M. [O] [E] a commandé des travaux de réfection de toiture à M. [D] pour un montant de 22 556 euros, versant un acompte de 9 000 euros. M. [D] n’ayant pas réalisé les travaux, M. [E] l’a assigné en justice pour obtenir le remboursement de l’acompte et des dommages et intérêts. Le tribunal de proximité de Roubaix a débouté M. [E] de ses demandes et l’a condamné aux dépens. M. [E] a interjeté appel, demandant la condamnation de M. [D] au remboursement de l’acompte, au versement de dommages et intérêts, ainsi qu’à la prise en charge des frais de justice. M. [D] n’a pas constitué avocat pour l’appel.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 26/09/2024
N° de MINUTE :
N° RG 22/05911 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UU5B
Jugement rendu le 12 juillet 2022
par le tribunal de proximité de Roubaix
APPELANT
Monsieur [O] [E]
né le 27 mai 1963 à [Localité 6]
[Adresse 2]
[Localité 5]
représenté par Me Amaury Lammens, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
INTIMÉ
Monsieur [B] [D] sous l’enseigne [D][B] Toiture
[Adresse 3]
[Localité 4]
défaillant, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 21 février 2023 à l’étude de l’huissier
DÉBATS à l’audience publique du 16 mai 2024, tenue par Céline Miller magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Bruno Poupet, président de chambre
Samuel Vitse, président de chambre
Céline Miller, conseiller
ARRÊT RENDU PAR DÉFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 26 septembre 2024 après prorogation du délibéré en date du 05 septembre 2024 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
Selon devis n°s 10/1 et 10/2 acceptés le 10 mai 2020, M. [O] [E] a commandé à M.'[B] [D], entrepreneur individuel exerçant sous l’enseigne [D][B] Toiture, des travaux de réfection de toiture en tuiles flamandes en koramic vieilli naturel comprenant le démontage des installations isolant aluthermo, le contrelattage et le lattage du garage, de la dépendance et des habitations, pour un montant total de 22 556 euros.
Exposant que M. [D], à qui il avait versé un acompte de 9 000 euros, n’avait pas réalisé le chantier et qu’il lui était en conséquence redevable de cette somme, M. [O] [E] l’a fait assigner devant le tribunal de proximité de Roubaix par acte du 17 mars 2022 aux fins, notamment, d’obtenir sa condamnation à lui rembourser l’acompte et à lui payer des dommages et intérêts.
Par jugement réputé contradictoire du 12 juillet 2022, le tribunal de proximité de Roubaix a débouté M. [E] de l’ensemble de ses demandes formées à l’encontre de M. [D] et l’a condamné aux dépens.
M. [E] a interjeté appel de ce jugement et, aux termes de ses dernières conclusions remises le 23 février 2023, demande à la cour, au visa des articles 1103 et suivants et 1240 du code civil, d’infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de’:
– condamner M. [D] à lui payer la somme de 9 000 euros en remboursement de l’acompte versé, assortie des intérêts au taux légal (applicable entre particuliers) à compter du 15 décembre 2021, date de la mise en demeure’;
– le condamner à lui verser la somme de 750 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral, assortie des intérêts au taux légal (applicable entre particuliers) à compter de la signification de l’exploit introductif d’instance ;
– ordonner la capitalisation des intérêts dus pour plus d’une année entière, sur le fondement des dispositions de l’article 1154 du code civil ;
– débouter M. [D] de l’ensemble de ses demandes ;
– condamner celui-ci, outre aux dépens de première instance et d’appel, à lui verser, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance, et celle de 2 300 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel, en ce compris le coût du procès-verbal de constat de commissaire de justice établi le 2 août 2022.
M. [D], à qui la déclaration d’appel et les conclusions d’appelant ont été signifiées le 21 février 2023 par dépôt de l’acte en l’étude du commissaire de justice, n’a pas constitué avocat devant la cour.
Aux termes de l’article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.
Sur la demande de remboursement
M. [E] soutient principalement que M. [D] n’a jamais démarré le chantier de réfection de toiture qu’il lui avait commandé et que les messages électroniques échangés entre les parties à partir du mois d’août 2020, constatés par procès-verbal de commissaire de justice versé aux débats en cause d’appel, établissent la preuve que les parties avaient convenu de rompre leur contrat, l’intimé s’engageant à lui rembourser la somme de 9 000 euros qu’il lui avait versée au titre de l’acompte de 40% prévu pour réserver le chantier.
Sur ce,
Aux termes des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
L’article 1193 du même code dispose que les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise.
Aux termes de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
*
Il résulte de l’extrait de compte courant de M. [E] versé aux débats que celui-ci, après avoir accepté le 10 mai 2020 les devis n° 10/1 et 10/2 établis par M. [D] [B], exerçant sous l’enseigne [D][B] toiture, a procédé le 12 mai 2020 à trois virements d’un montant de 3 000 euros, représentant 40 % du devis, à titre d’acompte pour la réservation du chantier.
