Recevabilité et Validité des Actions en Paiement dans le Cadre de la Sous-Traitance et de la Subrogation

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Recevabilité et Validité des Actions en Paiement dans le Cadre de la Sous-Traitance et de la Subrogation

La société AMIA GUADELOUPE a consenti une subrogation de créance à NATIXIS FACTOR dans le cadre d’un contrat d’affacturage. Dans le cadre d’un projet de construction, la société TAV a attribué un lot à ACTI ANTILLES, qui a sous-traité à AMIA. Le marché principal a été résilié par TAV. AMIA a cédé une créance à BPCE FACTOR, qui a notifié cette cession à TAV, demandant de cesser tout paiement à AMIA. Deux factures ont été émises par AMIA à ACTI ANTILLES, stipulant que le paiement devait être fait à BPCE FACTOR. BPCE FACTOR a mis en demeure ACTI ANTILLES et TAV pour le paiement des factures, mais ACTI ANTILLES a refusé, arguant que les créances n’avaient pas été validées. BPCE FACTOR a alors assigné les deux sociétés en justice. Le tribunal a déclaré les demandes de BPCE FACTOR irrecevables, ce qui a conduit BPCE FACTOR à faire appel. L’appel a été jugé recevable, et le tribunal a infirmé le jugement précédent, condamnant ACTI ANTILLES et TAV à payer les sommes dues à BPCE FACTOR.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

13 septembre 2024
Cour d’appel de Basse-Terre
RG
22/01116
COUR D’APPEL DE BASSE-TERRE

2ème CHAMBRE CIVILE

ARRÊT N° 485 DU TREIZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE

AFFAIRE N° : RG 22/01116 – N° Portalis DBV7-V-B7G-DP76

Décision déférée à la cour : jugement du Tribunal Mixte de Commerce de Pointe-à-Pitre du 21 octobre 2022.

APPELANTE

S.A. BPCE FACTOR

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Maître Jamil HOUDA, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART – Toque 28 –

INTIMÉES

S.A.S. ACTI ANTILLES

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée par Maître Agnès BOURACHOT, avocate au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART – Toque 14 –

S.A.R.L. TRANSAT ANTILLES VOYAGES

[Adresse 4]

[Localité 3]

Non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 29 avril 2024, en audience publique, devant M. Thomas Habu Groud, conseiller, chargé du rapport, les parties ne s’y étant pas opposé.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Frank Robail, président de chambre, président,

Madame Annabelle Clédat, conseillère,

Monsieur Thomas Habu Groud, conseiller,

Les parties ont été avisées à l’issue des débats de ce que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 25 juillet 2024. Elles ont ensuite été informées de la prorogation de ce délibéré à ce jour, en raison de l’absence d’un greffier et de la surcharge des magistrats.

GREFFIER

Lors des débats : Mme Sonia Vicino, greffier

Lors du délibéré : Mme Valérie Souriant,greffier principal

ARRÊT :

– rendu par défaut, publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l’article 450 al 2 du CPC.

– Signé par M. Frank Robail, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier principal, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

******

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Par acte daté et signé du 27 septembre 2018, la société AMIA GUADELOUPE a consenti au profit de la société NATIXIS FACTOR une subrogation de créance permanente dans le cadre du contrat d’affacturage qui les liait ;

Dans la cadre d’une opération de construction d’un immeuble de commerces et de bureaux dénommé ‘LES PORTES DE LA MARINA’, menée par la S.A.R.L. TRANSAT ANTILLES VOYAGES, ci-après désignée ‘société TAV’, maître d’ouvrage, le lot n° 2 (ossature, serrurerie, bardage, étanchéité) a été attribué à la S.A.S. à associé unique ACTI ANTILLES, laquelle, suivant déclaration de sous-traintance en date du 17 janvier 2019 (pièce BPCE n° 10), a sous-traité la fourniture et la pose de rideaux métalliques à la société AMIA GUADELOUPE, ci-après désignée ‘société AMIA’, ce sous-traitant ayant été accepté par la société TAV par acte signé le 8 mars 2019 et notifié à la société AMIA le 11 mars suivant ;

Le marché principal conclu avec la société ACTI ANTILLES a été résilié à l’initiative de la société TAV le 7 août 2019 ;

Une quittance subrogative (pièce BPCE n°3) dite ‘QUITTANCE SUBROGATIVE PERMANENTE’, a été signée et donnée à la société NATIXIS FACTOR le 27 mars 2018 par la société AMIA GUADELOUPE, aux termes de laquelle elle lui demandait, ‘ dans le cadre de l’exécution du contrat d’affacturage qui (les) li(ait) (…) d’inscrire au crédit du compte ouvert à (son) nom dans les livres de NATIXIS FACTOR, lors de chaque remise, les créances objet de ce contrat ‘ ;

Suivant bordereau d » acte de cession résultant d’un marché public ‘ du 23 avril 2019, (pièce BPCE n° 11) la société AMIA a cédé à la société BPCE FACTOR ‘ à titre de garantie (…) la créance résultant du marché public ci-dessus désigné ‘, savoir ‘ les portes de la marina, construction d’un immeuble de commerces et de bureaux Lot n° 2 ossature-serrurerie-bardage-étanchéité ‘ en date du 8 mars 2019, le montant de ce marché y étant mentionné pour 44 222,02 euros hors TVA ; par lettre recommandée avec avis de réception (LRAR) du 24 avril 2019 (pièce BPCE n° 12), la S.A. BPCE FACTOR, au visa des articles L313-23 et L313-34 du code monétaire et financier, a notifié cette cession de créance à la société TAV et lui a demandé de cesser, à compter de cette notification, tout paiement au titre des créances cédées à la société AMIA, ajoutant que le règlement de sa dette devrait être effectué directement à son ordre ; par LRAR du 15 mai 2019 (pièce BPCE n° 13), la société BPCE FACTOR a réitéré cette notification au maître d’ouvrage, y ajoutant une demande faite à la société TAV de lui ‘ confirmer qu’il n’existe aucune cause de rejet de la présente cession’ et de l’ ‘informer de toute modification qui pourrait remettre en cause cette notification ‘ ;

