], demeurant [Adresse 8] – [Localité 4]

représenté par Me Gildas BROCHEN, avocat au barreau de LILLE

ET :

DÉFENDEUR(S)

S.A.S. DF CARS, sis [Adresse 2] – [Localité 5]

représentée par M. [F] [D], muni d’un pouvoir

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L’AUDIENCE PUBLIQUE DU 01 Juillet 2024

Mélanie COCQUEREL, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DU DÉLIBÉRÉ

Par mise à disposition au Greffe le 07 Octobre 2024, date indiquée à l’issue des débats par Mélanie COCQUEREL, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier

RG 867/24 – Page – MAEXPOSE DU LITIGE
Le 12 avril 2023, M. [V] [P] a acquis auprès de la société par actions simplifiée (SAS) DF CARS un véhicule d’occasion de marque Citroën, modèle DS 3, immatriculé sous le numéro [Immatriculation 10], mis pour la première fois en circulation le 16 décembre 2011 et ayant parcouru 122 500 kilomètres, au prix de 7 400 euros TTC.
A la demande de M. [P], son assureur protection juridique, la société anonyme (SA) Pacifica, a mandaté le cabinet Idea Nord de France Expertises afin de réaliser une expertise amiable contradictoire du véhicule.
Celle-ci a eu lieu le 23 août 2023.
Par lettre recommandée du 15 septembre 2023 réceptionnée le 23 septembre 2023, la SA Pacifica a invité la SAS DF Cars à fait connaître sa position dans un délai de 8 jours par rapport aux conclusions de cette expertise.
Par acte d’huissier du 3 janvier 2024, M. [P] a fait assigner la SAS DF CARS aux fins de voir, au visa des articles 1641 et suivants du code civil, :
constater la résolution de la vente du véhicule,ordonner la restitution par lui du véhicule à la SAS DF CARS ;condamner la SAS DF CARS à lui verser la somme de 7 400 euros au titre du prix d’acquisition ;condamner la SAS DF CARS à lui verser la somme de 2 040,64 euros au titre des frais exposés,condamner la SAS DF CARS à lui verser la somme de 500 euros en réparation de son préjudice moral ;condamner la SAS DF CARS à verser à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;condamner la S.A.S DF CARS aux dépens ;A titre subsidiaire,
ordonner une expertise judiciaire du véhicule et désigner tel expert qu’il plaira à la juridiction afin de procéder à l’examen de ce véhicule avec mission habituelle.L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 1er juillet 2024.
M. [P], représenté par son conseil, s’en est rapporté aux demandes contenues dans son acte introductif d’instance.
Au soutien, il fait valoir que le rapport d’expertise amiable contradictoire met en évidence que le véhicule était atteint de vices affectant son utilisation ; que l’expertise judiciaire est réputée opposable à la personne malgré son absence dans la mesure où elle a été régulièrement convoquée aux opérations, ce qui est le cas en l’espèce ; que les défauts affectant le véhicule ont été volontairement dissimulés par le vendeur et que les travaux nécessaires à la remise en état sont particulièrement importants notamment le remplacement du vase d’expansion et du moteur ; que s’il avait eu connaissance de ces vices, il n’aurait pas procédé à l’acquisition de ce véhicule ; que les défauts cachés du véhicule le rendent impropre à son utilisation.
Il précise que la restitution du véhicule et du prix doit être ordonnée en application de l’article 1144 du code civil.
Il ajoute que le garage est également tenu, en tant que professionnel, à l’indemnisation des dommages et des conséquences de la résolution ; qu’il sollicite le remboursement des intérêts du crédit à la consommation qu’il a souscrit pour acquérir le véhicule, soit 1 313,40 euros, du coût de l’assurance souscrite, soit 558,48 euros pour un an et de la somme de 168,76 euros au titre de la carte grise.
La SAS DF CARS, représentée par M. [F] [D], muni d’un pouvoir, a fait valoir que le véhicule présentait seulement des défaillances mineures, que M. [P] a parcouru plus de 1 000 kilomètres avec le véhicule, qu’elle n’a pas été convoquée à l’expertise amiable dont elle conteste les conclusions et sollicite du juge qu’il ordonne une « contre-expertise ».
A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 7 octobre 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la nécessité d’ordonner une expertise judiciaire
Aux termes de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver, conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention.
Aux termes de l’article 144 du code de procédure civile, les mesures d’instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause, dès lors que le juge ne dispose pas d’éléments suffisants pour statuer.
Aux termes de l’article 146 du code de procédure civile, une mesure d’instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l’allègue ne dispose pas d’éléments suffisants pour le prouver.

En aucun cas une mesure d’instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve.
En l’espèce, M. [P] produit aux débats un rapport d’expertise amiable du cabinet Nord de France Expertises qui a examiné le véhicule litigieux le 23 août 2023 et conclu à la nécessité de faire procéder au remplacement du vase d’expansion, du moteur, du phare 2 et à un alignement conforme de l’aide avant droite et de la porte D.
Il n’a toutefois pas précisé si les désordres constatés sur le véhicule étaient de nature à rendre le véhicule impropre à sa destination ou à en diminuer substantiellement l’usage au sens de l’article 1641 du code civil, étant par ailleurs observé qu’à la date de la réunion d’expertise amiable, le kilométrage du véhicule était de 127 182 kms, ce dont il se déduit que M. [P] aurait parcouru 4 682 kilomètres avec le véhicule depuis son acquisition.

Par ailleurs, si le cabinet Idea Nord de France Expertises mentionne dans son rapport que les parties ont été invitées par lettre recommandée avec accusé de réception à la réunion d’expertise amiable organisée le 23 août 2023 et que le siège social de la SAS DF Cars est manifestement resté inchangé, celle-ci fait valoir qu’elle n’a pas été convoquée à cette réunion.
Enfin, elle dit ne pas être en mesure de se prononcer sur les conclusions de l’expertise amiable.
Ces éléments sont suffisants à permettre de considérer qu’il est nécessaire d’ordonner, avant dire droit, une expertise judiciaire du véhicule litigieux.

Sur les demandes accessoires

En application de l’article 483 du code de procédure civile, dans la mesure où le jugement avant dire droit ne dessaisit pas le juge, il convient de réserver les dépens et les frais irrépétibles.

Par ailleurs, la présente décision est assortie de l’exécution provisoire de droit en application de l’article 514-1 du code de procédure civile.

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