La société Sogefinancement a accordé un crédit personnel de 25 000 euros à M. [J] [X] en novembre 2012, remboursable en 84 mensualités. Un avenant en décembre 2015 a réaménagé le montant dû à 16 928,38 euros, avec des mensualités réduites. Après plusieurs impayés, Sogefinancement a demandé la déchéance du terme et a assigné M. [X] en juillet 2022. Le tribunal a constaté la résiliation du contrat, prononcé la déchéance du droit aux intérêts et débouté la banque de ses demandes. Sogefinancement a interjeté appel, demandant l’infirmation du jugement et le paiement de 8 491,56 euros. M. [X] a demandé la confirmation du jugement et a soulevé des arguments concernant la vérification de sa solvabilité et le devoir de conseil de la banque. La cour a finalement infirmé le jugement sur certains points, a condamné M. [X] à payer une somme à Sogefinancement, et a accordé des dommages et intérêts à M. [X] pour défaut de conseil et refus de remboursement anticipé.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 9 – A
ARRÊT DU 10 OCTOBRE 2024
(n° , 14 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/03749 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHFVR
Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 novembre 2022 – Juge des contentieux de la protection de BOBIGNY – RG n° 11-22-001465
APPELANTE
La société SOGEFINANCEMENT, société par actions simplifiée, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège
N° SIRET : 394 352 272 00022
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 2]
représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173
substitué à l’audience par Me Hinde FAJRI de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173
INTIMÉ
Monsieur [J] [X]
né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 6] (MALI)
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représenté et assisté de Me Marie-Pierre MATHIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : B0295
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/006643 du 25/04/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PARIS)
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 juin 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre
Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère
Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Selon offre préalable acceptée le 30 novembre 2012, la société Sogefinancement a consenti à M. [J] [X] un crédit personnel d’un montant en capital de 25 000 euros remboursable en 84 mensualités de 382,22 euros hors assurance incluant les intérêts au taux nominal de 7,40 %, le TAEG s’élevant à 7,82 %, soit une mensualité avec assurance de 398,47 euros.
Par avenant du 21 décembre 2015, les parties ont convenu d’un réaménagement du montant dû à cette date de 16 928,38 euros par réduction du montant des mensualités à la somme de 230,49 euros assurance comprise, sur 105 mois du 29 février 2016 au 29 octobre 2024.
Plusieurs échéances n’ayant pas été honorées, la société Sogefinancement a entendu se prévaloir de la déchéance du terme.
Par acte du 29 juillet 2022, la société Sogefinancement a fait assigner M. [X] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bobigny en paiement du solde du prêt lequel, par jugement réputé contradictoire du 17 novembre 2022, a déclaré la société Sogefinancement recevable en son action, constaté la résiliation du contrat, prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels, débouté la banque de ses demandes en paiement et l’a condamnée aux dépens.
Après avoir contrôlé la recevabilité de la demande au regard de la forclusion et la régularité de la déchéance du terme et pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, le juge a retenu que la solvabilité de l’emprunteur n’avait pas été suffisamment vérifiée, la banque ne produisant pas de pièces justificatives de ses revenus et charges et qu’elle se devait notamment de vérifier la réalité d’un loyer dans la mesure où il avait été déclaré à hauteur d’une somme très modique (199 euros). Il a également relevé que la banque n’avait pas non plus valablement consulté le FICP faute d’avoir retrouvé l’identité de l’emprunteur et que sa recherche avait été infructueuse, ce qui impliquait aussi une vérification plus poussée de la solvabilité de l’emprunteur.
Il a constaté que les versements effectués par celui-ci, soit 28 745,06 euros, excédaient le montant du capital emprunté de sorte qu’il n’y avait pas lieu à condamnation au paiement d’une quelconque somme.
Par déclaration réalisée par voie électronique le 17 février 2023, la société Sogefinancement a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions (n° 2) déposées par voie électronique le 10 octobre 2023, la société Sogefinancement demande à la cour :
– de la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,
– d’infirmer le jugement sauf en ce qu’il l’a déclarée recevable en sa demande et en ce qu’il a constaté l’acquisition de la clause résolutoire et de le confirmer sur ces points,
– de déclarer irrecevables les moyens visant à faire prononcer la déchéance du droit aux intérêts au regard du délai de prescription quinquennal, et subsidiairement de rejeter le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels,
– de constater que la déchéance du terme a été prononcée, subsidiairement de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit au vu des manquements de l’emprunteur dans son obligation de rembourser les échéances du crédit et fixer la date des effets de la résiliation au 22 décembre 2021 et,
– en tout état de cause, de condamner M. [X] à lui payer la somme de 8 491,56 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 7,40 % l’an à compter du 23 décembre 2021 sur la somme de 7 866,32 euros et au taux légal pour le surplus,
– d’ordonner la capitalisation des intérêts à compter du 29 juillet 2022 date de l’assignation en application de l’article 1343-2 du code civil (anciennement 1154),
– de déclarer irrecevable la demande de dommages et intérêts formée par M. [X] sur le fondement d’un manquement au devoir de conseil en assurance comme prescrite, à défaut, de la rejeter comme infondée,
– de dire et juger n’y avoir lieu à accorder des délais de paiement, subsidiairement en cas d’échéancier accordé dans la limite du délai légal de 24 mois, de dire et juger qu’en cas de non-règlement d’une seule échéance à bonne date, l’intégralité de la créance sera immédiatement exigible,
– de débouter M. [X] de toutes ses demandes,
– de condamner M. [X] à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens avec distraction au profit de Selas Cloix & Mendes Gil.
