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La SAS Madore Hydraulique, spécialisée dans la réparation de vérins hydrauliques, a entretenu une relation commerciale avec la SAS Aluminium France Extrusion (AFE) depuis 2006. En août 2017, Madore a réparé un vérin pour AFE, qui a été réglé. En décembre 2019, AFE a demandé une expertise sur ce vérin, et Madore a accepté de le réparer à titre commercial, malgré l’expiration de la garantie. Après des réparations, le vérin a été livré en mars 2020 sans réclamations de la part d’AFE.
En janvier 2021, un autre vérin a présenté des dysfonctionnements, et AFE a décidé d’utiliser le vérin réparé comme pièce de rechange. En février 2021, une fuite a été constatée, entraînant une analyse conjointe avec un huissier. Des défauts ont été relevés, et Madore a pris en charge la réparation. Après des essais concluants, le vérin a été livré à nouveau en février 2021, accompagné d’une facture de 11 428,61 euros. AFE a tardé à payer, invoquant des doutes sur la qualité du vérin et a finalement proposé un règlement amiable. En octobre 2021, Madore a assigné AFE en justice pour obtenir le paiement de la facture. Le tribunal de commerce de Limoges a jugé en juin 2023 que les demandes de Madore étaient irrecevables et a débouté les deux parties. Madore a fait appel de cette décision. En appel, Madore a demandé la confirmation de la compétence du tribunal de Limoges et le paiement de la facture, tandis qu’AFE a contesté la compétence territoriale et a demandé la nullité de l’assignation. AFE a également réclamé des dommages et intérêts pour la défectuosité du vérin. La cour a finalement infirmé le jugement de première instance concernant la demande de paiement de Madore, condamnant AFE à régler la facture, tout en confirmant le reste du jugement. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 23/00512 – N° Portalis DBV6-V-B7H-BIPCE
AFFAIRE :
S.A.S. MADORE HYDRAULIQUE RCS DE LIMOGES
C/
S.A.S. ALUMINIUM FRANCE EXTRUSION
OJLG/MS
Demande en paiement du prix et/ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix
Grosse délivrée à Me Pascal DUBOIS, Me Anne DEBERNARD-DAURIAC , le 10-10-2024.
COUR D’APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE ECONOMIQUE ET SOCIALE
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ARRÊT DU 10 OCTOBRE 2024
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Le dix Octobre deux mille vingt quatre la Chambre économique et sociale de la cour d’appel de LIMOGES a rendu l’arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :
ENTRE :
S.A.S. MADORE HYDRAULIQUE RCS DE LIMOGES, demeurant [Adresse 1] – [Localité 3]
représentée par Me Pascal DUBOIS de la SCP DUBOIS DUDOGNON VILLETTE, avocat au barreau de LIMOGES
APPELANTE d’une décision rendue le 05 JUIN 2023 par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE LIMOGES
ET :
S.A.S. ALUMINIUM FRANCE EXTRUSION, demeurant [Adresse 5] – [Localité 6]
représentée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC de la SELARL SELARL LX LIMOGES, avocat au barreau de LIMOGES substituée par Me Emmanuel FLEURY, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l’affaire a été fixée à l’audience du 03 Septembre 2024. L’ordonnance de clôture a été rendue le 05 juin 2024.
Conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile, Madame Johanne PERRIER, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, magistrat rapporteur, assistée de Mme Sophie MAILLANT, Greffier, a tenu seule l’audience au cours de laquelle elle a été entendu en son rapport oral.
Les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients et ont donné leur accord à l’adoption de cette procédure.
Après quoi, Madame Johanne PERRIER, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 10 Octobre 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
Au cours de ce délibéré, Madame Johanne PERRIER a rendu compte à la Cour, composée de Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Présidente de chambre, de Madame Géraldine VOISIN, Conseiller et d’elle même. A l’issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l’arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
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FAITS ET PROCÉDURE :
La SAS MADORE HYDRAULIQUE, située à [Localité 4] (87), a pour objet social ‘tous travaux de maintenance de réparation ou reconstruction complète en mécanique industrielle dans les secteurs automobile et hydraulique sur: tous vérins hydrauliques’.
