Protection de la dénomination des collectifs

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Protection de la dénomination des collectifs

Afin d’être protégé le nom d’un collectif doit être déposé à titre de marque. L’action en référé visant à une interdiction de l’usage de déclinaisons du nom du collectif est vouée à l’échec en présence d’une contestation sérieuse.

En l’espèce, l’antériorité dont se prévalent les intimés, en ce qu’elle oblige à trancher un conflit de propriété intellectuelle sur le nom ‘[Localité 6] en luttes’ et touche au fond du droit, constitue une contestation sérieuse à la demande qui tend à interdire aux défendeurs d’utiliser le titre associatif ‘Collectif [Localité 6] en luttes’ ou sa version elliptique ‘[Localité 6] en luttes’ ainsi que son logo dans leur expression politique sous cette dénomination, au sein du conseil municipal de [Localité 6] et du conseil métropolitain de [Localité 6] Métropole, comme en dehors de ces assemblées électives, notamment dans tous les médias, excédant en conséquence les pouvoirs du juge des référés.

Le juge des référés peut aux termes des dispositions de l’article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, dans les limites de sa compétence, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. Il peut toujours, aux termes des dispositions de l’article 835, même en présence d’une contestation sérieuse, dans les limites de sa compétence, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Il s’ensuit que si, sur le fondement de l’article 835 du code de procédure civile, la contestation sérieuse ne fait pas obstacle à ce qu’il soit ordonné en référé des mesures conservatoires ou de remise en état, dont les mesures d’interdiction sollicitées par l’appelante, c’est à la condition qu’il y ait lieu de faire cesser un trouble manifestement illicite dont il incombe à l’association demanderesse d’établir la matérialité, c’est à dire le trouble constituant une atteinte à un droit s’imposant avec une évidence suffisante, ni l’urgence, ni la gravité du trouble ne constituant des conditions d’ouverture à ce référé.

Or, si seule l’association ‘Collectif [Localité 6] en luttes’ est investie de la personnalité morale et si elle est en droit d’agir en justice pour la défense de son nom, il ne peut être contesté que les intimés, qui sont poursuivis en leur nom personnel ont qualité et intérêt à défendre à l’action qui leur interdit l’usage du nom ‘[Localité 6] en luttes’ alors qu’ils ont été élus aux élections municipales de [Localité 6] de mars/ juin 2020 sous la liste « [Localité 6] en luttes» au même titre que M. [R] avec lequel ils ont constitué au conseil municipal de [Localité 6], dans la suite de leur élection, un groupe dénommé ‘[Localité 6] en luttes’, ainsi qu’il ressort de la délibération du conseil municipal du 23 juillet 2020, ce qui conférait à ce groupe une existence légale et à ses membres un droit à l’usage du nom ‘[Localité 6] en luttes’ dans le cadre de leur mandat électif et dans toutes les activités s’y rattachant, pendant la durée de leur mandat.

Il s’ensuit que l’usage qu’ils font ou qu’ils ont fait du nom ‘[Localité 6] en luttes’, du logo et du compte facebook créé à l’occasion de ces mêmes municipales, dans le cadre de leur mandat électif, y compris dans les médias où ils sont amenés à s’exprimer en ce titre, et ce dès avant même la création de l’association ‘Collectif [Localité 6] en Luttes’, ne porte pas en soi la marque d’une illicéité manifeste qu’il conviendrait de faire cesser.