S’agissant de la prescription, elle fait valoir que celle-ci s’applique à toutes les demandes qu’elles soient formées par voie d’action ou par voie d’exception, que la demande de déchéance du droit aux intérêts est bien une demande puisqu’elle vise à compenser les intérêts avec la créance et que cette prescription s’applique aussi bien aux parties qu’au juge qui ne peut avoir plus de droits que les parties elles-mêmes. Elle se prévaut de l’article L. 110-4 du code de commerce dans sa version applicable après l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, laquelle a réduit ce délai à 5 ans et soutient que les arguments soulevés au titre d’une déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel ou du formalisme contractuel ne pouvaient donc être invoqués que jusqu’au 30 novembre 2017 alors que le juge l’a soulevée à l’audience du 19 septembre 2022. Elle ajoute que cette prescription s’impose aussi à M. [X].
Subsidiairement, elle soutient que le premier juge a mal interprété le justificatif de consultation FICP, que la recherche a été faite avec le nom de famille et la date de naissance de M. [X], ce qui a permis de faire ressortir trois personnes inscrites au fichier répondant à ces critères mais pas l’emprunteur, ce qui a permis d’établir que ce dernier n’était pas fiché. Elle considère donc que la consultation a bien abouti à un résultat.
En réponse aux conclusions de ce dernier, elle soutient que le justificatif qu’elle produit répond aux prescriptions de l’article 13 de l’arrêté du 26 octobre 2010 dans sa rédaction applicable à la date de l’offre qui n’exige nullement la mention d’une clé BDF non plus que celle de l’heure de la demande et de la réponse, qu’elle mentionne bien le motif de la consultation, sa date et son résultat. Elle souligne que la consultation ne doit pas être faite avant la signature du contrat mais avant la date de déblocage des fonds.
S’agissant de la vérification de la solvabilité, elle indique qu’elle avait produit la fiche de dialogue, l’avis d’imposition 2012 de M. [X] et ses fiches de paie de août à octobre 2012 démontrant qu’elle avait bien respecté ses obligations à cet égard et que dès lors que le contrat a été conclu en agence, les dispositions de l’article L. 311-10 du code de la consommation dans sa version applicable au litige ne s’appliquent pas et qu’elles sont les seules à poser l’exigence de pièces justificatives dont la liste est fixée par décret.
Elle ajoute qu’elle est fondée à se fier aux déclarations de l’emprunteur et n’était tenue à aucun devoir de mise en garde dès lors que sa situation ne révélait aucun risque d’endettement, la charge du remboursement représentant 25 % de ses revenus. Elle souligne que M. [X] reconnaît lui-même que ses difficultés sont apparues postérieurement suite à des pertes d’emploi. Elle ajoute s’être montrée compréhensive en accordant un réaménagement.
Sur ce point elle fait valoir qu’il s’agissait bien d’un réaménagement ayant pour seul objet d’éviter le prononcé brutal de la déchéance du terme alors que l’emprunteur avait souhaité reprendre le règlement des échéances de crédit et donc régulariser sa situation et non d’un nouveau contrat de crédit puisqu’il n’opérait la modification que des modalités de remboursement et permettait de rembourser l’intégralité des sommes dues sans toucher à ses conditions si bien qu’elle n’avait pas à respecter le formalisme de l’offre préalable de crédit et donc n’avait pas à vérifier de nouveau sa solvabilité. Elle détaille les sommes qui étaient alors dues par M. [X] et soutient que le réaménagement a strictement porté sur ces sommes.
Elle fait encore valoir que le contrat a respecté le corps huit qu’il s’agisse du point Pica de 2,8 mm qu’elle estime devoir être appliqué mais aussi du point Didot de 3 mm, qu’elle considère néanmoins comme ne répondant plus à la norme actuelle.
Elle soutient avoir valablement mis en ‘uvre la déchéance du terme par l’envoi d’une mise en demeure préalable et à titre subsidiaire, si la cour devait considérer que la déchéance du terme n’était pas acquise, elle rappelle que la clause résolutoire est toujours sous entendue dans les contrats synallagmatiques et que M. [X] a commis des manquements graves à son obligation de remboursement devant conduire au prononcé de la résolution judiciaire du contrat.
Elle s’estime bien fondée à obtenir la somme qu’elle réclame. Elle souligne que les sommes dues continuent à produire intérêts indépendamment de toute mise en demeure et insiste sur le fait qu’elle a le droit de prétendre à une indemnité de résiliation équivalant à 8 % du capital restant dû. Enfin elle considère que la capitalisation des intérêts doit être ordonnée dès lors qu’elle la sollicite en application de l’article 1154 du code civil et que l’article L. 311-16 dans sa version applicable au litige l’autorise expressément.
