La SCCV LES MANGUIERS a contracté un crédit auprès de la BANQUE DE LA REUNION en décembre 2007, avec plusieurs avenants ultérieurs. En octobre 2021, la Société de Négociation Achat de Créances Contentieuses (NACC), ayant repris les droits de la banque, a délivré un commandement de payer à la SCCV, entraînant une saisie immobilière de plusieurs lots. La NACC a ensuite assigné la SCCV devant le juge de l’exécution pour obtenir la vente forcée des biens, en fixant sa créance à 459.384,52 euros. Le 23 février 2023, le juge a débouté la NACC de sa demande de vente forcée et a déclaré irrecevable la demande de BNP PARIBAS concernant les frais. La SARL B SQUARED-INVESTMENTS a interjeté appel de ce jugement en avril 2024, demandant la révision de la décision. La cour a ensuite ordonné à B SQUARED-INVESTMENTS de produire des documents relatifs à la cession de créance et a fixé une astreinte en cas de non-respect. L’affaire a été renvoyée à une audience ultérieure.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
PC
N° RG 23/00446 – N° Portalis DBWB-V-B7H-F4NB
S.A.R.L. B-SQUARED INVESTMENTS
C/
S.C. SCCV LES MANGUIERS
S.A. BNP PARIBAS REUNION
Etablissement Public POLE RECOUVREMENT SPECIALISE
Etablissement Public TRESORERIE DU [Localité 17] CENTRE DES FINANCES PUBLIQUES
COUR D’APPEL DE SAINT-DENIS
ARRÊT DU 06 SEPTEMBRE 2024
Chambre civile TGI
Appel d’une ordonnance rendue par le JUGE DE L’EXECUTION DE SAINT-DENIS en date du 23 FEVRIER 2023 suivant déclaration d’appel en date du 06 AVRIL 2023 rg n°: 21/00071
APPELANTE :
S.A.R.L. B-SQUARED INVESTMENTS La société B-SQUARED INVESTMENTS S.A.R.L, société à responsabilité limitée au capital de 102.000 €, dont le siège social est [Adresse 11] enregistrée auprès du registre de commerce et des sociétés du Luxembourg sous le n°B261266, représentée par la Société de Négociation Achat de Créances Contentieuses (NACC), SAS au capital de 14.032.410 €, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris sous le n° B 407 971 111, dont le siège social est [Adresse 6], représentée par son Président, en exercice, domicilié es qualité audit siège,
Laquelle vient aux droits de la société de Négociation Achat de Créances Contentieuses (NACC), SAS au capital de 14.032.410,00 €, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris sous le n° B 407 971 111, dont le siège social est [Adresse 6], représentée par son Directeur Général Délégué, en exercice, domicilié es qualité audit siège ;
en vertu d’un acte de cession de créances en date du 30 avril 2022
Laquelle venait déjà aux droits de la Caisse d’Epargne (CEPAC), banque coopérative régie par les articles L.512-85 et suivants du Code monétaire et financier – SA à directoire et Conseil d’Orientation et de Surveillance au capital de 759 825 200 €, ayant son siège social [Adresse 16] – 775 559 404 RCS de Marseille – Intermédiaire en assurance, immatriculé à PORTAS sous le numéro 07 006 180 ‘ Titulaire de la carte professionnelle ‘transactions sur immeubles et fonds de commerce sans perception de fonds effets ou valeurs’ n° A06-4122 délivrée par la Préfecture des Bouches du Rhône garantie par la CEGC – [Adresse 4], venant aux droits de la Banque de la Réunion à la suite d’une fusion-absorption entre la Banque de la Réunion et la CEPAC ;
en vertu d’un acte de cession de créances sous seing privé du 26 juin 2017 déposé au rang des minutes de Maître [F] [D], notaire à [Localité 15], le 03 août 2017
[Adresse 11]
[Localité 5]
Représentant : Me Amina GARNAULT de la SELAS AMINA GARNAULT, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
INTIMEES :
S.C. SCCV LES MANGUIERS
[Adresse 8]
[Localité 12]
Représentant : Me Jean-francis CHEUNG AH SEUNG de la SELARL VJL AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION, ayant plaidé
S.A. BNP PARIBAS REUNION société au capital de 24 934 510 euros, immatriculée au R.C.S de Paris sous le numéro 428 633 408 00128, représentée par son directeur général en exercice ou par toute autre personne dûment habilitée et ayant un établissement au [Adresse 9].
