Invalidité d’un engagement de cautionnement en raison du non-respect des exigences formelles prévues par la législation sur la consommation.

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Invalidité d’un engagement de cautionnement en raison du non-respect des exigences formelles prévues par la législation sur la consommation.

La SA Banque CIC Nord-Ouest a accordé un prêt de 30.500 euros à la SARL [Adresse 8] pour financer des travaux, garanti par la SAS Brasserie de [Localité 4] et cautionné par M. [D] [P]. Les remboursements ont cessé en janvier 2017, entraînant le paiement par la SAS Brasserie de 26.915,08 euros à la banque. La SARL a ensuite été placée en liquidation judiciaire, et la SAS Brasserie a déclaré sa créance. M. [D] [P] a été mis en demeure de rembourser et a été assigné en justice. Le tribunal a condamné M. [D] [P] à rembourser la somme due, mais il a interjeté appel. En appel, il a demandé l’annulation de son acte de cautionnement. La SAS Brasserie a demandé la confirmation du jugement initial et des dommages-intérêts pour résistance abusive. La cour d’appel a finalement annulé le cautionnement, débouté la SAS Brasserie de ses demandes et condamné celle-ci à verser 2.000 euros à M. [D] [P].

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

10 octobre 2024
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG
20/07540
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-3

ARRÊT AU FOND

DU 10 OCTOBRE 2024

N° 2024/115

Rôle N° RG 20/07540 – N° Portalis DBVB-V-B7E-BGEQG

[D] [P]

C/

S.A.S. LA BRASSERIE DE [Localité 4]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Thomas SALAUN

Me Hubert ROUSSEL

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de TARASCON en date du 29 Juin 2020 enregistrée au répertoire général sous le n°2019 004433.

APPELANT

Monsieur [D] [P]

né le [Date naissance 2] 1976 à [Localité 9]

demeurant [Adresse 3] – [Localité 1]

représenté par Me Thomas SALAUN de la SELARL CLERGERIE – SEMMEL – SALAUN – KAUTZMANN, avocat au barreau de TARASCON

INTIMÉE

S.A.S. BRASSERIE DE [Localité 4], agissant poursuites et diligences de son président,

dont le siège social est sis [Adresse 5] – [Localité 4]

représentée par Me Hubert ROUSSEL de l’ASSOCIATION ROUSSEL-CABAYE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Juin 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Françoise PETEL, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Philippe DELMOTTE, Président

Madame Françoise PETEL, Conseillère

Madame Gaëlle MARTIN, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Marielle JAMET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2024

Signé par Madame Françoise PETEL, Conseillère, en l’absence du Président empêché, et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Suivant contrat du 19 avril 2016, la SA Banque CIC Nord-Ouest a consenti à la SARL [Adresse 8] un prêt, destiné à financer des travaux dans un fonds de commerce à l’enseigne « [7] » à [Localité 6], d’un montant de 30.500 euros, au taux fixe de 5,5 % l’an, d’une durée de soixante mois, ledit crédit étant garanti à hauteur de 100 % par le cautionnement solidaire de la SAS Brasserie de [Localité 4].

Aux termes d’un acte sous seing privé du même jour, M. [D] [P] s’est porté caution solidaire des engagements de la SARL [Adresse 8] envers la SAS Brasserie de [Localité 4], dans la limite de la somme de 30.500 euros et pour une durée de sept ans.

Les échéances du prêt ayant cessé d’être payées à compter de janvier 2017, la SAS Brasserie de [Localité 4] a réglé à la SA Banque CIC Nord-Ouest la somme totale de 26.915,08 euros, selon quittance subrogative du 15 décembre 2017.

La SARL [Adresse 8] a fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire, convertie en liquidation judiciaire par jugement du 15 mai 2019 du tribunal de commerce d’Avignon.

La SAS Brasserie de [Localité 4] a déclaré sa créance au passif de ladite procédure collective.

Un certificat d’irrecouvrabilité lui a été délivré par le liquidateur judiciaire le 6 juin 2019.

Par courrier recommandé du 27 mai 2019, la SAS Brasserie de [Localité 4] a mis en demeure M. [D] [P] de lui rembourser la somme de 26.915,08 euros.

Selon exploit du 25 juillet 2019, elle l’a fait assigner en paiement devant le tribunal de commerce de Tarascon.

Par jugement du 29 juin 2020, ce tribunal a :

‘ déclaré la partie demanderesse bien fondée en ses prétentions principales, par conséquent y fait droit,

‘ condamné M. [D] [P] à payer à la SAS Brasserie de [Localité 4] :

– la somme de 26.915,08 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 27 mai 2019,

– la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

‘ ordonné la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil,

‘ débouté la SAS Brasserie de [Localité 4] de sa demande indemnitaire,

‘ ordonné l’exécution provisoire du jugement,

‘ débouté les parties de leurs conclusions plus amples ou contraires,

‘ dit que les dépens seront supportés par la partie défenderesse.