Elle s’oppose à tous délais au regard du temps déjà écoulé et demande à titre subsidiaire qu’ils soient assortis d’une clause de déchéance du terme.
Elle conclut à l’irrecevabilité de la demande de dommages et intérêts présentée par M. [X] pour défaut de conseil en assurance faisant valoir que cette demande est prescrite pour ne pas avoir été soulevée dans le délai de 5 ans imparti par l’article L. 110-4 du code de commerce applicable dans les rapports entre établissements de crédit et emprunteur et relève que M. [X] aurait dû faire cette demande avant le 30 novembre 2017.
A titre subsidiaire, elle indique produire la synthèse des garanties en assurance en sus de la notice d’assurance, soutient que ce document démontre qu’elle a bien informé M. [X] de la possibilité de souscrire cette garantie perte d’emploi et des conditions essentielles pour en bénéficier, afin qu’il puisse faire un choix éclairé en connaissance de cause.
Elle conteste avoir refusé un remboursement anticipé et relève que le fait de justifier de l’émission d’un chèque de banque de 9 271,31 euros par une banque tierce (le crédit Agricole) ne suffit pas à démontrer que M. [X] le lui aurait adressé. Elle souligne que ce montant a d’ailleurs été recrédité sur le compte Crédit Agricole de M. [X], ce sur quoi il ne s’explique pas et qu’en revanche elle a enregistré dans ses comptes le rejet d’un tel règlement revenu impayé, ce qui démontre que ce n’est pas elle qui aurait refusé un règlement anticipé de ce montant mais bien que la banque émettrice l’a remis en cause.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 10 juillet 2023, M. [X] demande à la cour :
– à titre principal de confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, en ce qu’il a débouté la société Sogefinancement de ses demandes en paiement de la somme de 8 491,56 euros au titre du solde du crédit, d’une indemnité de résiliation de 8 %, de capitalisation des intérêts, au titre de l’article 700 du code de procédure civile et en ce qu’il l’a condamnée aux dépens et d’infirmer le jugement en ce qu’il a déclaré la déchéance du terme régulière,
– à titre subsidiaire de dire que la société Sogefinancement ne justifie pas du montant de 16 928,38 euros figurant dans l’avenant du 21 décembre 2015, de la débouter en conséquence de sa demande de paiement au titre du solde du prêt,
– de dire que la déchéance du terme n’a pas été valablement prononcée, en conséquence de dire n’y avoir lieu à application de l’indemnité de résiliation de 8% sur le capital restant dû, du fait de l’absence de déchéance du terme régulière et subsidiairement du fait de l’absence de préjudice subi par la société Sogefinancement et de son caractère excessif et de dire que les intérêts ne peuvent commencer à courir qu’à compter du jugement, date de résiliation du prêt,
– de dire n’y avoir lieu à capitalisation des intérêts,
– de dire que la société Sogefinancement a engagé sa responsabilité en ne respectant pas ses obligations en ce qui concerne son devoir de conseil d’une assurance adaptée à sa situation et de la condamner en conséquence à lui payer la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts,
– de dire que la société Sogefinancement a engagé sa responsabilité en refusant le remboursement anticipé du prêt au mois de septembre 2020 et de la condamner en conséquence à lui payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,
– d’ordonner la compensation entre les sommes dues par la société Sogefinancement et les sommes qu’il pourrait rester devoir,
– à titre infiniment subsidiaire, de lui accorder les délais les plus larges pour toute somme qu’il pourrait rester devoir à la société Sogefinancement,
– en tout état de cause, de condamner la société Sogefinancement à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700-2° du code de procédure civile.
Il soutient que dès lors que la demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels est un moyen de défense, aucune prescription ne peut lui être opposée et souligne qu’aucune condamnation à rembourser le trop-perçu n’a été prononcée ni est sollicitée.
Il fait valoir que la société Sogefinancement ne justifie pas avoir procédé à la vérification auprès du FICP de manière régulière, qu’en effet soit il est fiché et son nom apparaît, soit il n’est pas fiché et il doit apparaître comme non fiché. Il souligne que le fait de mentionner sur un document de la banque trois personnes fichées sans aucun rapport avec lui ne peut constituer la preuve que la recherche le concernant a été faite correctement et qu’il appartenait à la banque de préciser à l’instar de ce qui est mentionné pour les noms figurant sur la fiche, sa ville de naissance. Il ajoute que sur le document daté du 30 novembre 2012, aucune information n’apparaît en ce qui concerne le résultat. Il relève que ni l’heure de la consultation, ni le motif de la demande à savoir un crédit à la consommation, ni la clef BDF ne figurent. Il considère que la banque devait en outre consulter le FICP avant la signature du contrat alors qu’elle l’a fait le jour même.
Il fait siens les motifs du premier juge qui a retenu que faute de résultat sur la recherche FICP, sa solvabilité aurait dû être vérifiée de manière plus minutieuse. Il relève que la banque n’a pas mentionné qu’il était marié et père de trois enfants.