Il n’est par ailleurs pas contesté que les travaux n’ont jamais été réalisés, les témoignages de voisins de M. [E] produits en cause d’appel l’attestant.
La lecture des messages électroniques échangés entre les parties par sms entre le 2 août 2020 et le 11 juin 2021, désormais constatés par procès-verbal du 2 août 2022 dressé par Mme [F], clerc habilité aux constats auprès de la SCP Defrance-Leduc, qui s’est assurée de l’identité de M. [D], montre par ailleurs que les parties se sont manifestement accordées pour rompre le contrat, M. [D] s’avérant dans l’impossibilité de réaliser le chantier en raison de difficultés d’ordre personnel et celui-ci s’étant engagé à plusieurs reprises expressément à rembourser à M. [E] l’acompte lui ayant été versé et qu’il n’a jamais contesté avoir reçu.
Cet engagement écrit est corroboré par l’aveu formulé par M. [D] auprès de Mme [F] lors de la prise de contact téléphonique réalisée par celle-ci à l’occasion de l’établissement du constat : ‘En date du 2 septembre 2022 à 10h22min, j’ai tenté de joindre Monsieur [D] [B] au [XXXXXXXX01].
Un homme me répond.
Je lui décline alors mes prénoms, nom, qualité et objet de mon appel.
Ce dernier me confirme être Monsieur [D] [B] et m’informe de sa volonté de vouloir régler en plusieurs mensualités dès réception d’une rente devant intervenir dès le mois prochain.
Je l’invite alors à se rapprocher de toute urgence auprès de Maître Lammens, avocat du demandeur’.
Or, il n’est pas contesté que M. [D] n’a jamais remboursé, même partiellement, le montant de son acompte à M.'[E], et ce malgré la mise en demeure qui lui a été adressée par lettre recommandée reçue le 16 décembre 2021.
Il y a donc lieu, par infirmation de la décision entreprise, de condamner M. [D] au paiement de la somme de 9 000 euros en remboursement de l’acompte versé par M. [E] pour les travaux de réfection de toiture qui n’ont pas été effectués.
Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive
M. [E] soutient que l’intimé a fait preuve de mauvaise foi et d’une résistance injustifiée en ne répondant pas favorablement à ses multiples relances pour obtenir le remboursement de l’acompte, et en ne donnant pas suite aux propos qu’il a pourtant tenus auprès de Mme [F].
Sur ce,
Aux termes de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
La résistance à une demande constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à réparation que s’il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi. La partie qui invoque la résistance abusive doit non seulement caractériser l’abus mais également le préjudice subi.
En l’espèce, l’inertie dont a fait preuve M. [D] pour procéder au remboursement de la somme de 9 000 euros, et ce malgré les multiples démarches amiables engagées par l’appelant, ainsi que la mise en demeure du 15 décembre 2021, contraignant alors ce dernier à ester en justice pour faire valoir ses droits, présente un caractère abusif, de sorte qu’il y a lieu de condamner M.'[D] à payer à M. [E] la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral qu’il a nécessairement subi de ce fait.
La décision de première instance sera également infirmée de ce chef.
Sur les autres demandes
L’issue du litige justifie d’infirmer la décision entreprise des chefs des dépens et frais irrépétibles de première instance, et de condamner M. [D] outre aux dépens, à verser à M. [E] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Succombant en cause d’appel, M. [D] sera tenu aux entiers dépens de cette procédure et condamné à payer à M. [E] la somme de 2 300 euros sur le fondement dudit article 700 au titre de ses frais irrépétibles d’appel.
La cour
Infirme le jugement entrepris ;
Statuant à nouveau,
Condamne M. [B] [D], exerçant sous l’enseigne [D][B] Toiture, à payer à M. [O] [E] la somme de 9 000 euros en remboursement de l’acompte versé par ce dernier au titre des devis 10/1 et 10/2 acceptés le 10 mai 2020, assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2021, date de la mise en demeure ;
Condamne M. [B] [D], exerçant sous l’enseigne [D][B] Toiture, à payer à M. [O] [E] la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts, assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2022, date de l’assignation ;
Ordonne la capitalisation des intérêts dus pour plus d’une année entière sur le fondement des dispositions de l’article 1154 du code civil ;
Condamne M. [B] [D], exerçant sous l’enseigne [D][B] Toiture, aux entiers dépens de première instance ;
Le condamne à payer à M. [O] [E] la somme de 1 500 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance ;
Y ajoutant,
Condamne M. [B] [D], exerçant sous l’enseigne [D][B] Toiture, aux entiers dépens d’appel ;
Le condamne à payer à M. [O] [E] la somme de 2 300 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel.
Le greffier
Delphine Verhaeghe
Le président
Bruno Poupet