Un marché de travaux a été signé le 31 janvier 2022 entre GRAND DELTA HABITAT (GDH) et L’EURL PLATRIER PLAQUISTE BRIQUETEUR (PPB) pour la construction de 27 logements, avec un prix initial de 130 345,56 € TTC, augmenté par deux avenants en 2022. Un troisième avenant, daté du 18 décembre 2023, a prolongé la durée des travaux à 33 mois en raison de retards. Le 20 décembre 2023, GDH a refusé toute nouvelle augmentation des coûts des matériaux, rappelant l’intangibilité des prix. Le 22 décembre 2023, la maîtrise d’œuvre a demandé à PPB de commencer les travaux le 8 janvier 2024 et de fournir des documents requis. Le 4 janvier 2024, PPB a demandé un cadre juridique pour son intervention, considérant que les relations contractuelles n’étaient plus valides. Le 8 janvier 2024, PPB n’était pas présent sur le chantier et n’a pas fourni les documents demandés. GDH a mis PPB en demeure le 9 janvier 2024 de respecter ses obligations, avec une résiliation prévue pour le 22 janvier 2024. La résiliation a été prononcée le 27 février 2024. PPB a assigné GDH en référé pour contester la résiliation et demander la reprise des relations contractuelles, ainsi qu’une provision pour préjudice. GDH a contesté la demande de PPB, arguant de l’absence d’urgence et de la signature d’un marché de substitution après la résiliation. L’affaire a été plaidée le 9 septembre 2024 et mise en délibéré pour le 7 octobre 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
DU 07 OCTOBRE 2024
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N° du dossier : N° RG 24/00252 – N° Portalis DB3F-W-B7I-JXM2
Minute : n°
PRÉSIDENT : Olivier LEFRANCQ
GREFFIER : Béatrice OGIER
DEMANDEUR
E.U.R.L. PLATRIER PLAQUISTE BRIQUETEUR (PPB) S.A.R.L. Unipersonnelle prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Claire DOUX, avocat au barreau de CARPENTRAS
DÉFENDEUR
SCIC H.L.M GRAND DELTA HABITAT prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 2]
représentée par Me Christèle CLABEAUT, avocat au barreau de NIMES
DÉBATS :
Après avoir entendu à l’audience du 09 Septembre 2024 les parties comparantes ou leurs conseils, le président les a informés que l’affaire était mise en délibéré et que l’ordonnance serait rendue ce jour, par mise à disposition au greffe.
Le :07/10/2024
exécutoire & expédition
à :Me DOUX-Me CLABEAUT
Un marché de travaux a été signé le 31/01/22, entre GRAND DELTA HABITAT (GDH) et L’EURL PLATRIER PLAQUISTE BRIQUETEUR (PPB), dans le cadre d’un projet de construction de 27 logements “Le [Adresse 6] – Lot B” à [Localité 4] pour un prix global forfaitaire de 130 345, 56 € TTC, porté à 134 652, 39 € par deux avenants courant 2022 relatifs à la prise en charge de l’augmentation du prix de matériaux (396 € puis
3 910, 80 €).
Un troisième avenant intervenait le 18/12/23, portant la durée des travaux confiés à PPB à 33 mois pour tenir compte des décalages engendrés par le retard du lot charpente-couverture.
Le 20/12/23, GDH refusait cette fois toute nouvelle augmentation de prise en charge de coûts de matériaux, rappelant l’intangibilité des prix prévus au contrat (et GDH confirmerait encore sa position à cet égard par LRAR du 15/01/24).
Par LRAR en date du 22/12/23, adressé par la maîtrise d’oeuvre du chantier, il était demandé à PPB de démarrer les travaux le 08/01/24, et de fournir les documents d’exécution et plans de repérage, déjà réclamés (et listés).
Par LRAR du 04/01/24, PPB, considérant qu’il n’y avait plus de cadre juridique aux relations contractuelles, sollicitait alors (par la voie de son conseil) de voir “conférer un cadre juridique à l’intervention de l’entreprise, tout en prévoyant les modalités financières adaptées à la situation exceptionnelle rencontrée”.
Nonobstant, étant constaté l’absence de PPB sur le chantier le 08/01/24 et la non-présentation des documents réclamés par la maîtrise d’oeuvre, GDH, par LRAR du 09/01/24, mettait PPB en demeure de respecter ses obligations contractuelles sous 10 jours ouvrés, soit au plus tard le 22/01/24, date passée laquelle la résiliation serait prononcée aux torts exclusifs de PPB pour cause de refus d’exécution, résiliation qui allait intervenir le 27/02/24.