Il fait état de ce que le rachat de crédit n’avait pas pour finalité de faciliter le remboursement de ses crédits en cours mais de rembourser ce qu’il devait déjà à la société Sogefinancement, souligne qu’il devait initialement 20 034,82 euros et qu’après le rachat il devait 33 591,48 euros, ce qui a aggravé son endettement. Il indique que la banque a une obligation de vérification de la solvabilité de l’emprunteur en lui demandant toute information supplémentaire lui permettant d’exercer son devoir de mise en garde, surtout en cas d’anomalie.
Il soutient encore que le contrat ne respecte pas le corps huit.
Il fait valoir que la société Sogefinancement ne justifie pas de son décompte au moment de la signature de l’avenant lequel a encore augmenté son endettement.
A titre subsidiaire, il considère que la déchéance du terme n’a pas été régulière, la mise en demeure datée du 16 novembre 2021 ne précisant pas à quoi correspond la somme réclamée et que sa division par le montant d’une échéance n’aboutit à aucun chiffre entier. Il ajoute que ce courrier ne comprend aucune date d’envoi, de présentation ou de réception. Il rappelle que l’assignation qui porte sur la totalité des sommes dues, ne peut être considérée comme une mise en demeure préalable à la déchéance du terme.
Il relève qu’en l’absence de déchéance du terme, l’indemnité de résiliation n’est pas due et à titre subsidiaire que la banque n’a pas subi de préjudice supérieur à 1 euro ayant déjà considérablement majoré le coût du crédit dans le cadre du réaménagement.
Il soutient que la capitalisation des intérêts est interdite par les dispositions de l’article L. 312-18 du code de la consommation et souligne que le contrat mentionne en son article 5.6 qu’aucune autre somme ne peut être réclamée par la banque.
Il prétend qu’aucune mention ne lui a permis dans l’offre de prêt de savoir s’il serait ou non garanti en cas de perte d’emploi, événement pourtant prévisible et qui s’est produit et soutient que la banque a manqué à son devoir de conseil compte tenu de sa situation particulière qui faisait que le moindre accident de la vie, dont le plus courant en ce qui concerne sa situation personnelle, la perte d’emploi, le placerait bien dans l’incapacité de faire face à ses obligations, ce que la banque ne pouvait ignorer s’agissant d’un regroupement de crédits. Il reproche donc à la banque de ne pas l’avoir éclairé sur l’adéquation des risques couverts à sa situation et ce d’autant que la notice mentionnait que le risque perte d’emploi était garanti et estime le préjudice par lui subi à 6 000 euros.
Il soutient que le preteur a commis une faute dans l’exécution du contrat quand il a voulu effectuer un remboursement anticipé. Il affirme avoir fait émettre un chèque de banque de 9 095,48 euros le 9 septembre 2020 pour procéder au remboursement anticipé de ce prêt, en payant les échéances restant dues à cette date, mais que la société Sogefinancement a refusé ce paiement, ce qui a conduit la banque émettrice à lui recréditer ce chèque le 24 septembre 2020 « suite chèque crédité SG pour remboursement ». Il ajoute qu’il a aussi procédé le 18 septembre 2020 à un virement pour un montant de 9 271,31 euros, sur lequel figuraient bien les références du prêt mais que ce versement a aussi été refusé par la société Sogefinancement qui a voulu qu’il continue à payer les échéances de 230,49 euros et ce sans explication. Il précise qu’il a été licencié le mois suivant et a ensuite rencontré de grandes difficultés pour rembourser. Il considère que la société Sogefinancement a donc manqué à son devoir de conseil et l’a placé dans une situation incertaine.
A titre très subsidiaire il demande des délais de paiement pour s’acquitter de toute somme qu’il resterait devoir à la société Sogefinancement et détaille sa situation financière.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 mai 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 25 juin 2024.
Il résulte de l’article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.
Sur la demande en paiement de la société Sogefinancement
Le présent litige est relatif à un crédit souscrit le 30 novembre 2012 soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu’il doit être fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.
Sur la forclusion
La recevabilité de l’action de la société Sogefinancement au regard de la forclusion, vérifiée par le premier juge qui a constaté que le premier impayé non régularisé datait du 10 août 2021, n’est pas remise en cause à hauteur d’appel. Le jugement doit être confirmé sur ce point.
Sur la déchéance du droit aux intérêts
La prescription du moyen
La société Sogefinancement soutient que le juge du fond ne pouvait soulever d’office le 19 septembre 2022 le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels et que M. [X] ne pouvait pas non plus soulever ce moyen par ses conclusions du 10 juillet 2023 au regard du délai de prescription quinquennale ayant commencé à courir à la date d’acceptation de l’offre et devant se terminer au 30 novembre 2017.
La prescription est sans effet sur l’invocation d’un moyen qui tend non pas à l’octroi d’un avantage, mais seulement à mettre en échec une prétention adverse.
C’est ainsi que, défendant à une action en paiement du solde d’un crédit à la consommation, l’emprunteur peut opposer tout moyen tendant à faire rejeter tout ou partie des prétentions du créancier par application d’une disposition du code de la consommation prévoyant la déchéance du droit aux intérêts, sans se voir opposer la prescription, pour autant qu’il n’entende pas en obtenir un autre avantage tel le remboursement d’intérêts indûment acquittés.
