Conditions de validité et conséquences d’une mise en demeure dans le cadre d’un contrat de crédit

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Conditions de validité et conséquences d’une mise en demeure dans le cadre d’un contrat de crédit

La CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES a accordé un crédit à la consommation renouvelable à M. [U] [F] le 8 juillet 2021, permettant une utilisation unique de 10.000 euros le 20 juillet 2021. En raison du non-remboursement des échéances, la caisse a assigné M. [U] [F] en justice le 18 août 2022, demandant le paiement de 10.936,78 euros. Le tribunal a débouté la caisse de sa demande le 15 novembre 2022, en raison de l’absence de mise en demeure régulière. La caisse a interjeté appel le 24 novembre 2022, demandant la réformation du jugement et le remboursement des sommes dues. M. [U] [F] n’a pas constitué avocat ni conclu en appel. L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 mars 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

26 septembre 2024
Cour d’appel de Douai
RG
22/05405
République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 26/09/2024

N° de MINUTE : 24/651

N° RG 22/05405 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UTKO

Jugement (N° 22/000662) rendu le 15 Novembre 2022 par le Juge des contentieux de la protection de Douai

APPELANTE

Société Caisse de Crédit Mutuel d’Orchies, Société anonyme au capital de 77,00 €, inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de Douai sous le N° 305 523 375, Société Coopérative de Crédit à capital variable régie par l’article 5 de l’ordonnance du 16 Octobre 1958, créée le 16 Février 1966 et dont les statuts modifiés le 24 octobre 2005 ont été déposés au greffe du Tribunal d’Instance de DOUAI agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Stéphanie Calot-Foutry, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

INTIMÉ

Monsieur [U] [F]

né le [Date naissance 1] 2000 à [Localité 6] (Roumanie) – de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 3]

Défaillant, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 09 janvier 2023 (article 659 CPC)

DÉBATS à l’audience publique du 10 avril 2024 tenue par Yves Benhamou magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Samuel Vitse, président de chambre

Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT PAR DEFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 26 septembre 2024 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 27 mars 2024

– FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

Selon offre préalable acceptée le 8 juillet 2021, la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES a consenti dans le cadre d’un contrat signé électroniquement à M. [U] [F] un crédit a la consommation renouvelable de type « PASSEPORT » n° 00098544602 et utilisable par fractions d’un montant minimal de 1.500 euros et maximal de 10.000 euros dont les échéances et les taux varient en fonction du capital débloqué.

Une seule utilisation de ce crédit a été réalisée le 20 juillet 2021 pour la somme de 10.000 euros, donnant lieu à l’ouverture d’un sous-compte numéroté 00098544603.

Arguant de la défaillance de l’emprunteur dans le remboursement des échéances du crédit et se prévalant de la déchéance du terme, par acte d’huissier en date du 18 août 2022, la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES a assigné en justice M. [U] [F] aux fins de le voir notamment condamner à lui payer sous le bénéfice de 1’exécution provisoire la somme de 10.936,78 euros avec intérêts au taux conventionnel de 3,499% 1’an à compter du 22 juin 2022 jusqu’au parfait paiement sur la somme de 9.810,98 euros et avec intérêts au taux légal sur l’indemnité conventionnelle, pour l’utilisation numéro 00098544603 du CRÉDIT ‘PASSEPORT’.

Par jugement réputé contradictoire en date du 15 novembre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Douai, a:

– débouté la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES de sa demande présentée an titre du contrat de crédit daté du 8 juillet 2021 souscrit par M. [U] [F], en raison de l’absence d’une mise en demeure régulière préalable a la déchéance du terme,

– débouté la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES du surplus de ses prétentions,

– débouté la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES de sa demande formée en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES aux dépens de l’instance,

– constaté l’exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 24 novembre 2022, la société CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES a interjeté appel de cette décision en visant expressément dans l’acte d’appel tous les points tranchés dans le dispositif du jugement querellé.