La SAS ALUMINIUM FRANCE EXTRUSION [Localité 6], dite AFE, est située à [Localité 6] (89) et a pour objet social: ‘la production et la commercialisation de produits métallurgiques et en particulier de profilés et laminés en aluminium’.
Les deux sociétés sont en relation d’affaires depuis 2006, la société Madore Hydraulique intervenant (réparations, entretien) sur les vérins utilisés par la société AFE dans le cadre de son activité métallurgique.
Entre juin et août 2017, la société Madore Hydraulique a réparé un vérin conteneur pour le compte de la société Aluminium France Extrusion. Cette réparation a fait l’objet d’une facture datée du 25 août 2017, qui a été réglée par la société Aluminium France Extrusion, et le vérin a été enregistré sous OR de traçabilité n°51182.
Fin décembre 2019, la société Aluminium France Extrusion a contacté la société Madore Hydraulique afin d’obtenir une expertise du vérin conteneur ‘P5″ qui avait été réparé en août 2017. Suite au constat d’une rupture de soudure entre le piston et la tige sur ce vérin, la société Madore Hydraulique a adressé le 20 janvier 2020 à la société Aluminium France Extrusion, un courrier l’informant que malgré l’échéance du délai de garantie, elle acceptait de réparer ce vérin sans frais, à titre de geste commercial. Cette réparation a été effectuée et enregistrée sous OR de traçabilité n°54727, puis le vérin conteneur a été livré à la société Aluminium France Extrusion le 4 mars 2020. Aucune observation ou réclamation n’a été émise par la société Aluminium France Extrusion lors ou à la suite de cette livraison.
Le 26 janvier 2021, un des vérins installés sur la presse n°5 de l’usine de la société Aluminium France Extrusion a présenté un dysfonctionnement et il a été décidé de le remplacer par le vérin conteneur ayant fait l’objet de réparations par la société Madore Hydraulique, qui, selon la société AFE, était gardé en stock, sans être utilisé, à usage de pièce de rechange en tant que ‘vérin d’occasion’.
Le 3 février 2021, la société Aluminium France Extrusion a constaté une fuite sur le vérin conteneur d’occasion et a contacté la société Madore Hydraulique pour qu’elle se déplace sur son site afin de procéder à une analyse conjointe du vérin litigieux.
Préalablement à cette analyse, la société Aluminium France Extrusion a ôté le vérin conteneur d’occasion de la presse et l’a déposé sur le sol.
Le 4 février 2021, l’analyse conjointe du vérin déposé a été réalisée par des représentants de deux sociétés, sur le site d’Aluminium France Extrusion, en présence d’un huissier mandaté par cette dernière.
L’huissier de justice, Maitre [V], a établi un constat procès-verbal de cette expertise, par lequel il a constaté l’identification du vérin posé au sol, marqué OR 51182 et OR 54727. Il a recueilli les observations de la société Madore Hydraulique qui a indiqué qu’un démontage dans ses locaux aurait été préférable en raison des risques pour le vérin ou le fût d’effectuer le démontage horizontalement.
Les opérations de démontage ont révélé des rayures sur la tige du vérin, des rayures anormales sur les bagues en bronze, ainsi que des résidus en limaille sur un joint.
La société Madore Hydraulique est repartie avec la tige du vérin pour en effectuer la réparation dans ses locaux, situés à [Localité 4] et a organisé, avec l’accord de la société AFE et pour son compte, le transport par un transporteur spécialisé de l’autre partie du vérin dans ses locaux.
Le 9 février 2021, un constat ‘d’essais au ban du vérin Presse N° 5 AFE selon nouvel OR N°56271″ a été établi dans les locaux de la société Madore Hydraulique en présence de la société Aluminium France Extrusion, et d’un huissier de justice.
Les essais ont été validés, notamment quant à l’absence de tout blocage et/ou points durs, et de tout dysfonctionnement.
Un document, intitulé ‘constat d’essais au banc du vérin Presse n°5 AFE selon nouvel OR n° 56271″, indiquant que le passage au banc a permis de valider l’absence de tout blocage ou point dur qui mettrait en évidence un quelconque désalignement du vérin a été signé par les représentants des sociétés AFE et Madore, ainsi que par l’huissiers de justice.