Dans le rôle qui lui est conféré tant par l’article L. 141-4 (devenu R. 632-1) du code de la consommation que par le droit européen, le juge peut relever d’office, sans être enfermé dans un quelconque délai, toute irrégularité qui heurte une disposition d’ordre public de ce code.
En l’espèce, le moyen soulevé d’office par le premier juge et repris par M. [X] et susceptible de priver le prêteur de son droit aux intérêts contractuels n’a pas pour effet de conférer à l’emprunteur un avantage autre qu’une minoration de la créance dont la société Sogefinancement poursuit le paiement.
Loin de constituer un remboursement des intérêts acquittés par le jeu d’une compensation qui supposerait une condamnation -qui n’est pas demandée- de l’organisme de crédit à payer une dette réciproque, ces moyens ne peuvent avoir pour seul effet que de modifier l’imputation des paiements faits par l’emprunteur.
En conséquence, il convient d’écarter la fin de non-recevoir soulevée par la société Sogefinancement.
La vérification de la solvabilité
L’article L. 311-9 (devenu L. 312-16) du code de la consommation impose au prêteur avant de conclure le contrat de crédit, de vérifier la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur.
Il résulte de l’article L. 311-48 al.2 (devenu L. 341-2) que lorsque le prêteur n’a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 311-8 et L. 311-9 (devenus L. 312-14 et L. 312-16), il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.
En l’espèce, il est constant que le contrat a été conclu dans l’agence du prêteur et qu’il est revêtu de la signature manuscrite de l’emprunteur de sorte que seules les dispositions de l’article L. 311-9 sont applicables et que le premier juge ne pouvait donc imposer au prêteur de communiquer copie des pièces listées à l’article L. 311-10 du même code à savoir tout justificatif du domicile, du revenu et de l’identité de l’emprunteur.
La société Sogefinancement produit devant la cour une fiche « charges ressources » qui mentionne les revenus de M. [X] à hauteur de 1 550 euros, son loyer à hauteur de 199 euros par mois, ses crédits à hauteur de 341 euros par mois en précisant qu’il s’agit de crédits souscrits auprès de la Société Générale, et la nouvelle mensualité de crédit.
M. [X] qui justifie d’un loyer bien supérieur en 2023 ne démontre pas que son loyer n’était pas de ce montant en 2012. Il ne vivait d’ailleurs pas à l’adresse qui est désormais la sienne à [Localité 3] mais à [Localité 7] ainsi qu’il résulte des pièces qu’il avait alors remises à la banque. Il doit en outre être relevé que la banque a pris soin de se faire communiquer les bulletins de salaire de M. [X] des mois d’août, septembre et octobre 2012 et son avis d’imposition de 2012 sur les revenus de 2011 qui corroborent lesdits revenus. M. [X] s’est marié au Mali, ses enfants y sont nés et il résulte des pièces qu’il produit lui-même que sa famille est restée au Mali et qu’il lui envoie de l’argent. Il ne résulte pas de son avis d’imposition de 2012 qu’il avait plus d’une part fiscale. Aucune déchéance du droit aux intérêts contractuels ne peut donc être prononcée pour le motif.
La date et le contenu de la consultation du FICP
L’article L. 311-9 (devenu L. 312-16) du code de la consommation impose au prêteur avant de conclure le contrat de crédit, de consulter le fichier prévu à l’article L. 333-4 (devenu L. 751-1), dans les conditions prévues par l’arrêté mentionné à l’article L. 333-5 (devenu L. 751-6) et ce à peine de déchéance du droit aux intérêts contractuels (article L. 311-48 al.2 devenu L. 341-2).
S’agissant de la date de conclusion du contrat, elle doit s’établir en application l’article L. 311-13 (devenu L. 312-24) du code de la consommation qui énonce que « Le contrat accepté par l’emprunteur ne devient parfait qu’à la double condition que ledit emprunteur n’ait pas usé de sa faculté de rétractation et que le prêteur ait fait connaître à l’emprunteur sa décision d’accorder le crédit, dans un délai de sept jours. L’agrément de la personne de l’emprunteur est réputé refusé si, à l’expiration de ce délai, la décision d’accorder le crédit n’a pas été portée à la connaissance de l’intéressé. L’agrément de la personne de l’emprunteur parvenu à sa connais-sance après l’expiration de ce délai reste néanmoins valable si celui-ci entend toujours bénéficier du crédit. La mise à disposition des fonds au-delà du délai de sept jours mentionné à l’article L. 311-14 (devenu L. 312-25) vaut agrément de l’emprunteur par le prêteur ».
En l’espèce, l’offre préalable a été acceptée le 30 novembre 2012 et il n’a pas été fait usage du délai de rétractation de l’article L. 311-12 (devenu L. 312-19). Aucun agrément n’a été formellement notifié mais la date de mise à disposition des fonds est le 10 décembre 2012. C’est donc à cette date que le contrat est devenu parfait et dès lors, la consultation du FICP le 30 novembre 2012 répond aux exigences de ces textes. Aucune déchéance du droit aux intérêts n’est donc encourue de ce chef.
