M. [O] [C] a engagé M. [L] [V] pour des travaux de gros œuvre dans son logement, selon un devis de 13 602,79 euros TTC daté du 10 décembre 2020. Tous les paiements ont été effectués, sauf une facture de solde de 3 300,84 euros émise le 28 février 2021. M. [V] a également réalisé une tranchée et fourni des matériaux pour des cloisons dans un garage, pour lesquels une facture de 1 239,36 euros TTC a été émise le 3 mai 2021, mais n’a pas été réglée. Une sommation de payer a été envoyée le 14 juin 2021 pour un total de 4 540,20 euros, incluant les deux factures impayées. M. [V] a cessé son activité le 30 juin 2021 et a obtenu une ordonnance le 16 juillet 2021 contre M. [C] pour le paiement de cette somme. L’ordonnance a été signifiée le 3 août 2021, et M. [C] a formé opposition le 30 août 2021. En première instance, M. [C] a demandé à la juridiction…
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N°
[C]
C/
[V]
DB/MC/SGS/DPC
COUR D’APPEL D’AMIENS
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU VINGT SIX SEPTEMBRE
DEUX MILLE VINGT QUATRE
Numéro d’inscription de l’affaire au répertoire général de la cour : N° RG 23/00586 – N° Portalis DBV4-V-B7H-IVLE
Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D’AMIENS DU DIX SEPT OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX
PARTIES EN CAUSE :
Monsieur [O] [C]
né le 11 Avril 1982 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Alexandre COUTEL substituant Me Xavier D’HELLENCOURT de l’ASSOCIATION CABINET D’HELLENCOURT, avocats au barreau d’AMIENS
APPELANT
ET
Monsieur [L] [V] exerçant sous l’enseigne entreprise RPM
né le 21 Février 1964 à [Localité 6]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Ségolène MERCIER substituant Me Ludivine BIDART-DECLE, avocats au barreau d’AMIENS
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/000784 du 06/04/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle d’AMIENS)
INTIME
DEBATS :
A l’audience publique du 30 mai 2024, l’affaire est venue devant M. Douglas BERTHE, magistrat chargé du rapport siégeant sans opposition des avocats en vertu de l’article 805 du Code de procédure civile. Ce magistrat a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 26 septembre 2024.
La Cour était assistée lors des débats de Mme Mathilde CRESSENT, greffière.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Le magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour composée de M. Douglas BERTHE, Président de chambre, président, Mme Graziella HAUDUIN, Présidente de chambre et Mme Clémence JACQUELINE, Conseillère, qui en ont délibéré conformément à la Loi.
PRONONCE DE L’ARRET :
Le 26 septembre 2024, l’arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par M. Douglas BERTHE, Président de chambre et Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.
* *
DECISION :
M. [O] [C] a fait appel à M. [L] [V], artisan exerçant sous l’enseigne « RPM » pour des travaux de gros ‘uvre dans un logement, notamment suivant devis final du 10 décembre 2020 pour un montant de 13 602,79 euros TTC.
Les travaux correspondant à ce devis ont été payés à l’exception d’une facture de solde de 3 300,84 euros émise le 28 février 2021.
Par ailleurs, une tranchée a été réalisée et il a été fourni par M. [V] à M. [C] les matériaux nécessaires pour la création de cloisons d’un local technique au sein du garage. Au titre de cette prestation, une facture de 1 239,36 euros TTC a été émise le 3 mai 2021 et n’a pas été réglée.
Une sommation de payer a été émise le 14 juin 2021 au titre du paiement des deux factures impayées, pour un principal de 4 540,20 euros, outre le coût de l’acte.
M. [V] a cessé son activité le 30 juin 2021.
M. [V] a obtenu le 16 juillet 2021 une ordonnance à l’encontre de M. [O] [C] enjoignant à ce dernier de payer la somme de 4 540,20 euros en principal au titre du total des deux factures impayées.
L’ordonnance a été signifiée le 3 août 2021 et M. [C] a formé opposition le 30 août 2021.