Vu les dernières conclusions de la SA CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES en date du 29 décembre 2022, et tendant à voir:

– Déclarer recevable et bien fonder l’appe1 interjeté par la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES a l’encontre du jugement rendu le l5 novembre 2022 par le Juge des Contentieux de la Protection du Tribunal Judiciaire de DOUAI,

– Le reformer et donc l’infirmer dans toutes ses dispositions,

– Condamner Monsieur [U] [F] a rembourser a la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES, les sommes dues au titre du CRÉDIT renouvelable PASSEPORT CRÉDIT d’un montant de 10.000 euros qui a fait l’objet d’une seule utilisation du montant intégral de la somme ainsi mise a disposition,

– Condamner par voie de conséquence Monsieur [U] [F] à payer à la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES la somme de l0.936,78 euros avec intérêts au taux contractuel de 3.499 % l’an sur la somme de 9.8l0,98 euros à compter du 22 juin 2022 jusqu’au parfait paiement et avec intérêts au taux légal sur l’indemnité conventionnelle, au titre de l’utilisation de la somme de 10.000 euros, seule la première échéance de ce prêt utilise ayant fait l’objet d’un règlement,

– A titre infiniment subsidiaire, prononcer la résolution judiciaire du contrat de prêt dénommé ‘PASSEPORT CRÉDIT’ a raison de l’inexécution par Monsieur [U] [F] de son engagement de payer les échéances de son prêt, ce qui constitue un manquement grave dans l’exécution de son contrat et par voie de conséquence le condamner à payer à la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES la somme de l0.936,78 euros avec intérêts au taux contractuel de 3.499 % l’an sur la somme de 9.8l0,98 euros à compter du 22 juin 2022 jusqu’au parfait paiement et avec intérêts au taux légal sur l’indemnité conventionnelle, au titre de l’utilisation de la somme de 10.000 euros, seule la première échéance de ce prêt utilise ayant fait l’objet d’un règlement,

– En tout état de cause, condamner Monsieur [U] [F] a payer a la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES une indemnité procédurale de 2.000,00 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de Maître Stéphanie CALOT-FOUTRY, avocat, sur ses offres de droit, par application des articles 696 et suivants du Code de procédure civile.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens de l’appelante, il convient de se référer à ses dernières écritures.

Pour sa part M. [U] [F] a été assigné devant la cour par la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES par acte d’huissier en date du 9 janvier 2023 étant précisé que cet acte extrajudiciaire a donné lieu à l’établissement d’un procès verbal de recherches en application des dispositions de l’article 659 du code de procédure civile. Toutefois subséquemment l’intimé n’a pas constitué avocat ni donc conclu en cause d’appel.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 27 mars 2024.

– MOTIFS DE LA COUR:

– Sur l’effectivité de la déchéance du terme:

L’article L 312-36 du code de la consommation dispose:

‘Dès le premier manquement de l’emprunteur à son obligation de rembourser, le prêteur informe celui-ci, sur support papier ou tout autre support durable des risques qu’il encourt au titre des articles L. 312-39 et L. 312-40 ainsi que, le cas échéant, au titre de l’article L. 141-3 du code des assurances.

Cette alerte ne fait pas obstacle à ce que, si les difficultés de remboursement ne sont pas rapidement résolues, le prêteur puisse régler de manière temporaire et pour une durée fixée par lui la cotisation d’assurance du crédit pour lequel des impayés ont été constatés, afin de permettre le maintien de la couverture assurantielle.’

De plus l’article L 312-39 du même code quant à lui dispose:

‘En cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt.

En outre, le prêteur peut demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application de l’article 1231-5 du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret.’

Il résulte ainsi des dispositions précitées que l’envoi l’une mise en demeure préalable précédant l’envoi d’une lettre prononçant la déchéance du terme, conditionne l’effectivité de cette déchéance du terme.

Il convient dès lors d’avoir une exacte intelligence de la chronologie des faits.

Il importe de souligner que les correspondances adressées par la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES les 9 et 29 novembre 2021 ne sont aucunement des mises en demeure mais apparaissent uniquement comme des lettres invitant le débiteur à régulariser la situation débitrice de ses comptes (pièces n°14 et 15 de l’appelante).

Au cas particulier l’objectivité commande de constater que la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES a dûment adressé à M. [U] [F] le 10 décembre 2021 une mise en demeure préalable par courrier recommandé avec avis de réception. Cette mise en demeure à l’évidence respecte les dispositions du code de la consommation car il est demandé au consommateur de ‘procéder au paiement des mensualités impayées à ce jour, au titre de l’utilisation projets n°15629027240098544603 d’un montant initial de 10 000,00 euros pour un montant de 748,53 euros suivant décompte joint et sauf articles portés pour mémoire.’ (Pièce n°18 de l’appelante).

Subséquemment par courrier recommandé adressé à M. [U] [F] le 3 février 2022 la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES a prononcé la déchéance du terme et l’exigibilité des sommes dues au titre du prêt (pièce n°20).

Il résulte donc des observations qui précédent que la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES peut se prévaloir effectivement de la déchéance du terme.

– Sur les sommes dues:

Pour établir tout à la fois la réalité et le montant de sa créance, la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES produit aux débats les pièces suivantes:

‘ l’offre préalable de crédit acceptée et non rétractée,

‘ la preuve de la signature électronique du prêt,

‘ la fiche de consultation du FICP en date du 8 juillet 2021,

‘ la fiche de renseignements joint au contrat de crédit,

‘ la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées en matière de CRÉDIT a la consommation,

‘ le tableau d’amortissement,

‘ le document d’information préalable a la mise a disposition d’une utilisation PASSEPORT CRÉDIT

‘ la lettre du CRÉDIT MUTUEL adressée à M. [F] du 20 juillet 2021,

‘ la lettre du CRÉDIT MUTUEL à M. [F] du 9 novembre 2021

‘ le dernier rappel du CRÉDIT MUTUEL avant poursuite en date du 29 novembre 2021,

‘ l’historique du compte,

‘ la mise en demeure préalable adressée à M. [F] le 10 décembre

2021,

‘ la mise en demeure du 10 décembre 2021 adressée à M. [F] sous pli simple le 10 janvier 2022,

‘ la mise en demeure rendant exigibles les créances adressée a M. [F] le 3 février 2022,

‘ la mise en demeure du 3 février 2022 adressée a Mr [F] sous pli

simple le 2 mars 2022,

‘ le décompte précis des sommes dues au 21 juin 2022.

Au regard de tels justificatifs la créance de la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES à l’égard de M. [U] [F] apparaît tout à la fois certaine, liquide et exigible et s’établit à hauteur des sommes suivantes:

– capital restant dû au 28 janvier 2022: 9.810,98 euros

– intéréts échus au taux contractuel de 3,499% l’an

au 28 janvier 2022: 161,44 euros

– intéréts courus du 29 janvier 2022 au 21 juin 2022 au taux

contractuel de 3,499% 1’an: 135,43 euros

– assurance échue au 21 juin 2022: 44,05 euros

– indemnité conventionnelle de 8% sur le capital restant dû 784,88 euros

Soit au total: 10.936,78 euros

Il convient dès lors après infirmation du jugement querellé en ce qu’il a débouté la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES de sa demande présentée an titre du contrat de crédit daté du 8 juillet 2021 souscrit par M. [U] [F], en raison de l’absence d’une mise en demeure régulière préalable a la déchéance du terme, et débouté la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES du surplus de ses prétentions, et statuant à nouveau, de condamner M. [U] [F] à payer à la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES les sommes suivantes:

‘ la somme de 10.151,90 euros au titre du capital restant dû , des intérêts échus et de l’assurance échue outre intérêts au taux contractuel à compter de l’assignation en date du 18 août 2022,

‘ la somme de 784,88 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de 8% outre intérêts au taux légal à compter de l’assignation en date du 18 août 2022.

– Sur l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile:

Il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES les frais irrépétibles exposés par elle et non compris dans les dépens.

Il convient dès lors de confirmer le jugement querellé en ce qu’il a débouté la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES de sa demande formée en application de l’article 700 du code de procédure civile.

– Sur les dépens:

Il convient après infirmation du jugement querellé en ce qu’il a condamné la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES aux dépens de première instance, et y ajoutant, de condamner M. [U] [F] qui succombe, aux entiers dépens tant de première instance que d’appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt rendu par défaut, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

– INFIRME le jugement querellé sauf en ce qu’il a débouté la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES de sa demande formée en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

– CONDAMNE M. [U] [F] à payer à la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D’ORCHIES les sommes suivantes:

‘ la somme de 10.151,90 euros au titre du capital restant dû , des intérêts échus et de l’assurance échue outre intérêts au taux contractuel à compter de l’assignation en date du 18 août 2022,

‘ la somme de 784,88 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de 8% outre intérêts au taux légal à compter de l’assignation en date du 18 août 2022,

– CONDAMNE M. [U] [F] aux entiers dépens tant de première instance que d’appel.

Le greffier

Ismérie CAPIEZ

Le président

Yves BENHAMOU


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