La Banque Populaire du Nord a accordé un prêt immobilier de 230’660 euros à M. [I] [Z] et Mme [C] [N] le 27 juin 2017, garanti par la société Parnasse garanties. En raison de défauts de paiement, la banque a prononcé la déchéance du terme le 28 juin 2019, réclamant 244’624,73 euros. Parnasse garanties a réglé 228’704,86 euros à la banque et a ensuite assigné les emprunteurs en paiement. Le tribunal judiciaire de Lille a condamné M. [I] [Z] et Mme [C] [N] à rembourser cette somme, avec intérêts et dépens, par un jugement du 31 mars 2022. M. [I] [Z] a interjeté appel de ce jugement à deux reprises, demandant l’irrecevabilité de l’action de Parnasse garanties. Cette dernière a demandé la confirmation du jugement en appel. Mme [C] [N] n’a pas constitué avocat ni conclu. L’affaire a été plaidée le 22 mai 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 26/09/2024
N° de MINUTE : 24/711
N° RG 22/03567 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UNAI
Jugement (N° 19/09365) rendu le 31 Mars 2022 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de lille
APPELANT
Monsieur [I] [Z]
né le [Date naissance 3] 1989 à [Localité 9] (Portugal) – de nationalité Portugaise
[Adresse 4]
[Localité 7]
Représenté par Me Sylviane Mazard, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
INTIMÉES
Madame [C] [N]
née le [Date naissance 2] 1988 à [Localité 10] – de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 6]
Défaillante, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 11 octobre 2022 à personne
SA Parnasse Garanties
[Adresse 1]
[Localité 8]
Représentée par Me Patrick Delbar, avocat au barreau de Lille, avocat constitué assisté de Me Philippe Lecat, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant
DÉBATS à l’audience publique du 22 mai 2024 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Yves Benhamou, président de chambre
Samuel Vitse, président de chambre
Catherine Ménegaire
ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 26 septembre 2024 après prorogation du délibéré du 05 septembre 2024 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 7 mai 2024
Suivant offre de crédit acceptée le 27 juin 2017, la société la Banque Populaire du Nord a consenti à M. [I] [Z] et Mme [C] [N] un prêt immobilier Logifix n°086 86878 d’un montant de 230’660 euros, remboursable en 300 mensualités, au taux fixe de 2,40 %, destiné au financement de l’acquisition et la réalisation de travaux d’une maison individuelle sis [Adresse 4].
Ce prêt était garanti par la caution solidaire de la société Parnasse garanties, société caution du groupe Casden Banque Populaire,
Les échéances du prêt n’étant plus honorées, la Banque Populaire du Nord a prononcé la déchéance du terme du contrat de crédit le 28 juin 2019, mettant en demeure les emprunteurs de lui régler la somme de 244’624,73 euros, arrêtée au 28 juillet 2019, outre les intérêts postérieurs jusqu’à la date effective de paiement.
La société Parnasse garanties a été amenée à régler à la Banque Populaire du Nord, en sa qualité de caution, la somme de 228’704,86 euros, en principal, intérêts échus et frais, pour laquelle la banque lui a délivré le 26 septembre 2019 quittance subrogative.
Après avoir vainement mis en demeure M. [I] [Z] et Mme [C] [N] de régler ladite somme, la société Parnasse garanties les a assignés en paiement par acte d’huissier de justice du 30 décembre 2019.
Par jugement réputé contradictoire du 31 mars 2022, le tribunal judiciaire de Lille a :
– condamné solidairement M. [I] [Z] et Mme [C] [N] à payer à la société Parnasse garanties la somme de 228’704,86 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 26 septembre 2019,
– condamné in solidum M. [I] [Z] et Mme [C] [N] aux dépens en application de l’article 696 du code de procédure civile,
– condamné in solidum M. [I] [Z] et Mme [C] [N] à payer à la société Parnasse garanties la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté M. [I] [Z] de l’ensemble de ses demandes,
– débouté la société Parnasse garanties du surplus de ses demandes.
Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 21 juillet 2022, enregistrée au répertoire général sous le n°22/03567, M. [I] [Z] a relevé appel de l’ensemble des chef de ce jugement sauf en ce qu’il a débouté la société Parnasse garanties du surplus de ses demandes.
Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 5 octobre 2022, M. [I] [Z] a relevé appel du même jugement, cet appel ayant été enregistré au répertoire général sous le n° 22/046 42.
Par ordonnance du 13 octobre 2022, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la jonction des procédures sous le numéro 22/03567.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 5 octobre 2022, M. [I] [Z] demande à la cour de :
Vu la convention de prestation de services du 30 décembre 2014 et la convention de cautionnement du 30 octobre 2017,
vu l’article 1346-5 du code civil,
– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lille le 31 mars 2022,
statuant à nouveau,
– déclarer l’irrecevabilité de l’action de Parnasse garanties,
– en conséquence débouter Parnasse garanties de toutes ses demandes fins et conclusions,
– la condamner à payer à M. [I] [Z] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel et la même somme pour la procédure de première instance, outre les dépens.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 21 décembre 2022, la société Parnasse garanties demande à la cour de :
Vu les articles 1346, 2305, 2306 du code civil,
– dire l’appel mal fondé,
– confirmer purement et simplement le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lille le 31 mars 2022 en ce qu’il a :
– condamné solidairement M. [I] [Z] et Mme [C] [N] à payer à la société Parnasse garanties la somme de 228’704,86 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 26 septembre 2019,
– condamné in solidum M. [I] [Z] et Mme [C] [N] aux dépens en application de l’article 696 du code de procédure civile,
– condamné in solidum M. [I] [Z] et Mme [C] [N] à payer à la société Parnasse garanties la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté M. [I] [Z] de l’ensemble de ses demandes,
– débouter M. [I] [Z] et Mme [C] [N] de leurs demandes,
– condamner solidairement M. [I] [Z] et Mme [C] [N] à payer à la société Parnasse garanties la somme de 228’704,86 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 septembre 2019,
– condamner solidairement M. [I] [Z] et Mme [C] [N] à payer à la société Parnasse garanties la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner solidairement M. [I] [Z] et Mme [C] [N] en tous les dépens de première instance et d’appel et autoriser la Selarl Toulet Delbar & Associés à recouvrer ceux dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision, dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.
M. [I] [Z] a signifié sa déclaration d’appel et conclusions à Mme [C] [N] par acte d’huissier de justice délivré le 11 octobre 2022 à personne. Mme [C] [N] n’a pas constitué avocat ni conclu.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l’exposé de leurs moyens.
La clôture de l’affaire a été rendue le 7 mai 2024 et l’affaire plaidée à l’audience de la cour du 22 mai 2024.
Sur l’irrecevabilité de l’action de Parnasse Garanties
M. [I] [Z] soulève une fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de Parnasse garanties et invoque à ce titre l’article 3-8 de convention de prestation de services signée le 30 décembre 2014 entre Parnasse Garanties et Casden Banque Populaire, suivant laquelle Parnasse garanties donne à Casden mandat de recouvrement judiciaire de ses créances et lui confère l’exclusivité pleine et entière quant au recouvrement des créances des prêts bancaires au titre desquels Parnasse Garanties a été subrogée dans le cadre des sinistres et renonce en conséquence à agir personnellement ou à faire intervenir un tiers dès la remise du dossier à Casden. Il souligne que le dossier contentieux avait été transmis par Parnasse Garanties à Casden afin qu’elle poursuive le recouvrement de la créance, le courrier de mise en demeure ayant été adressé par cette dernière. Il ajoute qu’il n’est pas tiers à la convention de prestations de services signée entre Parnasse Garanties et Casden dès lors qu’en souscrivant le prêt auprès de la Banque Populaire, il est devenu automatiquement sociétaire Casden en sorte que les conventions signées par cette dernière avec Parnasse garanties lui sont applicables et qu’il a donc toute possibilité pour opposer à Parnasse Garanties les stipulations de la convention de prestation de services signée avec Casden.
C’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a relevé que le mandat donné aux termes de la convention conclue en Parnasse Garanties et Casden le 30 décembre 2014, ne prive pas le mandant, en l’espèce la caution subrogée dans les droits du prêteur, d’agir personnellement en recouvrement de sa créance contre ce dernier, étant souligné qu’en cas d’action en justice diligentée par le mandataire, elle l’est en tout état de cause pour le compte du mandant, seul titulaire du droit de créance.
Dès lors, nonobstant la convention de prestation de services conclue entre Casden et Parnasse garanties, cette dernière avait donc parfaitement qualité à agir en paiement à l’encontre de M. [I] [Z].
Au visa de l’article 1346-5 du code civil, M. [I] [Z] soulève l’irrecevabilité de l’action engagée par Parnasse Garanties à raison du non-respect par la Banque Populaire de l’article 11 de la convention de cautionnement conclue entre cette dernière et Parnasse Garantie le 30 octobre 2017, en ce que la banque a actionné la garantie de Parnasse Garanties sans avoir préalablement sollicité la compagnie d’assurance des emprunteurs contrairement à ce qui est exigé par l’article 11 précité. Il rappelle que lors de la conclusion de l’emprunt immobilier, il a souscrit une assurance auprès de la compagnie AXA IARD garantissant les risques invalidité, décés, arrêt de travail. Ayant fait une dépression, il n’a plus été en mesure de régler le prêt, en a sollicité la suspension auprès de la Banque Populaire, qui n’a pas donné suite à sa demande, a prononcé la déchéance du terme le 26 juin 2019 et a aussitôt demandé à Parnasse Garanties de payer les sommes dues au titre de son engagement de caution, sans avoir prélablement actionné l’assurance AXA IARD conformément à l’article 11 susvisé.
D’une part, M. [I] [Z] ne saurait se prévaloir à l’encontre de Parnasse Garanties des dispositions d’une convention à laquelle il n’est pas partie, le fait qu’il soit devenu sociétaire de Casden lors de la souscription de l’emprunt immobilier ne lui octroyant aucunement la qualité de partie à ladite convention.
D’autre part, par l’effet de la subrogation et en application de l’article 1346-5 invoqué par lui, le débiteur principal ne pourrait opposer à Panasse Garanties que les exceptions inhérentes à la dette, c’est à dire celle afférentes au contrat de prêt immobilier conclu avec la Banque Populaire du Nord. Il ne peut donc opposer le non-respect par la banque de la convention de cautionnement souscrite entre elle et la société Parnasse Garanties.
En outre, Parnasse Garanties précise qu’elle exerce son recours personnel sur le fondement de l’article 2305 du code civil. Ce recours personnel est un droit propre reconnu à la caution, indépendant du droit du créancier contre le débiteur et qui trouve sa cause dans le seul fait du paiement générateur d’une obligation nouvelle, distincte de celle éteinte par ledit paiement. Dans le cadre de ce recours, à la différence du recours subrogatoire, le débiteur principal ne peut opposer à la caution, qui à payé, les exceptions et moyens dont elle aurait pu disposer à l’encontre du créancier originaire tiré de ses rapports avec celui-ci.
Enfin, comme l’a relevé à juste titre le premier juge, alors qu’il évoque des difficultés consécutives à sa perte d’emploi et fait grief à la banque de ne pas avoir actionné sa compagnie d’assurance AXA avant de demander le paiement à Parnasse Garanties, force est de constater qu’il ressort de l’offre de prêt aceptée que M. [I] [Z] a refusé de souscrire à l’assurance groupe chômage auprès de la compagnie d’assurance, et que l’attestation d’assurance qu’il produit garantit seulement les risques décès, perte totale et irréversible d’autonomie, ITT, IPT et IPP. M. [I] [Z] ne produit aucu élément démontrant que les conditions étaient réunies pour que son assureur prenne en charge les impayés, ni qu’il a informé la banque que sa situation relevait des garanties souscrites.
Au regard de ces éléments, la fin de non-recevoir tirée du défaut par la banque de n’avoir pas actionné la compagnie d’assurance avant de demander le paiement à Parnasse Garanties sera en conséquence rejetée.
Sur la demande en paiement de Parnasse garanties
La caution qui a payé dispose à l’encontre du débiteur principal, outre le recours subrogatoire prévu par l’article 2306 du code civil, d’un recours personnel prévu par l’article 2305 du code civil lequel dispose :
‘La caution qui a payé à son recours contre le débiteur principal, soit que le cautionnement ait été donné au su ou à l’insu du débiteur.
Ce recours a lieu tant pour le principal que pour les intérêts et frais ; néanmoins, la caution n’a de recours que pour les frais par elle faits depuis qu’elle a dénoncé au débiteur principal les poursuites dirigées contre elle.
Elle a aussi recours pour les dommages et intérêts s’il y a lieu ‘.
En l’espèce, Parnasse Garanties précise qu’elle entend exercer son recours personnel fondé sur l’article 2305 du code civil.
Outre le contrat de prêt cautionné et son engagement de caution, Parnasse Garanties verse aux débats la quittance subrogative délivrée le 26 septembre 2019 par la Banque Populaire dont il résulte que la Parnasse Garantie a payé à cette banque la somme totale de 228 704,86 euros en remboursement du prêt n° 08686878.
L’appelante justifie en conséquence du paiement effectué entre les mains de la Banque Populaire au titre de son engagement de caution, par conséquent, du bien fondé de son recours personnel à l’encontre de M. [I] [Z] et Mme [C] [N], débiteurs principaux et de son droit au remboursement des sommes qu’elle a payées à la banque.
L’article 2305 alinéa 2 du code civil précité, par exception au principe selon lequel les intérêts moratoires ne courent qu’à compter de la mise en demeure formulée par l’ancien article 1153, alinéa 3, devenu 1231-6, l’article 2305, alinéa 2 a toujours été unanimement interprété, en doctrine comme en jurisprudence, comme faisant courir de plein droit les intérêts contre le débiteur dès le jour du paiement fait par la caution, indépendamment de toute sommation ou poursuite.
Au regard de ces éléments, il convient donc de confirmer le jugement entrepris et de condamner solidairement M. [I] [Z] et Mme [C] [N] à payer à Parnasse Garantie la somme de 228 704,86 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 septembre 2019, date du paiement.
Sur les demandes accessoires
Les motifs du premier méritant d’être adoptés, le jugement est confirmé en ses dispositons relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.
M. [I] [Z] et Mme [C] [N], qui succombent, sont condamnés in solidum aux dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de la selarl Toulet Delbar et Associés, avocats, en application de l’article 699 du code de proécdure civile.
Il ne paraît pas inquitable de les condamner in solidum à payer à Parnasse Garanties la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour statuant par arrêt réputé contradictoire ;
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant ;
Condamne in solidum M. [I] [Z] et Mme [C] [N] à payer à la société Parnasse Garanties la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum M. [I] [Z] et Mme [C] [N] aux dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de la Selarl Toulet Delbar et Associés, avocats, en application de l’article 699 du code de procédure civile.
Le greffier
Ismérie CAPIEZ
Le président
Yves BENHAMOU