En première instance, M. [C] a sollicité que la juridiction :
Déboute M. [V] de l’intégralité de ses demandes,
Condamne M. [V] à lui verser la somme de 10 000 euros pour compenser son préjudice,
Condamne M. [V] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Il indiquait que les travaux auraient été, selon lui, mal exécutés et que le coût des travaux de reprise s’élèveraient à « au moins » 10 000 euros.
M. [L] [V] avait maintenu sa demande tendant à la confirmation des termes de l’ordonnance d’injonction de payer.
Il a exposé qu’il n’était pas responsable du défaut de pose du plancher car il n’était chargé que de l’exécution de la dalle béton sur laquelle a été posé le plancher, que l’artisan chargé de la pose du revêtement avait ainsi accepté la dalle et que rien ne pouvait donc lui être reproché.
Par jugement du 17 octobre 2022, le juge du contentieux et de la protection du tribunal judiciaire d’Amiens a :
Condamné M. [O] [C] à payer à M. [L] [V] la somme de 3 467,24 euros au titre des travaux réalisés,
Débouté les parties de l’intégralité de leurs autres demandes,
Condamné M. [O] [C] aux entiers dépens.
La juridiction a notamment indiqué dans sa motivation réduire de 500 euros la première facture pour mauvaise exécution des seuils et de 500 euros la seconde facture, en excluant le coût des transports de matériaux, l’entreprise travaillant sur site ainsi que celui de la reprise des tranchées en raison de sa mauvaise exécution.
Par déclaration du 24 janvier 2023, M. [O] [C] a interjeté appel de cette décision.
Vu les conclusions récapitulatives déposées le 22 janvier 2024 par lesquelles M. [O] [C] demande à la cour de :
Déclarer son appel recevable et bien fondé,
Déclarer l’appel incident de la partie adverse recevable et mal fondé,
En conséquence :
Infirmer le jugement entrepris,
Débouter M. [V] de l’ensemble de ses demandes financières en application de la règle de l’exception d’inexécution,
Accueillir ses demandes reconventionnelles,
Prononcer la résolution du contrat de louage d’ouvrage conclu entre lui et M. [V] prenant la forme des devis émis par l’artisan et acceptés, à la date du 23 mars 2021, soit à la date de la notification de la résiliation amiable ou à compter de l’arrêt à intervenir,
Ordonner le retour au statu quo ante,
Débouter M. [V] de toutes demandes financières dirigées à son égard au regard de la mauvaise qualité des travaux réalisés,
Condamner M. [V] à lui restituer les sommes que celui-ci lui a déjà versées,
Condamner M. [V] à reprendre son matériel laissé sur place dans les 15 jours de l’arrêt à intervenir après avoir contacté le propriétaire pour convenir d’un rendez-vous pour permettre la reprise, sous astreinte de 50 euros par jours de retard,
Condamner en tout état de cause M. [V] à lui payer à M. [C] une somme de 13 160 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice matériel subi et 8 000 euros en réparation du préjudice immatériel subi,
Ordonner, s’il y a lieu, la compensation judiciaire des éventuelles créances croisées entre les parties,
Condamner la partie intimée à lui payer une indemnité de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamner la partie adverse aux entiers dépens
Vu les conclusions récapitulatives déposées le 7 février 2024 de M. [L] [V], par lesquelles il demande à la cour de :
Déclarer M. [C] recevable mais mal fondé en son appel
En conséquence :
Prononcer l’irrecevabilité de la demande tendant à la résolution du contrat d’ouvrage,
Confirmer le jugement déféré en ce qu’il a condamné M. [C] en paiement ainsi qu’aux dépens,
Rejeter sa demande de condamnation au paiement de la somme de 13 160 euros au titre d’un préjudice matériel,
Rejeter sa demande de condamnation au paiement de la somme de 8 000 euros au titre d’un préjudice immatériel,
Rejeter sa demande de condamnation au paiement de la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Le déclarer recevable et bien fondé en son appel incident,
En conséquence :
Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :
Condamné M. [C] à lui payer la somme de 3 467,24 euros au titre des travaux réalisés,
Débouté les parties de l’intégralité de leurs autres demandes,
Statuant à nouveau, de :
Condamner M. [C] au paiement de la somme de 4 540,20 euros au titre du principal, outre 5,70 euros conformément à l’ordonnance portant injonction de payer,
Dire que cette somme portera intérêt au taux légal à compter de la date de la signification de l’ordonnance portant injonction de payer,
En tout état de cause :
Condamner M. [C] aux entiers dépens de première instance et d’appel.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.
La clôture a été prononcée le 14 février 2024 et l’affaire a été renvoyée pour être plaidée à l’audience du 30 mai 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l’irrecevabilité de la demande de résolution du contrat de louage d’ouvrage :
Il résulte de l’article 564 du code de procédure civile qu’à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
En l’espèce et aux termes de ses dernières conclusions d’appel, M. [C] sollicite que la cour prononce la résolution du contrat de louage d’ouvrage conclu entre lui et M. [V] et en conséquence d’ordonner le retour au statu quo ante en condamnant M. [V] à lui restituer les sommes qu’il lui a déjà versées.
Force est de constater que la demande de résolution du contrat est parfaitement nouvelle à hauteur d’appel et qu’elle sera donc déclarée irrecevable. Dès lors, la demande subséquente de restitution à ce titre n’est pas fondée.
Sur la demande en paiement de M. [V] et la réduction du prix au titre des malfaçons invoquées :
Il résulte des articles 1353 et 1217 du code civil que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut notamment refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ou obtenir une réduction du prix.
En l’espèce, l’existence d’une relation contractuelle entre les parties n’est pas discutée.
Il est cependant reproché par M. [C] à M. [V] une mauvaise exécution des travaux, justifiant une absence totale de paiement, consistant :
1° en ce qui concerne la facture de solde de 3 300,84 euros relative aux travaux prévus par le devis du 10 décembre 2020 :
– en un défaut de planéité de la dalle de béton,
– en l’absence de finition d’enduit d’une fenêtre à l’arrière du bâtiment,
– en une différence d’un centimètre sur une dalle de seuil d’entrée,
2° en ce qui concerne les travaux correspondant à la facture de 1 239,36 euros TTC :
– en un remblaiement grossier des saignées,
– en un non achèvement et malfaçons des cloisons siporex du local technique,
3° pour le reste :
-en la pose d’une demi-couvertine imparfaitement étanche,
– en une absence d’évacuation des déblais,
Il convient de relever que les travaux portant sur les couvertines ne font pas l’objet des deux factures litigieuses mais d’une facture du 12 décembre 2020 d’un montant de 459,25 euros qui a intégralement été réglée par M. [C].
Par ailleurs, M. [V] conteste avoir laissé des déblais sur site et aucun élément à la procédure ne permet de démontrer que des déblais auraient été abandonnés sur place par ce dernier.
En ce qui concerne les travaux correspondant à la facture de 1 239,36 euros TTC, un devis prévoyant l’édification de cloisons en béton cellulaire avait effectivement été envisagé entre les parties mais n’a pas été accepté par M. [C] compte-tenu du litige né entre les parties.
M. [V] s’est donc contenté de reboucher les saignées laissées par l’électricien et le plombier et de livrer les matériaux nécessaires à l’édification des cloisons du local technique.
M. [V] expose que le rebouchage a été réalisé par un apprenti qu’il n’a pas été en mesure de contrôler au regard de son hospitalisation.
Il résulte effectivement du constat d’huissier du 24 mars 201 produit par M. [C] que les saignées ont été remblayées de façon grossière, ce qui a contraint ce dernier à en assurer la reprise et le compactage. Ce poste ayant été facturé 360 euros TTC, il conviendra donc de réduire la facture de ce montant.
En ce qui concerne la pose de cloisons du local technique, il est constant qu’elle n’a pas été assurée par M. [V], M. [C] ne lui ayant d’ailleurs pas confié la réalisation de ces travaux.
La facture litigieuse ne concerne ainsi que dans la seule livraison des matériaux nécessaires. Le grief tirée de l’absence d’achèvement de la pose des cloisons et de leurs défauts allégués n’est donc pas fondé.
En ce qui concerne les travaux réalisés au titre de la facture de solde de 3 300,84 euros au titre du devis du 10 décembre 2020, le constat d’huissier et l’expertise d’assurance produite par M. [C] se bornent à constater la pose d’un revêtement clipsable d’imitation parquet en matière synthétique présentant une irrégularité.