[Adresse 1]
[Localité 10]
Représentant : Me Guillaume jean hyppo DE GERY de la SELARL GERY-SCHAEPMAN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
PARTIE INTERVENANTE :
Etablissement Public POLE RECOUVREMENT SPECIALISE
[Adresse 2]
[Localité 13]
Etablissement Public TRESORERIE DU [Localité 17] CENTRE DES FINANCES PUBLIQUES
[Adresse 7]
[Localité 12]
DÉBATS : en application des dispositions des articles 778, 805 et 917 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 21 Mai 2024 devant la cour composée de :
Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Mme Pauline FLAUSS, Conseillère
Le président a indiqué que l’audience sera tenue en double rapporteur. Les parties ne s’y sont pas opposées.
A l’issue des débats, le président a indiqué que l’arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition le 06 Septembre 2024.
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Monsieur Patrick CHEVRIER
Conseiller : Pauline FLAUSS,
Conseiller : Sophie PIEDAGNEL
Qui en ont délibéré
Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 06 Septembre 2024.
Greffier : Mme Véronique FONTAINE, Greffier.
La SCCV LES MANGUIERS a souscrit le 12 décembre 2007 auprès de la BANQUE DE LA REUNION, un crédit d’accompagnement ayant fait l’objet de deux avenants par :
– acte authentique du 12 décembre 2007 ;
– la copie exécutoire d’un acte authentique du 18 décembre 2009, portant avenant au prêt notarié ;
– la copie exécutoire d’un acte authentique du 17 mars 2011, portant avenant N° 2 du prêt notarié.
La Société de Négociation Achat de Créances Contentieuses (la NACC), venant aux droits de la BANQUE DE LA RÉUNION, a fait délivrer le 13 octobre 2021 à la SCCV LES MANGUIERS un commandement de payer valant saisie immobilière portant sur plusieurs lots dépendant de l’ensemble immobilier sis [Adresse 14], cadastré section AP n° [Cadastre 3], d’une contenance de 70 ares et 30 centiares.
Le commandement de payer valant saisie a été publiés au Service de la Publicité Foncière de [Localité 18] de la Réunion le 27 octobre 2021 sous les références Volume 9744P31 2021S N° 85.
Puis, la NACC a fait assigner la SCCV LES MANGUIERS, par acte délivré le 15 décembre 2021, devant le juge de l’exécution au fins de vente forcée des biens saisis en fixant sa créance à la somme de 459.384,52 euros (principal, frais et intérêts).
Elle a dénoncé l’acte introductif d’instance aux créanciers inscrits le 17 décembre 2021, soit à la société BNP PARIBAS REUNION, au Centre des Finances Publiques du [Localité 17] et à l’Administration PRS de [Localité 18].
Par jugement d’orientation réputé contradictoire en date du 23 février 2023, le juge de l’exécution a statué en ces termes :
Déboute la NACC Société de Négociation Achat de Créances Contentieuses de sa demande de vente forcée des immeubles suivants propriétés de la SCCV LES MANGUIERS situés à [Adresse 14], cadastré section AP n° [Cadastre 3], pris en deux lots :
– Lot numéro 1 :
* lots n° 63, 123 et 124 (appartement T3 duplex et deux parkings en sous-sol);
* les 104/ 10.000è et les 3 1/1 .000è des parties communes générales et particulières;
– Lot numéro 2 :
* lots n° 65, 151 et 152 (appartement T3 duplex et deux parkings en sous-sol);
* les 104/ 1 0.000è et les 31/1.000è des parties communes générales et particulières;
et sur l’ensemble des plus amples demandes ;
Déclare irrecevable la BNP PARIBAS en sa demande d’application de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
Dit n’y avoir lieu à fixation de sommes au titre des frais irrépétibles de la Société de Négociation Achat de Créances Contentieuses (NACC) ;
Laisse les dépens de l’instance à la charge de la Société de Négociation Achat de Créances Contentieuses (NACC).
