La SCI Gargahouse a engagé la SARL Multinergie pour des travaux de rénovation, mais plusieurs factures sont restées impayées. La SCI a également signalé des malfaçons et des travaux inachevés. Après une injonction de payer, la SARL Multinergie a obtenu une ordonnance du tribunal pour le paiement de 7 319 euros, mais la SCI a formé opposition. Un jugement a ordonné une expertise judiciaire, et plusieurs décisions ont été rendues concernant les créances et les responsabilités des parties. La SARL Multinergie a ensuite assigné son assureur, Axa France IARD, en garantie. Des appels ont été interjetés par les deux parties concernant les jugements rendus. Les conclusions des parties portent sur la responsabilité des travaux, les indemnités, et les frais d’expertise, avec des demandes de condamnation et de garantie. L’instruction a été clôturée le 22 mai 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 26 SEPTEMBRE 2024
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 20/02412 – N° Portalis DBVK-V-B7E-OTG6
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 28 FEVRIER 2020
TRIBUNAL D’INSTANCE DE BEZIERS
N° RG 11-18-704
APPELANTES :
S.A.R.L. MULTINERGIE
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Frédéric HASTRON, avocat au barreau de MONTPELLIER
Autre qualité : appelante dans 20/05975 (Fond)
S.C.I. GARGAHOUSE
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Sandra CORDERO, avocat au barreau de BEZIERS
Autre qualité : appelante dans 20/02412 (Fond)
INTIMEE :
S.A AXA FRANCE IARD représenté par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER
Autre qualité : intimée dans 20/05975 (Fond)
Ordonnance de clôture du 22 Mai 2024
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 juin 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :
M. Gilles SAINATI, président de chambre
M. Thierry CARLIER, conseiller
M. Fabrice DURAND, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Hélène ALBESA
ARRET :
– contradictoire
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Hélène ALBESA, greffier.
EXPOSÉ DU LITIGE
La SCI Gargahouse a confié à la SARL Multinergie la réalisation de divers travaux de rénovation d’une maison à usage d’habitation pour les lots électricité, chauffage, climatisation et plomberie.
La SARL Multinergie a établi plusieurs devis et factures au fur et à mesure du chantier, jusqu’à ce que plusieurs factures des 31 janvier, 23 février et 15 mars 2017 ne soient pas réglées par la SCI Gargahouse.
Parallèlement la SCI Gargahouse s’est plainte de non-conformités, de malfaçons et de travaux inachevés.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 juillet 2014, le service juridique de la CAPEB Hérault, organisation professionnelle du bâtiment dont la SARL Multinergie est adhérente, a proposé en vain à la SCI Gargahouse une réunion contradictoire sur le chantier pour déterminer les travaux effectués, leur état d’avancement et les éventuelles malfaçons.
Par requête en injonction de payer du 28 septembre 2017, la SARL Multinergie a saisi le tribunal d’instance de Béziers aux fins de faire reconnaître sa créance à l’encontre de la SCI Gargahouse pour un montant total de 7 319 euros en principal.
Par ordonnance du 12 janvier 2018, il a été fait injonction à la SCI Gargahouse de payer à la SARL Multinergie la somme, en principal, de 7 319 euros outre 49,58 euros de frais et indemnités.
Cette ordonnance d’injonction de payer a été signifiée le 7 février 2018 à la SCI Gargahouse.
Le 7 mars 2018, la SCI Gargahouse a formé opposition à cette ordonnance.
Par jugement du 6 juillet 2018, le tribunal d’instance de Béziers a ordonné une expertise judiciaire et désigné Monsieur [F] [G], remplacé par la suite par Monsieur [U] [T], pour y procéder.
L’expert a déposé son rapport le 1er août 2019.
Par exploit du 14 octobre 2019, la SARL Multinergie a fait assigner son assureur la SA Axa France IARD en garantie. Les procédures n’ont pas été jointes.
Par jugement du 28 février 2020 (n° 11-18-000704), le tribunal judiciaire de Béziers, dans le cadre du litige opposant la SARL Multinergie à la SCI Gargahouse, a :
– Déclaré sans objet les demandes de la SARL ;
– Condamné la SCI Gargahouse à payer à la SARL Multinergie la somme de 7 319 euros au titre des factures restant dues, du 31 janvier 2017, du 23 février 2017 et du 15 mars 2017 avec TVA au taux de 5,5 % ;
– Condamné la SARL Multinergie à payer à la SCI Gargahouse la somme de 7 265 euros hors taxes avec TVA de 10 % au titre des travaux de reprise des désordres ;
– Débouté la SCI Gargahouse de sa demande au titre de l’aménagement des combles ;
– Débouté la SCI Gargahouse de sa demande au titre du préjudice de jouissance ;
– Débouté les parties de leurs demandes en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamné chacune des parties à leurs propres dépens ;
– Ordonné l’exécution provisoire.
Par jugement du 30 octobre 2020 (n° 20/00032), le tribunal judiciaire de Béziers, dans le litige opposant la SARL Multinergie à la SA Axa France Iard, a :
– Condamné la SA Axa France Iard à garantir la SARL Multinergie de la condamnation à payer à la SCI Gargahouse la somme de 7 265 euros hors-taxes avec TVA de 10 % ;
– Dit que les plafonds de garantie et la franchise prévus au contrat son inopposables au tiers lésé ;
– Ordonné l’exécution provisoire du jugement ;
– Débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamné la SA Axa France IARD aux dépens de la présente instance.
Par déclaration d’appel, enregistrée le 17 juin 2020 sous le n° 20/02412, la SCI Gargahouse a interjeté appel du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Béziers le 28 février 2020 en ce qu’il a :
– Débouté les parties de leurs demandes en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamné chacune des parties à leurs propres dépens.
Par déclaration d’appel, enregistrée le 22 décembre 2020 sous le n° 20/05975, la SARL Multinergie a interjeté appel du jugement rendu le 30 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de Béziers en ce qu’il a :
– Débouté les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamné la SA Axa France IARD aux dépens de la présence instance ;
– Rejeté les demandes de condamnation formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens y compris en ce compris les frais d’expertise judiciaire.
Par ordonnance du 31 mai 2021, le conseiller de la mise en état a joint les procédure n° RG 20/02412 et 20/05975 sous le n° RG 20/2412.
Dans ses dernières conclusions, enregistrées par le greffe le 21 juin 2021, SA Axa France IARD demande à la cour d’appel de :
– Juger mal fondée la SARL Multinergie en son appel ;
– L’en débouter ;
– Recevoir la SA Axa France IARD en son appel incident, le disant bien fondé ;
– Infirmer le jugement du 30 octobre 2020 en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a débouté la SARL Multinergie de sa demande au titre des frais irrépétibles ;
Statuant à nouveau à titre principal :
– Juger que le jugement du 28 février 2020 (RG n° 11/18/704) consacrant la responsabilité de la SARL Multinergie n’est pas opposable à la SA Axa France IARD ;
– Débouter la SARL Multinergie de ses demandes, fins et conclusions ;
Subsidiairement :
– Juger qu’en l’état de la police souscrite par la SARL Multinergie, la SA Axa France IARD ne garantit que les dommages de nature décennale et les dommages intermédiaires ;
– Juger que l’ouvrage n’a pas été réceptionné ;
– Juger que les conditions de la réception tacite ne sont pas réunies ;
– Juger que la démonstration du caractère décennal n’est pas rapportée ;
– Juger que la SA AXA France IARD ne peut être tenue au titre de la garantie responsabilité décennale ;
– Juger que sur la police « garantie des dommages intermédiaire », la SARL Multinergie avait souscrit une police en base « réclamation » ;
– Juger que le contrat d’assurance souscrit par la SARL Multinergie a été résilié au 1er janvier 2018 ;
– Juger que la réclamation s’entend comme une demande de réparation amiable ou contentieuse par la victime d’un dommage adressée à l’assuré ou l’assureur ;
– Juger que la SARL Multinergie ne justifie pas qu’une ou plusieurs réclamations amiables ou contentieuses lui aient été adressées par la SCI Gargahouse antérieurement au 1er janvier 2018 ;
– Juger que la date de la première réclamation ne saurait être antérieure au 6 mars 2018, date de l’opposition à ordonnance d’injonction de payer ;
– Juger que la clause du contrat d’assurance souscrit par la SARL Multinergie auprès de la SA Axa France IARD, selon laquelle la garantie est déclenchée par la réclamation pendant la période de validité du contrat, est valide et opposable à l’assuré ;
– Juger que la SA Axa France IARD démontre que la SARL Multinergie s’est réassurée auprès de la Compagnie GAN ;
– Juger que la SARL Multinergie devra supporter les conséquences d’une absence de diligences pour se réassurer immédiatement après avoir résilié sa police Axa ;
– Juger en tout état de cause que les désordres imputés à la SARL Multinergie ne correspondent pas aux dommages garantis par la police ;
– Juger que la SA Axa France IARD ne peut être tenue au titre de la garantie responsabilité civile des dommages intermédiaire ;
– Débouter la SARL Multinergie de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions en ce qu’elles sont dirigées à l’encontre de la SA Axa France IARD ;
– Prononcer purement et simplement la mise hors de cause de la SA Axa France Iard ;
Très subsidiairement, si la cour devait retenir l’existence d’une réception tacite et de dommages de nature décennale ou relevant de la garantie des dommages intermédiaires et devait juger que les garanties AXA ont vocation à être mises en ‘uvre :
– Juger que la garantie de la SA Axa France IARD sera limitée à une somme de 5 373,50 euros toutes taxes comprises ;
En toute hypothèse :
– Juger que compagnie la SA Axa France IARD est en toute hypothèse fondée à opposer sa franchise contractuelle réindexée conformément au contrat sur le volet des dommages intermédiaires s’agissant d’une garantie facultative et sur le volet décennal à l’égard de son assuré soit :
o 1 500 euros de franchise opposable à l’assuré sur le volet décennal ;
o 1 500 euros de franchise opposable tant à l’assuré qu’aux tiers s’agissant de la garantie des dommages intermédiaires, laquelle est une garantie facultative ;
– Condamner la SARL Multinergie et tout succombant à verser à la SA Axa France IARD la somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel ;
– Débouter la SARL Multinergie de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Dans ses dernières conclusions, enregistrées par le greffe le 21 juillet 2021, la SARL Multinergie demande à la cour d’appel de :
– Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Béziers du 28 février 2020 en toutes ses dispositions ;
– Dire et juger recevable en la forme l’appel formé par la SARL Multinergie, et au fond y faisant droit ;
– Dire et juger recevables et bien fondées les demandes de la SARL Multinergie ;
– Dire et juger que les lots « chauffage climatisation », « chaudière radiateurs » et « VMC » ont été réceptionnés sans réserve le 16 mars 2017 ;
– Dire et juger que les lots « plomberie, sanitaire et électricité » ont été réceptionnés avec réserves au 16 mars 2017 telles que décrites dans le courriel de Monsieur [L] du 5 mars 2017 ;
– Dire et juger que le montant des travaux de reprise à effectuer consécutivement aux désordres affectant les travaux de la SARL Multinergie est évalué à 7 265 euros HT,soit 7 991,50 euros toutes taxes comprises (TVA à 10 %) ;
– Dire et juger que les échanges de sms et courriels entre les parties ainsi que les démarches entreprises par la Capeb Hérault pour le compte de la SARL Multinergie démontrent qu’une réclamation sur les travaux exécutés a été effectué par la SCI Gargahouse antérieurement au 1er janvier 2018 ;
– Dire et juger que les désordres constatés suivants, relèvent de la responsabilité décennale de la SARL Multinergie :
o Absence de bouche d’aspiration de la VMC desservant la cuisine et conduit écrasé dans les combles ;
o Pose non conforme d’une prise de courant dans la salle d’eau du RDC et absence de Liaison Équipotentielle Secondaire sur les huisseries de la salle d’eau ;
o Reprise du tableau électrique ;
o Problème lié à l’implantation de la chaudière et de son réseau de fumisterie ;
– Dire et juger que les désordres constatés suivants, relèvent de la garantie des dommages intermédiaires de la SARL Multinergie ;
o Défaut de pose des appareillages des zones : cuisine, chambre, coin feux, séjour ;
o Défaut de pose des spots de la cuisine ;
– Dire et juger que la SARL Multinergie est couverte au titre de sa responsabilité civile décennale et professionnelle par le contrat d’assurance AXA France IARD dénommé « BT PLUS » n° 4993944204 ;
– Condamner la SA Axa France IARD, à relever et garantir la SARL Multinergie indemne de toutes condamnations ;
– Condamner la SA Axa France IARD aux entiers dépens en ce compris les frais d’expertise de première instance et d’appel ;
– Condamner tout succombant au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions, enregistrées par le greffe le 4 août 2022, la SCI Gargahouse demande à la cour d’appel de :
– Dire et juger recevable en la forme l’appel formé par la SCI Gargahouse, et au fond y faisant droit ;
– Dire et juger recevables et bien fondées les demandes de la SCI Gargahouse ;
– Réformer le Jugement déféré en ce qu’il a qu’il a débouté la SCI Gargahouse de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et l’a condamnée à ses entiers dépens ;
– Le confirmer pour le surplus
Statuant à nouveau :
– Condamner la SARL Multinergie à verser à la SCI Gargahouse la somme de 2 500 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel, en ce compris les frais d’expertise s’élevant à la somme de 3 199,95 euros.
La clôture de l’instruction est intervenue le 22 mai 2024.
I. Sur la garantie d’Axa à l’égard de la SARL Multinergie
A. Sur l’autorité de la chose jugée du jugement rendu le 28 février 2020 par le tribunal judiciaire de Béziers (art. 1351 ancien du code civil)
Le tribunal, dans son jugement du 30 octobre 2020 a estimé qu’au regard du jugement du 28 février 2020, le moyen soulevé par l’assureur consistant à indiquer que les désordres relèveraient de la responsabilité contractuelle au titre des dommages intermédiaires, de même, la limitation des dommages de nature décennale seront rejetés pour avoir été jugés dans le précédent jugement.
Axa France Iard estime que le jugement du 28 février 2020 n’a pas autorité de la chose jugée à son égard :
– Il n’y a pas identité de parties à l’instance de sorte que le jugement du 28 février 2020 ne lui est pas opposable et ne revêt pas l’autorité de la chose jugée à son égard ;
– Le tribunal judiciaire de Béziers dans son jugement du 30 octobre 2020 ne pouvait entrer en voie de condamnation sur la foi du jugement du 28 février 2020 qui, bien qu’ayant consacré la responsabilité de la SARL Multinergie en visant l’article 1792 du code civil n’a statué ni sur la question de la réception du chantier, ni sur la nature décennale ou non des désordres relevés.
La SARL Multinergie ne remet pas en cause l’absence d’autorité de la chose jugée du jugement du 28 février 2020 à l’égard d’Axa.
Cependant elle estime que ses demandes tendant à la condamnation de son assureur se fondent sur le rapport d’expertise déposé le 1er août 2019 et que :
– L’assureur qui, en connaissance des résultats de l’expertise, a eu la possibilité d’en discuter les conclusions, ne peut sauf fraude à son encontre, soutenir que l’expertise à laquelle il n’a pas participé lui est inopposable ;
– Par conséquent le rapport d’expertise est opposable à Axa ;
– Dans le jugement du 30 octobre 2020, le tribunal judiciaire a considéré, au regard du rapport d’expertise, que les désordres étaient de nature décennale et que les ouvrages avaient été réceptionnés tacitement. L’assureur doit donc garantie.
En matière de garantie décennale, il est un principe et une jurisprudence applicable impliquant que la responsabilité de l’assuré est opposable à l’assureur même absent de l’instance car cette décision judiciaire constitue la preuve de la réalisation du risque. L’assureur ne peut alors pas contester la décision, s’agissant d’une assurance obligatoire qui entraîne automatiquement l’application de la garantie, l’assureur ne peut contester que la couverture du risque, ce en application de l’article L 113-5 du code des assurances.
B. Sur les garanties des désordres de nature décennale (1792 c. civ.)
Le tribunal, dans son jugement du 28 février 2020 a condamné la SARL Multinergie à la somme de 7 265 euros hors-taxes pour divers désordres résultants de défauts d’exécutions (lots : électricité, plomberie, VMC, chaudière, radiateurs et chauffages) relevés sur le chantier et imputables à la SARL Multinergie. Il a précisé que la SARL Multinergie reconnaissait être pleinement responsable des désordres affectant ces travaux et constatés par l’expert.
Puis le tribunal dans son jugement du 30 octobre 2020 a retenu la garantie d’Axa au titre des travaux de reprise des désordres nécessairement de nature décennale et postérieurement à une réception tacite bien que non expressément indiqués.
Axa France IARD discute l’application de la garantie décennale alors la SARL Multi énergie développe une position inverse en examinant chacun des désordres.
Il sera souligné qu’au terme d’un arrêt en date du 18 février 2016 mais qui reprend une position ancienne, la Cour de cassation (3ème Civ 18 février 2016, n° 14-29200), sur le fondement de l’article L. 113-5 du Code des assurances précité dispose que « Lors de la réalisation du risque ou à l’échéance du contrat, l’assureur doit exécuter dans le délai convenu la prestation déterminée par le contrat et ne peut être tenu au-delà. »
Au terme de cet arrêt, la 3e chambre civile rappelle que pour l’application de ce texte, la décision judiciaire condamnant l’assuré en raison de sa responsabilité, constitue pour l’assureur la réalisation, tant dans son principe que dans son étendue, du risque couvert et lui est dès lors opposable, à moins de fraude à son encontre.
L’analyse des désordres ne révèle pas une fraude à l’égard de l’assurance s’agissant :
– de l’absence de bouche d’aspiration de la VMC desservant la cuisine et le conduit écrasé dans les combles : ce défaut affecte un élément d’équipement indissociable dont le dysfonctionnement rend l’ouvrage impropre à sa destination ;
– de la pose non conforme d’une prise de courant dans la salle d’eau du rez-de-chaussée et l’absence de liaison équipotentielle secondaire sur les huisseries de la salle d’eau : ces non-conformités portent atteinte à la sécurité des personnes ;
– de la reprise du tableau électrique et du problème de la chaudière, autant de non-conformité qui porte atteinte à la sécurité des personnes ;
Enfin la réception tacite a été justement appréciée par le premier juge.
En conséquence, la SA Axa France IARD devra garantir la SARL Multinergie de la condamnation à payer à la SCI Gargahouse.
C. Sur le montant de la garantie et les plafonds de garantie en matière de garantie décennale.
Le tribunal, dans son jugement du 30 octobre 2010 a considéré qu’en l’absence de clause de non-garantie ou d’exclusion de garantie, la SA Axa France Iard est condamnée à garantie la SARL Multinergie de sa condamnation et que du fait qu’il s’agit d’une assurance obligatoire souscrite sur le fondement de l’article 1792 du code civil, les plafonds de garantie et la franchise prévus au contrat sont inopposables au tiers lésé.
La SA Axa France IARD estime que si la garantie d’Axa est retenue, sa garantie n’est mobilisable que pour une partie des désordres pour un montant total de 5 373,50 euros toutes taxes comprises. Elle ajoute par ailleurs qu’elle est fondée à opposer sa franchise contractuelle s’agissant d’une garantie facultative au titre des dommages intermédiaires et au titre du volet décennal à l’égard de son assuré.
Il s’avère que comme il a été mentionné plus haut, les désordres relèvent de la garantie décennale, dès lors les développements au regard des limitations de garantie du fait de désordres intermédiaires ne trouvent pas dans ce cas application.
Enfin, la somme de 7 289 euros a été évaluée par l’expert au titre des travaux propres remédier aux désordres déjà cités ainsi qu’à l’absence de câblage sur l’installation du séjour, qui est bien de nature à rendre impropre l’installation de cette pièce, la mauvaise implantation de la chaudière du fait d’un mauvais positionnement du conduit de gaz brûlés impliquant une non-conformité aux règles portant atteinte à la sécurité et la nécessité de la déplacer est évaluée par l’expert à 1 450 euros avec sa conséquence, soit le nécessaire percement et reprise du mur de façade pour 1 880 euros.
Il sera relevé qu’en matière d’assurance obligatoire, les plafonds de franchise s’avèrent inapplicables.
Qu’en conséquence, au titre des ces désordres de nature décennale, la SA Axa devra garantir la somme de 7 265 euros hors-taxes avec TVA de 10 % .
II. Les frais irrépétibles et les dépens
Le tribunal, dans son jugement du 28 février 2020 et le litige opposant la SCI Gargahouse à la SARL Multinergie a estimé :
Concernant les dépens ; les parties succombant chacune en leurs prétentions, elles étaient condamnées chacune en leurs entiers dépens (art. 696 c. civ.).
Concernant les frais irrépétibles , l’équité commandait de ne pas faire droit aux demandes de frais irrépétibles.
La SCI Gargahouse demande l’infirmation du jugement.
Concernant les dépens elle considère :
– Inéquitable de laisser à la charge d’une des parties les frais d’expertise et de faire supporter en pareil cas les dépens, et notamment les frais d’expertise, au maître d’ouvrage, ce qui le condamnerait à le priver de son droit de se défendre, se défendre étant sanctionné financièrement ;
– Il aurait été moins coûteux de payer les travaux mal réalisés qu’un conseil et un expert.
Concernant les frais irrépétibles, elle considère que :
– L’instance a pour origine les manquements de la SARL Multinergie qui « s’en sortira indemne » en raison de la garantie d’Axa ;
– Elle estime avoir été sanctionnée pour avoir mis un terme à la collaboration et à juste titre ne pas s’exécuter face à la mauvaise exécution de la SARL Multinergie et donc d’avoir été mesurée, alors que la SARL Multinergie a agi en recouvrement de factures afférentes à des prestations jugées impropres.
Elle sollicite la condamnation de la SARL Multinergie à la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d’appel dont 3199,95 euros au titre des frais d’expertise.
La SARL Multinergie demande la confirmation des jugements en s’accordant avec leurs motivations et subsidiairement, en cas de condamnation, la garantie d’Axa.
Axa France IARD demande l’infirmation du jugement du 30 octobre 2020 sans développer de moyen à ce sujet et sollicite la condamnation de la SARL Multenergie et tout succombant à verser à la SA AXA France IARD la somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Il apparaît que la société Multinergie est succombante à titre principal dans le jugement du 28 février 2020 qui révèle sa responsabilité dans des désordres décennaux portant des risques graves à la sécurité des personnes, à ce titre elle sera condamnée au paiement de la somme de 2 000 euros à la SCI Gargahouse au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d’appel dont 3 199,95 euros au titre des frais d’expertise.
LA SA AXA succombant à l’égard de la société Multinergie sera condamnée a payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens y compris les frais d’expertise de première instance et d’appel.
La cour,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Béziers du 30 octobre 2020 ;
Tenant l’appel limité concernant le jugement du tribunal judiciaire de Béziers du 28 février 2020 ;
Infirme ce jugement concernant les dispositions sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau,
Condamne la SARL Multinergie à payer à la SCI Gargahouse la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d’appel dont 3 199,95 euros au titre des frais d’expertise ;
Condamne la SA AXA à payer à la société SCI Multinergie à payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens y compris les frais d’expertise de première instance et d’appel.
le greffier le président