Deux factures ont été émises par la société AMIA à destination de la société ACTI ANTILLES, son donneur d’ordre, en date respectivement du 11 avril 2019 (17 589,43 euros) et du 29 mai 2019 (22 431,50 euros), avec, pour chacune d’elle, la mention suivante :

Pour être libératoire, le règlement de cette facture doit être libellé et adressé directement à BPCE FACTOR (…) qui a acquis notre créance par voie de subrogation dans le cadre d’un contrat d’affacturage. BPCE FACTOR devra être avisée de toute réclamation. >> ;

Par LRAR du 27 novembre 2019 (pièce BPCE n° 21), réitérée par lettre d’avocat du 12 août 2020 (pièce BPCE n° 22), la BPCE FACTOR a mis en demeure la société ACTI ANTILLES de lui payer la somme totale de 40 020,93 euros TTC représentant le montant des factures du 11 avril 2019 à échéance du 11 mai 2019 (n° 0004), de 17 589,43 euros TTC et du 29 mai 2019 à échéance du 27 août 2019 (n° 1900012R), de 22 431,50 euros TTC ;

Par LRAR du 15 janvier 2020, le conseil de la société BPCE FACTOR a mis en demeure la société TRANSAT ANTILLES VOYAGES, maître d’ouvrage ayant agréé le sous-traitant de la société ACTI ANTILLES, savoir la société AMIA GUADELOUPE, de lui payer la même somme de 40 020,93 euros sur le fondement de son action directe contre le maître d’ouvrage ayant agréé le sous-traitant ;

Par LRAR en réponse du 14 avril 2020, le conseil de la société ACTI ANTILLES a notifié à la BPCE FACTOR son refus de payer cette somme, y expliquant notamment que les créances correspondantes n’avaient pas été validées par le maître d’ouvrage, ni acceptées en paiement direct et que le marché en cause n’était pas un marché public et avait été résilié le 7 août 2019;

***

Par acte d’huissier de justice du 16 novembre 2020, la société BPCE FACTOR a fait assigner les sociétés ACTI ANTILLES et TRANSAT ANTLLES VOYAGES devant le tribunal mixte de commerce de POINTE-A-PITRE à l’effet de les voir condamner, in solidum, et avec exécution provisoire, à lui payer les sommes suivantes :

– 40 020,93 euros en principal, outre intérêts légaux à compter du 15 janvier 2020 pour TRANSAT ANTILLES VOYAGES et à compter du 27 novembre 2019 pour ACTI ANTILLES, avec capitalisation des intérêts jusqu’à parfait paiement,

– les pénalités de retard au taux de refinancement de la BCE majoré de 10 points de pourcentage à compter du 15 janvier 2020 pour la société TVA et à compter du 27 novembre 2019 pour ACTI ANTILLES, avec capitalisation des intérêts jusqu’à parfait paiement,

– l’indemnité de recouvrement de 80 euros (40 x 2) au titre des deux factures impayées,

– 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens ;

Par jugement contradictoire du 21 octobre 2022, le tribunal :

– a déclaré les demandes de la société BPCE FACTOR irrecevables pour défaut de droit d’agir,

– a condamné cette dernière à payer à la société TAV et à la société ACTI ANTILLES, chacune, la somme de 1 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance ;

Par déclaration remise au greffe par voie électronique (RPVA) le 14 novembre 2022, la S.A. BPCE FACTOR a relevé appel de ce jugement, y intimant les sociétés ACTI ANTILLES et TAV et y fixant expressément son objet à chacune des dispositions de cette décision ;

Cet appel a été orienté à la mise en état et avis d’avoir à faire signifier sa déclaration d’appel aux intimés non encore constitués a été notifié par RPVA au conseil de l’appelante le 2 janvier 2023;

Par actes de commissaire de justice du 12 janvier 2023, chacun desdits intimés s’est vu signifier ladite déclaration ;

La société ACTI ANTILLES a constitué avocat par acte remis au greffe et notifié au conseil de l’appelant, par RPVA, le 19 janvier 2023 ;

La société TAV n’a pas constitué avocat ; la signification de la déclaration d’appel lui ayant été faite à l’étude du commissaire de justice instrumentaire, sans justificatif de sa remise à personne, le présent arrêt sera rendu par défaut ;

L’appelant a conclu au fond à trois reprises, par actes remis au greffe et notifiés par RPVA à l’avocat constitué de la société ACTI ANTILLES, respectivement les 6 février 2023, 29 août 2023 et 19 octobre 2023 ; ses premières conclusions ont été régulièrement signifiées à la société TAV, intimée non constituée, par acte de commissaire de justice du 14 février 2023 ;

La société ACTI ANTILLES, co-intimée constituée, a elle aussi conclu au fond à trois reprises, par actes remis au greffe et notifiés par même voie au conseil de l’appelant, respectivement les 21 avril 2023, 26 septembre 2023 et 29 novembre 2023 ;