La SARL B SQUARED-INVESTMENTS a interjeté appel du jugement par déclaration déposée au greffe le 6 avril 2024.
Autorisée par ordonnance sur requête en date du 14 avril 2023, la société B SQUARED-INVESTMENTS fait assigner à jour fixe la SCCV LES MANGUIERS, la société BNP PARIBAS REUNION, l’administration PRS de [Localité 18], le Centre de finances publiques du [Localité 17], par actes d’huissier délivrés le 21 avril 2023, remis au greffe de la cour le 25 avril 2023.
L’affaire a été renvoyée à plusieurs reprises à la demande des parties jusqu’à examen à l’audience du 21 mai 2024.
***
Par dernières conclusions n° 3 remises le 19 février 2024, l’appelante demande à la cour de :
» o JUGER irrecevable la demande de sursis à statuer ;
o JUGER la société B-SQUARED INVESTMENTS, subrogée dans les droits de la société NACC, bien fondée en son appel ;
o DEBOUTER la SCCV LES MANGUIERS de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
En conséquence,
o INFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a :
» Débouté la NACC Société de Négociation Achat de Créances Contentieuses de sa demande de vente forcée des immeubles suivants propriétés de la SCCV LES MANGUIERS situés à [Adresse 14], cadastré section AP n° [Cadastre 3], pris en deux lots :
– Lot numéro 1 :
* lot n° 63, 123 et 124 (appartement T3 duplex et deux parkings en sous-sol);
* les 104/10.000èmes et es 31/1.000èmes des parties communes générales et particulières ;
– Lot numéro 2 :
* lots n° 63, 151 et 152(appartement T3 duplex et deux parkings en sous-sol);
* les 104/10.000è et es 31/1.000è des parties communes générales et particulières ;
Et sur l’ensemble des plus amples demandes ; »
Et statuant de nouveau,
o CONSTATER que la saisie pratiquée porte sur des droits saisissables ;
o CONSTATER que la société NACC détient une créance certaine, liquide et exigible, et non prescrite consacrée par un titre exécutoire,
o DETERMINER les modalités de poursuite de la procédure en autorisant la vente amiable à la demande du débiteur ou en ordonner la vente forcée, et à cet effet, notamment :
En cas de vente forcée :
o MENTIONNER le montant de la créance du créancier poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires, au jour du jugement à intervenir ;
o FIXER la date de l’audience de vente et déterminer les modalités de visite de l’immeuble ;
o ORDONNER l’emploi des dépens en frais privilégiés de vente.
En cas de vente amiable :
o MENTIONNER le montant de la créance du créancier poursuivant en principal, frais,
intérêts et autres accessoires, au jour du jugement à intervenir ;
o FIXER le montant en deçà duquel l’immeuble ne peut être vendu eu égard aux conditions économiques du marché ainsi que, le cas échéant, les conditions particulières de la vente ;
o TAXER le montant des frais privilégiés de vente de la requérante qui seront versés directement par l’acquéreur en sus du prix ;
o FIXER la date de l’audience à laquelle l’affaire sera appelée pour s’assurer que l’acte de vente est conforme aux conditions qu’il a fixé, que le prix est consigné et que l’état ordonné des créances a été dressée ou, à défaut, ordonner la reprise de la procédure sur vente forcée. »
***
Aux termes de ses dernières conclusions d’intimée n° 2, déposées par RPVA le 19 février 2024, la SCCV LES MANGUIERS demande à la cour de :
» A titre principal,
JUGER la société B-SQUARED INVESTMENTS irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité à agir et de droit d’agir,
A titre subsidiaire,
ENJOINDRE la société B-SQUARED INVESTMENTS de communiquer à la SCCV LES MANGUIERS les pièces permettant l’exercice du droit au retrait litigieux.