Étaient annexées à ce document les mesures prises lors du passage au banc.
Suite à la validation de ces essais, le vérin conteneur réparé a été livré à la société Aluminium France Extrusion le 10 février 2021.
Le 23 février 2021, la societé Madore Hydraulique a adressé un courrier a la société Aluminium France Extrusion comportant facture du même jour d’un montant de 11 428,61 euros TTC à échéance au 14 avril 2021, correspondant au coût de la remise en état du vérin conteneur ‘P5″ et au coût de l’établissement du constat d’huissier du 09 février 2021.
Suite à l’absence de paiement malgré relance datant du 20 avril 2021, la société Madore Hydraulique a par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 juillet 2021, mis en demeure la société Aluminium France Extrusion de procéder au paiement de la facture susvisée.
Le 5 août 2021, la société Aluminium France Extrusion a répondu être dans l’attente d’un rapport à soumettre à la société Madore Hydraulique concernant le vérin réparé, ayant des doutes sur les qualités de ce dernier.
Le 9 septembre 2021, la société Aluminium France Extrusion a informé la société Madore Hydraulique de son intention de considérer le vérin livré comme une pièce de rechange inutilisable, et de son souhait de trouver un accord amiable, en se fondant sur un ‘avis technique’ réalisé à sa demande par l’Eurl Extruset, selon lequel le vérin litigieux aurait été atteint d’un problème interne.
Le 15 octobre 2021, la société Madore Hydraulique a assigné la société Aluminium France Extrusion devant le tribunal de commerce de Limoges aux fins d’obtenir le paiement de la facture du 23 février 2021 litigieuse.
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Par jugement du 5 juin 2023, le tribunal de commerce de Limoges:
– s’est estimé compétent pour connaître du litige,
– a dit recevable l’assignation délivrée par la société Madore Hydraulique à l’encontre de la société AFE,
– a débouté la société Madore Hydraulique de toutes ses demandes,
– a débouté la société AFE de l’ensemble de ses demandes,
– a dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– a dit que chaque partie conservera ses dépens.
Par déclaration du 03 juillet 2023, la S.A.S. MADORE HYDRAULIQUE a fait appel de ce jugement.
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MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières écritures du 8 mars 2024, la S.A.S. MADORE HYDRAULIQUE demande à la cour de :
Faisant droit à l’appel formé par la SAS MADORE HYDRAULIQUE à l’encontre du jugement rendu par le tribunal de commerce de Limoges le 5 juin 2023;
Confirmer ledit jugement en ce qu’il s’est déclaré compétent territorialement et a rejeté les exceptions de procédure;
Le réformer pour le surplus;
Vu les articles 1101 et suivants du code civil,
Condamner la SAS Aluminium France Extrusion au paiement de la somme de 11 428,61 euros relative à la facture en date du 23 février 2021;
Condamner la SAS AFE à payer les intérêts au taux légal sur cette somme à compter de la mise en demeure du 26 juillet 2021;
Condamner la SAS Aluminium France Extrusion au paiement de la somme de 5 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive;
Débouter la SAS AFE de son appel incident;
Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la SA AFE de sa demande reconventionnelle qui sera dite mal fondée;
Condamner la SAS AFE au paiement de la somme de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;
Condamner la SAS AFE aux entiers dépens d’instance et d’appel dans lesquels seront compris les frais de constat d’huissier de Maître [X] en date du 9 février 2021.
A cette fin, elle soutient que le tribunal de commerce de Limoges était compétent pour connaître du litige, puisque les réparations objet de la prestation se sont effectuées dans les locaux du prestataire à Limoges, et que par ailleurs, la société Aluminium France Extrusion a accepté ses conditions générales de vente, qui font élection du for de Limoges. Elle souligne que ses conditions générales de vente étaient connues de la société Aluminium France Extrusion en raison de leurs relations commerciales anciennes, depuis dix ans, et en raison de l’acceptation par la société Aluminium France Extrusion de factures antérieures mentionnant la compétence du tribunal de commerce de Limoges.