PPB faisait alors assigner GDH en référé et, par conclusions notifiées par RPVA le 05/07/24, afin de voir :
Vu les articles 834 et 835 du code de procédure civile,
Vu l’urgence,
Vu les pièces,
A titre principal
– Dire irrégulière la résiliation, par GRAND DELTA HABITAT, en date du 27
février 2024, du marché de travaux passé avec la société PPB,
– Ordonner la reprise des relations contractuelles avec l’entreprise PPB,
– Interdire à GRAND DELTA HABITAT de passer un marché de substitution au lot n°16,
– Dire et juger que GRAND DELTA HABITAT fera son affaire de l’éventuelle signature d’un contrat de substitution,
– Débouter GRAND DELTA HABITAT de l’ensemble de ses demandes,
A titre subsidiaire :
– Condamner GRAND DELTA HABITAT à payer à l’entreprise PPB, à titre de provision à valoir sur la réparation de son préjudice, la somme de 130.345, 56 €,
En tout état de cause :
– Condamner GRAND DELTA HABITAT à payer à l’entreprise PPB la somme de 3.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Par conclusions notifiées le 05/09/24, GDH demandait à la juridiction de :
Vu l’article 834 du code de procédure civile,
Vu l’article 835 du code de procédure civile,
Vu l’article 700 du code de procédure civile
Vu l’assignation introductive d’instance,
Vu les présentes conclusions et les pièces versées aux débats,
-Constatant l’existence d’une contestation sérieuse,
-Constatant l’absence de tout dommage imminent et par conséquent de l’absence
d’urgence,
-Constatant l’absence de trouble manifestement illicite,
-Constatant que la société GRAND DELTA HABITAT a signé un marché de substitution à la suite de la résiliation du marché confié à l’EURL PPB du fait de ses défaillances en date du 22 mars 2024,
-Juger que les demandes de l’EURL PPB sont devenues sans objet,
-Juger que les demandes, fins et prétentions formées par l’EURL PPB relèvent d’un débat relevant de la compétence du juge du fond,
En conséquence,
-Se déclarer incompétent pour statuer sur les demandes formées par l’EURL PPB
en référés,
-Débouter l’EURL PPB de l’intégralité de demandes fins et prétentions,
-Rejeter la demande visant à dire irrégulière la résiliation par GRAND DELTA HABITAT en date du 27 février 2024 du marché passé avec la société PPB,
-Rejeter la demande visant à voir ordonner la reprise des relations contractuelles avec l’entreprise PPB ;
-Rejeter la demande visant à voir interdire à la société GRAND DELTA HABITAT de passer un marché de substitution au LOT N°16, Page 17 sur 18
-Rejeter la demande formée à titre provisionnel de condamnation de la société GRAND DELTA HABITAT à payer à l‘entreprise PPB une somme de 130 345,56 € à valoir sur la réparation de son préjudice,
-Rejeter la demande condamnation de GRAND DELTA HABITAT à payer à l’entreprise PPB la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
-Rejeter la pièce N°18 versé aux débats par l’EURL PPB celle-ci étant irrecevable,
-Condamner l’EURL PPB à porter et payer à la SA GRAND DELTA HABITAT
une somme de 2000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour plus ample exposé des prétentions et des moyens.
Successivement renvoyée, l’affaire était plaidée le 09/09/24 et mise en délibéré au 07/10/24.
Dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend (article 834 du code de procédure civile).
Le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire (article 835 du code de procédure civile).
En l’espèce, répondre aux demandes de PPB supposerait une appréciation sur la régularité de la résiliation du marché de travaux entre GDH maître d’ouvrage et PPB artisan plaquiste, sachant que la résiliation a été prononcée par GDH en raison d’un retard au redémarrage du chantier confié au demandeur à l’instance, retard imputé à faute à celui-ci – et qui réclamait un autre cadre juridique – alors qu’au contraire PPB reproche à GDH et à la maîtrise d’oeuvre de n’avoir pas fourni de planning actualisé (compte tenu des contretemps rencontrés du fait d’événements extérieurs aux parties, tel le retard du lot charpente) planning pourtant annoncé par l’architecte (“ Nous sommes en train de reprendre le planning d’exécution. Nous vous demandons de démarrer votre intervention à partir du 8 janvier 2024″, courriel du 20/12/23) mais qui n’a pas été fourni à PPB qui argue, en outre, de ce qu’il ne pouvait effectuer la pose de plaques (“placo”) en l’état des menuiseries dont la pose n’était pas achevée (et sur lesquels le plaquiste ne peut donc pas s’appuyer) et des trous d’air existants sur la maçonnerie (et non rebouchés) éléments qui conduisaient le bureau de contrôle à émettre un avis défavorable avec reprises s’agissant des menuiseries.
Il s‘agit ainsi d’une contestation sérieuse, à caractère assurément technique, relevant du fond (et nécessitant vraisemblablement une mesure d’expertise), et que le juge des référés, juge de l’évidence, n’est pas compétent pour juger, d’autant que s’agissant notamment d’ “ordonner la reprise de relations contractuelles” la demande pose question, même au juge du fond.
Dans ces conditions, n’y ayant lieu à référé (en l’absence également de toute notion de dommage imminent ou de trouble manifestement illicite), les demandes de PPB ne peuvent qu’être rejetées.
L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile; les parties seront déboutées de leur demande de ce chef.
PPB, demanderesse, succombante, sera condamnée aux dépens.