La mise en état a été clôturée par ordonnance du 22 janvier 2024 et l’affaire fixée à l’audience du 29 avril 2024 ; à l’issue de cette audience, le délibéré a été annoncé pour le 25 juillet 2024 ; les parties ont ensuite été avisées de la prorogation de ce délibéré à ce jour ;

EXPOSE DES PRETENTIONS DES PARTIES

1°/ Par ses dernières conclusions, remises au greffe le 19 octobre 2023, la S.A. BPCE FACTOR, appelante, souhaite voir, au visa des articles 1346-1 à 1346-5 du code civilsur la subrogation conventionnelle et 12 de la loi du 31 décembre 1975 sur la sous-traitance :

– constater le droit d’agir de la société BPCE FACTOR, anciennement dénommée NATIXIS FACTOR, et la recevabilité de son action en qualité de créancier subrogé dans les droits de la société AMIA GUADELOUPE,

– constater l’inopposabilité à la société BPCE FACTOR, en qualité de créancier subrogé dans les droits de la société AMIA GUADELOUPE, des pénalités de retard invoquées par la société TAV en raison de leur absence de caractère certain, liquide et exigible au jour de la réception de la mise en jeu de l’action directe du 15 septembre 2020,

En conséquence

– déclarer recevable et bien fondé l’appel de la société BPCE FACTOR à l’encontre du jugement querellé,

– infirmer ce jugement en toutes ses dispositions,

– débouter la société ACTI ANTILLES de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Statuant à nouveau

– condamner la société TVA, in solidum avec la société ACTI ANTILLES, à payer à la société BPCE FACTOR les sommes suivantes :

** 40 020,93 euros, outre les intérêts légaux à compter du 15 janvier 2020 pour la société TRANSAT ANTILLES VOYAGES et à compter du 27 novembre 2019 pour la société ACTI ANTILLES, avec capitalisation jusqu’à parfait paiement,

** les pénalités de retard au taux de refinancement de la BCE majoré de 10 points de pourcentage à compter du 15 janvier 2020 pour la société TRANSAT ANTILLES VOYAGES et à compter du 27 novembre 2019 pour ACTI ANTILLES, avec capitalisation jusqu’à parfait paiement,

** l’indemnité de recouvrement de 80 euros (40 x 2) au titre des deux factures impayées,

– condamner solidairement la société TRANSAT ANTILLES VOYAGES avec la société ACTI ANTILLES à payer à la société BPCE FACTOR la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel ‘ qui comprendront, encas d’exécution forcée, les frais d’huissier, notamment ceux visés par l’article 444-32 de l’arrêté du 26 février 2016  » ;

Pour l’exposé des moyens proposés par la société appelante au soutien de ces fins, il est expressément référé à ses dernières conclusions ;

1°/ Par ses propres dernières conclusions, remises au greffe le 29 novembre 2023, la S.A.S. ACTI ANTILLES, intimée, conclut quant à elle aux fins de voir, au visa des articles 9, 32, 700 du code de procédure civile, 1315, 1346-1 et 1690 du code civil, R313-5, R313-16, L313-23 et L313-25 du code monétaire et financier :

IN LIMINE LITIS

– constater que la société BPCE FACTOR n’a pas qualité pour agir à son encontre,

En conséquence,

– déclarer les demandes de ladite société irrecevables,

– débouter la société BPCE FACTOR de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à son encontre,

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

A TITRE PRINCIPAL

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

– débouter la société BPCE FACTOR de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à son encontre,

A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE, si, par impossible, la juridiction devait juger les demandes de la société BPCE FACTOR recevables

– dire que l’éventuelle cession de créance intervenue entre cette société et la société AMIA GUADELOUPE lui est inopposable,

– constater que les conditions pour se prévaloir du paiement direct sont réunies et que l’action en paiement direct est bien opposable à la société TRANSAT ANTILLES VOYAGES,

– dire qu’en tout état de cause, le montant à mettre à sa charge ne saurait excéder la somme de 21 790,52 euros ;

EN TOUTE HYPOTHESE, condamner la société BPCE FACTOR à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens;

MOTIFS DE LA DECISION

I- Sur la recevabilité de l’appel

Attendu qu’en application de l’article 538 du code de procédure civile, le délai de recours par une voie ordinaire est d’un mois en matière contentieuse à compter de la signification de la décision querellée, outre les délais de distance de l’article 644, soit un mois de plus lorsque la juridiction saisie a son siège en GUADELOUPE et que l’appelant, domicilié dans tout autre territoire français, n’y demeure pas ;

Attendu qu’en l’espèce l’appelante a son siège à [Localité 5] et bénéficiait ainsi d’un délai de 2 mois pour relever appel de la décision querellée devant la cour ayant son siège en GUADELOUPE;

Attendu que la société BPC a relevé appel le 14 novembre 2022 d’un jugement rendu le 21 octobre 2022 ; qu’il y a donc lieu, sans avoir à rechercher si une quelconque signification de ladite décision était intervenue, (ce qui d’ailleurs n’est ni allégué ni, partant, justifié), de la déclarer recevable en cet appel ;

II- Sur les demandes à l’encontre de la société ACTI ANTILLES (entreprise sous-traitante)

Attendu qu’il est constant que par contrat non daté, mais signé des deux parties et dénommé ‘marché de travaux passé en procédure adaptée’ valant ‘ acte d’engagement et CCAP ‘, la société TRANSAT ANTILLES VOYAGE, maître d’ouvrage de l’opération de construction immobilière ‘LES PORTES DE LA MARINA’ (commerces et bureaux à la marina de [Localité 3]), a confié à la société ACTI ANTILLES le lot n° 2 ‘charpente-couverture-étanchéité-bardage-serrurerie’ ;