Suivant déclaration du 7 août 2020, M. [D] [P] a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées et déposées le 4 juillet 2022, auxquelles il est expressément référé en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, l’appelant demande à la cour de :

‘ réformer le jugement rendu par 1e tribunal de commerce de Tarascon le 29 juin 2020 en ce qu’il :

‘ l’a condamné à payer à la société Brasserie de [Localité 4] la somme de 26.915,08 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 27 mai 2019,

‘ l’a condamné à payer à la société Brasserie de [Localité 4] la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

‘ a ordonné la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil,

‘ a ordonné l’exécution provisoire du jugement,

statuant à nouveau,

‘ prononcer la nullité de l’acte de cautionnement du 19 avril 2016 souscrit par lui au bénéfice de la SAS Brasserie de [Localité 4],

en conséquence,

‘ débouter la société Brasserie de [Localité 4] de toutes ses demandes, fins et prétentions,

en tout état de cause,

‘ condamner la société Brasserie de [Localité 4] à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d’appel,

‘ condamner la société Brasserie de [Localité 4] aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions notifiées et déposées le 26 octobre 2022, auxquelles il est expressément référé en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la SAS Brasserie de [Localité 4] demande à la cour de :

‘ confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Tarascon le 29 juin 2020 en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il l’a déboutée de sa demande indemnitaire,

y ajoutant,

‘ condamner M. [P] à payer la somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée,

‘ vu l’article 700 du code de procédure civile, condamner M. [D] [P] à lui payer la somme de 2.000 euros,

‘ le condamner aux entiers frais et dépens de l’instance.

MOTIFS

L’appelant sollicite, au visa des dispositions des articles L.341-2 et L.341-3 du code de la consommation dans leur rédaction alors en vigueur, la nullité du cautionnement souscrit le 19 avril 2016.

Il fait valoir qu’en effet, le formalisme impératif de ces textes n’a pas été respecté, que, d’une part, aucune signature, ni aucun paraphe, ne figurent en-dessous des mentions manuscrites, que, d’autre part, l’acte comporte une référence erronée à la qualité de prêteur de l’intimée, laquelle est la caution de la SARL [Adresse 8], seule la SA Banque CIC Nord-Ouest ayant en 1’espèce la qualité de prêteur au sens des articles précités.

La SAS Brasserie de [Localité 4] réplique que les motifs allégués à l’appui d’un prétendu défaut de validité de l’acte de cautionnement ne pourront qu’être rejetés.

Elle soutient qu’en effet, la signature de M. [D] [P] apparaît clairement sur l’acte et son engagement ne peut être légitimement contesté, que, s’agissant des termes utilisés au sein de la mention manuscrite, il n’y a en l’espèce aucune confusion entre elle, caution solidaire, et l’organisme prêteur, que, si le terme « prêteur » du texte a été remplacé par la « Brasserie de [Localité 4] », cela montre la bonne compréhension par l’appelant de la portée de son engagement, puisqu’il s’est effectivement engagé envers elle et non à l’égard de la Banque CIC.

Mais, si l’argumentation de M. [D] [P] sur ce dernier point doit effectivement être écartée dans la mesure où la sous-caution s’engage, non envers l’établissement prêteur, mais envers la seule caution, en l’occurrence l’intimée, dont le nom figure donc nécessairement dans la mention manuscrite comme étant le créancier professionnel bénéficiaire du cautionnement sous seing privé souscrit le 19 avril 2016, il reste, en revanche, qu’il ne peut qu’être constaté que, en contradiction avec les dispositions d’ordre public des articles L.341-2 et L.341-3 du code de la consommation applicables en l’espèce, la mention manuscrite prescrite n’est suivie d’aucune signature, ni même paraphe, de la personne physique qui s’engage par ledit acte en qualité de caution.

Et le fait que figure préalablement dans l’acte sous une mention dactylographiée la signature de l’appelant ne pouvant, contrairement à ce que prétend la SAS Brasserie de [Localité 4], suppléer une telle carence, la nullité de l’engagement litigieux doit en conséquence, par application des textes précités, être prononcée.

L’intimée est donc déboutée de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de M. [D] [P].

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Prononce la nullité du cautionnement souscrit par M. [D] [P] le 19 avril 2016,

Déboute la SAS Brasserie de [Localité 4] de l’ensemble de ses demandes,

Condamne la SAS Brasserie de [Localité 4] à payer à M. [D] [P] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

La condamne aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER P°/LE PRESIDENT EMPECHE


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