La SCI GROUPE MELJORG a sollicité un prêt de 1.915.000€ auprès de BNP PARIBAS pour l’acquisition de murs professionnels, avec un différé de remboursement de 24 mois. Madame [J], associée de la SCI, a souscrit une assurance collective auprès de CARDIF ASSURANCE VIE en tant que caution. Après l’acquisition, Madame [J] a été placée en arrêt de travail en novembre 2019, et CARDIF a reconnu le sinistre en juin 2020, mais a ensuite demandé le remboursement d’un trop-perçu. En mars 2021, Madame [J] a pris sa retraite, et sa demande de prorogation d’indemnités a été rejetée. En mars 2023, les demandeurs ont saisi le tribunal pour obtenir la prise en charge de certaines échéances de prêt et le remboursement des cotisations, arguant que le prêt n’était pas adapté à leurs besoins et invoquant une violation du secret médical. BNP PARIBAS a soulevé l’irrecevabilité des demandes pour cause de prescription, tandis que CARDIF a contesté la compétence du tribunal. Le tribunal a finalement déclaré sa compétence, rejeté les demandes de réparation pour violation du secret professionnel et de déchéance des intérêts, et a programmé une audience pour la clôture de l’affaire.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copies exécutoires
délivrées le :
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5ème chambre 2ème section
N° RG 23/06378
N° Portalis 352J-W-B7H-CZJUS
N° MINUTE :
Assignations du :
20 Mars 2023
ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 12 Septembre 2024
DEMANDEURS
Monsieur [F] [J]
[Adresse 4]
[Localité 6]
représenté par Me Claire BINISTI de la SELEURL CLAIRE BINISTI AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C1454
Madame [D] [H] épouse [J]
[Adresse 4]
[Localité 6]
représentée par Me Claire BINISTI de la SELEURL CLAIRE BINISTI AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C1454
S.C.I. Groupe M.E.L.J.O.R.G
[Adresse 3]
[Localité 7]
représentée par Me Claire BINISTI de la SELEURL CLAIRE BINISTI AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C1454
DEFENDERESSES
S.A. CARDIF ASSURANCE VIE
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Valérie LAFARGE SARKOZY de la SELARL ALTANA, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #R021
Décision du 12 Septembre 2024
4ème chambre 1ère section
N° RG 23/06378
S.A. BNP PARIBAS
[Adresse 2]
[Localité 5]
représentée par Me Sébastien ZIEGLER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C2258
MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT
Christine BOILLOT, Vice-Présidente
assistée de Catherine BOURGEOIS, Greffier lors des débats
et de Nadia SHAKI, Greffier lors de la mise à disposition au greffe
DEBATS
A l’audience du 04 Juillet 2024, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 12 Septembre 2024.
ORDONNANCE
Prononcée par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
La SCI GROUPE MELJORG s’est rapprochée de BNP PARIBAS, pour le financement de l’acquisition de murs professionnels, situés [Adresse 3], à [Localité 7].
Le 9 mars 2016, la banque BNP PARIBAS marquait son accord, sous conditions, pour octroyer à la SCI GROUPE MELJORG un prêt de 1.915.000€, sur 180 mois, dont 24 mois de différé de remboursement du capital.
Madame [J], associée de la SCI GROUPE MELJORG, en tant que caution de ce prêt a donc adhéré à la Formule F4 d’une assurance collective BNP PARIBAS ATOUT EMPRUNTEUR n°2456/654, souscrite auprès de la compagnie CARDIF ASSURANCE VIE, avec une garantie décès, PTIA, IPT et ITT, la garantie portant sur le décès, la perte totale et irréversible d’autonomie – invalidité permanente totale – Incapacité temporaire totale de travail, avec une franchise de 30 jours.
Le 8 juillet 2016, le notaire Maître [B], a reçu l’acte de vente du bien immobilier et de prêt de 1.915.000 € par BNP PARIBAS à la SCI MELJORG, les associés de la SCI déclarant par ailleurs se constituer cautions solidaires envers BNP PARIBAS, chacun à hauteur de 1.244.750 €, couvrant le paiement de 50% de la créance de la banque en principal, intérêts, commissions, cotisations, frais et accessoires.
L’acte constatait (p. 21) » A l’adhérent comme à tout assuré au contrat d’assurance BNP PARIBAS Atout emprunteur n°2456/654 (l’Assurance) souscrit par la Banque auprès des compagnies d’assurance CARDIF Assurance-Vie et CARDIF Assurances Risques Divers (les Assureurs) mentionnés aux conditions particulières, la Banque a remis préalablement à la conclusion des présentes une Notice des Conditions d’Assurance n°2456/654 dont l’adhérent et chaque assuré déclare avoir pris connaissance « .