Aucun formalisme n’est exigé quant à la justification de la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers par les organismes prêteurs, l’article 13 de l’arrêté du 26 octobre 2010 relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers prévoit, dans sa rédaction applicable au litige, qu’en application de l’article L. 333-5 (devenu L. 751-6) du code de la consommation, afin de pouvoir justifier qu’ils ont consulté le fichier, les établissements et organismes mentionnés à l’article 1er doivent, dans les cas de consultations aux fins mentionnées au I de l’article 2, conserver des preuves de cette consultation, de son motif et de son résultat, sur un support durable. En effet, la Banque de France ne délivrait pas à cette époque de récépissé de la consultation de son fichier.
Pour démontrer avoir satisfait à son obligation de consultation préalable du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, la société Sogefinancement communique un document qui comporte la mention « résultat interrogation fichage FICP », le motif qui résulte du numéro de contrat en bas similaire à celui de l’offre de crédit et du nom de M. [X] [J] « né à Mali le 01/01/1971 », sa qualité d’emprunteur, la date de l’interrogation, et mentionne le nom de trois homonymes qui sont fichés. Ceci correspond aux exigences du texte qui n’impose pas qu’une clef banque de France figure sur le document ni une heure de consultation, et il doit être considéré que le résultat est mentionné, le nom de l’intéressé n’étant pas ressorti. Le fait que son lieu de naissance n’ait pas été mentionné était seulement de nature à réduire le champ des recherches mais non à l’en écarter et ne peut être considéré comme ayant faussé ledit résultat.
Aucune déchéance du droit aux intérêts contractuels ne peut donc être prononcée pour ce motif.
La taille des caractères
L’article L. 311-18 (devenu L. 312-28) du code de la consommation dans sa version applicable au litige prévoit que le prêteur qui accorde un crédit sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant notamment aux conditions fixées par l’article R. 311-5 (devenu R. 312-10) du même code est déchu du droit aux intérêts en application de l’article L. 311-48 (devenu L. 341-4) du même code.
Aux termes de l’article R. 311-5 du code de la consommation dans sa version applicable au litige, le contrat de crédit prévu à l’article L. 311-18 est rédigé en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure à celle du corps huit.
La cour rappelle que le corps 8 correspond à 3 mm en points Didot. S’il est exact qu’aucune disposition légale ou réglementaire ne définit précisément le corps 8 ou n’exclut le point PICA, pour autant, lorsque le législateur français a légiféré le 24 mars 1978 dans le domaine du droit de la consommation, il s’est référé implicitement à la norme typographique française et donc au point Didot. Il ne peut être laissé aux seuls établissements bancaires le soin de déterminer quel point et quelle police permettrait de considérer que l’offre de prêt est suffisamment lisible alors qu’il s’agit d’appliquer des textes d’ordre public ayant trait à la protection des consommateurs. Le corps huit correspond à 3 mm en points Didot. Le point de référence à multiplier par 8 reste le point Didot (soit 0,375), d’où une police de caractères d’au moins trois millimètres (car : 0,375×8 = 3 mm). Par ailleurs, la taille de la police doit être considérée comme la hauteur maximale occupée par le dessin de tous les caractères, donc du bas des lettres descendantes au haut des lettres ascendantes y compris avec signes diacritiques), à laquelle s’ajoutent les talus de tête et de pied. Il suffit, pour s’assurer du respect de cette prescription réglementaire, de diviser la hauteur en millimètres d’un paragraphe (mesuré du haut des lettres montantes de la première ligne au bas des lettres descendantes de la dernière ligne) par le nombre de lignes qu’il contient. Le quotient ainsi obtenu doit être au moins égal à trois millimètres.
En l’espèce, cette vérification conduite sur plusieurs paragraphes du contrat montre que chaque ligne occupe plus de 3 mm.
Aucune déchéance n’est donc encourue de ce chef.
Les autres pièces
La banque produit en outre :
– le contrat de prêt avec un bordereau de rétractation,
– la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées,
– la notice d’assurance, et la fiche de synthèse des garanties.
Aucune déchéance du droit aux intérêts contractuels n’est donc encourue et le jugement doit donc être infirmé sur ce point.
Sur la déchéance du terme
Le contrat de crédit comporte une clause de déchéance du terme. La banque produit la mise en demeure préalable à la déchéance du terme datée du 16 novembre 2021 qui impartit à M. [X] un délai de 15 jours pour régler la somme de 1 005,77 sous quinze jours à peine de déchéance du terme et sa preuve d’envoi en recommandé à l’adresse de M. [X] lors de la souscription du contrat. Ceci correspond à 4 mensualités majorés des indemnités et des intérêts de retard. Elle a ensuite notifié le prononcé de la déchéance du terme par courrier recommandé du 24 décembre 2021. Ce faisant elle a laissé un délai suffisant à M. [X] pour s’exécuter et il doit être considéré qu’elle a de manière légitime prononcé cette déchéance du terme. Le jugement doit être confirmé sur ce point.
Sur le montant des sommes dues
En application de l’article L. 311-24 (devenu L. 312-39) du code de la consommation en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application des articles 1152 et 1231 (de l’article 1231-5 du code civil), est fixée suivant un barème déterminé par décret.