Résumé de l’affaire : Lors des élections municipales de 2020 à [Localité 6], un collectif dénommé « [Localité 6] en luttes » a été formé, dont trois membres ont été élus au conseil municipal. Ce collectif a ensuite été constitué en association déclarée en octobre 2020. Des dissensions internes ont conduit à la démission de plusieurs membres, dont M. [R], Mme [D] et M. [J]. Malgré leur départ, M. [J] et Mme [D] ont continué à utiliser le nom et le logo de l’association, ce qui a poussé le collectif à les assigner en justice en avril 2023 pour faire cesser cette utilisation. Le tribunal a rendu une ordonnance le 16 octobre 2023, déboutant l’association de ses demandes et condamnant celle-ci à verser des frais à M. [J] et Mme [D]. L’association a fait appel de cette décision, demandant l’interdiction de l’utilisation de son nom et la restitution de l’accès à sa page Facebook. M. [J] et Mme [D] ont demandé la confirmation de l’ordonnance initiale. L’affaire a été fixée pour audience en juin 2024, et l’instruction a été clôturée en mai 2024. Des conclusions ont été déposées après la clôture, mais ont été déclarées irrecevables par la cour, qui a confirmé la décision initiale et condamné l’association à payer des frais supplémentaires.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

24 septembre 2024
Cour d’appel de Bordeaux
RG n°
23/05283
COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

————————–

ARRÊT DU : 24 SEPTEMBRE 2024

PP

N° RG 23/05283 – N° Portalis DBVJ-V-B7H-NQTI

Association COLLECTIF [Localité 6] EN LUTTES

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/010027 du 29/12/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BORDEAUX)

c/

[Z] [J]

[P] [D]

Nature de la décision : APPEL D’UNE ORDONNANCE DE REFERE

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : ordonnance de référé rendue le 16 octobre 2023 par le Président du Tribunal Judiciaire de Bordeaux (RG : 23/00928) suivant déclaration d’appel du 23 novembre 2023

APPELANTE :

Association COLLECTIF [Localité 6] EN LUTTES agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]

représentée par Maître Bruno BOUYER de la SCP BOUYER – BOURGEOIS, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

[Z] [J]

né le [Date naissance 2] 1967 à [Localité 8]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 5]

[P] [D]

née le [Date naissance 3] 1962 à [Localité 7]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 4]

représentés par Maître Eugénie CRIQUILLION, avocat postulant au barreau de BORDEAUX et assistés de Maître Yelena CENARD substituant Maître Arié ALIMI de la SELEURL Arié Alimi Avocat, avocat plaidant au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 juin 2024 en audience publique, en double rapporteur, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Paule POIREL, Présidente qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries, et Monsieur Emmanuel BREARD, conseiller,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Paule POIREL, président,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Emmanuel BREARD, conseiller,

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

A l’occasion des élections municipales de 2020 à [Localité 6], divers mouvements politiques se sont rapprochés pour porter une liste électorale en créant un collectif d’abord dénommé « [Localité 6] debout ! », qui a finalement déposé une liste sous la dénomination « [Localité 6] en luttes ».

A l’issue des scrutins de mars et juin 2020, trois de ses membres ont été élus, M. [J], Mme [D] et M. [R], qui ont constitué au conseil municipal de [Localité 6] un groupe dénommé ‘[Localité 6] en luttes’.

Le collectif s’est ensuite structuré en constituant une association type loi 1901 déclarée en préfecture le 6 octobre 2020 sous le titre « Collectif [Localité 6] en luttes » ; dont les actions sont menées par une collégiale élue pour un an par l’assemblée générale.

Des dissensions internes sont apparues au sein de l’association qui ont abouti à la démission de M. [R] du conseil municipal, le 14 décembre 2021, lequel a été remplacé par Mme [T], puis, les 29 et 31 décembre 2021, de Mme [D] et de M. [J] qui ont démissionné de l’association.

L’association expose que M. [J] et Mme [D] ont néanmoins continué à intervenir sous la dénomination du « Collectif [Localité 6] en luttes » ou sa version elliptique « [Localité 6] en luttes » tant au sein du conseil municipal qu’en dehors, et d’administrer sa page Facebook.

Se plaignant notamment de n’être pas parvenue à un accord pour faire cesser l’usage du nom ‘Bordeaux en luttes’ par Mme [D] et M. [J], l’association « Collectif Bordeaux en Luttes » a fait assigner, par actes du 20 avril 2023, M. [Z] [J] et Mme [P] [D] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux afin notamment de voir, au visa de l’article 835 du code de procédure civile :

– interdire aux défendeurs d’utiliser le titre associatif « Collectif [Localité 6] en luttes » ou sa version elliptique « [Localité 6] en luttes » ainsi que son logo dans leur expression politique sous cette dénomination, au sein du conseil municipal de [Localité 6] et du conseil métropolitain de [Localité 6] Métropole comme en dehors de ces assemblées électives, notamment dans tous les médias, sous astreinte de 500,00 euros par manquement constaté ;

– leur ordonner de prendre toute mesure auprès des organes du conseil municipal de [Localité 6] et du conseil métropolitain de [Localité 6] Métropole pour faire cesser en leur sein l’utilisation illicite du titre associatif « Collectif [Localité 6] en luttes » ou sa version elliptique « [Localité 6] en luttes » et son logo sous leur nom, et d’en justifier auprès d’elle dans un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision, et à défaut sous astreinte de 200 euros par jour de retard pendant un mois ;

– leur ordonner de lui restituer l’accès à sa page Facebook en lui transférant la plénitude de ses droits d’administrateur dans un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision, et à défaut sous astreinte de 200 euros par jour de retard pendant un mois ;

– leur ordonner de procéder à la publication de la décision, à leurs frais exclusifs, dans deux journaux d’information politique et générale, l’un régional, l’autre national, et d’en justifier auprès d’elle dans un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision, et à défaut sous astreinte de 200 euros par jour de retard pendant un mois.

Par ordonnance de référé du 16 octobre 2023, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :

– débouté l’association « Collectif [Localité 6] en Luttes » de toutes ses demandes,

– débouté M. [J] et Mme [D] de leurs demandes reconventionnelles,

– condamné l’association « Collectif [Localité 6] en Luttes » à payer à M. [J] et Mme [D] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné l’association « Collectif [Localité 6] en Luttes » aux entiers dépens.

L’association Collectif [Localité 6] en Luttes a relevé appel de cette ordonnance par déclaration du 23 novembre 2023, en ce qu’elle a :

– débouté l’association « Collectif [Localité 6] en Luttes » de toutes ses demandes,

– condamné l’association « Collectif [Localité 6] en Luttes » à payer à M. [J] et Mme [D] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné l’association « Collectif [Localité 6] en Luttes » aux entiers dépens.

L’association Collectif [Localité 6] en Luttes, par dernières conclusions déposées le 19 janvier 2024, demande à la cour de :

– déclarer recevable l’action engagée par l’association « Collectif [Localité 6] en luttes »,

Infirmer l’ordonnance rendue le 16 octobre 2023 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux en ses chefs expressément critiqués,

En conséquence,

– interdire à M. [Z] [J] et à Mme [P] [D] d’utiliser le titre associatif ‘Collectif [Localité 6] en luttes’ ou sa version elliptique ‘[Localité 6] en luttes’ dans leur expression politique sous cette dénomination, au sein du Conseil municipal de [Localité 6] et du Conseil métropolitain de [Localité 6] Métropole, comme en dehors de ces assemblées électives, notamment dans tous les médias (presse écrite, radiophonique, audiovisuelle, communication sur les réseaux sociaux’), sous astreinte de 500,00 € par manquement constaté à compter de la signification de la décision à intervenir,

– ordonner à M. [Z] [J] et à Mme [P] [D] de prendre toute mesure auprès des organes du Conseil municipal de [Localité 6] et du Conseil métropolitain de [Localité 6] Métropole aux fins de faire cesser en leur sein l’utilisation illicite du titre associatif « Collectif [Localité 6] en luttes » ou sa version elliptique « [Localité 6] en luttes » sous leur nom, et d’en justifier auprès de l’association « Collectif [Localité 6] en luttes » dans un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision à intervenir, et à défaut sous astreinte de 200,00 € par jour de retard pendant un mois,

– ordonner à M. [Z] [J] et à Mme [P] [D] de restituer à l’association « Collectif [Localité 6] en luttes » l’accès à sa page Facebook, en lui transférant la plénitude de ses droits d’administrateur dans un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision à intervenir par restitution des codes d’accès et renonciation aux fonctions d’administrateur et d’éditeur de la page, et à défaut sous astreinte de 200,00 € par jour de retard pendant un mois,

– ordonner à M. [Z] [J] et à Mme [P] [D] de procéder à la publication de la présente décision, à leurs frais exclusifs, dans deux journaux d’information politique et générale, l’un régional, l’autre national, d’en justifier auprès de l’association « Collectif [Localité 6] en luttes » dans un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision à intervenir, et à défaut sous astreinte de 200,00 € par jour de retard pendant un mois.

– condamner in solidum M. [Z] [J] et Mme [P] [D] aux entiers dépens de première instance et d’appel,

– condamner in solidum M. [Z] [J] et Mme [P] [D] à verser à maître Bouyer, avocat de l’association « Collectif [Localité 6] en luttes » la somme de 3 000,00 € HT soit 3 600,00 TTC au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l’aide aurait exposés s’il n’avait pas eu cette aide par application des dispositions de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique.

M. [J] et Mme [D] , par dernières conclusions déposées le 15 février 2024, demandent à la cour de :

Confirmer intégralement l’ordonnance de référé en ce qu’elle a :

* débouté l’association « Collectif [Localité 6] en Luttes » de toutes ses demandes ;

* condamné l’association « Collectif [Localité 6] en Luttes » à payer à M. [J] et Mme [D] la somme de 2.500,00€ sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

* condamné l’association « Collectif [Localité 6] en Luttes » aux entiers dépens ;

– Débouter l’association « Collectif [Localité 6] en Luttes » de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

– Condamner l’association « Collectif [Localité 6] en Luttes » au paiement de la somme de 3.000,00€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel ;

– Condamner l’association « Collectif [Localité 6] en Luttes » au paiement des entiers dépens d’appel.

L’affaire a été fixée à l’audience collégiale du 18 juin 2024.

L’instruction a été clôturée le 15 mai 2024.

Les parties ont déposé de nouvelles conclusions après clôture, le 30 mai 2024 pour l’appelante et en réponse le 13 juin 2024 pour les intimés aux termes desquelles les intimés demandent notamment à la cour de :

Au préalable

– Déclarer irrecevables les conclusions communiquées par l’appelante le 30 mai 2024, en l’absence de cause grave dûment justifiée postérieure à la date de clôture du 15 mai 2024,

A titre subsidiaire :

(Seulement si les conclusions de l’appelante du 30 mai 2024 n’étaient pas déclarées irrecevables)

– révoquer la clôture en date du 15 mai 2024, et sur le fond :

– déclarer recevable l’appelante faute de qualité à agir au titre de la revendication du droit de propriété de la marque « [Localité 6] en luttes ».

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient de déclarer irrecevables les dernières conclusions communiquées par l’appelante après la clôture, le 30 mai 2024, ainsi que celles en réponse des intimés en date du 13 juin 2024, alors même que l’appelante n’avait pas sollicité la révocation de l’ordonnance de clôture, ni en conséquence fait valoir de motifs graves de révocation.

L’association ‘Collectif [Localité 6] en Lutte’ reproche au premier juge d’avoir dit que la demande excédait ses pouvoirs au motif de l’existence d’une contestation sérieuse reposant sur une antériorité de l’usage du nom ‘Collectif [Localité 6] en luttes’ ou son ellipse ‘[Localité 6] en luttes’ alors que la demande était fondée sur l’existence d’un trouble manifestement illicite qu’il convenait de faire cesser, seule l’association étant investie de la personnalité morale et en droit d’agir en justice pour la défense de son nom.

Les intimés demandent la confirmation de la décision entreprise.