SURSEOIR à statuer dans l’attente de la production par la société B-SQUARED INVESTMENTS à la SCCV LES MANGUIERS des pièces permettant l’exercice du droit au retrait litigieux. »
***
Par conclusions remises à la cour la 22 mai 2023, la société BNP PARIBAS REUNION demande à la cour de :
PRENDRE ACTE que la BNP PARIBAS REUNION n’entend pas contester le jugement querellé.
***
Par message RPVA du 27 juin 2024, la cour a invité les parties à présenter leurs observations, impérativement sous quinzaine, sur la recevabilité de la demande d’injonction aux fins de retrait de la créance litigieuse, présentée en appel après le jugement d’orientation, au regard des prescriptions de l’article R. 311-5 du code des procédures civiles d’exécution.
***
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l’article 455 du code de procédure civile.
A titre liminaire, la cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n’examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.
Elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de » constatations » ou de » dire et juger » lorsqu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.
Sur la qualité à agir de la société B-SQUARED INVESTMENTS :
Selon la SCCV LES MANGUIERS, la société B-SQUARED INVESTMENTS prétend agir en vertu d’un acte de cession de créances en date du 30 avril 2022. Mais elle n’a fourni pour seul justificatif qu’une « Attestation de cession de créance et de mandat de gestion » en date du 30 avril 2022 aux termes de laquelle il est indiqué que le cédant (la société NACC) a cédé à la société B-SQUARED INVESTMENTS la créance détenue à l’encontre de « [G] [P] ». Elle ne rapporte donc pas la preuve de sa qualité de créancier de la SCCV LES MANGUIERS et partant, la démonstration de son droit d’agir.
La société B-SQUARED INVESTMENTS réplique que la SCCV LES MANGUIERS a été assignée à la présente procédure d’appel par acte du 21 avril 2023, lequel précise expressément que la société B-SQUARED INVESTMENTS vient désormais aux droits de la NACC en vertu d’un bordereau de cession de créance du 30 avril 2022. Cet acte vaut notification au sens de l’article 1324 du code civil. Il n’y a donc pas lieu de » justificatif de la notification « .
Sur ce,
Aux termes de l’article 1324 du code civil, la cession n’est opposable au débiteur, s’il n’y a déjà consenti, que si elle lui a été notifiée ou s’il en a pris acte.
Le débiteur peut opposer au cessionnaire les exceptions inhérentes à la dette, telles que la nullité, l’exception d’inexécution, la résolution ou la compensation des dettes connexes. Il peut également opposer les exceptions nées de ses rapports avec le cédant avant que la cession lui soit devenue opposable, telles que l’octroi d’un terme, la remise de dette ou la compensation de dettes non connexes.
Le cédant et le cessionnaire sont solidairement tenus de tous les frais supplémentaires occasionnés par la cession dont le débiteur n’a pas à faire l’avance. Sauf clause contraire, la charge de ces frais incombe au cessionnaire.
Cette disposition n’exige aucune forme particulière de notification de la cession de créance au débiteur.
Ainsi, en l’espèce, la déclaration d’appel et l’assignation à jour fixe de la SCCV LES MANGUIERS par la SARL B-SQUARED INVESTMENTS constitue la notification de la cession de créance à la débitrice au sens de l’article 1324 du code civil.
A cet égard, en cause d’appel, la société B-SQUARED verse aux débats (Pièce N° 12) l’attestation du président de la société VERALTIS ASSET MANGEMENT, anciennement NACC, qui confirme que l’appelante est la cessionnaire de la créance invoquée au soutien de la saisie immobilière.
Cet acte suffit à conférer à l’appelante la qualité à agir en appel à l’encontre du jugement entrepris ayant débouté le cédant, la SARL NACC, sans préjudice du bien fondé de ses prétentions au fond.
Sur la recevabilité de la contestation nouvelle en appel :
En vertu des dispositions de l’article R. 311-5 du code des procédures civiles excrétion, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office, aucune contestation, aucune demande incidente ne peut, sauf disposition contraire, être formée après l’audience d’orientation prévue à l’article 322-15 du code des procédures civiles d’exécution, à moins qu’elle porte sur des actes de procédure postérieurs à celle-ci. Dans ce cas, la contestation ou la demande incidente est formée dans les quinze jours de la notification de l’acte.