Attendu que si ce contrat n’est pas daté, la société ACTI ANTILLES n’est pas contestée lorsqu’elle indique, en page 19/23 de ses dernières écritures qu’il a ‘été signé le 6 juillet 2017 avec un OS (ordre de service) de démarrage des travaux le même jour ‘ ;

Attendu que, suivant déclaration de sous-traitance signée des deux parties le 17 janvier 2019, la société ACTI ANTILLES a confié à la société AMIA GUADELOUPE la fourniture et de la pose de rideaux métalliques, et ce moyennant le prix, hors TVA, de 44 222,02 euros ;

Attendu que l’action en paiement de la société BPCE FACTOR à l’encontre de la société ACTI ANTILLES est ici exclusivement fondée sur la subrogation qu’elle invoque dans les droits et actions de la société AMIA GUADELOUPE, subrogeante, à l’égard de son donneur d’ordre en vertu du contrat de sous-traitance sus-évoqué ; et que la société ACTI ANTILLES s’y oppose aux moyens qu’elle y serait irrecevable :

– pour défaut du droit d’agir, en l’absence de preuve d’une quelconque subrogation à son profit,

– pour manquement aux dispositions des articles R313-15 et R313-16 du code monétaire et financier relativement aux notifications visées aux articles L313-28 à L313-35 du même code,

– pour défaut de production de l’acte de cession du 23 avril 2019 en vertu duquel la BPCE FACTOR viendrait aux droits de la société AMIA GUADELOUPE,

– pour inefficience et défaut de valeur juridique de la quittance subrogative permanente au regard des exigences de l’article 1346-1 du code civil ;

Attendu que, subsidiairement, la société ACTI ANTILLES estime impossible de lui imputer le paiement d’une somme supérieure à 21 790,52 euros ;

1°/ Sur la fin de non-recevoir de la société ACTI ANTILLES

Attendu qu’aux termes de l’article 32 du code de procédure civile, est irrecevable toute prétention émise par une personne dépourvue du droit d’agir, lequel est défini par les articles 30 et 31 du même code par le droit, pour l’auteur d’une prétention, d’être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée, et ce s’il a un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une telle prétention, sous réserve des cas où la loi attribue ce droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre cette prétention ;

Attendu que l’article 1315 du code civil impose à celui qui réclame l’exécution d’une obligation de la prouver ;

Attendu que les demandes de la BPCE FACTOR à l’encontre de ACTI ANTILLES n’étant expressément fondées que sur sa subrogation dans les droits de la société AMIA GUADELOUPE, sous-traitante de cette dernière, à l’exclusion de la cession de créances professionnelles au sens des articles L313-23 et suivants et R313-15 du code monétaire et financier, d’une part, c’est sans portée aucune la concernant que la société ACTI ANTILLES invoque à la fois la non-production aux débats de l’acte de cession de créances du 23 avril 2019 (d’ailleurs à tort : cf pièce BPCE 11) et le non respect des dispositions sus-visées, et, d’autre part, seules sont applicables à ces demandes les dispositions des articles 1346-1 et suivants du code civil, aux termes desquelles :

– article 1346-1 :

** la subrogation conventionnelle, qui doit être expresse, s’opère à l’initiative du créancier lorsque celui-ci, recevant son paiement d’une tierce personne, la subroge dans ses droits contre le débiteur,

** elle doit être consentie en même temps que le paiement, à moins que, dans un acte antérieur, le subrogeant n’ait manifesté la volonté que son cocontractant lui soit subrogé lors du paiement, étant précisé que la concomitance de la subrogation et du paiement peut être prouvée par tous moyens,

– article 1346-5 :

** le débiteur peut invoquer la subrogation dès qu’il en a connaissance mais elle ne peut lui être opposée que si elle lui a été notifiée ou s’il en a pris acte,

** la subrogation est opposable aux tiers dès le paiement ;

Attendu qu’il en résulte que le factor qui revendique sa qualité de créancier subrogé dans les droits du créancier subrogeant, doit faire la preuve de l’intention de subroger manifestée par ce dernier et celle du paiement subrogatoire des créances par l’inscription de leur montant au crédit du compte courant du subrogeant ; qu’en revanche, le factor qui agit en paiement contre le débiteur cédé n’est pas tenu de produire le contrat d’affacturage qui n’intéresse que la société d’affacturage et son client, à l’exclusion du débiteur cédé ; que c’est donc encore à tort que ACTI ANTILLES excipe de la non-production par la BPCE FACTOR du contrat d’affacturage la liant à AMIA GUADELOUPE ;

Attendu qu’il résulte plus spécialement de l’article 1346-1 que la condition de concomitance de la subrogation au paiement, peut être remplie lorsque le subrogeant a manifesté expressément, fût-ce dans un document antérieur, sa volonté de subroger son contractant dans ses créances à l’instant même du paiement, si bien que c’est également à tort que la société ACTI ANTILLES demande que soit écartée des pièces probantes dont excipe la BPCE FACTOR, la quittance subrogative permanente du 27 mars 2018, laquelle fait à suffisance la preuve de l’intention de subroger de la société AMIA GUADELOUPE dans ses droits et actions à l’encontre de son donneur d’ordre ACTI ANTILLES, et celle du caractère exprès de cette subrogation ;

Attendu que la société ACTI ANTILLES conteste cependant, et principalement, que cette quittance subrogative, en ce qu’elle a été faite au profit, expressément y mentionné, de ‘NATIXIS FACTOR’, puisse bénéficier à la société BPCE FACTOR, dont elle prétend qu’il n’est pas démontré qu’elle serait le nouveau nom commercial de cette avant-dernière ;

Attendu que si ACTI ANTILLES n’avait pas soulevé en première instance le défaut du droit d’agir de la BPCE FACTOR au titre de cette quittance établie au bénéficie d’une société tenue pour tierce, NATIXIS FACTOR et si, par suite, les premiers juges, qui n’ont pas permis aux parties d’en débattre, l’ont retenu en violation du principe du contradictoire, d’une part, la seule sanction d’une telle violation ne pouvait être que la nullité du jugement que la BPCE FACTOR a fait choix de ne pas demander, et, d’autre part, toute fin de non-recevoir pouvant être soulevée en tout état de cause, la société ACTI ANTILLES est parfaitement recevable à la soulever pour la première fois en appel ;

Attendu que, dès lors que la BPCE FACTOR, demanderesse originelle, invoque une quittance subrogative qui n’est établie qu’au nom de NATIXIS FACTOR, à l’exclusion du sien propre, il lui appartient, en vertu de l’article 1315 du code civil sus-rappelé, de faire la preuve de l’identité, qu’elle invoque, des personnalités juridiques de ces deux entités ; qu’elle prétend à cet effet que cette identité ne résulte que d’un changement de dénomination de la société NATIXIS FACTOR, lequel serait intervenu par décision de son directeur général en date du 1er avril 2019 ; et que, pour preuve de ce simple changement de nom, elle verse aux débats :

– un extrait Kbis de la société NATIXIS FACTOR à jour au 11 octobre 2016, soit avant le changement de nom allégué, qui révèle notamment qu’elle avait été immatriculée le 31 août 1990 sous le n° 379 160 070 du RCS de PARIS, (pièce BPCE ‘b’),

– un extrait Kbis de la société BPCE FACTOR à jour au 2 avril 2019, soit après ledit changement prétendu, lequel révèle un numéro d’immatriculation du même registre identique à celui de NATIXIS FACTOR, soit le n° 379 160 070, (pièce BPCE ‘a’)

– la copie du procès-verbal de l’assemblée générale mixte de la société NATIXIS FACTOR du 25 mars 2019 (pièce BPCE ‘d’), aux termes de la troisième résolution duquel il était décidé de modifier la dénomination sociale de la société de ‘Natixis Factor’ en ‘BPCE Factor’,

– et la copie du procès-verbal des décisions du directeur général de la S.A. BPCE FACTOR du 1er avril 2019, aux termes duquel :

** il est rappelé que par contrat de cession et d’acquisition d’actions en date du 12 février 2019, NATIXIS S.A. ‘est convenue de vendre à BPCE S.A.’ et ‘BPCE d’acquérir auprès de NATIXIS S.A. (…) certaines filiales de Natixis S.A. relevant de son pôle services financiers spécialisés, dont ses activités de crédit-bail, d’affacturage, de crédit à la consommation, de cautions et garanties et certaines de ses activités de tenue de compte-conservation(…) ‘,

** le directeur général ‘ constate le changement de dénomination sociale en ‘BPCE Factor’ en date du 1er avril 2019  » ;

Attendu qu’il résulte de l’ensemble de ces éléments que la société NATIXIS FACTOR, qui était, avant la cession de février 2019, la société d’affacturage du groupe BPCE, a fini par être rachetée par la S.A. BPCE et qu’en suite de ce rachat, lui a été donné le nouveau nom commercial de ‘BPCE FACTOR’ ; qu’il y a donc identité de personnalité juridique entre ces deux sociétés NATIXIS FACTOR et BPCE FACTOR, la première étant devenue, par suite d’un rachat et surtout d’un changement de nom commercial, BPCE FACTOR ;

Attendu que le seul argument proposé par la société ACTI ANTILLES pour contester ce changement de nom, est tiré d’une capture d’écran du site internet ‘sociétés.com’ et l’extrait Kbis de la société BPCE FACTOR du 28 novembre 2023 (sa pièce 4), en ce qu’ils révèlent qu’elle existe depuis la date du 31 août 1990 (date de son immatriculation après sa création du 28 août précédent), soit la même date que l’immatriculation de NATIXIS FACTOR ; mais attendu qu’il n’y a là rien que de très logique et conforme aux révélations du Kbis de NATIXIS FACTOR et des procès-verbaux sus-visés, puisque si cette dernière a, comme ces pièces le démontrent, seulement changé de nom le 1er avril 2019 pour devenir la société BPCE FACTOR, la date de sa première immatriculation, soit le 31 août 1990, n’a pas pu varier, non plus que son numéro d’immatriculation, qui est, dans les deux cas, le même, soit 379160070, ces deux dénominations étant celles, successives, de la même personne morale ;

Attendu que c’est donc encore à tort que la société ACTI ANTILLES dénie à la société BPCE FACTOR sa parenté avec la société NATIXIS FACTOR et, partant, le bénéfice qu’elle peut tirer de la quittance subrogative permanente établie formellement le 27 mars 2018 au profit de cette dernière, ensuite devenue ‘BPCE FACTOR’ ; qu’il s’en déduit que c’est à bon droit, car en stricte conformité avec ladite quittance et le changement de nom intervenu depuis la date de cette dernière, que les deux factures litigieuses, des 11 avril 2019 (pour 17 589,43 euros) et 29 mai 2019 (pour 22431,50 euros), imposaient un paiement libératoire entre les seules mains de la société BPCE FACTOR, seule bénéficiaire de ladite quittance subrogative permanente ;

Attendu que le paiement subrogatoire de chacune des factures litigieuses est établi par les borderaux de remise ‘ valant avis de paiement subrogatoir ‘ des12 avril 2019 (pour la facture 17 589,43 euros) et 11 juin 2019 (pour la facture de 22 431,50 euros) (pièces BPCE n° 5 et 8), ainsi que par les deux relevés du compte courant de la société AMIA GUADELOUPE, créancier subrogeant, d’avril et juin 2019 (pièces BPCE 6 et 9), en ce qu’ils portent mention de l’inscription au crédit de ce compte des sommes en cause, soit aux dates des 12 avril 2019 et 11 juin 2019 ;

Attendu qu’il en résulte que la société BPCE FACTOR, en ce qu’elle s’est acquittée des sommes en litige entre les mains de la société AMIA GUADELOUPE qui l’avait préalablement et concomitamment subrogée dans ses droits à l’encontre de sa débitrice, ACTI ANTILLES, a bel et bien qualité et intérêt à agir, et donc le droit d’agir à l’encontre du débiteur cédé pour en recouvrer les montants ; qu’il échet en conséquence d’infirmer le jugement déféré en ce qu’il a dénié ce droit d’agir et déclaré les demandes de BPCE FACTOR à l’encontre de la société ACTI ANTILLES irrecevables ; et que, statuant à nouveau sur ce point, la cour déclarera ces demandes recevables ;

2°/ Sur le fond des sommes dues par ACTI ANTILLES à BPCE FACTOR, ès qualités de subrogée dans les droits et actions de la société AMIA GUADELOUPE

Attendu qu’en page 20 de ses conclusions, partie ‘discussion’, la société ACTI ANTILLES fonde la demande subsidiaire qu’elle formule en leur ‘dispositif’ (page 23) au titre de la limitation de sa condamnation à la somme de 21 790,52 euros, sur les considérations suivantes:

– les deux factures ‘ qui resteraient à payer ‘ avaient fait l’objet d’une transmission par elle-même au maître d’ouvrage pour un paiement direct,

– ‘ plus particulièrement ‘, un montant à payer de 22 431,50 euros à la société AMIA GUADELOUPE avait été validé par la maîtrise d’oeuvre,

– ‘ en tout état de cause ‘, elle ne conteste pas le travail réalisé par la société AMIA GUADELOUPE et ‘ le présent litige fait concrètement état de la défaillance de la maîtrise d’ouvrage quant à son obligation de régler un sous-traitant dont le travail n’est pas contesté ‘ ;

Attendu que de ces seules constatations, la société ACTI ANTILLES conclut : ‘c’est pourquoi, à titre infiniment subsidiaire et pour les besoins du raisonnement, si par impossible la juridiction de céans décidait d’entrer en voie de condamnation à (son) encontre, le montant mis à sa charge ne saurait en tout état de cause excéder la somme de 21 790,52 euros ‘, et ce sans à aucun moment exposer en quoi il en irait différemment de la somme supplémentairement réclamée de 17 589,43 euros, alors même que la BPCE verse aux débats, concernant cette somme :

– un bon de ‘ commande fournisseur ‘ du 31 mars 2019 à l’adresse de AMIA GUADELOUPE, relativement à la fourniture et la pose de rideaux métalliques pour le prix HT de 17 589,43 euros (pièce BPCE n°16),

– un ‘ bon de réception chantier ‘ portant, à la date du 20 mars 2019, la signature et le cachets des entreprises ACTI ANTILLES et AMIA GUADELOUPE, lequel porte sur la pose de 11 rideaux métalliques ‘ R+1 + RENFORT ‘ (pièce BPCE n°14),

– le décompte général provisoire du chantier LES PORTES DE LA MARINA établi le 31 juillet 2019 par le maître d’oeuvre de l’opération, qui contient, au chapitre de la répartition des paiements dus aux différentes entreprises, la mention de la somme de 40 020,93 euros au profit de la société AMIA GUADELOUPE, cette somme représentant très exactement l’addition des deux factures litigieuses, soit 17 589,43 euros + 22 431,50 euros (pièce BPCE n° 19) ;

Attendu que la société ACTI ANTILLES n’émet aucune observation quant à ces trois éléments; qu’elle n’en conteste donc ni la réalité existentielle ni la portée, de quoi il ressort que la preuve est faite d’une créance AMIA GUADELOUPE du montant réclamé, soit 40 020,93 euros ; que, par ailleurs, ACTI ANTILLES ne prétend ni ne démontre, a fortiori, que tout ou partie de cette somme aurait été payée, alors que la preuve de tout paiement libératoire lui incombe ; et que, subséquemment, compte tenu de la subrogation ci-avant établie au profit de la BPCE FACTOR, il y a lieu de condamner la société ACTI ANTILLES à lui payer la somme de 40 020,93 euros, laquelle portera intérêts de retard au taux légal à compter de la mise en demeure qui lui en fut faite incontestablement par LRAR dûment produite (pièce BPCE n°21) du 27 novembre 2019;

Attendu qu’en effet, cette mise en demeure valait, pour la débitrice ainsi informée de l’absence de paiement direct par le maître d’ouvrage, interpellation suffisante d’avoir à s’acquitter de sa dette de donneur d’ordre au profit de son sous-traitant ;

Attendu qu’en accord avec la demande expresse en ce sens de la société BPCE FACTOR, la capitalisation de ces intérêts sera ordonnée en stricte conformité avec les dispositions de l’article 1343-2 du code civil, et ce, en l’absence de précision de la demande à cet égard, à compter du seul présent arrêt ;

Attendu qu’aux termes de l’article L441-10, I et II du code de commerce, des pénalités de retard et une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement (fixée à 40 euros par décret d’application de ce texte) sont dus de plein droit par le débiteur au créancier impayé après l’expiration d’un délai de 30 ou 60 jours à compter de l’exécution des prestations ou de la réception des marchandises ; que la BPCE FACTOR, ès qualités de subrogée dans les droits et actions de AMIA GUADELOUPE, est donc fondée :

– en sa réclamation au titre de ces pénalités de retard, sur la somme de 40 020,93 euros, au taux de refinancement de la banque centrale européenne majoré de 10 points de pourcentage à compter de la mise en demeure du 27 novembre 2019, cette mise en demeure dépassant de plus de 60 jours l’exécution des prestations facturées,

– en sa demande au titre de l’indemnité forfaitaire de 40 euros, mais ce dans la limite de cette somme, à l’exclusion des 80 euros qu’elle réclame, puisque si deux factures sont en cause, une seule réclamation et une seule mise en demeure sont ici justifiées pour ces deux factures ;

Attendu que la société ACTI ANTILLES sera donc supplémentairement condamnée au paiement de ces indemnité forfaitaire et pénalités allouées dans les conditions de l’article L441-10 sus-visé;

III- Sur les demandes à l’encontre de la société TAV (maître d’ouvrage)

Attendu que lorsque l’intimé ne comparaît pas et qu’il est néanmoins statué sur le fond des demandes de l’appelant, l’article 472 du code de procédure civile impose à la cour de ne faire droit aux demandes qui sont dirigées contre lui que si elle les estime régulières, recevables et bien fondées ; qu’il n’appartient cependant pas à la cour de relever d’office des moyens de pur fait qui n’auraient pas été intégrés aux débats ;

Attendu que la société BPCE FACTOR a été jugée ci-avant recevable, au titre du droit d’agir, en qualité de subrogée dans les droits et actions de la société AMIA GUADELOUPE, en ses demandes relatives aux deux factures litigieuses à l’encontre de la société ACTI ANTILLES;

Attendu que, pour les mêmes motifs, elle est recevable, au plan du droit d’agir, en ses demandes identiques à l’encontre du maître d’ouvrage en la personne de la société TAV ; que, partant, le jugement déféré sera encore infirmé, mais cette fois en ce qu’il a déclaré irrecevables les demandes de BPCE FACTOR à l’encontre de la société TAV ;

Attendu que, sur le fond, la cour constate que la société BPCE FACTOR agit contre cette dernière sur le double fondement de l’action directe du sous-traitant contre le maître d’ouvrage et de la cession à son profit du marché conclu par la société AMIA GUADELOUPE, sa cliente au titre d’un contrat d’affacturage, avec la société ACTI ANTILLES, suivant acte du 23 avril 2019 (pièce BPCE n° 11) ;

Or, attendu que, sans qu’il soit besoin d’examiner ce second fondement, il résulte des dispositions de l’article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, que le sous-traitant a une action directe contre le maître de l’ouvrage si l’entrepreneur principal ne paie pas les sommes qui sont dues en vertu du contrat de sous-traitance dans le délai d’un mois après en avoir été mis en demeure par un acte dont une est adressée au maître de l’ouvrage; et que cette action directe est subordonnée à l’acceptation du sous-traitant et à l’agrément des conditions de paiement par le maître d’ouvrage ;

Attendu qu’il appert des mentions du jugement déféré en ce qui est de l’exposé des conclusions de la société TAV, alors comparante, devant les premiers juges, qu’elle y reconnaissait expressément avoir agréé la société AMIA GUADELOUPE en qualité de sous-traitante de l’entreprise ACTI ANTILLES avec laquelle elle avait conclu un contrat d’entreprise principal pour le lot n°2 de son programme constructif, et qu’elle n’y contestait que l’acceptation des conditions de paiement de cette sous-traitance, condition sine qua non du bien fondé de l’action directe dirigée contre elle ;

Or, attendu que cet agrément ainsi expressément reconnu résulte en réalité d’une acceptation expressément portée par la société TAV en dernière page de la déclaration de sous-traitance du 17 janvier 2019, sous le cachet de son entreprise et la signature d’un sien représentant datés du 8 mars 2019 à [Localité 3] ; que la mention de cette acceptation expresse est libellée en ces termes : ‘le représentant de l’acheteur, compétent pour signer le marché public, accepte le sous-traitant, autorise la sous-traitance des activités de traitement de données à caractère personnel visées dans la présente déclaration et agrée ses conditions de paiement ‘, de quoi il ressort, avec la force de termes clairs et précis qui ne laissent place à aucune contestation valable, que le maître d’ouvrage a non seulement agréé le sous-traitant de son entreprise principale, mais en a accepté les conditions de paiement fixées en la déclaration de sous-traitance ;

Attendu qu’il résulte des éléments de la cause que la société BPCE FACTOR a pleinement respecté, à l’égard de la société TAV, les conditions formelles de mise en oeuvre de son action directe en qualité de subrogée dans les droits du sous-traitant AMIA GUADELOUPE, savoir :

– une mise en demeure de payer préalablement adressée à l’entrepreneur principal, donneur d’ordre, ACTI ANTILLES, soit le 12 août 2020 (pièce BPCE n° 22),

– une mise en demeure de payer adressée à la société TAV sur le fondement expressément visé de l’action directe du sous-traitant, par LRAR du 15 septembre 2020 (pièce BPCE n° 25), soit après l’expiration du délai d’un mois imposé par l’alinéa 1 de l’article 12 de la loi de 1975 sus-visé, avec, y annexée, la copie de la mise en demeure adressée à l’entrepreneur principal le 12 août précédent ;