Elle soutient que l’assignation délivrée n’est pas entachée de nullité, car elle mentionne bien le nom, l’adresse, et la qualité d’avocat pour le compte de la société Madore Hydraulique de Maitre [I]. S’il est mentionné que seul un avocat à la cour d’appel de Limoges pouvait se constituer, cela n’a causé aucun préjudice à la société assignée qui a constitué et s’est faite représenter par un avocat du barreau de Paris.
Sur le fond, elle soutient que la société Aluminium France Extrusion est mal fondée à refuser de payer la facture litigieuse, les travaux de remise en état ayant été réalisés avec diligence et efficacité, comme en témoignent le constat d’essai au banc et la très courte immobilisation de la pièce.
Elle conteste la validité de ‘l’avis technique’ versé aux débats par la société Aluminium France Extrusion , qui n’est pas signé ni établi sur papier à entête, et qui a été établi sur pièces, et non après examen du vérin litigieux. Elle considère que l’origine des désordres présentés par le vérin est à rechercher dans un défaut de la presse sur laquelle il était installé.
Aux termes de ses dernières écritures du 12 décembre 2023, la S.A.S. ALUMINIUM FRANCE EXTRUSION demande à la cour de :
A titre liminaire,
Infirmer le jugement en ce qu’il s’est estimé compétent territorialement pour connaître de ce litige;
Statuant à nouveau,
Renvoyer la société Madore Hydraulique à mieux se pourvoir devant le Tribunal de commerce d’Auxerre;
Infirmer le jugement en ce qu’il a retenu que l’acte introductif d’instance délivré à la demande de la société Madore Hydraulique n’était pas affecté de nullité;
Statuant à nouveau,
Juger que l’acte introductif d’instance délivré à la demande de la société Madore Hydraulique est nul;
A titre principal,
Confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Madore Hydraulique de toutes ses demandes, fins et prétentions;
Statuant à nouveau
Débouter la société Madore Hydraulique de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.
A titre reconventionnel ;
Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Aluminium France Extrusion [Localité 6] de sa demande de condamnation de la société Madore Hydraulique à lui payer la somme de 102 840,19 euros à titre de dommages et intérêts ;
Statuant à nouveau,
Condamner la société Madore Hydraulique à régler à la société Aluminium France Extrusion [Localité 6] la somme de 102 840,19 euros à titre de dommages et intérêts;
En tout état de cause,
Condamner la société Madore Hydraulique à payer à la société Aluminium France Extrusion [Localité 6] la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’instance.
La société Aluminium France Extrusion soutient que le tribunal de commerce de Limoges est territorialement incompétent pour statuer sur le litige, aux termes de l’article 46 du code de procédure civile, en ce qu’elle réside en tant que défendeur dans le ressort de la juridiction commerciale d’Auxerre, et alors que la société Madore Hydraulique a reconnu s’être déplacée sur son site pour effectuer la prestation de services dont elle demande le paiement.
Elle soutient que par ailleurs, la société Madore Hydraulique ne pouvait saisir le tribunal de commerce de Limoges au lieu du tribunal de commerce d’Auxerre sur le fondement d’une clause attributive de compétence intégrée dans ses conditions générales de vente, car cette clause ne lui a pas été communiquée, n’a pas été signée par elle et ne lui est donc pas opposable.
Elle soutient qu’en tout état de cause, cette clause deva être réputée non écrite car elle n’a pas un caractère apparent, et n’a pas été acceptée lors de la formation du contrat.
Elle soutient ensuite in limine litis que l’assignation délivrée par Madore Hydraulique devant la juridiction de première instance était nulle du fait de plusieurs vices de fonds : l’absence de mention de la constitution d’avocat de la société appelante, l’impossibilité de déterminer la juridiction saisie en raison de la mention de le corps de l’assignation du tribunal judiciaire, et de la formation des référés, et par la mention ‘par ministère d’avocat constitué près ledit tribunal’, qui limite le droit de représentation de l’AFE.