L’acte précisait, en page 9, la mention » Article : Taux Effectif Global (TEG) pour satisfaire aux dispositions des articles L.313-1 et suivants du Code de la consommation, il est précisé à titre indicatif que, pour une utilisation unique du prêt à la date des présentes, le Taux Effectif Global du prêt calculé selon la méthode légale actuellement en vigueur à partir d’un taux actuariel mensuel de A PRECISER pour cent s’élève à la date des présentes A PRECISER pour cent l’an « .
Or, Madame [J] a été placée en arrêt de travail, le 7 novembre 2019, et la compagnie CARDIF, le 4 juin 2020, a déclaré prendre en charge le sinistre, puis elle lui a demandé de rembourser un trop versé le 9 décembre 2020, au regard des termes de la police.
Le 25 mars 2021 Madame [J] était placée à la retraite, et sa demande de prorogation d’indemnités journalières au-delà de la retraite à taux plein a été rejetée, il lui a été indiqué qu’en tant que professionnelle libérale, elle était en droit de poursuivre au-delà de l’âge de la retraite.
Monsieur [F] [J] et Madame [D] [H] épouse [J], et la société Groupe MELJORG, par assignation du 20 mars 2023, ont saisi le tribunal judiciaire de Paris, en vue d’obtenir la prise en charge de certaines échéances de prêt et le remboursement des cotisations par l’assureur. Ils invoquent que le prêt consenti la banque BNP PARISBAS SA n’est pas adapté à leurs besoins et se prévalent de la perte de chance d’en avoir contracté un plus adapté à leurs besoins. Ils demandent l’arrêt des prélèvements d’assurance, ainsi que la déchéance du droit aux intérêts, à l’égard de la banque, et se prévalent de la violation du secret médical protégé à au code de la santé publique, tant à l’égard de la banque, qu’à l’égard de l’assureur sollicitant une compensation de ce préjudice spécifique.
La banque BNP PARISBAS SA, par conclusions d’incident transmises par RPVA le 18 décembre 2023, a soulevé l’irrecevabilité des demandes relatives à la déchéance des intérêts pour cause de prescription, prévue à l’article L341-4 du code de la consommation, compte tenu de la date du prêt, sur le fondement de l’article 2224 du code civil, en visant également l’article L 110-4 du code de commerce, dans la mesure où l’erreur alléguée se constate à la seule lecture de l’acte de prêt du 8 juillet 2016, alors que l’assignation n’a été délivrée que le 20 mars 2023.
La compagnie CARDIF ASSURANCE VIE a, de son côté, soulevé l’incompétence de la juridiction saisie, au regard de l’article R114-1 du code des assurances, au bénéfice du tribunal de Créteil, d’une part, et la prescription des demandes relatives à l’indemnisation du préjudice lié à la violation du secret médical, d’autre part.
Vu les dernières conclusions d’incident, notifiées la banque BNP PARISBAS SA, par voie dématérialisée, le 12 juin 2024, qui s’en remet à justice s’agissant de l’incompétence, et qui maintient la fin de non-recevoir tirée de la prescription, quant à la déchéance des intérêts soulevée par l’assureur, qu’elle estime également prescrite, tout comme l’action en réparation pour violation du secret médical. Elle demande également la condamnation des demandeurs à lui verser à la somme de 3.000€, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et de statuer ce que de droit sur les dépens de l’incident.
Vu les conclusions en réponse à l’incident, transmises par voie électronique le 14 juin 2024, de la compagnie CARDIF ASSURANCE VIE, par lesquelles l’assureur se prévaut de
– l’incompétence, au bénéfice du tribunal judiciaire de Créteil, pour connaître des demandes à son endroit ;
– la prescription et le débouté des demandes indemnitaires à son égard quant à la violation du secret professionnel ;
Elle y demande de donner acte de ce qu’elle se réserve de faire valoir tout autre incident et également la condamnation des demandeurs à lui verser à la somme de 5.000€, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l’incident.
Vu les conclusions en réponse à l’incident, transmises par voie électronique le 19 juin 2024, des demandeurs dans lesquelles, ils sollicitent de :
– débouter BNP PARIBAS et CARDIF de leurs demandes formulées au présent incident ;
– retenir la compétence du Tribunal judiciaire de Paris, en l’espèce, dans la mesure où la SCI Groupe M.E.L.J.O.R.G est également adhérente au contrat d’assurance et a qualité de partie à celle-ci puisqu’elle a son siège à Paris, et alors que de surcroît les demandes ne se limitent pas à la seule mise en œuvre et fixation des indemnités d’assurance, mais renvoient également à la mise en œuvre de l’obligation d’information et de conseil et à la violation du secret médical ;
– de dire recevable la demande des consorts [J] et de la SCI Groupe M.E.L.J.O.R.G de condamner in solidum la société CARDIF Assurance vie et BNP Paribas au règlement de 5.000 € à chacun des époux [J], en réparation du préjudice subi, du fait de la violation du secret médical, d’une part, et leur demande de déchoir BNP du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le Tribunal ;
– leur condamnation à lui verser 2.000 € au titre des frais irrépétibles et aux entiers dépens de l’incident.
Les parties ont été appelées à l’audience du juge de la mise en état du 4 juillet 2024.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer aux dernières conclusions des parties, en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
o Sur l’incompétence
L’article 789 du code de procédure civile dispose que lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 du même code et sur les incidents mettant fin à l’instance. Les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions et incidents ultérieurement, à moins qu’ils ne surviennent ou soient révélés postérieurement au dessaisissement du juge.
Le juge de la mise en état a donc compétence pour statuer sur toutes les exceptions de procédure, c’est-à-dire, entre autres, sur les exceptions d’incompétence.
En vertu des articles 73, 74 et 75 du code de procédure civile, constitue une exception de procédure, tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours. Les exceptions doivent, à peine d’irrecevabilité, être soulevées simultanément, et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir.
S’il est prétendu que la juridiction saisie en première instance ou en appel est incompétente, la partie qui soulève cette exception doit, à peine d’irrecevabilité, la motiver et faire connaître, dans tous les cas, devant quelle juridiction elle demande que l’affaire soit portée.
En vertu de l’article 42 du code de procédure civile, la juridiction territorialement compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur.
L’article R. 114-1 du code des assurances dispose en vertu d’une règle dérogatoire que dans toutes les instances relatives à la fixation et au règlement des indemnités dues, le défendeur est assigné devant le tribunal du domicile de l’assuré, de quelque espèce d’assurance qu’il s’agisse, sauf en matière d’immeubles ou de meubles par nature, auquel cas le défendeur est assigné devant le tribunal de la situation des objets assurés.
Toutefois, s’il s’agit d’assurances contre les accidents de toute nature, l’assuré peut assigner l’assureur devant le tribunal du lieu où s’est produit le fait dommageable.
En l’espèce, puisque la SCI Groupe M.E.L.J.O.R.G est également adhérente au contrat d’assurance et a qualité de partie à celle-ci, alors qu’elle a son siège à Paris, et puisque, de surcroît, les demandes ne se limitent pas à la seule mise en œuvre et fixation des indemnités d’assurance, mais renvoient également à la mise en œuvre de l’obligation d’information pour lesquelles la règle dérogatoire du code des assurances n’a pas vocation à s’appliquer, et alors que la banque et l’assureur ont leur siège à Paris, il y a lieu de rejeter l’exception d’incompétence, soulevée in limine litis par la compagnie CARDIF, et de retenir la compétence de la juridiction parisienne en l’occurrence.
Le moyen soulevé au titre de l’incident de ce chef sera donc rejeté.
o Sur les prescriptions invoquées
En vertu de l’article 789 du code de procédure civile, dans sa rédaction entrée en vigueur au 1er janvier 2020, et applicable aux procédures en cours à cette date, le juge de la mise en état est dorénavant compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir, et notamment, sur la prescription, envisagés comme telle, à l’article 122 du code de procédure civile. L’incident soulevé est recevable, dans la mesure où l’assignation est datée du 20 mars 2023, et est donc postérieure à l’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions.
En application de l’article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
– Sur la prescription de la demande relative à la déchéance des intérêts
La banque BNP soutient que l’absence de TEG était apparente à la rédaction de l’acte de prêt, de sorte que le délai de prescription de l’action en nullité a commencé de courir à cette date, alors que le prêt consenti est un prêt à objet professionnel, destiné à l’acquisition de locaux commerciaux, la SCI agissant en qualité de professionnelle.
Les demandeurs font valoir la spécificité de la situation d’espèce, puisque n’est pas en cause la mention d’un taux erroné ou illicite, mais l’absence de toute mention de taux (avec l’indication taux à préciser), de sorte que le point de départ de la prescription ne pouvait être celui de la date du prêt, l’examen de l’acte de prêt ne permettait pas à l’emprunteur, selon eux, de constater l’erreur commise. Ils font valoir, avant le litige, n’avoir pu suspecter l’erreur attachée au taux stipulé, et que dès lors la prescription n’a commencé de courir qu’à la révélation de l’erreur. Ils en déduisent que leur demande relative à la déchéance des intérêts sont valables.
En l’espèce, la vente et le prêt sont souscrits au profit de la SCI et il résulte des mentions de l’acte de vente produit, du 8 juillet 2016, qu’il y est fait état de ce que le prêt est à objet professionnel et que l’emprunteur personne morale ne dispose pas de ce fait de droit de rétractation.
Il en résulte que les dispositions invoquées dans l’assignation au soutien de la demande de déchéance du droit aux intérêts prévue à l’article L341-4 du code de la consommation, disposition d’ordre public, n’ont pas vocation à s’appliquer.
Et à supposer les demandes fondées sur l’erreur attachée à la stipulation du taux d’intérêt, ou sur le dol, et sur le droit commun des contrats, qui renvoie à la prescription quinquennale de l’article 2224 du code civil, puisque le demandeur invoque le taux erroné voire l’absence de taux, dans la mesure où cette erreur procède d’une mention explicite d’un acte de prêt conclu par une SCI avec une banque, et à vocation professionnelle, le point de départ du délai de l’action a couru du jour de la signature de l’acte, de sorte que l’action en nullité fondée sur le vice du consentement se trouve prescrite, l’acte en cause étant daté du 8 juillet 2016 et l’action ayant été engagée par l’acte introductif de la présente instance datée du 20 mars 2023.
Elle est donc irrecevable.
– Sur la prescription de la demande relative à la réparation du préjudice liée à la violation du secret professionnel
L’assureur CARDIF fait également valoir que les demandes fondées sur la violation du secret médical sont fondées sur des courriels des 24 juin et 19 juillet 2016, date à partir desquels la prescription a commencé de courir, de sorte que l’action est prescrite au jour où l’action est engagée en mars 2023, et que les demandeurs ne sauraient prendre pour point de départ, la date, hypothétique, où ils ont pris de contact avec leur avocat, date du 22 juillet 2021, que rien ne permet d’attester. Pour eux, les cautions, et surtout la SCI emprunteuse, étaient en mesure de percevoir leur erreur dès la date de conclusion du prêt, ils ne sauraient se réfugier derrière l’idée qu’ils n’auraient eu connaissance des conditions générales du contrat qu’en 2021, alors que les mentions de l’acte et du bulletin attestent du contraire.
Pour eux la SCI emprunteuse étaient en mesure de percevoir son erreur, dès la date de conclusion du prêt, elle ne saurait se réfugier derrière l’idée qu’ils n’auraient eu connaissance des conditions générales du contrat qu’en 2021, alors que les mentions de l’acte et du bulletin attestent du contraire.
Pour les mêmes raisons, la banque BNP considère que l’action engagée est prescrite depuis le 19 juillet 2021 soit antérieurement à la saisine du tribunal. Et les demandeurs selon eux ne sauraient se fonder pour retarder le point de départ de la prescription sur une nouvelle hypothèse de violation du secret professionnel non envisagée à l’assignation survenue en janvier 2020, alors que la banque a sollicité de lui transmettre directement de nouveaux documents médicaux, à savoir des arrêts de travail, ni même se fonder sur les stipulations des conditions générales, qui institueraient une violation permanente du secret médical. La banque considère ces conditions générales, parfaitement opposables à l’assuré, pour lui avoir été remises lors de l’adhésion, comme en atteste le bulletin d’adhésion et comme le retient la jurisprudence rendue au visa de l’article 1119 du code civil.
En réponse, les demandeurs font valoir que le point de départ de l’action soumise au délai quinquennal n’a pu courir, qu’à compter du moment où ils ont consulté un avocat, soit le 22 juillet 2021 puisqu’auparavant la banque s’était fait passé pour l’interlocuteur et s’était fait remettre le dossier médical, s’interrogant encore le 25 juin 2016 sur les dosage PSA et demandant que lui soit transmis directement un électrocardiogramme et un rapport cardio-vasculaire, un courrier du 12 juillet 2016 évoquant la perte du dossier médical de Monsieur [J], et non pas à la date du prêt, car à l’époque ils n’avaient pas connaissance des faits leur permettant d’agir. Ils estiment que la violation du secret professionnel est entérinée par les conditions générales, qui ne lui ont été transmises qu’en janvier 2021, et que c’est sur cette base que la société CARDIF a demandé le 20 janvier 2020 de transmettre les arrêts de travail au banquier, de sorte que l’action n’est en toute hypothèse pas prescrite.
En l’espèce, dans la mesure où les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître » les faits » lui permettant de l’exercer, il convient de situer le point de départ de la prescription à compter de la dernière violation du secret médical alléguée.
Et les époux [J] ne sauraient se prévaloir de la non-transmission des conditions générales, dans la mesure où il résulte du bulletin d’adhésion, et des termes du l’acte de vente du 8 juillet 2016 produit, que l’assuré reconnait les avoir reçues de la banque. Ayant connu dès cette date les conditions générales, ils ne sauraient de ce point de vue obtenir le report du point de départ du délai de prescription.
Le fait que la rédaction des conditions générales du contrat ne soit pas respectueuse du secret professionnel est indifférent à la présente action, faute de demande visant à priver d’effet ces clauses des conditions générales et en l’absence de violation concrète et avérée du secret professionnel. Seules ces violations effectives ouvrent un droit à réparation dans les termes de la demande formulée.
Les défendeurs ne sauraient, en revanche, opposer que le courrier du 16 janvier 2020, invoqué en pièce 27, comme instituant la dernière violation du secret médical par la banque, n’est pas visé à l’assignation, et qu’il s’agirait d’une nouvelle violation du secret médical invoquée, alors que le demandeur, au terme de l’assignation, évoque de manière succincte la violation du secret professionnel contre l’assureur et la banque, indifféremment, sans viser aucun de ces courriers précisément, ni ceux de 2016 ni celui de 2020 sollicitant à ce titre 5.000€ de dommages-intérêts.
Toutefois, le courriel du 16 janvier 2020 produit, qui institue, à suivre les demandeurs, la dernière violation du secret médical, est un mail émanant de Monsieur [J] dans lequel il transmet de son propre chef les arrêts de travail. Rien ne permet dès lors d’affirmer que cet envoi soit fait en réponse à une demande de la banque de produire un tel document couvert par le secret médical. Or, seule une telle demande, émanant de la banque constituerait la violation du secret médical alléguée, la transmission spontanée par l’assuré de documents médicaux, ne constituant pas en soi une violation du secret médical, auquel l’intéressé peut, de son propre chef, renoncer. Ainsi, faute de nouvelle violation du secret médical établie, le point de départ de la prescription ne saurait être repoussé à cette date.
La violation alléguée du secret médical en 2020 n’étant pas établie par les demandeurs, sur qui pèse la charge d’une telle preuve, les violations non contestées remontent à l’année 2016, de sorte qu’au jour de l’introduction de la présente action – soit le 20 mars 2023 -, l’action était prescrite et comme telle irrecevable.
Il convient au demeurant de relever que ces courriers de 2016, dont l’existence n’est pas contestée par les défendeurs, et invoqués au soutien de ses prétentions par le demandeur, ne sont pas produits au soutien des conclusions relatives à l’incident.
L’action fondée sur la violation du secret professionnel sera déclarée irrecevable comme prescrite.
Compte tenu de la nature de la décision, qui ne met pas fin à l’instance puisque d’autres demandes sont formulées formulées à l’assignation, il convient de réserver les dépens et les frais irrépétibles.
L’affaire sera renvoyée au juge de la mise en état dans les termes du dispositif.
Le juge de la mise en état statuant publiquement par voie d’ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,
REJETONS l’incompétence soulevée et déclarons le tribunal judiciaire compétent ;
DECLARONS IRRECEVABLES comme prescrites les demandes relatives à la réparation de la violation du secret professionnel formées par contre la banque et l’assureur ainsi que la demande relative à la déchéance des intérêts;
REJETONS les plus amples demandes des parties ;
DISONS que l’affaire sera rappelée à l’audience de mise en état du 5 décembre 2024 pour clôture éventuelle, avec conclusions de l’ensemble des défendeurs avant le 30 octobre 2024, et conclusions du demandeur en réplique avant le 30 novembre 2024, ces conclusions étant expurgées de toutes les demandes jugées irrecevables par la présente décision ;
RESERVONS les dépens et les condamnations sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Faite et rendue à Paris le 12 Septembre 2024.
Le Greffier Le Juge de la mise en état
Nadia SHAKI Christine BOILLOT