Cependant, en l’espèce, il est constant que la SCCV LES MANGUIERS a reçu notification de la cession de créance conclue entre la société NACC et la SARL B SQUARED INVESTMENTS après le jugement d’orientation et à l’occasion de la déclaration d’appel du 6 avril 2024.
La SCCV LES MANGUIERS est donc recevable à solliciter en appel le retrait de la créance litigieuse.
Sur la demande de sursis à statuer :
La SCCV LESMANGUIERS demande subsidiairement » d’enjoindre la société B-SQUARED INVESTMENTS de communiquer à la SCCV LES MANGUIERS les pièces permettant l’exercice du droit au retrait litigieux puis de surseoir à statuer dans l’attente de la production par la société B-SQUARED INVESTMENTS à la SCCV LES MANGUIERS des pièces permettant l’exercice du droit au retrait litigieux. »
La société B SQUARED affirme que la demande de sursis à statuer formulée à titre subsidiaire est irrecevable faute d’avoir été soulevée in limine litis, s’agissant d’une exception de procédure au sens de l’article 74 du code de procédure civile.
Sur ce,
L’article 378 du code de procédure civile prescrit que la décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine.
Or, en l’espèce, la SCCV LESMANGUIERS présente une demande d’injonction de production de pièces afin de soutenir une demande de retrait de la créance litigieuse.
Sa demande de sursis à statuer ne peut être accueillie comme telle mais doit s’interpréter comme une demande de report de la décision en attendant le déroulement de la procédure de rachat éventuel de la créance une fois son montant liquidé.
Ainsi, même si la demande de sursis à statuer est recevable, car présentée avant toute défense au fond, elle est mal fondée tandis qu’elle ne rend pas la demande d’injonction et de production de pièces irrecevable.
Sur la demande d’injonction de l’intimée :
La SCCV LES MANGUIERS demande à la cour de faire injonction à la société B-SQUARED INVESTMENTS de communiquer à la SCCV LES MANGUIERS les pièces permettant l’exercice du droit au retrait litigieux.
Elle invoque les dispositions de l’article 1699 du code civil pour soutenir cette prétention.
La SARL B-SQUARED INVESTMENTS réplique que cette le retrait ne peut pas être demandé par voie de conclusions subsidiaires.
Sur ce,
Sur les pouvoirs du juge de l’exécution :
L’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire dispose que le juge de l’exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu’elles n’échappent à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire.
Dans les mêmes conditions, il autorise les mesures conservatoires et connaît des contestations relatives à leur mise en ‘uvre.
Le juge de l’exécution connaît, sous la même réserve, de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s’élèvent à l’occasion de celle-ci et des demandes nées de cette procédure ou s’y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit ainsi que de la procédure de distribution qui en découle. (‘)
L’article R. 121-14 du code des procédures civiles d’exécution (CPCE) prescrit que, sauf dispositions contraires, le juge de l’exécution statue comme juge du principal.
Enfin, le juge de l’exécution doit, en application de l’article R. 322-18 du CPCE, « mentionner le montant retenu pour la créance du poursuivant ».
Il résulte de ces dispositions que le juge de l’exécution peut trancher toutes les questions de fond dès lors qu’elles ont une influence sur la validité ou l’étendue de la mesure , mais juge que de la mesure, le juge ne pouvant créer une obligation à la charge du créancier susceptible d’y faire obstacle.
La demande fondée sur l’article 1699 du code civil dans le cadre de la saisie immobilière en cause est donc recevable devant la cour, statuant comme juge de l’exécution puisque cette prétention constitue un moyen de défense de la SCCV LES MANGUIERS.
Sur la demande du retrait litigieux :
Aux termes de l’article 1699 du code civil, celui contre lequel on a cédé un droit litigieux peut s’en faire tenir quitte par le cessionnaire, en lui remboursant le prix réel de la cession avec les frais et loyaux coûts, et avec les intérêts à compter du jour où le cessionnaire a payé le prix de la cession à lui faite.
L’article 1700 du même code prévoit que la chose est censée litigieuse dès qu’il y a procès et contestation sur le fond du droit.
Il convient donc de permettre à la SCCV LESMANGUIERS de faire valoir son droit au retrait de la créance servant de fondement à la saisie immobilière dès lors que la cession en bloc d’un grand nombre de droits et créances ne fait pas obstacle à l’exercice du droit de retrait litigieux à l’égard d’une créance qui y est incluse, dès lors que la détermination de son prix est possible.
Sur l’injonction de communication de pièces :
Selon les termes de l’article 11 du code de procédure civile, les parties sont tenues d’apporter leur concours aux mesures d’instruction sauf au juge à tirer toute conséquence d’une abstention ou d’un refus.
Si une partie détient un élément de preuve, le juge peut, à la requête de l’autre partie, lui enjoindre de le produire, au besoin à peine d’astreinte. Il peut, à la requête de l’une des parties, demander ou ordonner, au besoin sous la même peine, la production de tous documents détenus par des tiers s’il n’existe pas d’empêchement légitime.
En l’espèce, la SCCV LES MANGUIERS est fondée à solliciter les éléments destinés à présenter sa demande de retrait litigieux alors que le décompte présenté au soutien de la créance fondant la saisie immobilière est soumis à discussion et à contestations, compte tenu des versements effectués, du protocole d’accord confidentiel entre la BANQUE DE LA RÉUNION et la SCCV LES MANGUIERS en date du 21 décembre 2015, du montant de la cession de créance intervenue pour une somme supérieure à 1.100.000 euros en 2017, du décompte actualisé en appel de la créance alléguée.
En conséquence, la cour ordonnera à la SARL B SQUARED de produire une partie des pièces permettant l’exercice du droit au retrait litigieux et l’appréciation éventuelle du montant du retrait par la cour, énumérées dans la sommation de communiquer du 19 février 2024 (Pièce n° 3 de l’intimée), soit seulement :
. La copie de l’acte de cession de créance, par la société de Négociation Achat de Créances Contentieuses (NACC) à la société B-SQUARED INVESTMENTS contenant la créance détenue à l’encontre de la SCCV LES MANGUIERS ;
. Le montant de ladite cession de créance et les éléments contractuels et comptables permettant d’évaluer le montant de cession de la créance litigieuse.
Afin de garantir la célérité des parties, une astreinte sera prononcée.
L’examen de l’affaire sera renvoyée à une audience ultérieure.
Toutes les demandes seront réservées.
La cour, statuant publiquement, en matière civile, par arrêt avant dire-droit mis à disposition au greffe conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
DECLARE RECEVABLE la contestation soulevée en appel par la SCCV LES MANGUIERS portant sur la demande de retrait de la créance litigieuse ;
DECLARE RECEVABLE la demande de sursis à statuer ;
LA REJETTE .
ENJOINT à la SARL B SQUARED INVESTMENTS de produire les pièces suivantes visées dans la sommation de communiquer du 19 février 2024 (Pièce n° 3 de l’intimée) :
. La copie de l’acte de cession de créance, par la société de Négociation Achat de Créances Contentieuses (NACC) à la société B-SQUARED INVESTMENTS contenant la créance détenue à l’encontre de la SCCV LES MANGUIERS ;
. Le montant individualisé de la créance litigieuse cédée et les éléments contractuels et comptables permettant de l’évaluer ;
FAIT INJONCTION à la SARL B SQUARED INVESTMENTS de communiquer ces pièces à l’avocat de la SCCV LES MANGUIERS au plus tard le 30 octobre 2024 ;
FIXE l’astreinte provisoire à la somme de 150,00 euros par jour de retard qui courra à compter du 1er novembre 2024 et pendant un délai d’un mois ;
RENVOIE l’examen de l’affaire à l’audience du mardi 17 décembre 2024 à 10 heures 30 ;
RESERVE toutes les demandes.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT