Analyse des conséquences juridiques liées à la déchéance des droits contractuels en matière de crédit à la consommation

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Analyse des conséquences juridiques liées à la déchéance des droits contractuels en matière de crédit à la consommation

La société Sogefinancement a accordé un crédit personnel de 33 659 euros à M. [H] en mars 2016, remboursable en 84 mensualités. Un avenant en septembre 2017 a réaménagé le montant dû à 29 366,81 euros, avec des mensualités réduites. Suite à des impayés, Sogefinancement a demandé la déchéance du terme et a assigné M. [H] en juillet 2022. Le tribunal a déclaré Sogefinancement recevable mais l’a déchue de ses intérêts contractuels, condamnant M. [H] à payer 6 733,68 euros. Sogefinancement a interjeté appel, demandant l’infirmation du jugement et le paiement d’une somme plus élevée, tout en contestant la prescription et la déchéance des intérêts. À l’audience, la cour a noté que la fiche d’information précontractuelle n’était pas signée et a demandé des justificatifs de remise. La banque a soutenu que la signature n’était pas nécessaire pour prouver la remise de ce document.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

26 septembre 2024
Cour d’appel de Paris
RG
23/01940
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9 – A

ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2024

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/01940 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHAOW

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 novembre 2022 – Juge des contentieux de la protection du RAINCY – RG n° 11-22-000926

APPELANTE

La société SOGEFINANCEMENT, société par actions simplifiée, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège

N° SIRET : 394 352 272 00022

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉ

Monsieur [G] [H]

né le [Date naissance 1] 1980 au VIETNAM

[Adresse 2]

[Localité 4]

DÉFAILLANT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 juin 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

– RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Marylène BOGAERS,

Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre préalable acceptée le 8 mars 2016, la société Sogefinancement a consenti à M. [G] [H] un crédit personnel d’un montant en capital de 33 659 euros remboursable en 84 mensualités de 512,95 euros hors assurance incluant les intérêts au taux nominal de 7,30 %, le TAEG s’élevant à 7,61 %, soit une mensualité avec assurance de 534,83 euros.

Par avenant du 20 septembre 2017, les parties ont convenu d’un réaménagement du montant dû à cette date de 29 366,81 euros par réduction du montant des mensualités à la somme de 414,84 euros assurance comprise, sur 99 mois du 2 décembre 2017 au 2 février 2026.

Plusieurs échéances n’ayant pas été honorées, la société Sogefinancement a entendu se prévaloir de la déchéance du terme.

Par acte du 5 juillet 2022, la société Sogefinancement a fait assigner M. [H] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité du Raincy en paiement du solde du prêt lequel, par jugement réputé contradictoire du 24 novembre 2022, a déclaré la société Sogefinancement recevable en son action mais l’a déchue de son droit aux intérêts contractuels et a condamné M. [H] au paiement de la somme de 6 733,68 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 9 décembre 2021, rejeté la demande de capitalisation des intérêts, condamné M. [H] à payer à la société Sogefinancement la somme de 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens et débouté la société Sogefinancement de ses autres demandes.

Après avoir contrôlé la recevabilité de la demande au regard de la forclusion et la régularité de la déchéance du terme et pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, le juge a retenu que le montant de l’assurance n’apparaissait pas dans l’encadré et qu’il n’était pas justifié de la remise de la notice d’assurance.

Il a déduit les sommes versées soit 26 925,32 euros du capital emprunté et a relevé que pour assurer l’effectivité de la sanction il fallait écarter l’application des dispositions relatives à la majoration de plein droit du taux légal de 5 points. Il a rejeté la demande de capitalisation des intérêts comme contraire aux dispositions de l’article L. 312-38 du code de la consommation.

Par déclaration réalisée par voie électronique le 17 janvier 2023, la société Sogefinancement a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions déposées par voie électronique le 17 avril 2023, la société Sogefinancement demande à la cour :

– de la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

– d’infirmer le jugement sauf en ce qu’il l’a déclarée recevable en sa demande et a condamné M. [H] aux dépens et au paiement d’une somme de 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– de déclarer irrecevables les moyens visant à faire prononcer la déchéance du droit aux intérêts au regard du délai de prescription quinquennale, et subsidiairement de rejeter le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels,

– de constater que la déchéance du terme a été prononcée, subsidiairement de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit au vu des manquements de l’emprunteur dans son obligation de rembourser les échéances du crédit et fixer la date des effets de la résiliation au 7 décembre 2021 et,

– en tout état de cause, de condamner M. [H] à lui payer la somme de 21 865,04 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 7,30 % l’an à compter du 8 décembre 2021 et de dire et juger n’y avoir lieu d’écarter la majoration de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier,

– d’ordonner la capitalisation des intérêts à compter de l’assignation,

– en tout état de cause de condamner M. [H] à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens avec distraction au profit de Selas Cloix & Mendes Gil.

S’agissant de la prescription, elle fait valoir que celle-ci s’applique à toutes les demandes qu’elles soient formées par voie d’action ou par voie d’exception, que la demande de déchéance du droit aux intérêts est bien une demande puisqu’elle vise à compenser les intérêts avec la créance et que cette prescription s’applique aussi bien aux parties qu’au juge qui ne peut avoir plus de droits que les parties elles-mêmes. Elle se prévaut de l’article L. 110-4 du code de commerce dans sa version applicable après l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, laquelle a réduit ce délai à 5 ans et soutient que les arguments soulevés au titre d’une déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel ou du formalisme contractuel ne pouvaient donc être invoqués que jusqu’au 8 mars 2021 alors que le juge l’a soulevé à l’audience du 29 septembre 2022.

Elle fait valoir que lorsque l’assurance est facultative, le montant de l’assurance n’a pas à figurer dans l’encadré. Elle ajoute qu’aucune disposition du code de la consommation n’impose de parapher ou de signer la notice d’assurance, que l’offre de prêt comporte une mention selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu, pris connaissance et conservé un exemplaire de la notice d’information et qu’elle n’est pas dans l’obligation de la produire. Elle ajoute que l’emprunteur ne contestait pas cette remise et qu’en tout état de cause elle produit la notice en appel.

Elle soutient que l’indemnité d’exigibilité anticipée, dont le montant est limité en fonction de la durée de remboursement du crédit, et donc proportionnée au préjudice subi par le prêteur du fait de la défaillance du débiteur, n’est pas manifestement excessive.

Elle s’estime fondée à obtenir le paiement de la somme de 21 865,04 euros.

A titre subsidiaire, elle rappelle que le juge n’a pas le pouvoir d’écarter l’application du taux légal, et que seul le juge de l’exécution est donc en mesure de se prononcer sur le caractère non dissuasif de la sanction de la déchéance du droit aux intérêts contractuels au regard de l’application du taux majoré.

Aucun avocat ne s’est constitué pour M. [H] à qui la déclaration d’appel a été signifiée par acte du 15 mars 2023 délivré à personne et les conclusions par acte du 27 avril 2023 délivré à étude.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l’appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 mai 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience le 11 juin 2024.

A l’audience la cour ayant examiné les pièces a relevé que la FIPEN produite n’était pas signée. Elle a fait parvenir le 11 juin 2024 au conseil de la banque par RPVA un avis rappelant que dans un arrêt du 7 juin 2023 (pourvoi 22-15.552) la première chambre de la cour de cassation avait considéré que la preuve de la remise de la FIPEN ne pouvait se déduire de la clause de reconnaissance et de la seule production de la FIPEN non signée, ce document émanant de la seule banque, souligné que l’intimé ne comparaissait pas et a invité la banque à produire tout justificatif de la remise de cette FIPEN et le cas échéant à faire valoir ses observations sur la déchéance du droit aux intérêts encourue à défaut de preuve de remise, et ce au plus tard le 4 juillet 2024.

Le 4 juillet 2024, la banque a fait parvenir une note en délibéré aux termes de laquelle elle fait valoir :

– qu’aucun texte ne prévoit que la FIPEN soit signée et que sa seule obligation consiste à remettre cette fiche d’information,

– que jusqu’à l’arrêt du 7 juin 2023 visé dans l’avis, la Cour de cassation admettait que la remise d’un document constituant un fait juridique, il pouvait être prouvé par tous moyens et notamment par une clause de reconnaissance, et qu’il en était déduit, de manière constante, que la clause combinée à la production de la copie du document permettait à l’établissement de crédit de rapporter la preuve de la remise du document sans qu’il soit nécessaire que ledit document soit signé par l’emprunteur,

– que l’exigence d’un document émanant du débiteur n’est requise qu’en matière de preuve des actes juridiques par l’article 1362 du code civil,

– que l’apposition de la signature de l’emprunteur sur le document ne confère, en outre, pas à la production un caractère plus probant que celui résultant de la signature sous la clause de reconnaissance corroborée par la production d’une copie du document,

– que la FIPEN soit ou non signée laisse à l’emprunteur la faculté de rapporter la preuve contraire que le document qui lui a été remis n’est pas celui que le prêteur a produit, en produisant le cas échéant l’exemplaire qui lui a été remis,

– que l’arrêt du 7 juin 2023 apparaît en contradiction avec une position jusqu’alors clairement établie, qu’il ne peut qu’être analysé qu’en un arrêt d’espèce voire d’égarement isolé et ne saurait être suivi, étant rappelé que la loi a une valeur normative supérieure et que jusqu’alors la présente cour statuait différemment,

– que changer de jurisprudence conduirait à heurter gravement le principe de sécurité juridique et que cette règle ne peut au mieux valoir que pour l’avenir et ne saurait être appliquée rétroactivement car la banque n’était pas en mesure de prévoir cette exigence nouvelle,

– qu’il y a donc lieu de ne pas prononcer de déchéance du droit aux intérêts de ce chef.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Il résulte de l’article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.

Sur la demande en paiement

Le présent litige est relatif à un crédit souscrit le 8 mars 2016 soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu’il doit être fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

Sur la forclusion

La recevabilité de l’action de la société Sogefinancement au regard de la forclusion, vérifiée par le premier juge, n’est pas remise en cause à hauteur d’appel. Le jugement doit être confirmé sur ce point.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

La prescription du moyen

La société Sogefinancement soutient que le juge du fond ne pouvait soulever d’office le 29 septembre 2022 le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels au regard du délai de prescription quinquennale ayant commencé à courir à la date d’acceptation de l’offre et devant se terminer au 8 mars 2021.

La prescription est sans effet sur l’invocation d’un moyen qui tend non pas à l’octroi d’un avantage, mais seulement à mettre en échec une prétention adverse.

C’est ainsi que, défendant à une action en paiement du solde d’un crédit à la consommation, l’emprunteur peut opposer tout moyen tendant à faire rejeter tout ou partie des prétentions du créancier par application d’une disposition du code de la consommation prévoyant la déchéance du droit aux intérêts, sans se voir opposer la prescription, pour autant qu’il n’entende pas en obtenir un autre avantage tel le remboursement d’intérêts indûment acquittés.

Dans le rôle qui lui est conféré tant par l’article L. 141-4 (devenu R. 632-1) du code de la consommation que par le droit européen, le juge peut relever d’office, sans être enfermé dans un quelconque délai, toute irrégularité qui heurte une disposition d’ordre public de ce code.

En l’espèce, le moyen soulevé d’office par le premier juge comme par la cour et susceptible de priver le prêteur de son droit aux intérêts contractuels n’a pas pour effet de conférer à l’emprunteur un avantage autre qu’une minoration de la créance dont la société Sogefinancement poursuit le paiement.

Loin de constituer un remboursement des intérêts acquittés par le jeu d’une compensation qui supposerait une condamnation -qui n’est pas demandée- de l’organisme de crédit à payer une dette réciproque, ces moyens ne peuvent avoir pour seul effet que de modifier l’imputation des paiements faits par l’emprunteur.

En conséquence, il convient d’écarter la fin de non-recevoir soulevée par la société Sogefinancement.

L’encadré

L’article L. 311-18 (devenu L. 312-28) du code de la consommation dispose qu’un encadré, inséré au début du contrat, informe l’emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit.

Il résulte de l’article L. 311-48 al.1 (devenu L. 341-1) du code de la consommation que lorsque le prêteur n’a pas respecté les obligations fixées à l’article L. 311-18 (devenu L. 312-28), il est déchu du droit aux intérêts.

L’article R. 311-5 (devenu R. 312-10) précise que cet encadré doit notamment mentionner [‘] h) Les sûretés et les assurances exigées, le cas échéant. En conséquence dès lors que l’assurance n’est pas exigée par le prêteur, ces dispositions légales et réglementaires n’imposent pas que le coût mensuel de l’assurance soit indiqué dans cet encadré.

C’est donc en ajoutant aux textes précités que le premier juge a retenu que la banque encourrait la déchéance du droit aux intérêts pour n’avoir pas mentionné le coût de l’assurance facultative dans l’encadré prévu par l’article L. 311-18 (devenu L. 312-28).

La notice d’assurance

L’article L. 311-19 devenu L. 312-29 du code de la consommation impose au prêteur, lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, de remettre à l’emprunteur une notice qui comporte les extraits des conditions générales de l’assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l’assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus. Si l’assurance est obligatoire pour obtenir le financement, l’offre préalable rappelle que l’emprunteur peut souscrire une assurance équivalente auprès de l’assureur de son choix. Si l’assurance est facultative, l’offre préalable rappelle les modalités suivant lesquelles l’emprunteur peut ne pas y adhérer.

Il résulte de l’article L. 311-48 al 1 devenu L. 341-4 du code de la consommation que l’absence de remise de cette notice entraîne la déchéance du droit aux intérêts pour le prêteur.

Contrairement à ce que soutient la banque, la preuve de la remise de la notice et de sa conformité ne sauraient résulter d’une simple clause pré-imprimée selon laquelle l’emprunteur reconnaît la remise, une telle clause ne constituant qu’un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments de preuve pertinents et notamment la production de la notice.

En l’espèce, le contrat contient une clause pré-imprimée selon laquelle l’emprunteur reconnaît la remise, et si une telle clause ne constitue qu’un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer, il reste qu’il produit également la notice elle-même et dès lors la déchéance du droit aux intérêts contractuels n’est pas encourue de ce chef.

La fiche d’informations précontractuelles

Il résulte de l’article L. 311-6 du code de la consommation applicable au cas d’espèce (devenu L. 312-12) que préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit donne à l’emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l’emprunteur, compte tenu de ses préférences, d’appréhender clairement l’étendue de son engagement.

Cette fiche d’informations précontractuelles -FIPEN- est exigée à peine de déchéance totale du droit aux intérêts (article L. 341-1), étant précisé qu’il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à son obligation d’information et de remise de cette FIPEN.

A cet égard, la clause type, figurant au contrat de prêt, selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu la fiche d’informations précontractuelles normalisées européennes, n’est qu’un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.

Il a toutefois été jugé qu’un document qui émane du seul prêteur ne peut utilement corroborer les mentions de cette clause type de l’offre de prêt pour apporter la preuve de l’effectivité de la remise. (Cass. civ. 1, 7 juin 2023, n° 22-15.552).

Dès lors, la production de la FIPEN remplie par le prêteur ne saurait suffire à corroborer cette clause car ce qui doit être prouvé d’emblée par le prêteur est la remise effective à M. [H] non représenté en appel, de la FIPEN personnalisée.

Il doit dès lors être considéré que la société Sogefinancement qui ne produit que le contrat comportant une clause de reconnaissance et une FIPEN remplie mais non signée par M. [H] ne rapporte pas suffisamment la preuve d’avoir respecté l’obligation qui lui incombe, sans qu’elle puisse valablement opposer que la signature de cette pièce n’est pas exigée par les textes ou que le fait que l’appréciation des éléments de preuve apportés ait pu être différente est de nature à heurter un principe de sécurité juridique.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a retenu une déchéance du droit aux intérêts contractuels.

Il y a toutefois lieu de la prononcer de manière formelle.

Sur le montant des sommes dues

La société Sogefinancement produit en sus de l’offre de contrat de crédit qui comporte une clause de déchéance du terme, l’avenant de réaménagement, l’historique de prêt, les tableaux d’amortissement, la mise en demeure avant déchéance du terme du 12 novembre 2021 enjoignant à M. [H] de régler l’arriéré de 1 357,61 euros sous 15 jours à peine de déchéance du terme et celle notifiant la déchéance du terme du 9 décembre 2021 portant mise en demeure de payer le solde du crédit et un décompte de créance.

La régularité de la déchéance du terme retenue par le premier juge n’est pas remise en cause.

Aux termes de l’article L. 311-48 devenu L. 341-8 du code de la consommation, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu. Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

Il y a donc lieu comme l’a fait le premier juge de déduire de la totalité des sommes empruntées soit 33 659 euros la totalité des sommes payées soit 26 925,32 euros et de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné M. [H] à payer à la société Sogefinancement la somme de 6 733,68 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 9 décembre 2021.

La limitation légale de la créance du préteur exclut qu’il puisse prétendre au paiement de toute autre somme et notamment de la clause pénale prévue par l’article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation. La société Sogefinancement doit donc être déboutée sur ce point et le jugement confirmé.

Sur les intérêts au taux légal, la majoration des intérêts au taux légal et la capitalisation des intérêts

Le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, en vertu de l’article 1153 devenu 1231-6 du code civil, sur le capital restant dû, majoré de plein droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier.

Ces dispositions légales doivent cependant être écartées s’il en résulte pour le prêteur la perception de montants équivalents ou proches de ceux qu’il aurait perçus si la déchéance du droit aux intérêts n’avait pas été prononcée, sauf à faire perdre à cette sanction ses caractères de dissuasion et d’efficacité (CJUE 27 mars 2014, affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA / Fesih Kalhan).

En l’espèce, le crédit personnel a été accordé à un taux d’intérêts annuel fixe de 7,30 %.

Dès lors, les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal significativement inférieurs à ce taux conventionnel ne le seraient plus si ce taux devait être majoré de cinq points. Il convient en conséquence de ne pas faire application de l’article 1231-6 du code civil dans son intégralité et de dire qu’il ne sera pas fait application de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier. La somme restant due en capital au titre de ce crédit portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure de payer effectuée simultanément au prononcé de la déchéance du terme soit le 9 décembre 2021 sans majoration de retard, ce que le juge du fond comme la cour peuvent parfaitement apprécier, sans que ceci relève de la compétence exclusive du juge de l’exécution, le jugement étant donc également confirmé sur ce point.

La capitalisation des intérêts doit être écartée pour les mêmes motifs et le jugement doit également être confirmé sur ce point.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a condamné M. [H] aux dépens de première instance et au paiement à la société Sogefinancement de la somme de 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. La société Sogefinancement qui succombe doit conserver la charge de ses dépens d’appel et de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Rejette la fin de non-recevoir ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Prononce la déchéance du droit aux intérêts contractuels ;

Laisse les dépens d’appel à la charge de la société Sogefinancement ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

La greffière La présidente


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