Cependant, le devis du 10 décembre 2020 ne prévoit que la pose d’une dalle de béton et en aucun cas celui d’un revêtement.
L’impossibilité de réaliser le réagréage préalable à la pose d’un revêtement ne résulte que de la seule affirmation de M. [C] alors que celle-ci n’incombait pas à M. [V] et devait nécessairement être réalisée avant la pose du revêtement. Ce grief n’est donc pas fondé.
En ce qui concerne l’absence de finition d’enduit d’une fenêtre à l’arrière du bâtiment, le devis ne prévoit qu’une modification des tableaux et appui de fenêtre et la reprise de la maçonnerie de la fenêtre arrière, sans aucun travail de finition, et notamment d’enduit.
Le constat produit par M. [C] démontre d’ailleurs que les enduits extérieurs n’ont pas été réalisés.
En revanche, le procès-verbal de constat produit par M. [C] laisse effectivement apparaître un défaut d’un seuil d’entrée dont la réalisation était prévue par le devis. Celui-ci a été facturé 120 euros TTC et il conviendra donc de réduire la facture de ce montant.
Il résulte de ces éléments que M. [C] reste redevable à l’égard de M. [V] de la somme de 4 060,20 euros TTC (4 540,20 euros – 360 – 120 euros) et il conviendra d’assortir cette somme de l’intérêt légal à compter de la date de signification de l’ordonnance d’injonction de payer.
La décision entreprise sera donc infirmée sur ce point.
Sur la demande de condamnation de M. [V] à reprendre son matériel laissé sur place sous astreinte :
En l’espèce, aucun élément produit au débat ne permet de relever que M. [V] aurait laissé du matériel sur place, à l’exception des matériaux achetés destinés à l’édification des cloisons du local technique et qui se trouvent être dorénavant la propriété de M. [C].
Cette demande, qui n’est pas fondée, sera donc rejetée et il sera donc ajouté au jugement entrepris sur ce point.
Sur les demandes de réparation des préjudices matériels et immatériels de M. [C] :
M. [C] produit un devis d’un montant de 13 160 euros portant sur la dépose et la réfection totale de la dalle de béton pour justifier de son préjudice matériel allégué. Pour autant, aucune malfaçon ni nécessité de reprise de la dalle posée par M. [V] n’ont été démontrées.
Aucun retard dans l’exécution des travaux ni préjudice de jouissance ne sont par ailleurs établis.
Par ailleurs, les malfaçons retenues ont déjà fait l’objet d’une indemnisation intégrale par réduction du prix.
M. [C] sera donc débouté de ces demandes et la décision entreprise sera confirmée en son rejet du préjudice matériel et il y sera ajouté en ce qui concerne le rejet du préjudice immatériel.
M. [C] n’étant ainsi créancier d’aucune somme à l’encontre de M. [V] la demande de compensation judiciaire des créances réciproques devient ainsi sans objet.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
M. [O] [C] qui succombe sera condamné aux dépens de l’appel et la décision de première instance sera confirmée en ses dispositions afférentes aux rejet de sa demande de frais irrépétibles et aux dépens.
Il conviendra de préciser que les frais accessoires perçus par le greffe pour les besoins de la procédure d’injonction de payer seront compris dans les dépens.
La demande de M. [O] [C] au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
M. [V] ne sollicite pas l’indemnisation de ses frais irrépétibles de première instance ni d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à disposition au greffe,
Déclare irrecevable la demande de résolution du contrat de louage d’ouvrage formée par M. [O] [C] à hauteur d’appel,
Confirme la décision querellée sauf en ce qu’elle a condamné M. [O] [C] à payer à M. [L] [V] la somme de 3 467,24 euros au titre des travaux réalisés,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne M. [O] [C] à payer à M. [L] [V] la somme de 4 060,20 euros TTC avec intérêt au taux légal à compter du 3 août 2021,
Rejette l’ensemble des autres demandes de M. [O] [C],
Condamne M. [O] [C] aux dépens de l’appel en ce compris les frais accessoires de l’ordonnance d’injonction de payer du 16 juillet 2021.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT