La SARL Constructions métalliques Bosche (CMB) a été engagée par la SAS Business Invest pour réaliser des structures métalliques sur plusieurs chantiers entre 2018 et 2019. Suite à des différends concernant le paiement de factures, CMB a assigné Business Invest devant le tribunal de commerce de Bordeaux en septembre 2020. Business Invest a contesté les demandes de CMB, arguant que les travaux n’étaient pas achevés et avaient fait l’objet de réserves. Le tribunal a rendu un jugement en avril 2022, condamnant Business Invest à payer à CMB une somme totale de 94.478,05 euros, tout en déboutant Business Invest de ses demandes reconventionnelles. Business Invest a interjeté appel de ce jugement. En avril 2024, Business Invest a été placée en redressement judiciaire, et CMB a déclaré sa créance. En mai 2024, CMB a assigné le mandataire et l’administrateur judiciaires de Business Invest. Les deux parties ont formulé des demandes contradictoires devant la cour. En juin 2024, la cour a confirmé le jugement de première instance, précisant que les condamnations seraient inscrites au passif du redressement judiciaire de Business Invest, tout en rejetant les autres demandes.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 10 SEPTEMBRE 2024
N° RG 22/02396 – N° Portalis DBVJ-V-B7G-MWQU
S.A.R.L. BUSINESS INVEST
c/
S.A.R.L. CONSTRUCTIONS METALLIQUES BOSCHE
S.E.L.A.R.L. PHILAE
S.E.L.A.R.L. FHB
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 avril 2022 (R.G. 2020F00926) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 17 mai 2022
APPELANTE :
S.A.R.L. BUSINESS INVEST, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]
Représentée par Maître Valérie MONPLAISIR, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
S.A.R.L. CONSTRUCTIONS METALLIQUES BOSCHE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 6]
Représentée par Maître Julie NEDELEC de la SELARL CMC AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Virgile RENAUDIE, avocat au barreau de BRIVE
INTERVENANTES :
S.E.L.A.R.L. PHILAE, es qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SAS BUSINESS INVEST, domiciliée en cette qualité [Adresse 3]
S.E.L.A.R.L. FHB, en qualité d’administrateur judiciaire de la SAS BUSINESS INVEST, domiciliée en cette qualité [Adresse 2]
Représentées par Maître Valérie MONPLAISIR, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 11 juin 2024 en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,
Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,
Madame Sophie MASSON, Conseiller,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
EXPOSE DU LITIGE
La SARL Constructions métalliques Bosche (ci-après CMB) est spécialisée dans la réalisation de structures métalliques pour la construction de bâtiments.
La SAS Business invest, à l’enseigne Hexagone (anciennement dénommée SARL Business invest) est spécialisée dans les études techniques et intervient en tant que contractant général dans des opérations de construction.
Au cours des années 2018 et 2019, la société Business invest a confié la réalisation du lot ‘structures métalliques’ sur plusieurs de ses chantiers à la société CMB, en qualité de sous-traitante.
A la suite de différents survenus entre les parties, concernant le paiement de plusieurs factures, la société CMB a fait assigner la société Business invest devant le tribunal de commerce de Bordeaux par acte extra judiciaire du 22 septembre 2020.
Devant le tribunal, la société Business Invest a conclu au débouté, en soutenant que la société CMB ne justifiait pas de la réalisation des travaux, ni de leur état d’avancement, et qu’en réalité, les prestations avaient fait l’objet de nombreuses réserves et n’étaient pas achevées.
Elle a formé une demande reconventionnelle tendant à la condamnation de la société CMB à lui communiquer sous astreinte les dossiers d’ouvrages exécutés sur les différents chantiers litigieux, et en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive.
Subsidiairement elle a sollicité de la désignation d’un expert judiciaire sur chaque chantier litigieux, afin de déterminer l’état des prestations réalisées par la société constructions métalliques Bosche.
Par jugement rendu le 15 avril 2022, le tribunal de commerce de Bordeaux a :
– condamné la société Business invest SARL à régler à la société Constructions métalliques Bosche SARL la somme de 77.767,35 euros (soixante dix sept mille sept cent soixante sept euros trente cinq centimes), augmentée de la somme de 16.710,70 euros (seize mille sept cent dix euros soixante dix centimes), le tout assorti des intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2020.
– débouté la société Constructions métalliques Bosche SARL du surplus de ses demandes.
– débouté la société Business invest SARL de l’ensemble de ses demandes.
– condamné la société Business invest SARL à régler à la société Constructions métalliques Bosche SARL la somme de 3.000,00 euros (trois mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– condamné la société Business invest SARL aux entiers dépens de l’instance.
Le tribunal a considéré que la société Business Invest avait refusé de payer certaines factures en raison des anomalies constatées, sans pour autant fournir de chiffrage, de nature à expliquer la retenue effectuée au titre des factures non réglées et qu’elle ne justifiait que d’un état non contractuel des réserves.
Par déclaration en date du 17 mai 2022, la société Business invert a relevé appel de ce jugement en ses chefs expressément critiqués intimant la société Constructions métalliques Bosche.
Par jugement du 10 avril 2024 prononcé par le tribunal de commerce de Bordeaux, publiée au BODACC le 21 avril 2024, la société Business Invest a été placée en redressement judiciaire.
La société CMB a déclaré sa créance par courrier du 22 avril 2024.
Par exploit des 17 et 21 mai 2024, la société Constructions métalliques Bosche a assigné en intervention forcée la SELARL Philae, mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société Business invest, et la SELARL FHBX, administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société Business invest.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par conclusions notifiées par RPVA, le 10 juin 2024, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Business Invest, la SELARL FHB et la SELARL Philae agissant respectivement en qualité d’administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire de la société Business Invest, demandent à la cour de :
Vu les dispositions de l’article 1103 du code civil,
Vu les dispositions de l’article 1219 du code civil
Vu les dispositions de l’article 1799- 1 du code civil,
Vu les articles 6, 8 et 9 du code de procédure civile,
Vu l’appel interjeté par la société Business invest à l’encontre du jugement rendu le 15 avril 2022 par le tribunal de commerce de Bordeaux,
– juger la société Business invest recevable et bien fondée en son appel et en ses demandes.
Réformer le jugement déféré en ce qu’il a :
– condamné la société Business invest à régler à la société Constructions métalliques Bosche SARL, la somme de 77.767,35 euros augmentée de la somme de 16.710,70 euros assorti des intérêts au taux légal à compter du 22 Septembre 2020
– débouté la société Business invest de l’ensemble de ses demandes.
– condamné la société Business invest à régler à la société Constructions métalliques Bosche la somme de 3.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– condamné la société Business invest aux entiers dépens de l’instance.
Et statuant à nouveau :
– débouter la société Constructions métalliques Bosche de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– condamner la société Constructions métalliques Bosche à communiquer sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir les dossiers d’ouvrages exécutés sur les différents chantiers litigieux à la société Business invest,
– condamner la société Constructions métalliques Bosche à payer à la société Business invest, à la SELARL FHB et la SELARL Philae, agissant respectivement en qualité d’administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire de la société Business Invest, une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
– A titre subsidiaire, ordonner une mesure d’expertise judiciaire sur chaque chantier litigieux afin de déterminer l’état des prestations réalisées par la société Constructions métalliques Bosche au regard de ses demandes de paiement, ce avec la mission habituelle en pareille matière,
– dire et juger que les frais d’expertise seront avancés par la demanderesse à l’action en paiement, soit par la société la société Constructions métalliques Bosche.
– condamner la société Constructions métalliques Bosche à payer à la société Business invest une somme de 8.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Par conclusions notifiées par RPVA, le 10 juin 2024, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Constructions métalliques Bosche demande à la cour:
Rejetant toutes conclusions contraires,
Au visa de l’article 1231-1 et s du code civil, 331 du code de procédure civile, L.622-22 du code de commerce,
-d’ordonner la jonction de la présente procédure avec la procédure en cours enregistrée sous le numéro 22/02 396 portée devant la quatrième chambre commerciale;
– de confirmer le jugement entrepris purement et simplement en ce qu’il a condamné la SARL Business invest (Hexagone) :
– à régler à la SARLU CMB les sommes suivantes :
– au titre des retenues de garantie : 16.710,70 euros
– au titre des factures impayées : 77.767, 35 euros décomposé comme suit:
‘ marché d'[Localité 11] : 467,10 euros
‘ marché de [Localité 7] : 26.858,35 euros outre application d’intérêts moratoires à compter de la date du 25 novembre 2019, en application du taux d’intérêt légal au jour du paiement à intervenir.
‘ marché de [Localité 8] : 9.838,70 euros HT outre application d’intérêts moratoires à compter de la date du 30 novembre 2018, en application du taux d’intérêt légal au jour du paiement à intervenir
‘ marché de [Localité 4] : 40.603,20 euros décomposée comme suit :
o 17.488,74 euros outre application d’intérêts moratoires à compter de la date du 1er mars 2018, en application du taux d’intérêt légal au jour du paiement à intervenir,
o 23.144,46 euros outre application d’intérêts moratoires à compter de la date du 19 mai 2019, en application du taux d’intérêt légal au jour du paiement à intervenir
‘ au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 3000 euros.
– débouter la SARLU Business invest (Hexagone) de sa demande de dommages et intérêts d’un montant de 5000 euros;
– débouter la SARLU Business invest de sa demande d’expertise judiciaire. Subsidiairement, la prononcer aux frais avancés de Business invest;
– débouter la SARLU Business Invest (Hexagone) de sa demande de communiquer sous astreinte de 200 euros par jour de retard les DOE et prendre acte que toutes les pièces pouvant être communiquées l’ont été (cf bordereau de pièces)
Ajoutant au jugement de première instance :
– dire le jugement commun à la société Business Invest, la SELARL Philae et la SELARL FHB,
– ordonner l’inscription de la créance de la SARL CMB au passif de la procédure collective de la société Business Invest, au principal et accessoires, quittances et deniers,
– la condamner à verser 6.000 euros au titre de l’article 700 CPC
– la condamner aux dépens d’appel dont distraction au profit de Me Nedelec sur ses offres de droits.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 11 juin 2024.
Il sera relevé à titre liminaire qu’il n’y a pas lieu à jonction des lors que l’assignation en intervention forcée du mandataire judiciaire de l’administrateur judiciaire n’a pas donné lieu à une nouvelle instance.
Sur les demandes en paiement de la société CMB:
1- Se fondant sur les dispositions de l’article 1219 du code civil, la société Business invest, la SELARL FHB et la SELARL Philae, agissant respectivement en qualité d’administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire de la société Business Invest, soutiennent que la société CMB ne communique au débat ni compte rendu de chantier, ni constat de huissier, ni procès-verbal de réception, ni situation de travaux avalisée par le maître d »uvre de sorte qu’elle échoue à rapporter la preuve qu’elle a réalisé les travaux convenus, dont elle sollicite le paiement.
Le tribunal aurait ainsi procédé à une inversion de la charge de la preuve.
Elle souligne qu’elle a contesté les décomptes généraux définitifs de sa sous-traitante, en raison de retards, inachèvements et défauts d’exécution de certains travaux, caractérisant un manquement de la société CMB à son obligation de résultat, et ajoute qu’elle s’est trouvée confrontée à des refus de paiement de la part des maîtres d’ouvrage.
2- La société CMB réplique que conformément à ses pratiques habituelles avec ses sous-traitants, la société Business Invest refuse de manière injustifiée de régler les factures relatives à 6 chantiers, en conservant les retenues de garanties, alors même que certains des chantiers ont été réceptionnés sans que subsiste de grief des maîtres d’ouvrage ([Localité 10], [Localité 11], [Localité 5]) et qu’aucune lettre recommandée ne lui a été adressée dans le délai d’un an après réception, expliquant les motifs du refus de libérer la garantie.
Elle précise avoir été dû cesser d’intervenir sur certains chantiers compte tenu des refus de paiement de ses factures précédentes.
Sur ce:
Concernant le chantier d'[Localité 11]:
3- Suivant marché du 2 mai 2018, la société Business Invest (Groupe Hexagone), désignée comme contractant général, a confié à la société CMB la réalisation des travaux de bardage métallique pour l’aménagement du magasin Darty pour un prix de 16’220 euros hors-taxes, stipulé global et forfaitaire.
4-Ces travaux ont donné lieu à un procès-verbal de réception signé contradictoirement le 31 juillet 2018 entre le maître de l’ouvrage et le contractant général avec une liste de 11 réserves, dont une seule concernant le lot bardage (habillage du volet mécanique de la surface de vente); celle-ci devant être levée avant le 15 août.
5- C’est en vain que les appelantes entendent se prévaloir du compte-rendu de chantier numéro 7 établi le 27 juillet 2018, antérieur au procès-verbal de réception, et qui n’est donc pas de nature à démonter un refus de lever des réserves.
6- En réalité, contrairement aux stipulations du marché de sous-traitance, le contractant général ne justifie pas avoir adressé à sa sous-traitante dans le délai d’un an à compter de la réception une lettre recommandée avec accusé de réception lui notifiant son refus libérer la garantie en raison de l’existence d’une réserve non reprise, ni même aucune relance en vue de la levée de la seule réserve figurant au procès-verbal de réception.
7- Au vu des termes du marché de travaux, l’entreprise générale n’était pas davantage fondée à conserver des sommes au titre de la retenue de garantie, en raison d’une absence de réponse de la sous-traitante à une demande tendant à la production des documents administratifs relatifs aux travailleurs détachés. Il n’est d’ailleurs justifié d’aucune demande en ce sens.
8- Enfin, il n’est pas pas justifié de l’existence d’un litige survenu entre le maître d’ouvrage et l’entreprise générale, concerant l’exécution du lot bardage métallique.
9- Le décompte général définitif adressé par la sous-traitante pour un montant de 19747.80 euros a en définitive été accepté par l’entreprise générale pour un montant de 18970 euros, après déduction de la somme de 777.80 euros correspondant à un devis qui demeurait en attente de validation au titre d’une plus-value (dimension de deux rideaux supérieure au marché de base).
La pièce 3 des appelantes datée du 1er mars 2019 d’un montant de 18970 euros HT correspond au DGD après négociation, dûment signé des deux parties.
10- C’est donc à juste titre que le tribunal a fait droit à la demande relative au montant du dépôt de garantie pour un montant de 948,50 euros (soit 18970 x 5%); le versement de cette somme ayant d’ailleurs été proposé par la société Business invest dans un courriel du 29 juillet 2020.
11- En outre, la société Business Invest ne rapporte par la preuve, qui lui incombait, du paiement de la somme de 467.10 euros, au titre du solde de la situation de travaux ayant donné lieu à la facture 18/44 du 2 juillet 2018.
12- Le jugement doit donc être confirmé, s’agissant des sommes réclamées au titre du marché d'[Localité 11].
Concernant le chantier de [Localité 5]:
13- La société Business Invest (Groupe Hexagone), désigné comme contractant général, a confié à la société CMB la réalisation de travaux de bardage, couverture dans le cadre de la réalisation de l’extension d’un bâtiment commercial et de l’aménagement d’un cabinet médical à [Localité 5].
14- Les travaux ont donné lieu à un procès-verbal de réception le 8 février 2019, avec des réserves qui ne concernaient pas les lots confiés à la société CMB.
15- En toutes hypothèses, il n’est nullement justifié de l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception dans le délai d’un an à compter de la réception mettant en demeure la sous-traitante de réaliser la levée de certaines réserves.
16- Les pièces numéro 30 et 31 invoquées cet égard par les sociétés appelantes ne sont nullement probantes.
17- La pièce numéro 30 concerne un compte-rendu de chantier établi le 24 janvier 2019, avant la réception.
La pièce 31 intitulée ‘suivi administratif des sous-traitantes libération des retenues de bonne fin de chantier ‘ne fait apparaître aucune observation au titre du lot charpente métallique confié la société CMB; il est en outre mentionné OK dans les cases DOE et DGD.
18- C’est donc à juste titre que le tribunal a fait droit à la demande en paiement des retenues de garantie pour le chantier de Guitres (1270,89 euros au titre de la retenue de garantie de 5 % concernant la facture du 19 octobre 2018, outre 847,26 euros au titre de la garantie de 5 % pour la facture du 12 novembre 2018).
Concernant le chantier de [Localité 10]:
19- Suivant marché du 5 juillet 2018, la société Business Invest (Groupe Hexagone), désignée comme contractant général, a confié à la société CMB la réalisation des travaux de serrurerie (lot 2) dans le cadre de l’aménagement d’une salle de sport à [Localité 10] (maître d’ouvrage: Logofit pour un montant global et forfaitaire de 9448 euros hors-taxes.
20-Les appelantes invoquent un défaut de mise aux normes de l’escalier mécanique avec garde-corps.
21- Ce grief figurait effectivement au compte-rendu de chantier établi le 12 décembre 2018, en semaine 50 (pièce 32 des appelantes); toutefois le procès-verbal de réception des travaux qui a été signé contradictoirement le 7 janvier 2019 ne comportait aucune réserve concernant les prestations confiées à la société CMB.
22- Aucune mise en demeure n’a par la suite été adressée à la sous-traitante dans le délai d’un an à compter de la signature du procès-verbal de réception des travaux.
23- Dès lors, la société CMB est fondée à solliciter paiement de la somme de 944,80 euros au titre des retenues de garantie de 5 % afférentes aux factures des 5 novembre 2018 et 14 septembre 2019; le jugement devra être confirmé de ce chef.
Concernant le chantier de [Localité 4]:
24- Suivant marché du 15 décembre 2017, la société Business Invest (Groupe Hexagone), désignée comme contractant général, a confié à la société CMB la réalisation de travaux de charpente métallique dans le cadre d’un chantier ayant pour maître d’ouvrage la SCI JFL, pour un montant global et forfaitaire de 90668.64 euros HT.
25- Contrairement à ce que soutiennent les appelantes, il n’est pas démontré que la société CMB aurait refusé par la suite d’exécuter le marché, au prétexte que les délais et les conditions financières ne lui convenaient pas. Aucun écrit provenant de la sous-traitante ne vient prouver une telle intention.
Il convient à cet égard d’écarter, comme non probant, le courrier du 5 juillet 2021, par lequel la société 2CZI (nouveau maître d’oeuvre du chantier de [Localité 4]) affirme sans autre forme de précisions ou de références utiles, susceptibles de rendre ses propos vraisemblables, que la société CMB ne ‘pouvait pas intervenir dans les délais et n’acceptait pas les conditions financières du marché.’
26- La société Business Invest justifie seulement voir été évincée du chantier par le maître de l’ouvrage, suivant courrier du 27 mars 2018, et avoir elle-même notifié à la société CMB qu’elle résiliait le contrat du 15 décembre 2017 pour un montant de 90’668,64 euros.
27- Il résulte de l’article 1794 du code civil que la société Business Invest, en sa qualité d’entrepreneur principal, pouvait résilier sans faute le marché à forfait de sous-traitance, à condition toutefois de dédommager la société CMB de toutes ses dépenses et de tous ses travaux.
28- A cette date, la société CMB justifie par les pièces produites qu’elle avait réalisé et fait livrer sur le site du chantier de [Localité 4] les éléments d’une ossature métallique, ainsi que des matériaux de bardage et de couverture, de sorte que ses factures des 31 janvier 2018 et 19 avril 2018 sont entièrement justifiées, comme correspondant aux prestations convenues réalisées avant la résiliation du marché de sous-traitance, et sans que puissent lui être valablement opposées les circonstances dans lesquelles le marché principal a lui-même été résilié.
29- Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a fait droit aux demandes en paiement des factures, pour un montant respectif de 17488.74 euros et 23144,46 euros, outre intérêt au taux légal.
Concernant le chantier de [Localité 8]:
30- Suivant marché du 9 octobre 2018, la société Business Invest (Groupe Hexagone), désignée comme contractant général, a confié à la société CMB la réalisation de travaux de renforcement de plancher sur un chantier situé à [Adresse 9], ayant pour maître d’ouvrage la SCI Pessac Newton, conformément à un devis du 25 septembre 2018, pour un prix global et forfaitaire de 13 937.60 euros.
Les prestations devaient être réalisées semaines 43 et 44 (soit les semaines des 22 et 29 octobre 2018.
31- Le 31 octobre 2018, la société CMB a émis une facture 18/76 d’un montant de 10356.52 euros HT, au titre de la fourniture des matériaux, dont à déduire le montant de la retenue de garantie (517.82 euros) soit un solde de 9838.70 euros HT, dont elle n’a pu obtenir le réglement en dépit d’une relance du 6 février 2019 (dans laquelle elle certifiait que les travaux de fabrication étaient exécutés et en attente de livraison dans ses ateliers), puis d’une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 juin 2019.
32- Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 décembre 2019, la société Business Invest a notifié à sa sous-traitante que par suite de l’annulation par sa cliente de l’opération Expandika à [Localité 8], elle procédait elle-même à l’annulation du contrat de sous-traitance du 9 octobre 2018.
33- Il résulte de l’article 1794 du code civil que la société Business Invest, en sa qualité d’entrepreneur principal, pouvait résilier sans faute le marché à forfait de sous-traitance, à condition toutefois de dédommager la société CMB de toutes ses dépenses et de tous ses travaux.
34- La société CMB, qui justifie de la réalisation des matériaux par les pièces produites (notamment par la photographie en pièce 52), qui n’ont pas donné lieu à contestation, est donc fondée à lui réclamer paiement des travaux correspondants.
35- Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a fait droit à sa demande.
Concernant le chantier de [Localité 7]:
36- Suivant marché du 15 décembre 2017, la société Business Invest (Groupe Hexagone), désigné comme contractant général, a confié à la société CMB la réalisation des travaux de charpente métallique pour trois bâtiments, ayant pour maîtres d’ouvrage la société Andrro Financière – Double M, pour un prix de 241 302.66 euros HT.
37- La somme réclamée (26 858.35 euros HT) correspond au montant de la facture 19/70 du 25 octobre 2019 au titre de prestations sur le bâtiment 3 (bardage, couverture, charpente), pour un montant total de 112827.41 euros, dont à déduire la retenue de 10% et les acomptes versés, soit 2 x 37343.16 = 74 676.32 euros.
38- Les appelantes n’ont pas communiqué de procès-verbal de réception de ces travaux.
39- Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 9 octobre 2019, la société Business Invest a notifié à la sous-traitante qu’elle lui retirait la prestation étanchéité du bâtiment 3, dans la mesure où elle n’avait pas donné suite à la précédente mise en demeure du 3 octobre 2019.
40- S’il est constant que l’entrepreneur général a pu, sans faute de sa part, procéder ainsi à la résiliation partielle du marché à forfait, concernant l’étanchéité du bâtiment 3, compte tenu des retards et inexécutions constatés, qui étaient de nature à pénaliser la bonne marche du chantier en retardant l’intervention des autres corps de métier et la livraison de l’ouvrage, il n’en demeure pas moins qu’un compte devait être fait entre les parties, concernant les travaux effectivement exécutés avant résiliation.
41- Il résulte du compte-rendu de chantier n°19 (semaine 40) en date du 1er octobre 2019
qu’à cette date, il existait un retard de l’entreprise sous-traitante pour les prestations suivantes:
– protection collective du toit avec risque de chute liée au manque de protection périphérique,
– absence de collecte des eaux pluviales intérieures du bâtiment 3,
– nécessité de reprendre les ossatures secondaires aux droits des menuiseries extérieures (ce point ayant déjà donné lieu à une demande de modification par courriel du 26 aout 2019, soulignant que les ossatures étaient situées sur l’emplacement des menuiserie extérieures),
– absence d’isolation et étanchéité avec relevés.
42- À la requête de l’entreprise générale, un procès-verbal de constat a été dressé par huissier le 7 octobre 2019 avec photographies du bâtiment n°3, dont il ressort effectivement que l’isolant n’était posé que sur la façade sud-ouest, et qu’il n’existait aucune descente d’eau pluviale et que le bardage du bâtiment n’était pas posé.
La nécessité de reprendre les ossatures secondaires aux droits des menuiseries extérieures (qui figurait au compte-rendu de chantier du 1er octobre 2019) n’est pas mentionnée au constat, de sorte que la persistance de ce défaut n’est pas avérée à la date à laquelle l’huissier est intervenu.
43- En outre, il doit être relevé qu’en ce qui concerne le bâtiment 3, le montant du marché confié à la société RICB, selon contrat du 11 octobre 2019, dans les suites immédiates de la résiliation partielle du marché confié à la société CMB, ne porte que sur le bardage (réalisation d’une seconde peau verticale, traitement des couvertines, boite à eau en aluminium laqué avec trop plein, descente d’eaux pluviales en aluminium laqué) pour un montant total de 8530.98 euros HT.
44- Les appelantes ne justifient pas avoir dû exposer d’autres frais pour terminer le bâtiment 3, ou pour rectifier des non-façons affectant les travaux réalisés par la société CMB.
45- La totalité des prestations convenues avec la société CMB pour le bâtiment 3 s’élevait à la somme de 138 308 euros, sur laquelle elle n’avait facturé le 25 octobre 2019 que la somme de 74686.32 + 26858.35 = 101 544.67 euros.
Au vu des montants figurant à son marché, il lui restait ainsi à facturer:
-au titre du bardage: 40 366 – 29723.69 = 10642.31 euros
-au titre de la couverture: 43230 – 37515.72 = 5714.28 euros
soit un total de 16356.59 euros.
46- Il résulte donc suffisamment des pièces produites que le montant de la demande en paiement, au titre du chantier de [Localité 7], était parfaitement justifié et correspondait à des prestations réalisées avant résiliation.
47- Le jugement doit donc être confirmé de ce chef.
Sur les demandes des sociétés Business Invest, FHB et Philae (en leur qualité respective d’administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire):
48- La demande au titre de la communication sous astreinte des dossiers d’ouvrages exécutés doit être rejetée dès lors que la société CMB a communiqué dans le cadre de l’instance la totalité des pièces à ce titre, pour ceux des chantiers qu’elle a achevés.
Aucune retenue de garantie ne pouvait être conservée par l’entreprise générale au prétexte de la non-communication de ces documents.
49- La demande d’expertise judiciaire ne peut davantage prospérer, dès lors que les sociétés appelantes n’ont pas produit d’éléments suffisants concernant leurs allégations sur les manquements contractuels de la société CMB, et que selon les termes de l’article 146 alinéa 2 du code de procédure civile, une mesure d’instruction ne peut en aucun cas être ordonnée en vue de suppléer la carence d’une partie dans l’administration de la preuve.
50- Enfin, la demande en paiement de la somme de 5000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive est infondée, dès lors que les prétentions de la société CMB étaient parfaitement justifiées.
51- Il convient définitive de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf à préciser que le montant des condamnations donnera lieu à fixation au passif du redressement judiciaire de la société Business Invest.
Sur les demandes accessoires :
52- il convient de fixer à 5000 euros le montant de l’indemnité due par la société CMB, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort:
Confirme, en toutes ses dispositions contestées, le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux le 15 avril 2022, sauf à préciser que le montant des condamnations prononcées par le tribunal donnera lieu à fixation au passif du redressement judiciaire de la société Business Invest,
Y ajoutant,
Fixe à 5000 euros, au passif du redressement judiciaire de la société Business Invest, le montant de l’indemnité due à la société Constructions métalliques Bosche (CMB) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Rejette les autres demandes,
Fixe les dépens d’appel au passif de la procédure de redressement judiciaire de la société Business Invest.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Magistrat