Sur le fond, la société Aluminium France Extrusion soutient ne pas être redevable de la facture du 23 février 2021, en raison de la violation la société Madore Hydraulique de son obligation de résultat en sa qualité de professionnelle.
Elle soutient ne pas avoir exercé son droit de contestation de la facture de manière illégitime, et demande à titre reconventionnel la condamnation de la société Madore Hydraulique à 102 840,19 euros à titre de dommages et intérêts à raison des préjudice subis du fait de la défectuosité du vérin, ayant rendu la presse n°5 inutilisable pendant plusieurs jours.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 juin 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur les exceptions de procédure:
La société AFE a soulevé une exception de compétence et une exception de nullité de l’assignation. Un tribunal ne pouvant statuer sur sa compétence que pour autant qu’il soit régulièrement saisi, l’exception de nullité de l’acte introductif d’instance doit être examinée en premier.
L’acte introductif d’instance:
La société AFE fait grief à l’assignation qui lui a été délivrée:
– de ne pas mentionner que la société Madore Hydraulique est représentée par un avocat, ce qui constituerait une irrégularité de fond, insusceptible de régularisation,
– de contenir diverses erreurs quant à la juridiction devant laquelle l’affaire est portée, lui ayant causé un grief tenant au temps passé par son avocat pour résoudre ces contradictions et à la facturation qui en serait découlée.
L’assignation mentionne être délivrée à la requête de la SAS Madore Hydraulique , mentionne son numéro d’immatriculation au RCS de [Localité 4], son adresse, sa représentation par son représentant légal, puis comporte la phrase suivante:
‘ayant pour avocat Maître Pascal DUBOIS, membre de la SCP DUBOIS-DUDOGNON-VILLETTE, avocats au barreau de Limoges, demeurant [Adresse 7], [Localité 2]’.
Les trois mots ‘ayant pour avocat’ se comprennent sans difficulté comme une formulation familière de ‘représentée par Maître..’.
L’assignation comprend par ailleurs l’identification précise de l’avocat et celui-ci a représenté de manière effective la société Madore Hydraulique devant le tribunal de commerce.
Le moyen n’est pas fondé.
Le second grief résulte sans conteste des différentes mentions portées sur l’assignation, intitulée ‘assignation devant le tribunal de commerce de Limoges avec représentation obligatoire’, mais qui invite la société AFE à comparaître à une audience du tribunal judiciaire de Limoges, pour ensuite faire référence à la ‘formation des référés du tribunal de commerce de Limoges.
Il était enfin précisé que la société AFE devait être représentée par ministère d’avocat constitué près le tribunal de Limoges, alors que devant les juridictions consulaires les conseils peuvent être choisis sans limite territoriale de postulation.
Pour autant, ces contradictions, purement formelles, n’ont pas interdit à la société AFE de se présenter à la bonne audience du tribunal de commerce de Limoges, et à s’y faire représenter par un avocat parisien, un appel téléphonique ou un courriel adressé à Me [I] ayant très certainement suffit à retrouver la juridiction idoine.
Aucun honoraire de ‘recherche de juridiction’ n’est justifié, ce dont il résulte que le grief allégué n’est pas démontré.
Or, aux termes des dispositions de l’article 114 du code de procédure civile, la nullité pour vice de forme d’un acte de procédure ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
Les prétentions visant à voir prononcer la nullité de l’assignation sont rejetées et le jugement déféré confirmé de ce chef.
Sur la compétence:
La société Madore Hydraulique, demanderesse à la procédure et demeurant sur le ressort du tribunal de commerce de Limoges, a assigné la société AFE devant le tribunal de commerce de Limoges alors que la défenderesse demeure dans l’Yonne.
La société Madore Hydraulique se prévaut d’une clause de prorogation de compétence figurant dans ses conditions générales de vente (ou d’intervention) que la société AFE n’aurait pu ignorer compte tenu du courant d’affaires ayant existé entre elles durant plusieurs années, puisqu’elle est reprise sur ses factures.
Selon les dispositions de l’article 48 du code de procédure civile, toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée.