Attendu que, pas plus que la société ACTI ANTILLES, la société TAV, qui ne comparaît pas en cause d’appel, ne prétend-elle avoir réglé tout ou partie de la somme litigieuse, laquelle, indépendamment de la mise en demeure conforme aux exigences de l’article 12 de la loi de 1975, lui avait été réclamée par une première mise en demeure du 15 janvier 2020 ;

Attendu qu’il convient dès lors de la condamner à payer à la société BPCE FACTOR, sur le double fondement de la subrogation sus-évoquée et de l’action directe du sous-traitant contre le maître d’ouvrage, in solidum avec la société ACTI ANTILLES, ci-avant déjà condamnée au même titre, la somme de 40 020,93 euros représentant le montant des factures impayées, laquelle somme ne portera cependant intérêts de retard au taux légal qu’à compter de la mise en demeure de payer qui lui en fut faite incontestablement par LRAR dûment produite (pièce BPCE n°25), en date du 15 septembre 2020, et non point à compter de celle du 15 janvier 2020 puisque n’y était pas annexée la mise en demeure préalable à l’entreprise principale exigée par la loi de 1975 en son article 12 ; que ces intérêts pourront être capitalisés annuellement dans les mêmes conditions que ci-avant fixées pour ACTI ANTILLES ;

Attendu qu’en revanche, la société BPCE ne fait pas la preuve, qui lui incombe, de ce que les pénalités et indemnité forfaitaires de l’article L441-10 I et II du code de commerce seraient opposables au maître d’ouvrage sur le fondement de l’action directe engagée à son encontre ; qu’il résulte à l’inverse des dispositions de cet article que ces pénalités ne s’appliquent qu’aux débiteurs directs des facturations en cause dont la date de paiement, soit légale (à 30 jours) soit conventionnelle (à 60 jours maximum) aurait été dépassé, à l’exclusion du maître d’ouvrage qui, sur la base d’une action dite ‘directe’ du sous-traitant, n’en est pas le débiteur immédiat et ne peut être fautif d’un retard de paiement que s’il est expressément mis en demeure de payer dans les conditions formelles de l’article 12 de la loi de 1975 sur la sous-traitance ; qu’il échet par suite de débouter la société BPCE FACTOR des susdites demandes à l’encontre de la société TAV ;

IV- Sur les dépens et frais irrépétibles

Attendu que, succombant pour l’essentiel en appel, les sociétés intimées, ACTI ANTILLES et TAV, devront supporter in solidum (ainsi que requis), les entiers dépens de première instance et d’appel, si bien que sur les premiers de ces dépens le jugement déféré sera encore infirmé ;

Attendu que ce jugement sera subséquemment infirmé du chef des frais irrépétibles de première instance alloués à ces deux sociétés aujourd’hui condamnées aux dépens ; et que, statuant à nouveau sur ce point, elles seront déboutées de leurs demandes originelles à ce titre ;

Attendu qu’il n’y a pas lieu d’intégrer dans ces dépens d’hypothétiques frais de recouvrement forcés, dont la charge est de toute façon règlementée distinctement ;

Attendu que des considérations tenant à l’équité justifient enfin de condamner in solidum les sociétés ACTI ANTILLES et TAV à indemniser la société BPCE FACTOR de ses frais irrépétibles d’appel à hauteur de la somme de 6 000 euros ;

Attendu que la société ACTI ANTILLES sera corrélativement déboutée de sa propre demande au titre de ses frais irrépétibles d’appel ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

– Dit recevable l’appel formé par la S.A. BPCE FACTOR à l’encontre du jugement du tribunal mixte de commerce de POINTE-A-PITRE en date du 21 octobre 2022,

– Infirme ce jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

– Dit recevable l’action et les demandes formées par la société BPCE FACTOR à l’encontre des sociétés ACTI ANTILLES et TRANSAT ANTILLES VOYAGES en qualité de subrogée dans les droits et actions de la société AMIA GUADELOUPE,

– Condamne la S.A.R.L. TRANSAT ANTILLES VOYAGES et la S.A.S. ACTI ANTILLES, in solidum, à payer à la S.A. BPCE FACTOR la somme de 40 020,93 euros au titre des factures impayées, avec intérêts de retard au taux légal à compter du 15 septembre 2020 pour la société TRANSAT ANTILLES VOYAGES et à compter du 27 novembre 2019 pour la société ACTI ANTILLES,

– Ordonne la capitalisation annuelle de ces intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil, à compter du présent arrêt,

– Condamne la S.A.S. ACTI ANTILLES à payer à la S.A. BPCE FACTOR les sommes suivantes:

** les pénalités de retard sur la somme de 40 020,93 euros au taux de refinancement de la banque centrale européenne majoré de 10 points de pourcentage, à compter du 27 novembre 2019, et ce dans les conditions de l’article L441-10-II du code de commerce,

** 40 euros au titre de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de l’article L441-10-II in fine du code de commerce,

– Déboute la société BPCE FACTOR du surplus de ses demandes à l’encontre de la société TRANSAT ANTILLES VOYAGES, ainsi que de sa demande au titre de l’inclusions aux dépens d’appel des éventuels frais de recouvrement forcé,

– Déboute la société ACTI ANTILLES de sa demande au titre de ses frais irrépétibles d’appel,

– Condamne la S.A.S. ACTI ANTILLES et la S.A.R.L. TRANSAT ANTILLES VOYAGES, in solidum, à payer à la S.A. BPCE FACTOR une somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Le greffier, Le président,


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