L’article D. 311-6 devenu D. 312-16 du même code dispose que le prêteur peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de défaillance. Aucune autre pénalité notamment de retard ne peut être exigée par le prêteur.
La société Sogefinancement produit en sus de l’offre de contrat de crédit qui comporte une clause de déchéance du terme, l’avenant de réaménagement, l’historique de prêt, les tableaux d’amortissement.
Elle justifie que l’avenant de réaménagement porte bien sur les sommes alors dues à savoir le capital restant dû au 31 janvier 2016, les trois mensualités impayées assurance incluses, les intérêts et les indemnités de retard.
La banque est donc fondée à obtenir paiement des sommes dues à la date de déchéance du terme et réclamées par la banque soit :
– 1 152,45 euros au titre des échéances impayées assurance comprise
– 6 713,87 euros au titre du capital restant dû
– 18,20 euros au titre des intérêts échus
soit un total de 7 884,52 euros majorée des intérêts au taux de 7,40 % à compter du 24 décembre 2021 sur la seule somme de 7 866,32 euros.
La capitalisation des intérêts, dit encore anatocisme, est prohibée concernant les crédits à la consommation, matière dans laquelle les sommes qui peuvent être réclamées sont strictement et limitativement énumérées. En effet, l’article L. 311-23 devenu L. 312-38 du code de la consommation rappelle qu’aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L. 311-24 et L. 311-25 devenus L. 312-39 et L. 312-40 ne peuvent être mis à la charge de l’emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles. Cette demande doit donc être rejetée, l’article L. 311-16 du code de la consommation invoqué ne concernant que les crédits renouvelables et n’étant pas applicable en l’espèce.
Elle est en outre fondée à obtenir une indemnité de résiliation de 8 % laquelle, sollicitée à hauteur de 607,04 euros, apparaît excessive d’autant que dans le cadre du réaménagement des indemnités de même nature ont déjà été prises en compte et doit être réduite à la somme de 1 euro et produire intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2021.
La cour condamne donc M. [X] à payer ces sommes à la société Sogefinancement.
Sur les demandes en paiement de M. [X]
Sur le devoir de mise en garde
M. [X] qui développe l’obligation de mise en garde de la banque à l’occasion de la demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels au titre de la vérification de la solvabilité ne réclame toutefois pas de dommages et intérêts à ce titre. Il ne les réclame que pour défaut d’information et de conseil en ce qui concerne l’assurance et le refus de remboursement anticipé. Il n’y a donc pas lieu de statuer spécifiquement sur ce point.
Sur le devoir de conseil en matière d’assurance
Cette demande ne saurait être prescrite, le point de départ du délai de prescription est en effet la date à laquelle le dommage s’est réalisé à savoir la date du premier impayé non régularisé comme correspondant à celle à laquelle le débiteur a réalisé qu’il ne pourrait honorer ses engagements faute d’assurance perte d’emploi. En l’espèce, ce premier impayé non régularisé date du 10 août 2021 et la demande a été faite le 10 juillet 2023.
Sur son bien-fondé, M. [X] justifie avoir subi une période de perte d’emploi du 15 octobre 2020 au 30 septembre 2021 qui a conduit à son impossibilité de rembourser le crédit tel que réaménagé. Il n’établit pas que les impayés à l’origine de réaménagement aient été dus à une perte d’emploi, le document de Pôle Emploi qu’il verse aux débats ne mentionnant pas cette période.
Il est constant que la banque qui propose à son client emprunteur d’adhérer à l’assurance de groupe qu’elle a souscrit afin de couvrir les risques pouvant affecter sa capacité à rembourser le prêt est tenue, d’une part, d’une obligation d’information sur l’objet même du contrat d’assurance, obligation qui s’exécute par la remise d’une notice définissant les garanties et les modalités de mise en ‘uvre de l’assurance (article L. 141-4 du code des assurances), et, d’autre part, depuis un arrêt d’assemblée plénière du 2 mars 2007 (n° 06-15.267) qu’elle est aussi tenue d’un devoir d’éclairer au titre duquel elle doit attirer l’attention de l’emprunteur sur l’adéquation des risques couverts à sa situation personnelle, notamment lorsque l’assurance proposée ne couvre pas un risque qui pourrait utilement, au regard de la situation de l’emprunteur, être couvert par une garantie complémentaire telle que la garantie perte d’emploi.
En l’espèce et contrairement à ce que soutient la banque, la fiche de synthèse qu’elle produit n’est pas une fiche de conseil en assurance. Si cette fiche de synthèse rappelle bien ce qu’est une assurance perte d’emploi, elle n’attire aucunement l’attention de l’emprunteur sur le fait que l’assurance groupe qu’elle propose ne garantit pas ce risque.