Deux factures sont versées aux débats, soit celle de la réparation du vérin effectuée en 2017 et la facture dont le paiement est demandé dans le cadre du présent litige. Elles renvoient toutes deux aux conditions générales et mentionnent en très petits caractères que toute contestation sera de la compétence du tribunal de commerce de Limoges.
Le nombre restreint de factures versées aux débats ainsi que la taille insuffisante des caractères de la clause de prorogation au regard des exigences de l’article 48 susvisé, ne permettent pas de démontrer que la société AFE, en demandant l’intervention de la société Madore Hydraulique en 2021, a accepté la clause de prorogation de compétence figurant sur la facture (et non sur la commande) de 2017, alors même que la demande de ré-intervention apparaissait comme nécessaire au regard des interventions antérieures.
Ce moyen n’est pas fondé.
En revanche, en vertu des dispositions de l’article 46 du code de procédure civile:
‘ Le demandeur peut saisir à son choix, outre la juridiction du lieu où demeure le défendeur:
– en matière contractuelle, la juridiction du lieu de la livraison effective de la chose ou du lieu de l’exécution de la prestation de service’.
Le litige est un litige contractuel, et la société Madore demande le paiement d’une prestation de service qu’elle a réalisé pour le compte de la société AFE, soit la réparation de son vérin au mois de février 2021.
Il résulte de l’exposé des faits que suite à la découverte par la société AFE d’un dysfonctionnement de son vérin, celle-ci, après avoir démonté le vérin, a demandé à la société Madore Hydraulique de se déplacer le 04 février 2021 dans ses locaux pour se livrer à une analyse conjointe de l’origine du désordre.
Il est établi qu’une fois cette analyse effectuée par les deux parties en présence d’un huissier, la société Madore Hydraulique a fait acheminer le vérin dans ses locaux de [Localité 4], et a procédé dans ses locaux à la réparation du vérin.
Une fois cette réparation effectuée, elle a convié la société AFE à procéder à des constatations, et une fois ces constats validés, a fait livrer le vérin dans les locaux de la société AFE.
Selon le compte-rendu rédigé par la société Madore à l’issue de la réunion du 04 février, les transports du vérin devaient être à la charge de la société AFE.
Ce compte-rendu, versé aux débats, ne fait pas l’objet de critique de la part de la société AFE.
La facture litigieuse précise expressément que le transport du vérin a été organisé par affrètement spécifique pour le compte de la société AFE, suite à un accord par mail de M. [Z] (Directeur industriel de la société AFE) réceptionné le 05 février 2021.
Cette mention n’a jamais été critiquée.
La mise en demeure de payer du 23 février 2021 contenait elle-même un rappel de l’historique du dossier et notamment le fait que suite à la réunion du 04 février 2021, AFE devait se charger d’expédier le vérin et que devant sa carence, celui-ci avait été organisé en urgence par la société Madore.
Si la société AFE a rédigé deux courriers expliquant pour quels motifs elle refusait de payer, elle n’a jamais remis en question la relation de l’historique du litige telle que rédigée par la société Madore.
Il en résulte que les parties s’étaient accordées sur l’exécution par la société Madore Hydraulique d’une prestation de réparation dans ses locaux de [Localité 4].
Par conséquent, et par application des dispositions de l’article 46 précité, le tribunal de commerce de Limoges est compétent pour connaître du litige et le jugement déféré est confirmé de ce chef.
Sur le fond du litige:
En réponse à une mise en demeure de la société Madore Hydraulique, M. [Z] a admis que la société AFE lui avait commandé la réparation du vérin puisqu’il a écrit le 09 septembre 2021: ‘le 05 février 2021, vous nous avez soumis une proposition de réparation en urgence, ce que nous avons accepté pour avoir une pièce de rechange en cas de nouvelle avarie sur l’un des quatre vérins de cette presse. Le fonctionnement des 2 presses de notre site étant le coeur même de notre activité, l’incapacité à réparer dans les plus brefs délais aurait des conséquences financières immédiates. L’acceptation de ce dépannage n’a pas pour autant été un quitus sur la conception, point que nous avons toujours remis en question’.
Les réparations ont donc été commandées par la société AFE.