Le juge des référés peut aux termes des dispositions de l’article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, dans les limites de sa compétence, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. Il peut toujours, aux termes des dispositions de l’article 835, même en présence d’une contestation sérieuse, dans les limites de sa compétence, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Il s’ensuit que si, sur le fondement de l’article 835 du code de procédure civile, la contestation sérieuse ne fait pas obstacle à ce qu’il soit ordonné en référé des mesures conservatoires ou de remise en état, dont les mesures d’interdiction sollicitées par l’appelante, c’est à la condition qu’il y ait lieu de faire cesser un trouble manifestement illicite dont il incombe à l’association demanderesse d’établir la matérialité, c’est à dire le trouble constituant une atteinte à un droit s’imposant avec une évidence suffisante, ni l’urgence, ni la gravité du trouble ne constituant des conditions d’ouverture à ce référé.

Or, si seule l’association ‘Collectif [Localité 6] en luttes’ est investie de la personnalité morale et si elle est en droit d’agir en justice pour la défense de son nom, il ne peut être contesté que les intimés, qui sont poursuivis en leur nom personnel ont qualité et intérêt à défendre à l’action qui leur interdit l’usage du nom ‘[Localité 6] en luttes’ alors qu’ils ont été élus aux élections municipales de [Localité 6] de mars/ juin 2020 sous la liste « [Localité 6] en luttes» au même titre que M. [R] avec lequel ils ont constitué au conseil municipal de [Localité 6], dans la suite de leur élection, un groupe dénommé ‘[Localité 6] en luttes’, ainsi qu’il ressort de la délibération du conseil municipal du 23 juillet 2020, ce qui conférait à ce groupe une existence légale et à ses membres un droit à l’usage du nom ‘[Localité 6] en luttes’ dans le cadre de leur mandat électif et dans toutes les activités s’y rattachant, pendant la durée de leur mandat.

Il s’ensuit que l’usage qu’ils font ou qu’ils ont fait du nom ‘[Localité 6] en luttes’, du logo et du compte facebook créé à l’occasion de ces mêmes municipales, dans le cadre de leur mandat électif, y compris dans les médias où ils sont amenés à s’exprimer en ce titre, et ce dès avant même la création de l’association ‘Collectif [Localité 6] en Luttes’, ne porte pas en soi la marque d’une illicéité manifeste qu’il conviendrait de faire cesser.

Et, en tout état de cause, l’antériorité dont se prévalent les intimés, en ce qu’elle oblige à trancher un conflit de propriété intellectuelle sur le nom ‘[Localité 6] en luttes’ et touche au fond du droit, constitue une contestation sérieuse à la demande qui tend à interdire aux défendeurs d’utiliser le titre associatif ‘Collectif [Localité 6] en luttes’ ou sa version elliptique ‘[Localité 6] en luttes’ ainsi que son logo dans leur expression politique sous cette dénomination, au sein du conseil municipal de [Localité 6] et du conseil métropolitain de [Localité 6] Métropole, comme en dehors de ces assemblées électives, notamment dans tous les médias, excédant en conséquence les pouvoirs du juge des référés.

L’ordonnance qui a débouté l’association ‘Collectif [Localité 6] en luttes’ de toutes ses demandes, est en conséquence confirmée.

Succombant en son recours, l’association ‘Collectif [Localité 6] en Luttes’ en supportera les dépens et sera équitablement condamnée à payer à Mme [P] [D] et à M. [Z] [J], ensemble, une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour

Déclare irrecevables les conclusions de l’association ‘Collectif [Localité 6] en luttes’ en date du 30 mai 2024 et celles en réponse de Mme [P] [D] et de M. [Z] [J] en date du 13 juin 2024.

Confirme la décision entreprise des chefs déférés.

Y ajoutant:

Condamne l’association ‘Collectif [Localité 6] en luttes’ à payer à Mme [P] [D] et à M. [Z] [J], ensemble, une somme de 3 000 euros

en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne l’association ‘Collectif [Localité 6] en luttes’ aux dépens du présent recours.

Le présent arrêt a été signé par Madame Paule POIREL, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


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