En effet la fiche de synthèse mentionne « Cette synthèse est destinée à répondre à vos besoins d’information et de conseil concernant l’assurance collective « Décès, Perte totale et irréversible d’autonomie, Incapacité et Invalidité » et Perte d’Emploi ; elle précise notamment le contenu des garanties proposées en fonction de la situation personnelle de chaque assuré, afin de vous permettre d’adhérer au(x) contrat(s) en toute connaissance de cause. » puis « la perte d’emploi est garantie si l’Assuré est salarié en contrat de travail à durée indéterminée et s’il a été licenciée. De plus, il doit bénéficier des revenus de remplacement prévu aux articles L. 5421-1 à L. 5427-10 du Code du travail. L’assureur prend en charge 100 % de la mensualité. Les prestations sont dues à compter de l’échéance suivant le premier jour indemnisé au titre du revenu de remplacement. La durée maximale de l’indemnisation est fonction de la durée du CDI à la date du sinistre ».
De son côté, le contrat précise en son article 5.2.2 « garantie perte d’emploi : le crédit peut être assorti d’une Garantie Perte d’Emploi dont les Conditions Générales contractuelles sont celles de la Notice d’information, qui a été remise à la (aux) personne(s) à assurer. Cette assurance est facultative. Son coût est mentionné sous l’encadré figurant au contrat. La cotisation est payable dans les conditions fixées à la Notice d’information ».
Pour autant sous l’encadré le coût de cette assurance qui viendrait donc s’ajouter à celui de l’assurance DIT mentionnée à l’article 5.2.1 du contrat n’est pas mentionnée et il n’est aucunement justifié que cette assurance perte d’emploi a effectivement été proposée à M. [X] ou qu’il ne remplissait pas les conditions pour en bénéficier. Il ne résulte pas non plus du contrat qu’il y a expressément renoncé.
Dès lors et comme il le soutient, il n’a pas été correctement informé et a pu croire qu’il était couvert. Il a perdu une chance de s’assurer contre ce risque qui s’est réalisé. Il y a donc lieu de faire droit à sa demande de dommages et intérêts à hauteur de la somme de 6 000 euros étant observé que la notice d’assurance prévoyait une période d’indemnisation de 360 jours et que M. [X] est resté moins d’un an au chômage, était indemnisé par pôle emploi et aurait donc pu bénéficier de la prise en charge des mensualités à l’époque où il a été défaillant et éviter ainsi la déchéance du terme, pour un montant supérieur à cette somme de sorte que le préjudice qu’il invoque est bien établi à hauteur du montant qu’il réclame.
Sur la faute de la banque dans l’exécution du contrat
M. [X] reproche encore à la banque d’avoir refusé le remboursement anticipé qu’il a tenté de réaliser.
L’article 5.4 du contrat permet à l’emprunteur de rembourser par anticipation le capital restant dû soit en totalité soit partiellement.
M. [X] justifie de l’émission d’un chèque de banque par le Crédit Agricole d’Ile-de-France de 9 095,48 euros qui a été débité de son compte ouvert auprès de ladite banque, puis du fait que ce chèque lui a été recrédité par le Crédit Agricole d’Ile-de-France avec la mention « suite chèque crédité SG PourRemboursement ». A la date d’émission du chèque de banque, son compte Crédit Agricole présentait un avoir suffisant. Il a ensuite tenté depuis ce même compte le Crédit Agricole d’Ile-de-France de faire un virement à la société Sogefinancement d’un montant légèrement supérieur lequel a toutefois échoué, le compte ne présentant plus un encours suffisant puisque le chèque était déjà débité.
Il démontre avoir ainsi tenté de rembourser la société Sogefinancement qui ne le lui a pas permis, ne respectant ainsi pas les clauses du contrat. Il y a donc lieu de faire droit à sa demande en paiement de la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts, son préjudice étant établi à hauteur de ce montant.
Sur la demande de compensation
Il convient de faire droit à la demande de compensation des créances réciproques présentée par M. [X].
Sur la demande de délais de paiement
Il n’y a pas lieu d’examiner cette demande présentée à titre très subsidiaire.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a condamné la société Sogefinancement aux dépens de première instance et a rejeté sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Au regard de ce qui précède, la banque doit être condamnée aux dépens d’appel et supporter la charge de ses frais irrépétibles. Il apparaît en outre équitable de lui faire supporter la charge des frais irrépétibles de M. [X] à hauteur de la somme de 2 000 euros.
LA COUR,
Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Infirme le jugement sauf en ce qu’il a déclaré la demande de la société Sogefinancement recevable, constaté la résiliation du contrat, condamné la société Sogefinancement aux dépens et rejeté sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Ecarte les fins de non-recevoir ;
Dit n’y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts contractuels ;
Condamne M. [J] [X] à payer à la société Sogefinancement les sommes de :
-7 884,52 euros majorée des intérêts au taux de 7,40 % à compter du 24 décembre 2021 sur la seule somme de 7 866,32 euros au titre du solde du prêt,
– un euro majorée des intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2021 au titre de l’indemnité légale de résiliation ;
Condamne la société Sogefinancement à payer à M. [J] [X] les sommes suivantes à titre de dommages et intérêts :
– 6 000 euros en réparation de son préjudice pour défaut de conseil en assurance,
– 3 000 euros en réparation de son préjudice pour refus de remboursement anticipé du crédit ;
Condamne la société Sogefinancement à payer à M. [J] [X] une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Ordonne la compensation des créances réciproques ;
Condamne la société Sogefinancement aux dépens d’appel ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
La greffière La présidente