La société Madore Hydraulique, après les avoir effectuées dans un très bref délai (trois jours), a convié la société AFE à assister dans ses locaux au passage au banc du vérin pour en vérifier contradictoirement la qualité.
Le 09 février 2021, les essais ont eu lieu en présence du responsable qualité de la société AFE et d’un huissier de justice.
A été signé par les représentants des deux sociétés et l’huissier de justice un ‘constat d’essai au banc du vérin’ dans lequel il était constaté que les réparations avaient été effectuées conformément aux règles de l’art, le vérin fonctionnant conformément à sa destination, sans le moindre blocage ni désalignement.
Les feuilles de mesure du banc étaient jointes à ce constat.
La société AFE a entendu remettre en question ces constatations contradictoires en faisant appel de façon unilatérale à un bureau d’études, qui n’a pas examiné le vérin mais a travaillé sur des photos et pièces écrites pour rendre un rapport technique par mail, non signé, selon lequel le vérin aurait présenté un vice au niveau de la ‘bague presse garniture’, qui aurait été trop serrée et serait à l’origine des désordres.
La société Madore Hydraulique a pour sa part conclu que la cause des désordres apparus en février 2021 était un mauvais alignement de la presse sur laquelle était installée le vérin.
Elle fonde cette analyse sur les traces relevées sur le vérin et sur le fait que celui-ci a été installé sur la presse pour remplacer un autre vérin, défectueux après seulement treize mois d’utilisation, ce qui confirmerait que les désordres sont causés par la presse et non intrinsèques aux vérins.
La Cour ne dispose pas des compétences techniques pour apprécier les thèses en présence.
Elle constate en revanche que la société AFE a commandé les réparations après analyse conjointe du désordre et que son responsable qualité a assisté aux essais post-réparations et conclu à leur caractère satisfactoire.
Dès lors, la seule production d’un avis technique unilatéral concluant à un vice intrinsèque du vérin tenant à un mauvais serrage de la bague presse garniture (lors de la réparation effectuée en 2020′) est insuffisante à démontrer que le désordre constaté en 2021 trouve son origine dans une faute commise par la société Madore Hydraulique dans ses interventions précédentes, cet avis technique n’étant confirmé par aucune autre pièce.
Enfin, la Cour relève que le coût des prestations figurant sur la facture ne fait l’objet d’aucune contestation, la société AFE ne prétendant pas que celui-ci soit démesuré au regard de la réparation effectuée.
Par conséquent, la facture présentée par la société Madore Hydraulique est due et la société AFE est condamnée à lui payer la somme de 11.428,61 euros avec intérêts au taux légal à compter de la première mise en demeure, soit celle du 26 juillet 2021.
Le jugement déféré est infirmé de ce chef.
A défaut de démonstration de l’existence d’un préjudice distinct de celui déjà réparé par l’octroi d’intérêts moratoires, la demande visant au prononcé d’une condamnation à dommages et intérêts pour résistance abusive de la société AFE est rejetée.
Le jugement déféré est confirmé de ce chef.
Enfin, la société AFE échouant à démontrer une quelconque faute de la société Madore HYDRAULIQUE, sa demande de dommages et intérêts ne peut aboutir.
Elle en est déboutée et le jugement est confirmé de ce chef.
Sur les frais irrépétibles et les dépens:
Les frais de constat engagés dans le cadre des réparations constituent des frais irrépétibles et non des dépens.
La société AFE, qui succombe, est condamnée au paiement des dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’au paiement de la somme de 5.000 euros à la société Madore Hydraulique sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
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La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté la société Madore Hydraulique de sa demande en paiement de la somme de 11.428,61 euros au titre de sa facture du 23 février 2021.
Statuant à nouveau:
Condamne la société Aluminium France Extrusion [Localité 6] à payer à la société Madore Hydraulique la somme de 11.428,61 euros portant intérêts au taux légal à compter du 26 juillet 2021.
Confirme pour le solde le jugement déféré.
Condamne la société Aluminium France Extrusion [Localité 6] aux dépens de première instance et d’appel.
Condamne la société Aluminium France Extrusion [Localité 6] à payer à la société Madore Hydraulique la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sophie MAILLANT. Olivia JEORGER-LE GAC.